Les XXIIe JTA
> Présentation
> Programme
> Comité scientifique
> Intervenants
> Contacter les JTA

En pratique
> S'inscrire
> Renseignements
> Hébergement
> Programme social
> Post-congrès

Les archives
> Andrologie
> Biologie
> Gynécologie
> Infertilité
> Médecine foetale
> Néonatologie
> Nutrition
> Obstétrique
> Pédiatrie
> Périnatalité
> Périnéologie
> Phlébologie
> Psychosomatique

Rechercher

Titre: L'endométriose de l'adolescente
Année: 2004
Auteurs:
Spécialité: Gynécologie
Theme: Adolescence

L'endométriose
de l'adolescente

J. BELAISCH

L'endométriose de l'adolescente est aussi énigmatique sinon plus que celle de l'adulte. Son devenir à long terme est absolument inconnu... et son traitement tout à fait empirique.

Bien que la cœlioscopie soit encore aujourd'hui l'étalon or du diagnostic, il n'est pas certain qu'elle doive toujours être entreprise quand on évoque ce diagnostic D'autre part, l'IRM et même l'échographie ont pris une place de moins en moins discutée parmi les investigations susceptibles de confirmer ce diagnostic quand il a été évoqué sur des bases cliniques. Mais leurs apports ne font pas encore l'objet d'un consensus absolu.

Il paraît donc nécessaire de repenser la façon dont on doit explorer et traiter toute adolescente souffrant de douleurs pelviennes chroniques ou de dysménorrhée sévère et rebelle aux thérapeutiques classiques. Cependant un point doit toujours demeurer à l'esprit du médecin. Que la femme soit adulte ou jeune, le médecin doit penser aux difficultés qu'elle rencontre dans la vie de tous les jours en raison de la persistance ou de l'intensité de ses douleurs. Il doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour la soulager. En ce qui concerne l'adolescente les problèmes scolaires, la nécessité d'obtenir un rang acceptable dans les études qui lui permette de conserver sa « self esteem » sont pour elle essentiels et ils peuvent se révéler d'une grande importance durant toute sa vie, le médecin doit toujours en tenir compte (Black et Jamieson) (5).

Nous suivrons dans cet exposé le plan habituel adopté dans la majorité des études d'ensemble en commençant par l'épidémiologie.

Incidence de l'endométriose

La fréquence de l'endométriose de l'adolescente est impossible à connaître ; les chiffres varient selon les diverses publications varient (29) (42). D'une part la population étudiée est variablement définie et d'autre part les lésions atypiques et subtiles décrites par JANSEN (20) et par STRIPPLING (45) en 1986-87 ont été ou non prises en compte. En outre comme ZONDERVAN et BARLOW (53) le rapportent, les médecins hésitent davantage à envoyer une jeune adolescente ou une femme âgée chez le spécialiste : elles le sont deux fois moins souvent que les femmes de 31-40 ans ! Enfin, comme pour toutes les endométrioses, mais de façon plus marquée encore pour celle de l'adolescence, les données sont affectées par la nécessité d'examens paracliniques susceptibles de faire courir un risque vital ce qui est le cas de de la coelioscopie.

Les travaux les plus souvent cités donnent les chiffres suivants : 45 % des jeunes filles souffrant de douleurs chroniques pelviennes, présentaient des lésions endométriosiques (EMANS, 1998) (10) et 70 %, lorsque les douleurs résistaient aux thérapeutiques (LAUFER 1997) (24).

Mais on doit noter que :

1 - Ces chiffres sont un reflet de l'absence ou de la rareté des autres causes de douleurs pelviennes chroniques (d'origine infectieuse en particulier) autant que de la fréquence de l'endométriose à cet âge. On admet généralement une prévalence au Royaume Uni de 38 pour 1000/année chez les femmes de 15 à 73 ans consultant un généraliste, c'est à dire une fréquence analogue à celle de l'asthme. (ZONDERVAN (53)).

2 - La fréquence de l'endométriose s'accroît avec l'âge (PROPST et LAUFER (34).

3 - L'endométriose est rare chez les plus jeunes adolescentes. Et de façon générale : 0,2 % dans une population de 2900 adolescentes de 15-19 ans, classées selon leur âge par HOUSTON (19).

4 - En observant les faits sous un autre angle REDWINE (1987) (36) a calculé que dans les cas d'endométriose diagnostiquée lors d'un geste chirurgical les adolescentes de 16-20 ans représentaient 10 % des patientes

Le dernier chiffre, très significatif est fourni par un des plus grands chirurgiens américains TELINDE qui a observé sur 8 789 laparotomies pelviennes, une proportion de 1,2 % d'endométrioses confirmées histologiquement chez des femmes ayant eu leurs premières règles dans les 10 années précédentes (voir SANFILIPPO (41) ).

Ainsi l'endométriose de l'adolescente existe, mais sa fréquence est faible dans la population générale. En revanche chez les jeunes filles consultant pour douleurs pelviennes rebelles elle dépasse 50 % si l'on prend en compte les lésions subtiles et les formes très peu évoluées. Le diagnostic risque donc d'être souvent méconnu par les gynécologues non avertis des finesses de cette affection.

Le développement des lésions endométriosiques
exige un minimum de temps

On estime qu'il faut entre 3 et 5 ans (précisément 4,5 ans selon SANFILPPO (41)) pour que les lésions aient atteint un volume critique permettant le diagnostic. Mais on connaît au moins deux cas d'endométriose très précoce : 10 ans, un mois après les premières règles (HOSHIAI)(18) et 10 ans (après 5 mois de menstruations) (GOLDSTEIN) (14). Dans deux cas une endométriose, vésicale à 21 ans et ovarienne à 22 ans ont été observées chez des femmes souffrant d'aménorrhée primaire (voir 41)).

On doit donc savoir qu'il ne faut jamais exclure ce diagnostic quel que soit l'âge ou la date des ménarches. Les cas particuliers des obstructions congénitales et le rôle des facteurs génétiques seront repris plus bas.

En outre la fréquence des lésions endométriosiques vues en cœlioscopie croit avec l'âge : 12 % dans le groupe des 11-13 ans contre 54 % chez les 20-21 ans.

Enfin notion importante : quelles que soient les limites d'âge qui vont habituellement de 11 à 19 ans, les formes avancées (stades III et IV RAFS) sont très rarement retrouvées. Et curieusement dans la statistique allemande de EMMERT (11), ce sont les plus jeunes adolescentes qui avaient les lésions les plus franches.

Les troubles fonctionnels sont toujours à la base
du diagnostic

Dysménorrhée et douleurs pelviennes chroniques font suspecter l'endométriose (6).

La dysménorrhée s'aggrave avec les années, contrairement à la dysménorrhée fonctionnelle et elle s'accompagne progressivement d'une douleur prolongée non menstruelle (43), les ménorragies, en association avec des crampes abdominales sévères, sont rapportées par LIM (26). Les troubles intestinaux ( douleurs ballonnements diarrhées et fausses envies), probablement en rapport avec la synthèse de prostaglandines en excès, sont d'une fréquence inattendue et ne doivent pas faire repousser le diagnostic. Certaines patientes se plaignent de troubles urinaires. En revanche, l'entrée dans la maladie par la découverte d'une tuméfaction ovarienne est rare, car les endométriomes sont exceptionnels. La dyspareunie est un symptôme de plus en plus souvent rencontré avec la transformation de la vie sexuelle des jeunes, mais elle n'est pas souvent mise en avant.

Les données de l'examen sont toujours très limitées

L'examen d'une adolescente est toujours délicat. En outre l'expérience de chaque gynécologue est limitée dans ce domaine d'autant plus qu'on a de moins en moins tendance à conseiller l'examen des jeunes filles demandant une contraception.

Néanmoins, CHATMAN et WARD (7) déclarent avoir constaté par toucher combiné vagino- ou recto-abdominal une sensibilité du cul de sac de Douglas dans 78% des cas et des nodules ont été perçus chez 36% des patientes notion confirmée par l'équipe de LAUFER. Ce qui, à la lumière des constatations coelioscopiques, paraît surprenant. En effet, MARTIN (30) a insisté sur le fait que les lésions sont volontiers subtiles chez l'adolescente alors qu'elles sont plus classiques donc fibreuses et palpables 10 ans plus tard. REDWINE (1987) (37) a mis l'accent sur la fréquence des lésions claires et rouges alors qu'à l'âge adulte elles deviennent foncées. Les lésions subtiles et rouges ne sont pas souvent nodulaires. On se demande donc comment des nodules ont pu être si souvent perçus. De même, PROPST et LAUFER (34) trouvent 77,4 % de stade I et 22,6 % de stade II, or il est rare que les endométrioses minimes soient reconnaissables par la clinique. Aussi admet-on que dans un cinquième des cas environ l'examen est entièrement normal, même lorsqu'il est pratiqué en période menstruelle, ce qui est conseillé dans le cadre de l'examen de toute femme suspectée d'être atteinte d'endométriose mais qui est particulièrement délicat chez la jeune fille.

Les constatations laparoscopiques
ne sont pratiquement jamais décrites
sur le même modèle

REESE en 1997 rapporte 67 patientes souffrant de douleurs pelviennes chroniques résistantes, 49 sont d'origine endométriosique (73 %). La majorité sont au stade 1 traduite par des lésions rouges superficielles ; ces lésions atypiques n'ayant été révélées que par une exploration méticuleuse (40).

EMMERT (1998) analyse les cas de 105 adolescentes, âge moyen 17,3 ans (11-19) souffrant de douleurs pelviennes chroniques. Cette fois seulement 35 cas d'endométriose (35 %), 34 stade I et 1 stade II (d'une classification personnelle). Chez 24 d'entre elles, les lésions n'affectaient qu'un seul organe (âge moyen 18,7 ans) et chez 13 patientes les lésions étaient multiples (âge moyen 16,9 ans). Les lésions affectaient le douglas, les utéro-sacrés et les fosses ovariennes, avec des biopsies positives dans 50 % des cas (11).

HASSAN (1999) 26 patientes entre 16 et 20 ans. 16 ( 61 %) stade I RAFS, 8 stade II (30,8 %) 1 cas de stade III et 1 de stade IV (3,8 %) (péritonéo-adhérentiels sans lésions ovariennes) qui avaient 19 et 20 ans. 2 cystectomies ont été pratiquées chez des patientes au stade 2, alors que les lésions ne peuvent être dans ce cas que superficielles car un kyste ovarien profond est déjà crédité de 16 points ce qui place le cas dans le stade 3 (16)(8).

AUDEBERT (2000), en plus de 23 ans d'expérience a examiné en cœlioscopie 239 adolescentes. 40 femmes jeunes, entre 11 et 19 ans représentant 16,7 % étaient atteintes d'endométriose. 3 patientes avaient un hématocolpos et 1 une sténose cervicale post électrocoagulation. 90 % des endométrioses ont été découvertes après l'âge de 17 ans, 2 seulement étaient plus jeunes. Particularité de la casuistique : 5 stades III et 4 stades IV dont 2 endométriomes volumineux découverts chez 2 jumelles de 17 ans ; en tout 8 endométriomes de plus de 3 cms de diamètre. Les antécédents de GEU et de stérilité inhabituels chez les adolescentes, font penser qu'il s'agissait de femmes largement entrées dans la vie adulte (2).

HENRY SUCHET (France) a observé que 20 % des cas d'endométriose de l'adolescente étaient attribuables à une salpingite antérieure (17).

LIANG (1995), le diagnostic d'endométriose a été porté chez 16 jeunes femmes opérées par laparotomie de 2 mois à 7 ans après les ménarches (âge moyen 12,8 ans). Cette publication possède l'avantage exceptionnel de fournir un suivi des cas : chez deux d'entre elles, une réopération a été nécessaire et chez deux autres, la dysménorrhée est réapparue. Deux autres qui souhaitaient une grossesse l'ont obtenue (25).

LAUFER (1997) confirme que les lésions sont peu avancées : 46 jeunes filles de moins de 22 ans souffrant de douleurs pelviennes chroniques résistantes aux CO et aux AINS. 32 (69,6 %) sont au stade 1 ou 2 (21) les douleurs étaient le plus souvent cycliques et acycliques. Et il s'agissait souvent de lésions atypiques vésiculaires claires (23).

En conclusion sauf exception, la majorité des patientes ont une forme minime ou légère et le pourcentage de formes modérées ou sévères est très faible.

L'évolution des lésions est très rarement connue.

Elle a été étudiée par REDWINE (38) avec l'âge et par KONINCKX (22) et il semble bien que si la couleur des lésions évolue, le nombre de lésions ne s'accroît pas et aucune extension de la surface des lésions dans le pelvis n'a été observée au contraire de l'extension en profondeur, ce qui ne fait pas partie des constatations cliniques chez l'adolescente.

Mais surtout il faut retenir que seuls les spécialistes chevronnés de l'endométriose savent reconnaître les lésions subtiles non colorées, bien que le nombre des spécialistes compétent se soit très notablement accru au cours des dernières années. Les lésions cachées par des adhérences ou sous péritonéales échappent souvent à l'examen mais elles peuvent désormais être dépistées par l'IRM et les échographies (voir aussi 39).

Les moyens d'exploration non invasifs
ne sont probablement pas assez utilisés
chez l'adolescente

L'IRM a cependant fait de francs progrès depuis la mise au point de la méthode de suppression des graisses. Ainsi WOOD & MAHER n'ont observé que 4 implants de plus de 5 mms de diamètre sur 111 examens avec la méthode conventionnelle alors qu'ils en ont reconnu 55 après suppression des graisses (52). LIM ajoute que cette méthode d'investigation est préférable chez les femmes qui souhaitent préserver leur fertilité en raison des adhérences dont on sait qu'elles peuvent se former après toute intervention y compris coelioscopique (26).

Quant aux échographies elles ne cessent d'affiner leurs résultats. LIM regrette que ce mode d'exploration ne soit pas encore accepté par la majorité des spécialistes ; mais cet ostracisme qui n'existe pas en France, ne pourra longtemps durer.

Le dosage de CA 125 chez des patientes dysménorrhéiques dont le diagnostic d'endométriose minime ou légère avait été porté par coelioscopie, n'a dépassé 35 U/ml que dans 26,8 % des cas. Ce marqueur ne permet donc pas un dépistage satisfaisant et encore moins de confirmer un diagnostic clinique.

Les malformations congénitales obstructives
représentent la particularité qui distingue
l'endométriose de l'adolescente des formes adultes

Lorsque l'écoulement menstruel est empêché, l'envahissementde la cavité pelvienne par l'endomètre qui desquame chaque mois, dépasse les possibilités de destruction par le péritoine et facilite la greffe (32). Aussi les malformations telles que les hémi-matrices avec corne rudimentaire ou hémi-vagins bornes, les aplasies cervicales et vaginales (mais peut-être pas les aplasies isthmiques qui ne saignent pas comme l'a montré René Musset) les hématocolpos par imperforation hyménéale (dont A AUDEBERT a rapporté 3 cas) comme d'ailleurs les sténoses cervicales quelle que soit leur origine, s'accompagnent d'une endométriose qui n'est parfois qu'unilatérale. L'endométriose s'est développée entre 2 mois et 7 ans après la ménarche chez les 3 patientes avec utérus unicorne de LIANG (âge moyen de la ménarche 12,8 ans, délai moyen à 5,2 ans) (25). Ces cas ne sont pas rares SCHIFFRIN (44) en a observé 6 sur 15 adolescentes de moins de 20 ans endométriosiques.

Le fait remarquable est la régression habituelle des lésions lorsque le flux menstruel normal est restauré, comme si le péritoine dispose dans ces cas de moyens permettant l'élimination d'une quantité normale des cellules endométriales dès qu'il n'est plus débordé par leur excès (SANFELIPPO (41)).

L'origine génétique est manifeste chez l'adolescente

Le problème du risque familial et de l'origine génétique de l'endométriose peut être abordé par l'étude des jumelles et par le recours à l' IRM qui permet d'éviter les risques inacceptables de la laparoscopie.

KENNEDY et al ont pratiqué des IRM chez les parentes des femmes atteintes d'une endométriose diagnostiquée par coelioscopie de stade II à IV. Ils ont observé les résultats suivants (17) :

Les auteurs comparent les 14-15 % d'endométriose au taux de 1 % qu'ils considèrent comme représentatif de la population générale et en concluent que certaines endométrioses ont une origine génétique. Mais alors que les adolescentes représentent la population idéale pour les études génétiques, l'IRM ne semble pas chez elles une arme adéquate, car elle ne reconnaît que très mal ou pas du tout les stade 1.

En ce qui concerne les jumelles, à titre indicatif TRELOAR conclut : les résultats sont en faveur de l'hypothèse que les gênes influencent la prédisposition à l'endométriose ( environ 50 % " de la variance)(46).

Ces spécificités de l'endométriose de l'adolescente
permettent donc des déductions physiopathologiques

1 - L'endométriose est généralement diagnostiquée 4 ans après les premières règles. Elle croît en fréquence de 11 à 20 ans et elle est pratiquement toujours limitée aux stades I et II (minime et légère, moins de 16 points RAFS). Lorsque les cas sortent de ce cadre c'est vraisemblablement si elles sont d'une extrême précocité (10 ans, 10 ans et demi, 2 mois après les premières règle) ou d'une plus grande sévérité, en raison de facteurs génétiques, rendant le terrain plus favorable, ou d'obstruction au flux menstruel, conduisant à l'introduction d'un excès de cellules (et de facteurs de croissance) d'origine endométriale qui débordent les possibilités d'épuration cellulaire du péritoine.

2 - Mais il est plus important de se pencher sur les faits suivants. Il est bien connu (13) et ces observations viennent d'être confirmées par PORPORA qu'il n'y a aucune corrélation chez les adultes entre le type, l'extension, le siège des lésions péritonéales et d'autre part les scores de douleurs ; contrairement aux cas des lésions profondes, et, en ce qui concerne la dysménorrhée avec la présence et l'extension des adhérences (33).

Or, chez l'adolescente souffrant de douleurs suffisamment sévères pour que le gynécologue propose une coelioscopie et que la jeune fille et ses parents l'acceptent, on ne trouve généralement que des lésions très modestes. Cependant, il est pratiquement constant que les douleurs leur soient attribuées. Ce consensus est-il à ce point justifié ? (48).

Certes on peut penser que les lésions jeunes, atypiques et subtiles, synthétisent davantage de prostaglandines F comme le travail de VERNON l'a démontré (49). Mais ces lésions actives sont aussi celles qui répondent le mieux à la thérapeutique médicale.

D'autre part la rareté de la progression des lésions vers un stade évolué fait évoquer une forme de protection conférée par l'adolescence contre le développement des lésions. L'idée de la protection apportée par la jeunesse pourrait être confirmée par la disparition spontanée de lésions associées à une malformation congénitale, comme si le péritoine savait, chez les jeunes, se débarrasser des implants dès lors qu'il n'est pas constamment submergé par un apport excessif de cellules endométriales.

Le traitement

La part dévolue aux hormones est sans doute insuffisante.

Le traitement de la maladie endométriosique est toujours un sujet de controverses. Les moyens thérapeutiques dont on dispose pour les adolescentes sont les mêmes que pour les adultes, avec cependant pour les adolescentes très jeunes le risque d'intervenir sur les phénomènes pubertaires et sur l'obtention d'un pic satisfaisant de masse osseuse dont on doit particulièrement tenir compte si l'on propose des agonistes du Gn RH.

Lorsque les jeunes patientes ont résisté aux AINS et aux contraceptifs oraux administrés de façon conventionnelle, pratiquement tous les auteurs considèrent le recours à la laparoscopie comme légitime et la plupart pensent que la découverte de lésions implique automatiquement leur destruction par tous moyens disponibles. SANFILIPPO suggère de demander aux parents avant le geste diagnostique, l'autorisation de détruire les implants qui pourraient être découverts. LIM (26) paraît le seul à insister sur une approche plus médicale car il estime que le concept de l'obligation du traitement de l'endométriose de l'adolescente pour éviter son aggravation n'est pas fondé sur des bases suffisamment solides. Prenant en compte les résultats de l'examen clinique et des échographies et IRM, il propose quand la clinique est négative de revoir les patientes après un à trois mois selon la réponse à une administration de AINS, pilules combinées ou progestatifs seuls. Et il modifie le traitement en cas d'échec. Ce n'est qu'après 3 à 6 mois, lorsque la patiente n'a pas été soulagée qu'il se tourne vers la coelioscopie.

En revanche lorsque l'examen clinique révèle la présence de nodules ou d'une fixation de l'utérus il conseille d'emblée la coelioscopie opératoire. Tout récemment Attaran et Gidwani ont insisté sur la qualité discutable des résultats de la chirurgie et ils ont fermement déconseillé les interventions radicales ou répetitives. Ils insistent sur la patience et les soins dont on doit entourer les jeunes malades pour les aider à comprendre la nature de leur maladie et pour les aider à retrouver une qualité de vie satisfaisante (1).

En cas de traitement chirurgical, presque tous les auteurs conseillent après la destruction des lésions, l'administration de 6 mois d'analogue de la GnRH ce qui témoigne de leurs doutes sur l'efficacité de leur geste opératoire.

Nous nous demandons si on ne peut aller plus loin. Dans la mesure où personne ne connaît les effets à long terme de la destruction des lésions d'endométriose, où les spécialistes de l'endométriose de l'adolescente considèrent que les récidives sont à attendre en raison de l'impossibilité de la destruction de toutes les lésions débutantes et compte tenu du fait que l'échographie et l'IRM surtout peuvent informer sur les lésions constituées de plus de 5 mm de diamètre, ne serait-il pas justifié d'utiliser d'emblée tous les moyens médicaux à notre disposition ?

C'est à dire les pilules monophasiques estro-progestatives prise sur un mode continu durant 3 à 4 plaquettes. Migraines, nausées, ballonnements abdominaux et surtout saignements inopinés pourront en effet survenir mais on s'efforcera alors de modifier les modalités d'administration. De même on pourra avoir recours aux progestatifs purs de type pregnane et norprégnanes, si utilisés en France et avec des résultats remarquables car ils peuvent être pris durant des années avec une tolérance exceptionnelle. L'essentiel est d'éviter une trop grande carence oestrogénique.

Les publications ont surtout porté sur la rétroprogestérone. Cette molécule a été étudiée dans l'endométriose de 1976 à 1999. Le travail de WALKER (50) en donne un excellent aperçu. Les suggestions des auteurs américains tels que PROPST et LAUFER (34) qui vont jusqu'à proposer des doses de 50 mg/j de MPA ou 150 mg de MPA depot tous les 3 mois nous semblent très excessives sauf sans doute dans les cas de lésions sévères. Les très petites doses de danazol évoquées par GREENBLATT ne sont pas non plus à oublier, quoiqu'elles n'aient pas été spécifiquement conseillées chez l'adolescente et qu'il soit impérieux d'interrompre cette administration en cas d'apparition de lésions acnéiques. Les analogues de la LH RH sont également une arme particulièrement puissante et utile en cas de douleurs sévères. LUBIANCA et al. suggèrent d'en soutenir l'effet par l'administration associée de stéroïdes sexuels (add back therapy) (28) afin de minimiser la perte osseuse. Ils conseillent si l'on choisit les estrogènes d'utiliser les doses qui préviennent l'ostéoporose chez la femme ménopausée en reconnaissant néanmoins que cette façon de faire n'a pas été évaluée chez l'adolescente. Il est donc difficile de savoir quelles molécules d'estrogènes ou de progestatifs (et à quelles doses) doivent être proposées.

Un préalable au traitement hormonal, lorsque celui-ci est envisagé, est la prise en consideration des experiences psychosociales antérieures de la patiente. Certains facteurs de grande importance pour la qualité de vie tels que les troubles du sommeil et ceux de nature anxio-depressive doivent orienter les modalités thérapeutiques et on doit aussi viser à leur amélioration (Bergqvist et Theorell T (4)). Il est donc suggéré d'adjoindre au traitement hormonal des antalgiques et des somnifères lorsqu'ils sont nécessaires.   

Dans les cas exceptionnels où existerait une endométriome d'aspect caractéristique en échographie et confirmé à quelques mois d'intervalle, si SANFILPPO conseille l'excision de ceux-ci, pourquoi ne pas commencer par une simple ponction dont Michel Mintz a montré qu'elle pouvait avoir des effets curatifs (31) et alors que les preuves s'accumulent des possibles effets néfastes sur la réserve folliculaire et parfois sur la formation d'adhérences, des kystectomies de toutes sortes WILLIAMS (51).

Enfin nous pensons avoir montré que les endométrioses se développent assez volontiers sur un terrain psychologiquement fragilisé, il n'est pas illogique de suggérer avant tout geste invasif un conseil psychothérapique (3).

Ces suggestions d'une thérapie a minima dont nous sommes persuadés qu'elles peuvent provoquer des réactions très vives des tenants de la chirurgie gynécologique classique, nous paraissent exiger une très grande disponibilité et une constante attention à toute évolution atypique ou à toute anomalie de la symptomatologie. Mais dans l'ignorance actuelle de l'évolution habituelle des endométrioses de l'adolescente, elles ne sont pas tout à fait déraisonnables. L'étude à long terme de ces cas devrait fournir des données essentielles sur l'histoire naturelle de l'endométriose.

On peut laisser à GRECO la conclusion finale. Une approche individualisée, multidisciplinaire est sans doute la plus efficace pour obtenir le but poursuivi : l'amélioration des conditions de vie et la disparition des douleurs pelviennes de la jeune fille (15).

Bibliographie

[1]   ATTARAN M, GIDWANI GP. Adolescent endometriosis. Obstet Gynecol Clin North Am. 2003 Jun;30(2):379-90.

[2]   AUDEBERT A. Caractéristiques de l'endométriose de l'adolescente : à propos d'une série de 40 cas. Gynecol Obstet Fertil 28 : 450-454, 2000

[2bis] L'endométriose de l'adolescente p 293-308 in L'endométriose. 2° ed. Masson 2003

[3]   BELAISCH J et ALLART JP Endométriose génitale et traumatismes psychologiques pages 177-186 L'endométriose. Masson année 2003

[4]   BERGQVIST A, THEORELL T.Changes in quality of life after hormonal treatment of endometriosis. Acta Obstet Gynecol Scand. 2001 Jul;80(7):628-37.

[5]   BLACK AY, JAMIESON MA. Adolescent endometriosis. Curr Opin Obstet Gynecol. 2002 Oct;14(5):467-74.

[6]   BULLOCK J., LASSEY F., GAMBRELL R. Symptomatic endometriosis in teenagers : a reappraisal. Obstet Gynecol 43 : 896-900, 1974

[7]   CHATMAN DL., WARD AB. Endometriosis in adolescents. J Repro Med 27 : 156-6O, 1982

[8]   CREATSAS G., HASSAN E., KOUMANTAKIS E. Adolescent laparoscopy Clin Exp Obstet Gynecol 24 : 147-8, 1997

[9]   DAVIS GD., THILLET E., LINDEMANN J. Clinical characteristics of adolescent endometriosis. J Adolesc Health 14 : 362-8, 1993

[10]   EMANS SJ. LAUFER MR., GOLDSTEIN DP.. Pediatric and adolescent gynecology fourth edition. Philadelphia, Lippincott / Raven 1998

[11]   EMMERT C. ROMANN D. RIEDEL HH. Endometriosis diagnosed by laparoscopy in adolescent girls. Arch Gynecol Obstet 261, 89-93, 1998

[12]   FALLON J. Endometriosis in youth. JAMA 131: 1405-6, 1946

[13]   FEDELE L., PARAZZINI F., BIANCHI S. ARCAINI L., CANDIANI GB. Stage and localization of pelvic endometriosis and pain. Fertil Steril 53 : 155-8, 1990

[14]   GOLDSTEIN DP., DE CHOLNOKY C., EMANS SJ. Adolescent endometriosis. J adolesc Health Care 1 : 37-41, 1980

[15]   GRECO CD. Management of adolescent chronic pelvic pain from endometriosis: a pain center perspective. J Pediatr Adolesc Gynecol. 2003 Jun;16(3 Suppl):S17-9

[16]   HASSAN E., KONTORAVDIS A., HASSAIKOS D., KALOGIROU D., KONTORAVDIS N. CREATSAS G. Evaluation of combined endoscopic and pharmaceutical management of endometriosis during adolescence. Clin Exp Obstet Gynecol 26, 85-87, 1999

[17]   HENRY-SUCHET J. à propos de " Caracteristiques de l'endométriose de l'adolescente : à propos d'une série de 40 cas de Alain AUDEBERT . Gynecol Obstet Fertil 28 : 693, 2000

[18]   HOSHIAI H.   , ISHIKAWA M., SAAWATARI Y., NODA K, FUKAYA T. Laparoscopic evaluation of the onset and progression of endometriosis. Am J Obstet Gynecol 169 : 714-719, 1993

[19]   HOUSTON D., NOLLER K., MELTON L., SELWYN BJ., HARDY RJ. Incidence of pelvic endometriosis. in Rochester, Minnesota 1970-1979. Am J Epidemiol 125 : 959-69, 1987

[20]   JANSEN RP. RUSSEL P. Non pigmented endometriosis : clinical laparoscopic and pathologic definition. Am J Obstet Gynecol 155 : 1154-9, 1986

[21]   KENNEDY S. HADFIELD R., WESTBROOK C., WEEKS DE., BARLOW D. Magnetic resonance imaging to assess familial risk in relatives of women endometriosis. Lancet 352 : 1440-1441, 1998

[22]   KONINCKX PR., MEULEMAN C., deMEYERE S., LESAFFRE E., CORNILLIE F. Suggestive evidence that pelvic endometriosis is a progressive disease, whereas deeply infiltrating endometriosis is associated with pelvic pain. Fertil Steril 55 : 759-766, 1991

[23]   LAUFER MR. Identification of clear vesicular lesions of atypical endometriosis : a new technique. Fertil Steril 68 : 739-40, 1997

[24]   LAUFER MR., GOITEIN L., BUSH M., CRAMER DW., EMANS SJ. Prevalence of endometriosis in adolescent girls with chronic pelvic pain not responding to conventional therapy. J Pediat Adoles Gynecol 10 : 199-202, 1997

[25]   LIANG CC., SOONG YK., HO YS. Endometriosis in adolescent women. Chang Gung Med J. 18 : 315-321, 1995

[26]   LIM YT. New insights into adolescent endometriosis. In Endometriosis ToDay edited by MINAGUCHI and SUGIMOTO page 21-27, Yokohama, Japan, oct 1996

[27]   LIU DTY, HITCHCOCK A. Endometriosis : its association with retrograde menstruation,dysmenorrhea and tubal pathology. Br J Obstet Gynecol 93 : 859-862, 1986

[28]    LUBIANCA J., LAUFER MIRENA. GORDON C. Add back therapy for endometriosis in adolescents. J Reprod Med 43 : 164-172, 1998

[29]   MAHMOOD TA., TEMPLETON A. Prevalence and genesis of endometriosis. Hum Reprod 6 : 544-9, 1991

[30]   MARTIN DC., HUBERT GD., VANDER ZWAAG R et al . Laparoscopic appearances of peritoneal endometriosis. Fertil Steril 51 : 63-67, 1989

[31]   MINTZ M. Kystes endométriosiques et ponction échoguidées .3ème journée du GEE Contracept Fertil Sex 22,12 : 857, 1994

[32]   OLIVE DL., HENDERSON DY. Endometriosis and mullerian anomalies .Obstet Gynecol 69 : 412-5, 1987

[33]   PORPORA MG. Correlation between endometriosis and pelvic pain. J Am As Gynecol Laparocopists 6/4 429-434, 1999

[34]   PROPST A. LAUFER M.R.Endometriosi s in adolescents : incidence, diagnosis and treatment. J Reprod Med 44 : 751-758, 1999

[35]   PROPST A. Lateral cervical displacement is associated with endometriosis Fertil Steril 70 : 568-70, 1998

[36]   REDWINE DB. The distribution of endometriosis in the pelvis by age groups and appearances of peritoneal endometriosis. Fertil Steril 51 : 63-67, 1989

[37]   REDWINE DB. Age related evolution in color appearance of endometriosis. Fertil Steril 48 : 1062-1063, 1987

[38]   REDWINE DB. The distribution of endometriosis in the pelvis by age groups and fertility. Fertil Steril, 47 : 173-175, 1987

[39]   REDWINE DB., YOCOM. Serial section study of visually normal pelvic peritoneum in patients with endometriosis. Fertil Steril 54 : 648-51, 1990

[40]   REESE KA., REDDY S., ROCK JA. Endometriosis in an adolescent population : the Emory experience. Journ Pediatric Gynecol 9 : 125-128, 1997

[41]   SANFILIPPO JS. Endometriosis in adolescents. in Endometriosis Edited by EA Wilson NY ., Alan R Liss p161-172, 1990

[42]   SANFILIPPO J., YUSSMAN M. Gynecologic problems of adolescence. In Lavery J and Sanfilippo Eds - Pediatric and Adolescent Obstet and Gynecol pp 74-83, 1985 ( New York Springer Verlag)

[43]   SANFILIPPO S., SCHROEDER B.Dysmenorrhea and pelvic pain in adolescents. Adolescent Gynecol 46 : 555-571, 1999

[44]   SCHIFRIN BS., EREZ S., MOORE JG. Teenage endometriosis. Am J Obstet Gynecol 116 : 973-80, 1973

[45]   STRIPLING MG., VANDER ZWAAG R., MARTIN DC., POSTON WM, CHATMAN Subtle appearance of pelvic endometriosis. Fertil Steril 49 : 427-31, 1986

[46]   TRELOAR SA., CONNOR DT, MARTIN NG. Genetic influences on endometriosis in an Australin twin sample. Fertil Steril 71/4, 701-710, 1999

[47]    VERCELLINI P., FEDELE L. ARCAINI L., BIANCHI S. ROGNONI MT., CANDIANI Laparoscopy in the diagnosis of chronic pelvic pain in adolescent women. J Reprod Med 34 : 827-30, 1989

[48]    VERCELLINI P. BOCCIOLONE L., CROSIGNANI PG. Is mild endometriosis always a disease. Hum Reprod 7 : 627-9, 1992

[49]   VERNON MW., BEARD JS., LINDEMANN J. Classification of endometriotic implants by morphologic appearance and capacity to synthesize prostaglandin. Fertil Steril 46 : 801-6, 1986

[50]   WALKER S. The treatment of endometriosis with retroprogesterone Br J Clin Pract (supplt 24) 40-49, 1983

[51]   WILLIAMS CM. HO HUEN B. KLEIN NA. ALLAIRE C. ROWE TC. Ovarian endometrioma during IVF treatment : do they affect outcome ? abstract O 049 16th world Congress on fertility and sterility.

[52]   WOOD C, MAHER P. Peritoneal surgery in the treatment of endometriosis-excision or thermal ablation. Aust N.Z. J. Obstet Gynecol 36 : 190-7, 1996

[53]   ZONDERVAN K., BARLOW DH. Epidemiology of chronic pelvic pain. Bailliere's clinical obstet and gynecol 14 N°3: 403-414, 2000.

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   557

558   J. BELAISCH

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   559

560   J. BELAISCH

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   561

562   J. BELAISCH

      Parentes au premier degré   Autres parentes

      (sœur et fille)

Tous diagnostiqués à l'IRM :

(Endométrioses + adénomyose ou les 2)   19/35 (54 %)   3/12 (25 %)

Endométrioses (à l'exclusion de l'adénomyose
ou de lésions équivoques)   5/35 (14 %)    1/12 (8 %)

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   563

564   J. BELAISCH

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   565

566   J. BELAISCH

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   567

568   J. BELAISCH

   L'ENDOMéTRIOSE DE L'ADOLESCENTE   569

570   J. BELAISCH