L'endométriose de l'adolescente
J. BELAISCH
L'endométriose de l'adolescente est aussi
énigmatique sinon plus que celle de l'adulte. Son devenir à long terme
est absolument inconnu... et son traitement tout à fait empirique.
Bien que la cœlioscopie soit encore
aujourd'hui l'étalon or du diagnostic, il n'est pas certain qu'elle doive toujours
être entreprise quand on évoque ce diagnostic D'autre part, l'IRM et même
l'échographie ont pris une place de moins en moins discutée parmi les
investigations susceptibles de confirmer ce diagnostic quand il a été
évoqué sur des bases cliniques. Mais leurs apports ne font pas encore
l'objet d'un consensus absolu.
Il paraît donc nécessaire
de repenser la façon dont on doit explorer et traiter toute adolescente souffrant
de douleurs pelviennes chroniques ou de dysménorrhée sévère
et rebelle aux thérapeutiques classiques. Cependant un point doit toujours
demeurer à l'esprit du médecin. Que la femme soit adulte ou jeune, le
médecin doit penser aux difficultés qu'elle rencontre dans la vie de tous
les jours en raison de la persistance ou de l'intensité de ses douleurs. Il
doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour la soulager. En ce qui concerne l'adolescente
les problèmes scolaires, la nécessité d'obtenir un rang acceptable
dans les études qui lui permette de conserver sa « self esteem »
sont pour elle essentiels et ils peuvent se révéler d'une grande importance
durant toute sa vie, le médecin doit toujours en tenir compte (Black et Jamieson)
(5).
Nous suivrons dans cet exposé
le plan habituel adopté dans la majorité des études d'ensemble en
commençant par l'épidémiologie.
Incidence de l'endométriose
La fréquence de l'endométriose de l'adolescente
est impossible à connaître ; les chiffres varient selon les diverses publications
varient (29) (42). D'une part la population étudiée est variablement définie
et d'autre part les lésions atypiques et subtiles décrites par JANSEN
(20) et par STRIPPLING (45) en 1986-87 ont été ou non prises en compte.
En outre comme ZONDERVAN et BARLOW (53) le rapportent, les médecins hésitent
davantage à envoyer une jeune adolescente ou une femme âgée chez
le spécialiste : elles le sont deux fois moins souvent que les femmes de 31-40
ans ! Enfin, comme pour toutes les endométrioses, mais de façon plus marquée
encore pour celle de l'adolescence, les données sont affectées par la
nécessité d'examens paracliniques susceptibles de faire courir un risque
vital ce qui est le cas de de la coelioscopie.
Les travaux les plus souvent cités
donnent les chiffres suivants : 45 % des jeunes filles souffrant de douleurs chroniques
pelviennes, présentaient des lésions endométriosiques (EMANS, 1998)
(10) et 70 %, lorsque les douleurs résistaient aux thérapeutiques (LAUFER
1997) (24).
Mais on doit noter que :
1 - Ces chiffres sont un reflet
de l'absence ou de la rareté des autres causes de douleurs pelviennes chroniques
(d'origine infectieuse en particulier) autant que de la fréquence de l'endométriose
à cet âge. On admet généralement une prévalence au Royaume
Uni de 38 pour 1000/année chez les femmes de 15 à 73 ans consultant un
généraliste, c'est à dire une fréquence analogue à celle
de l'asthme. (ZONDERVAN (53)).
2 - La fréquence de l'endométriose
s'accroît avec l'âge (PROPST et LAUFER (34).
3 - L'endométriose est rare
chez les plus jeunes adolescentes. Et de façon générale : 0,2 % dans
une population de 2900 adolescentes de 15-19 ans, classées selon leur âge
par HOUSTON (19).
4 - En observant les faits sous
un autre angle REDWINE (1987) (36) a calculé que dans les cas d'endométriose
diagnostiquée lors d'un geste chirurgical les adolescentes de 16-20 ans représentaient
10 % des patientes
Le dernier chiffre, très significatif
est fourni par un des plus grands chirurgiens américains TELINDE qui a observé
sur 8 789 laparotomies pelviennes, une proportion de 1,2 % d'endométrioses
confirmées histologiquement chez des femmes ayant eu leurs premières règles
dans les 10 années précédentes (voir SANFILIPPO (41) ).
Ainsi l'endométriose de l'adolescente
existe, mais sa fréquence est faible dans la population générale.
En revanche chez les jeunes filles consultant pour douleurs pelviennes rebelles
elle dépasse 50 % si l'on prend en compte les lésions subtiles et les
formes très peu évoluées. Le diagnostic risque donc d'être souvent
méconnu par les gynécologues non avertis des finesses de cette affection.
Le développement des lésions endométriosiques exige
un minimum de temps
On estime qu'il faut entre 3 et 5 ans (précisément
4,5 ans selon SANFILPPO (41)) pour que les lésions aient atteint un volume
critique permettant le diagnostic. Mais on connaît au moins deux cas d'endométriose
très précoce : 10 ans, un mois après les premières règles
(HOSHIAI)(18) et 10 ans (après 5 mois de menstruations) (GOLDSTEIN) (14). Dans
deux cas une endométriose, vésicale à 21 ans et ovarienne à
22 ans ont été observées chez des femmes souffrant d'aménorrhée
primaire (voir 41)).
On doit donc savoir qu'il ne faut jamais
exclure ce diagnostic quel que soit l'âge ou la date des ménarches. Les
cas particuliers des obstructions congénitales et le rôle des facteurs
génétiques seront repris plus bas.
En outre la fréquence des lésions
endométriosiques vues en cœlioscopie croit avec l'âge : 12 % dans le groupe
des 11-13 ans contre 54 % chez les 20-21 ans.
Enfin notion importante : quelles que
soient les limites d'âge qui vont habituellement de 11 à 19 ans, les formes
avancées (stades III et IV RAFS) sont très rarement retrouvées. Et
curieusement dans la statistique allemande de EMMERT (11), ce sont les plus jeunes
adolescentes qui avaient les lésions les plus franches.
Les troubles fonctionnels sont toujours à la base du
diagnostic
Dysménorrhée et douleurs pelviennes
chroniques font suspecter l'endométriose (6).
La dysménorrhée s'aggrave
avec les années, contrairement à la dysménorrhée fonctionnelle
et elle s'accompagne progressivement d'une douleur prolongée non menstruelle
(43), les ménorragies, en association avec des crampes abdominales sévères,
sont rapportées par LIM (26). Les troubles intestinaux ( douleurs ballonnements
diarrhées et fausses envies), probablement en rapport avec la synthèse
de prostaglandines en excès, sont d'une fréquence inattendue et ne doivent
pas faire repousser le diagnostic. Certaines patientes se plaignent de troubles
urinaires. En revanche, l'entrée dans la maladie par la découverte d'une
tuméfaction ovarienne est rare, car les endométriomes sont exceptionnels.
La dyspareunie est un symptôme de plus en plus souvent rencontré avec
la transformation de la vie sexuelle des jeunes, mais elle n'est pas souvent mise
en avant.
Les données de l'examen sont toujours très limitées
L'examen d'une adolescente est toujours délicat.
En outre l'expérience de chaque gynécologue est limitée dans ce domaine
d'autant plus qu'on a de moins en moins tendance à conseiller l'examen des
jeunes filles demandant une contraception.
Néanmoins, CHATMAN et WARD (7)
déclarent avoir constaté par toucher combiné vagino- ou recto-abdominal
une sensibilité du cul de sac de Douglas dans 78% des cas et des nodules ont
été perçus chez 36% des patientes notion confirmée par l'équipe
de LAUFER. Ce qui, à la lumière des constatations coelioscopiques, paraît
surprenant. En effet, MARTIN (30) a insisté sur le fait que les lésions
sont volontiers subtiles chez l'adolescente alors qu'elles sont plus classiques
donc fibreuses et palpables 10 ans plus tard. REDWINE (1987) (37) a mis l'accent
sur la fréquence des lésions claires et rouges alors qu'à l'âge
adulte elles deviennent foncées. Les lésions subtiles et rouges ne sont
pas souvent nodulaires. On se demande donc comment des nodules ont pu être
si souvent perçus. De même, PROPST et LAUFER (34) trouvent 77,4 % de stade
I et 22,6 % de stade II, or il est rare que les endométrioses minimes soient
reconnaissables par la clinique. Aussi admet-on que dans un cinquième des cas
environ l'examen est entièrement normal, même lorsqu'il est pratiqué
en période menstruelle, ce qui est conseillé dans le cadre de l'examen
de toute femme suspectée d'être atteinte d'endométriose mais qui
est particulièrement délicat chez la jeune fille.
Les constatations laparoscopiques ne sont pratiquement
jamais décrites sur le même modèle
REESE en 1997 rapporte 67 patientes souffrant
de douleurs pelviennes chroniques résistantes, 49 sont d'origine endométriosique
(73 %). La majorité sont au stade 1 traduite par des lésions rouges superficielles
; ces lésions atypiques n'ayant été révélées que par
une exploration méticuleuse (40).
EMMERT (1998) analyse les cas de 105
adolescentes, âge moyen 17,3 ans (11-19) souffrant de douleurs pelviennes chroniques.
Cette fois seulement 35 cas d'endométriose (35 %), 34 stade I et 1 stade II
(d'une classification personnelle). Chez 24 d'entre elles, les lésions n'affectaient
qu'un seul organe (âge moyen 18,7 ans) et chez 13 patientes les lésions
étaient multiples (âge moyen 16,9 ans). Les lésions affectaient le
douglas, les utéro-sacrés et les fosses ovariennes, avec des biopsies
positives dans 50 % des cas (11).
HASSAN (1999) 26 patientes entre 16
et 20 ans. 16 ( 61 %) stade I RAFS, 8 stade II (30,8 %) 1 cas de stade III et 1
de stade IV (3,8 %) (péritonéo-adhérentiels sans lésions ovariennes)
qui avaient 19 et 20 ans. 2 cystectomies ont été pratiquées chez
des patientes au stade 2, alors que les lésions ne peuvent être dans ce
cas que superficielles car un kyste ovarien profond est déjà crédité
de 16 points ce qui place le cas dans le stade 3 (16)(8).
AUDEBERT (2000), en plus de 23 ans
d'expérience a examiné en cœlioscopie 239 adolescentes. 40 femmes jeunes,
entre 11 et 19 ans représentant 16,7 % étaient atteintes d'endométriose.
3 patientes avaient un hématocolpos et 1 une sténose cervicale post électrocoagulation.
90 % des endométrioses ont été découvertes après l'âge
de 17 ans, 2 seulement étaient plus jeunes. Particularité de la casuistique
: 5 stades III et 4 stades IV dont 2 endométriomes volumineux découverts
chez 2 jumelles de 17 ans ; en tout 8 endométriomes de plus de 3 cms de diamètre.
Les antécédents de GEU et de stérilité inhabituels chez les
adolescentes, font penser qu'il s'agissait de femmes largement entrées dans
la vie adulte (2).
HENRY SUCHET (France) a observé
que 20 % des cas d'endométriose de l'adolescente étaient attribuables
à une salpingite antérieure (17).
LIANG (1995), le diagnostic d'endométriose
a été porté chez 16 jeunes femmes opérées par laparotomie
de 2 mois à 7 ans après les ménarches (âge moyen 12,8 ans).
Cette publication possède l'avantage exceptionnel de fournir un suivi des cas
: chez deux d'entre elles, une réopération a été nécessaire
et chez deux autres, la dysménorrhée est réapparue. Deux autres qui
souhaitaient une grossesse l'ont obtenue (25).
LAUFER (1997) confirme que les lésions
sont peu avancées : 46 jeunes filles de moins de 22 ans souffrant de douleurs
pelviennes chroniques résistantes aux CO et aux AINS. 32 (69,6 %) sont au stade
1 ou 2 (21) les douleurs étaient le plus souvent cycliques et acycliques. Et
il s'agissait souvent de lésions atypiques vésiculaires claires (23).
En conclusion sauf exception, la majorité
des patientes ont une forme minime ou légère et le pourcentage de formes
modérées ou sévères est très faible.
L'évolution des lésions est
très rarement connue.
Elle a été étudiée
par REDWINE (38) avec l'âge et par KONINCKX (22) et il semble bien que si la
couleur des lésions évolue, le nombre de lésions ne s'accroît
pas et aucune extension de la surface des lésions dans le pelvis n'a été
observée au contraire de l'extension en profondeur, ce qui ne fait pas partie
des constatations cliniques chez l'adolescente.
Mais surtout il faut retenir que seuls
les spécialistes chevronnés de l'endométriose savent reconnaître
les lésions subtiles non colorées, bien que le nombre des spécialistes
compétent se soit très notablement accru au cours des dernières années.
Les lésions cachées par des adhérences ou sous péritonéales
échappent souvent à l'examen mais elles peuvent désormais être
dépistées par l'IRM et les échographies (voir aussi 39).
Les moyens d'exploration non invasifs ne sont probablement
pas assez utilisés chez l'adolescente
L'IRM a cependant fait de francs progrès
depuis la mise au point de la méthode de suppression des graisses. Ainsi WOOD
& MAHER n'ont observé que 4 implants de plus de 5 mms de diamètre
sur 111 examens avec la méthode conventionnelle alors qu'ils en ont reconnu
55 après suppression des graisses (52). LIM ajoute que cette méthode d'investigation
est préférable chez les femmes qui souhaitent préserver leur fertilité
en raison des adhérences dont on sait qu'elles peuvent se former après
toute intervention y compris coelioscopique (26).
Quant aux échographies elles ne
cessent d'affiner leurs résultats. LIM regrette que ce mode d'exploration ne
soit pas encore accepté par la majorité des spécialistes ; mais cet
ostracisme qui n'existe pas en France, ne pourra longtemps durer.
Le dosage de CA 125 chez des patientes
dysménorrhéiques dont le diagnostic d'endométriose minime ou légère
avait été porté par coelioscopie, n'a dépassé 35 U/ml que
dans 26,8 % des cas. Ce marqueur ne permet donc pas un dépistage satisfaisant
et encore moins de confirmer un diagnostic clinique.
Les malformations congénitales obstructives représentent
la particularité qui distingue l'endométriose de l'adolescente des
formes adultes
Lorsque l'écoulement menstruel est empêché,
l'envahissementde la cavité pelvienne par l'endomètre qui desquame chaque
mois, dépasse les possibilités de destruction par le péritoine et
facilite la greffe (32). Aussi les malformations telles que les hémi-matrices
avec corne rudimentaire ou hémi-vagins bornes, les aplasies cervicales et vaginales
(mais peut-être pas les aplasies isthmiques qui ne saignent pas comme l'a montré
René Musset) les hématocolpos par imperforation hyménéale (dont
A AUDEBERT a rapporté 3 cas) comme d'ailleurs les sténoses cervicales
quelle que soit leur origine, s'accompagnent d'une endométriose qui n'est parfois
qu'unilatérale. L'endométriose s'est développée entre 2 mois
et 7 ans après la ménarche chez les 3 patientes avec utérus unicorne
de LIANG (âge moyen de la ménarche 12,8 ans, délai moyen à 5,2
ans) (25). Ces cas ne sont pas rares SCHIFFRIN (44) en a observé 6 sur 15 adolescentes
de moins de 20 ans endométriosiques.
Le fait remarquable est la régression
habituelle des lésions lorsque le flux menstruel normal est restauré,
comme si le péritoine dispose dans ces cas de moyens permettant l'élimination
d'une quantité normale des cellules endométriales dès qu'il n'est
plus débordé par leur excès (SANFELIPPO (41)).
L'origine génétique est manifeste chez l'adolescente
Le problème du risque familial et de l'origine
génétique de l'endométriose peut être abordé par l'étude
des jumelles et par le recours à l' IRM qui permet d'éviter les risques
inacceptables de la laparoscopie.
KENNEDY et al ont pratiqué des
IRM chez les parentes des femmes atteintes d'une endométriose diagnostiquée
par coelioscopie de stade II à IV. Ils ont observé les résultats
suivants (17) :
Les auteurs comparent les 14-15 % d'endométriose
au taux de 1 % qu'ils considèrent comme représentatif de la population
générale et en concluent que certaines endométrioses ont une origine
génétique. Mais alors que les adolescentes représentent la population
idéale pour les études génétiques, l'IRM ne semble pas chez
elles une arme adéquate, car elle ne reconnaît que très mal ou pas
du tout les stade 1.
En ce qui concerne les jumelles, à
titre indicatif TRELOAR conclut : les résultats sont en faveur de l'hypothèse
que les gênes influencent la prédisposition à l'endométriose
( environ 50 % " de la variance)(46).
Ces spécificités de l'endométriose de l'adolescente permettent
donc des déductions physiopathologiques
1 - L'endométriose est généralement
diagnostiquée 4 ans après les premières règles. Elle croît
en fréquence de 11 à 20 ans et elle est pratiquement toujours limitée
aux stades I et II (minime et légère, moins de 16 points RAFS). Lorsque
les cas sortent de ce cadre c'est vraisemblablement si elles sont d'une extrême
précocité (10 ans, 10 ans et demi, 2 mois après les premières
règle) ou d'une plus grande sévérité, en raison de facteurs
génétiques, rendant le terrain plus favorable, ou d'obstruction au flux
menstruel, conduisant à l'introduction d'un excès de cellules (et de facteurs
de croissance) d'origine endométriale qui débordent les possibilités
d'épuration cellulaire du péritoine.
2 - Mais il est plus important
de se pencher sur les faits suivants. Il est bien connu (13) et ces observations
viennent d'être confirmées par PORPORA qu'il n'y a aucune corrélation
chez les adultes entre le type, l'extension, le siège des lésions péritonéales
et d'autre part les scores de douleurs ; contrairement aux cas des lésions
profondes, et, en ce qui concerne la dysménorrhée avec la présence
et l'extension des adhérences (33).
Or, chez l'adolescente souffrant de
douleurs suffisamment sévères pour que le gynécologue propose une
coelioscopie et que la jeune fille et ses parents l'acceptent, on ne trouve généralement
que des lésions très modestes. Cependant, il est pratiquement constant
que les douleurs leur soient attribuées. Ce consensus est-il à ce point
justifié ? (48).
Certes on peut penser que les lésions
jeunes, atypiques et subtiles, synthétisent davantage de prostaglandines F
comme le travail de VERNON l'a démontré (49). Mais ces lésions actives
sont aussi celles qui répondent le mieux à la thérapeutique médicale.
D'autre part la rareté de la progression
des lésions vers un stade évolué fait évoquer une forme de protection
conférée par l'adolescence contre le développement des lésions.
L'idée de la protection apportée par la jeunesse pourrait être confirmée
par la disparition spontanée de lésions associées à une malformation
congénitale, comme si le péritoine savait, chez les jeunes, se débarrasser
des implants dès lors qu'il n'est pas constamment submergé par un apport
excessif de cellules endométriales.
Le traitement
La part dévolue aux hormones est sans doute
insuffisante.
Le traitement de la maladie endométriosique
est toujours un sujet de controverses. Les moyens thérapeutiques dont on dispose
pour les adolescentes sont les mêmes que pour les adultes, avec cependant pour
les adolescentes très jeunes le risque d'intervenir sur les phénomènes
pubertaires et sur l'obtention d'un pic satisfaisant de masse osseuse dont on doit
particulièrement tenir compte si l'on propose des agonistes du Gn RH.
Lorsque les jeunes patientes ont résisté
aux AINS et aux contraceptifs oraux administrés de façon conventionnelle,
pratiquement tous les auteurs considèrent le recours à la laparoscopie
comme légitime et la plupart pensent que la découverte de lésions
implique automatiquement leur destruction par tous moyens disponibles. SANFILIPPO
suggère de demander aux parents avant le geste diagnostique, l'autorisation
de détruire les implants qui pourraient être découverts. LIM (26)
paraît le seul à insister sur une approche plus médicale car il estime
que le concept de l'obligation du traitement de l'endométriose de l'adolescente
pour éviter son aggravation n'est pas fondé sur des bases suffisamment
solides. Prenant en compte les résultats de l'examen clinique et des échographies
et IRM, il propose quand la clinique est négative de revoir les patientes après
un à trois mois selon la réponse à une administration de AINS, pilules
combinées ou progestatifs seuls. Et il modifie le traitement en cas d'échec.
Ce n'est qu'après 3 à 6 mois, lorsque la patiente n'a pas été
soulagée qu'il se tourne vers la coelioscopie.
En revanche lorsque l'examen clinique
révèle la présence de nodules ou d'une fixation de l'utérus
il conseille d'emblée la coelioscopie opératoire. Tout récemment
Attaran et Gidwani ont insisté sur la qualité discutable des résultats
de la chirurgie et ils ont fermement déconseillé les interventions radicales
ou répetitives. Ils insistent sur la patience et les soins dont on doit entourer
les jeunes malades pour les aider à comprendre la nature de leur maladie et
pour les aider à retrouver une qualité de vie satisfaisante (1).
En cas de traitement chirurgical, presque
tous les auteurs conseillent après la destruction des lésions, l'administration
de 6 mois d'analogue de la GnRH ce qui témoigne de leurs doutes sur l'efficacité
de leur geste opératoire.
Nous nous demandons si on ne peut aller
plus loin. Dans la mesure où personne ne connaît les effets à long
terme de la destruction des lésions d'endométriose, où les spécialistes
de l'endométriose de l'adolescente considèrent que les récidives
sont à attendre en raison de l'impossibilité de la destruction de toutes
les lésions débutantes et compte tenu du fait que l'échographie et
l'IRM surtout peuvent informer sur les lésions constituées de plus de
5 mm de diamètre, ne serait-il pas justifié d'utiliser d'emblée tous
les moyens médicaux à notre disposition ?
C'est à dire les pilules monophasiques
estro-progestatives prise sur un mode continu durant 3 à 4 plaquettes. Migraines,
nausées, ballonnements abdominaux et surtout saignements inopinés pourront
en effet survenir mais on s'efforcera alors de modifier les modalités d'administration.
De même on pourra avoir recours aux progestatifs purs de type pregnane et norprégnanes,
si utilisés en France et avec des résultats remarquables car ils peuvent
être pris durant des années avec une tolérance exceptionnelle. L'essentiel
est d'éviter une trop grande carence oestrogénique.
Les publications ont surtout porté
sur la rétroprogestérone. Cette molécule a été étudiée
dans l'endométriose de 1976 à 1999. Le travail de WALKER (50) en donne
un excellent aperçu. Les suggestions des auteurs américains tels que PROPST
et LAUFER (34) qui vont jusqu'à proposer des doses de 50 mg/j de MPA ou 150
mg de MPA depot tous les 3 mois nous semblent très excessives sauf sans doute
dans les cas de lésions sévères. Les très petites doses de danazol
évoquées par GREENBLATT ne sont pas non plus à oublier, quoiqu'elles
n'aient pas été spécifiquement conseillées chez l'adolescente
et qu'il soit impérieux d'interrompre cette administration en cas d'apparition
de lésions acnéiques. Les analogues de la LH RH sont également une
arme particulièrement puissante et utile en cas de douleurs sévères.
LUBIANCA et al. suggèrent d'en soutenir l'effet par l'administration associée
de stéroïdes sexuels (add back therapy) (28) afin de minimiser la perte
osseuse. Ils conseillent si l'on choisit les estrogènes d'utiliser les doses
qui préviennent l'ostéoporose chez la femme ménopausée en reconnaissant
néanmoins que cette façon de faire n'a pas été évaluée
chez l'adolescente. Il est donc difficile de savoir quelles molécules d'estrogènes
ou de progestatifs (et à quelles doses) doivent être proposées.
Un préalable au traitement hormonal,
lorsque celui-ci est envisagé, est la prise en consideration des experiences
psychosociales antérieures de la patiente. Certains facteurs de grande importance
pour la qualité de vie tels que les troubles du sommeil et ceux de nature anxio-depressive
doivent orienter les modalités thérapeutiques et on doit aussi viser à
leur amélioration (Bergqvist et Theorell T (4)). Il est donc suggéré
d'adjoindre au traitement hormonal des antalgiques et des somnifères lorsqu'ils
sont nécessaires.
Dans les cas exceptionnels où
existerait une endométriome d'aspect caractéristique en échographie
et confirmé à quelques mois d'intervalle, si SANFILPPO conseille l'excision
de ceux-ci, pourquoi ne pas commencer par une simple ponction dont Michel Mintz
a montré qu'elle pouvait avoir des effets curatifs (31) et alors que les preuves
s'accumulent des possibles effets néfastes sur la réserve folliculaire
et parfois sur la formation d'adhérences, des kystectomies de toutes sortes
WILLIAMS (51).
Enfin nous pensons avoir montré
que les endométrioses se développent assez volontiers sur un terrain psychologiquement
fragilisé, il n'est pas illogique de suggérer avant tout geste invasif
un conseil psychothérapique (3).
Ces suggestions d'une thérapie
a minima dont nous sommes persuadés qu'elles peuvent provoquer des réactions
très vives des tenants de la chirurgie gynécologique classique, nous paraissent
exiger une très grande disponibilité et une constante attention à
toute évolution atypique ou à toute anomalie de la symptomatologie. Mais
dans l'ignorance actuelle de l'évolution habituelle des endométrioses
de l'adolescente, elles ne sont pas tout à fait déraisonnables. L'étude
à long terme de ces cas devrait fournir des données essentielles sur l'histoire
naturelle de l'endométriose.
On peut laisser à GRECO la conclusion
finale. Une approche individualisée, multidisciplinaire est sans doute la plus
efficace pour obtenir le but poursuivi : l'amélioration des conditions de vie
et la disparition des douleurs pelviennes de la jeune fille (15).
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BELAISCH L'ENDOMéTRIOSE
DE L'ADOLESCENTE 559
560 J.
BELAISCH L'ENDOMéTRIOSE
DE L'ADOLESCENTE 561
562 J.
BELAISCH Parentes
au premier degré Autres parentes
(sœur et fille)
Tous diagnostiqués à l'IRM :
(Endométrioses + adénomyose ou les 2) 19/35
(54 %) 3/12 (25 %)
Endométrioses (à l'exclusion de l'adénomyose
ou de lésions équivoques) 5/35 (14 %) 1/12
(8 %) L'ENDOMéTRIOSE
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564 J.
BELAISCH L'ENDOMéTRIOSE
DE L'ADOLESCENTE 565
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