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Titre: Effets des androgčnes sur l'appareil cardio-vasculaire masculin
Année: 2003
Auteurs: - Bélaisch J.
Spécialité: Andrologie
Theme: Androgčnes

Effets des androgènes
sur l'appareil cardio-vasculaire masculin

Jean BELAISCH

Ce thème a fait l'objet, depuis le premier congrès mondial d'andrologie de l'ISA, de constatations surprises et désenchantées d'orateurs prestigieux. En effet malgré l'importance du sujet les connaissances dans ce domaine demeuraient bien fragmentaires et ne permettaient pas d'adopter une attitude thérapeutique satisfaisante pour les sujets souffrant de troubles liés à une carence en androgènes.

L'idée qui avait prévalu pendant des années était que les androgènes étaient plutôt défavorables à l'état artériel des sujets de sexe masculin puisque les hommes souffrent plus tôt et plus souvent que la femme d'accidents vasculaires. Mais les travaux publiés dès les débuts de la deuxième moitié du
XXe siècle contredisent cette façon de penser.

Est-il aujourd'hui possible d'avoir une opinion plus précise et fondée sur des informations plus solides ?

D'autre part la façon de considérer ce sujet a été bouleversée par les résultats des études HERS et WHI. Ces études randomisées, concernant le THS des femmes ménopausées sont en effet venues contredire (au moins partiellement) les données des études de cohortes et d'observation et elles relativisent tous les espoirs que l'on pouvait avoir sur les bénéfices éventuels (aussi bien d'ailleurs que sur les effets néfastes que l'on pouvait craindre) de l'androgénothérapie dans le sexe masculin.

En voulant être trop précautionneux n'est-on pas en train de faire perdre de réels bénéfices de santé aux hommes présentant une carence androgénique, qu'il s'agisse de sujets jeunes hypoandres ou de sujets âgés dont la déficience androgénique est moins bien définie ?

C'est le sujet de cette revue de la littérature.

210   JEAN BELAISCH

1. Deux aspects de cette question

Sont à considérer en premier

1.1. Le polymorphisme génétique et la biodisponibilité des androgènes

•   Le polymorphisme génétique des récepteurs des hormones sexuelles conduit à des réponses différentes selon les sujets. Ce fait, couplé à la grande variabilité de la biodisponibilité des hormones sexuelles conduit à exclure toute possibilité que l'ensemble des hommes répondent de la même façon à une administration hormonale. Et surtout, il explique que, selon les populations étudiées, des résultats contradictoires aient pu être observés.

Cette variabilité de la biodisponibilité était déjà bien connue et démontrée pour les œstrogènes, quelle que soit leur voie d'administration. Elle a été confirmée également pour les androgènes au moins chez la femme (FLÖTER (10)).

1.2. L'assimilation de l'androgéno et œstrogénothérapie

•   Les dangers potentiels de l'œstrogénothérapie révélés par HERS et WHI sont-ils à craindre pour l'androgénothérapie masculine ?

Il faut d'abord dire que l'interruption prématurée de la vaste étude prévue aux USA sur les effets des androgènes chez l'homme âgé, à la suite des résultats de l'étude WHI, a fait perdre tout espoir de disposer à une échéance relativement brève de données chiffrées et fiables sur les effets principalement vasculaires de l'androgénothérapie dans une vaste population d'hommes âgés. Or la question se pose principalement pour l'homme âgé.

D'un autre côté il est clair que les résultats obtenus chez le sujet jeune en état de carence androgénique chez lequel la substitution hormonale ramène le taux de testostérone à la normale, ne sont pas applicables à des hommes plus vieux dont le taux de testostérone est certes abaissé par rapport à celui de jeunes adultes, mais se situe dans les limites physiologiques des hommes du même âge !

Enfin, comme on l'a vu, on peut seulement aujourd'hui espérer réunir des informations utiles mais en sachant qu'elles ne seront

   EFFETS DES ANDROGèNES SUR L'APPAREIL CARDIO-VASCULAIRE MASCULIN   211

valables que pour des groupes limités et homogènes de sujets dont il faudra préalablement déterminer les particularités.

Quoi qu'il en soit les résultats décevants obtenus sur l'œstrogénothérapie après la ménopause, ne sont pas applicables aux hommes parce que les androgènes ne sont pas assimilables aux œstrogènes et parce que les hommes ne réagissent apparemment pas de la même façon que les femmes.

a) Différences entre androgènes et œstrogènes

Une première observation peut être faite sur ce point. Certes, il existe très peu d'études explorant les effets à long terme des androgènes. Mais aucune n'a rapporté une augmentation de fréquence des phlébites ou des accidents artériels dans les mois faisant suite au début de l'administration de la testostérone. Ce stéroïde se distingue donc des œstrogènes, qui, aussi bien pour l'ethinyl estradiol contenu dans ces pilules que pour les Œstrogènes Conjugués Equins ou l'œstradiol provoquent surtout pendant les premiers mois, des accidents apparemment liés à une modification des facteurs de coagulation. Et cette absence de complications a été observée aussi bien avec la testostérone intramusculaire que lors de l'administration par voie cutanée. Il se pourrait cependant que cette complication ne se révèle qu'ultérieurement si la pratique de l'androgénothérapie se généralisait.

b) Différences entre hommes et femmes

Physiologiquement le taux des androgènes circulants est très différent chez l'homme et la femme et la fonction de la testostérone n'est pas identique dans les deux sexes.

Les modifications des lipides et des facteurs de coagulation ont été considérées chez les femmes avec une très grande attention par les endocrinologues et les gynécologues du fait de leur relation possible avec les accidents vasculaires de toute sorte. Une des raisons de cet intérêt tient à la très grande proportion de femmes sous hormonothérapie, qu'il s'agisse de contraception ou de ménopause. Des publications que l'on peut qualifier d'innombrables leur ont été consacrées et il en ressort généralement que plus une hormonothérapie, par exemple la prise de pilules contraceptives, a d'effets androgéniques et plus elle est susceptible de provoquer des altérations nuisibles des lipides plasmatiques et même des événements cardio-vasculaires.

212   JEAN BELAISCH

Or lorsque des substances à effet androgénique sont administrées à la femme, elles peuvent très rapidement sortir des limites relativement étroites de la physiologie. L'observation d'une nocivité des androgènes chez le sujet féminin ne peut donc être généralisée à l'homme. On verra plus loin l'importance de cette notion de physiologie.

Dans le sexe masculin, s'il n'existe pas de concordance absolue entre les publications, ce sont plutôt des effets bénéfiques que néfastes qui ont été observés après androgénothérapie. Cependant ceux-ci sont généralement modestes, et leur conséquences cliniques sont inconnues. Quels sont les effets des androgènes sur les marqueurs conventionnels de l'athérosclérose ?

2. Les effets de l'androgénothérapie
sur les paramètres biologiques
chez le sujet hypogonadique ou chez l'homme âgé

2.1. Le cholestérol et ses fractions

a) Les corrélations observées en dehors de toute intervention

On a toujours attribué une signification à la baisse du HDL-cholestérol chez les garçons qui deviennent pubères en considérant qu'elle était une preuve indirecte des effets potentiellement néfastes des androgènes. Cependant chez les adultes la majorité des études a montré que les taux élevés (mais dans les limites normales) de testostérone étaient associés à des valeurs élevées du cholestérol-HDL chez la plupart des hommes (KHAW et BARRET CONNOR 1992 (16)).En outre les taux bas de testostérone s'accompagnent d'une plus forte concentration en particules

 

˙N

˙Mois

˙Total chol

˙HDL-chol

˙LDL chol

  
˙ 

˙20

˙9

˙‚

˙11,7%

˙NC

˙-

˙ 

˙8

˙3

˙‚

˙9,0%

˙NC

˙-

˙ 

˙13

˙3

˙‚

˙11,0%

˙NC

˙11,2

˙ 

˙10

˙12

˙‚

˙*

˙NC

˙*

(NC, pas de changement ; *, absence de précisions)

   EFFETS DES ANDROGèNES SUR L'APPAREIL CARDIO-VASCULAIRE MASCULIN   213

denses de c-LDL considérés comme favorisant le développement de l'athérosclérose.

b) les effets de l'administration d'androgènes

La majorité des auteurs a observé une absence de modification du c-HDL ou une baisse modeste après administration de testostérone à des hommes âgés en particulier MORLEY et SNYDER (voir B et B).

S. TENOVER a confirmé par ses résultats personnels et une étude de la littérature la baisse du cholestérol total, la stabilité du HDL-c et la tendance à la réduction du LDL obtenus par la testostérone.

Effets de la testostéronothérapie sur les taux sériques de cholestérol chez les sujets âgés.

Mais deux remarques très importantes doivent compléter ces données :

•   ces résultats s'opposent à ceux observés de façon concordante après administration d'anabolisants par voie orale, et habituellement à doses supra physiologiques, car ceux-ci, qui ne sont généralement pas aromatisables, diminuent le HDL-c et accroissent la résistance à l'insuline (THOMPSON et al., 1989 (27)).

•   dès que l'on sort des valeurs physiologiques de la testostéronémie les résultats s'inversent. BAGATELL et BREMNER ont montré que le HDL-c s'abaisse et le LDL-c s'élève lorsque des quantités supra-physiologiques d'androgènes étaient administrées (5). De même dans l'évolution vers le bas l'administration d'agonistes de la LH-Rh conduit à une chute de la testostérone avec élévation du cholestérol total et HDL.

Ce rôle des doses physiologiques paraît donc essentiel et doit être gardé en mémoire.

2.2. Les relations entre la testostérone circulante, la répartition
des graisses et le métabolisme hydrocarboné

a) Testostérone et répartition des graisses

Les excès de graisse abdominale sont inversement liés au taux de T libre (VERMEULEN A. 1999) (28) et SEIDELL 1990 (23) et cela indépendamment de l'âge qui accroît cette localisation des graisses. Or la graisse viscérale est corrélée au risque vasculaire et au risque de diabète non insulino dépendant. Le sens de la relation entre l'abaissement de la T libre et l'obésité n'est pas tout à fait

214   JEAN BELAISCH

clair. Cependant, TENOVER (1998) a montré que l'administration de T réduisait la masse graisse chez le sujet âgé androgénodéficient.

Les résultats des expérimentations animales sont très intéressantes car elles montrent que le niveau de la sécrétion de testostérone est d'une extrême importance pour la sensibilité à l'insuline qu'elle commande très finement. Chez le rat castré la sensibilité se réduit. Elle est aussi altérée lorsque des doses supra-physiologiques lui sont administrées. En revanche la substitution équilibrée supprime l'insulino-résistance HOLMAN et BJORNTORP (15)).

Chez les humains les faits sont analogues.

Chez la femme, la majorité des travaux a donc montré que lorsque la testostérone libre est élevée (c'est-à-dire hors des limites physiologiques) et la SHBG basse, on observe une augmentation de fréquence de l'insulino résistance et de diabète non insulino dépendant et une augmentation de fréquence des facteurs de risque cardiovasculaires, mais non d'accidents cardiovasculaires ! Ces corrélations étant plus fortes pour l'abaissement de la SHBG que pour l'élévation de la testostérone (HAFFNER (12)).

Chez l'homme, MARIN et coll.(17) comme REBUFFÉ SCRIVE (20) ont montré que l'administration de testostérone par voie IM à des hommes présentant une adiposité centrale et un taux bas d'androgènes, diminuait l'adiposité viscerale et la résistance à l'insuline, probablement en inhibant la lipoprotéine lipase ce qui favorise la lipolyse et la mobilisation des triglycérides. Et cette amélioration était d'autant plus marquée que le taux de testostérone était plus bas au départ, ce qui suggère que cet effet bénéfique pourrait ne pas être observé dans une population normale. SIMON a également observé une amélioration de la sensibilité à l'insuline chez l'homme à testostérone basse traité par les androgènes (24).

Dans les études colligées par TENOVER on a pu observer de façon consistante après administration par voie intramusculaire ou cutanée (scrotale par patchs ou par application de gel) une réduction de la masse grasse, une augmentation de la masse maigre et une augmentation du poids total -sauf chez les obèses-(26).

On doit donc prendre en compte de façon très stricte ces trois paramètres : voie d'administration, degré de transformation possible en œstrogènes, et niveau de la déficience androgénique pour juger de l'effet d'un produit sue les paramètres lipidiques.

b) Testostérone et diabète

   EFFETS DES ANDROGèNES SUR L'APPAREIL CARDIO-VASCULAIRE MASCULIN   215

Les taux de testostérone sont plus bas chez les patients souffrant d'un diabète de type II que chez les sujets temoins (STELLATO 2000) (25° et des concentrations de testostérone libre et totale abaissées sont associées à un plus grand risque de l'apparition de ce type de diabète (ENDRE 1996) (9).

2.3. Les facteurs vasculaires et les facteurs de coagulation

GOOREN et GILTAY ont insisté sur l'effet possible de l'administration de testostérone sur les endothélines. Les résultats qu'ils ont eux-mêmes enregistré sur des transexuels (femme vers homme) montraient une élevation des valeurs de l'endothéline plasmatique sous testostérone et une baisse sous acétate de cyprotérone (11). Il apparaissait que cet effet était confirmé par les travaux de ADAMS réalisés chez les cynomulgus de sexe femelle (1). Mais ces travaux ne concernent pas les sujets XY. Néanmoins, dans les années à venir cet aspect possible de l'action de la testostérone chez le sujet âgé méritera, selon ces auteurs, un contrôle attentif.

En ce qui concerne les phénomènes de coagulation, il faut noter la rareté des accidents vasculaires rapportés par rapport à ceux provoqués par les œstrogènes puisqu'ils ne citent que deux accidents liés à la testostérone et un aux anabolisants stéroïdiens.

Il est possible que cette absence d'effets néfastes soit à rapprocher de l'accroissement de l'activité fibrinolytique des androgènes 17 alpha-alkylés et de l'augmentation des protéines C, S et de l'antithrombine III observé lors de leur administration.

2.4. Les autres effets des androgènes sur l'appareil cardio-vasculaire

À côté du cholestérol la Lp(a) prend une place grandissante ; il a été prouvé que l'orchidectomie l'élève. Mais peu de travaux ont été consacrés à ces corrélations dans la population générale.

De même la T libre est négativement corrélée au fibrinogène et à l'inhibiteur 1 du plasminogène activateur et ce sont là des éléments favorables. Cependant TENOVER insiste sur le fait que la testostérone peut provoquer une rétention d'eau. Celle-ci est susceptible de favoriser la survenue d'une hypertension artérielle. Néanmoins, mis à part une prise de poids qui pourrait relever partiellement d'une telle rétention, aucun signe n'en a été retrouvé dans les publications qu'elle a analysées et qui réunissaient 41 sujets.

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D'autres aspects bénéfiques sur le plan vasculaire ont été observés:

•   la baisse de la pression artérielle (SIMON ( )) ;

•   l'augmentation du flux artériel intra-coronarien chez les patients atteints de coronarite,lors de l'infusion dans les coronaires de doses physiologiques de testostérone (WEBB) (30) et ROSANO (22).

•   l'existence d'effets bénéfiques sur la fonction endothéliale (ONG et al. (18).

•   des effets favorables en cas d'ischémie myocardique (WEBB (31)) ;

•   néanmoins l'action sur l'agrégation plaquettaire, la fibrinolyse et les facteurs de coagulation est complexe (BONITHON -KOPP 1998 ((7). De même, outre son action sur les endothélines, la T a des effets directs sur plusieurs facteurs vasoactifs tels que prostacyclines et thromboxane A2. Et le résultat global de cette action des androgènes ne peut être facilement prévu (VERMEULEN) (29).

En somme, les observations vont pratiquement toutes dans le sens d'une réduction des facteurs de risque. Mais qu'en est-il des observations spécifiques ?

3. Relations directes
entre androgènes et athérosclérose

La publication le plus souvent citée est celle de PHILLIPS et al (19) qui ont observé une corrélation inverse entre les niveaux de T et la sévérité de la maladie coronarienne.

L'expérimentation animale montre que chez certaines souris (LDL-récepteur déficientes) la castration chirurgicale accélère la progression de l'athérosclérose; tandis que l'administration de T la freine. L'effet bénéfique n'existe plus quand on administre concomitamment une inhibiteur de l'aromatase. Comme si l'effet bénéfique passait par la conversion de la T en œstrogènes dans les paroi des vaisseaux ( B.B.)

Un effet bénéfique de la testostérone sur le développement de plaque après dénudation d'un anneau aortique a été mis en évidence chez le lapin par l'équipe de HANKE (14). Associé à cet effet inhibiteur sur les dimensions des plaques elle a noté une augmentation de 50 % des mRNA des recepteurs des androgènes dans les segments d'artères traitées par la testostérone. Ces faits

   EFFETS DES ANDROGèNES SUR L'APPAREIL CARDIO-VASCULAIRE MASCULIN   217

soulignent, au moins dans le sexe masculin, le rôle important des androgènes dans le système vasculaire.

Dans l'ensemble il n'est pas possible de dire que des variations de testostérone dans les limites de la normale soient associées à un risque de maladie coronarienne. Comme le rapportent ALEXANDERSEN et al,(1996) (2), parmi les publications concernant cette relation ils en ont trouvé 18 qui rapportaient des taux de testostérone abaissés, 11 qui avaient trouvé des taux analogues chez les témoins et chez les malades atteints de maladie coronarienne et une qui avait trouvé un taux élevé de SDHEA. Et dans une étude prospective de cet auteur, aucune association entre le taux de testostérone totale et le début de la maladie coronarienne n'a été mise en évidence.

Toutefois une publication des plus récentes, rapportant les résultats d'une étude menée à Rotterdam, vient confirmer directement le probable rôle bénéfique des androgènes quand ils sont à des taux physiologiques. Le degré d'athérosclérose était mesuré par radiographies de l'aorte abdominale -dont il a été montré qu'elle était un reflet de l'athérosclérose de l'intima. Les hommes situés dans le plus haut tertile de T etb de Tlibre avait par rapport à ceux appartenant au tertile le plus bas un risque de 0,4 (CI à 95% 0.2-0.9) tandis que pour les femmes il était de 3,7 (CI : 1.2-11.6) ; mais cette association devenait moins fra&nche chez la femme après prise en compte d'autres facteurs de risques cardio-vasculaires. Chez l'homme un effet protecteur des taux élevés de SDHEA était aussi suggéré (HAK (13)).

En somme

Si l'on limite l'androgénothérapie à une administration de testostérone aromatisable -peut-être en évitant la voie orale- si l'on ne vise que l'obtention d'une valeur physiologique de testostérone, c'est à dire la valeur moyenne normale d'un adulte jeune, il est plus que probable que l'on ne doit craindre aucun effet nocif sur le plan cardiovasculaire et même que l'on puisse espérer créer alors les conditions d'un risque cardio-vasculaire optimal. En revanche toute administration provoquant des taux supra physiologiques pourrait être nocive. Néanmoins, le THS féminin nous a enseigné une prudence dont il serait risqué de se départir. Et d'autre part, l'étude de la bibliographie montre qu'on ne dispose pas de données sur les points les plus importants que sont la mortalité cardiovasculaire ou l'incidence des infarctus du myocarde. Mais

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cette carence pourrait résulter de l'absence d'études d'envergure assez grande pour permettre d'en tirer d'utiles conclusions

4. Les androgènes surrénaliens

On ne peut entièrement éluder la question de la DHEA et de ses relations avec l'état de l'appareil cardio-vasculaire.

De premiers travaux (BARRETT-CONNOR et al. 1986 ( ) BERR 1996 () avaient rapporté que les valeurs basses de SDHEA étaient associées à une plus forte mortalité dans les 2 années suivantes. D'autres publications ont donné des résultats opposés.

En ce qui concerne les effets de l'administartion de DHEA sur la circulation pénienne, la controverse existe aussi. Comme le Massachussetts Male Aging Study avait montré que les hommes dont les taux de SDHEA étaient très bas, étaient souvent atteints de dysfonction érectile, REITER et al. ont observé que l'administration de DHEA améliorait franchement certaines catégories de ces patients(21). A l'inverse ARLT et al.(4) n'ont pas observé de tels effets ( ). Selon la formule consacrée, seules de plus vastes études pourront aider à reconnaître les hommes susceptibles de bénéficier de cette supplémentation et ceux chez qui une réponse positive est improbable. C'est d'ailleurs la voie suivie par REITER.

5. Les associations de médicaments

Les études effectuées chez les femmes à la ménopause, en particulier l'étude HERS, ont montré qu'il n'y avait pas (ou peu ) à attendre de bénéfices de l'œstrogénothérapie chez les femmes sous statines. Il n'en est peut-être pas de même pour les hommes recevant des androgènes étant donné que les statines exercent outre leur action sur le cholestérol, un effet anti-inflammatoire puissant et qu'ils agissent sur l'endothélium vasculaire et sur la vascularisation de la plaque. D'autres substances, comme les ezetemibes en inhibant l'absorption du cholestérol sont susceptibles d'améliorer plus avant le profil lipidique des hommes âgés.

L'association de testostérone à ces produits pourrait aboutir à une synergie des effets favorables sur l'état artériel ou au moins à réduire les effets nocifs potentiels des androgènes au moins dans certaines populations. La testostérone pourrait alors exercer ses effet bénéfiques principalement sur la force musculaire, l'humeur, les fonctions cognitives et au moins chez certains sur l'activité

   EFFETS DES ANDROGèNES SUR L'APPAREIL CARDIO-VASCULAIRE MASCULIN   219

sexuelle, augmentant le mieux être général. Quant à la forme galénique et à la voie d'administration les meilleures c'est là une tout autre
question.

6. La décision d'androgénothérapie

Deux questions incontournables se posent alors.

Quels sont les critères de la carence androgénique ?

Lorsqu'existent des manifestations cliniques classiques, susceptibles de répondre aux androgènes, il n'est pas douteux qu'une administration de testostérone mérite d'être tentée et suivie attentivement.

Mais lorsque la découverte est purement biochimique, par exemple une concentration plasmatique au dessous de 12,5 nmol/l -selon un consensus (3) le seuil serait encore plus bas à 2ng/ml- est-il licite de proposer une androgénothérapie ?

Il n'existe pas de réponse généralisée à cette question et l'opinion du sujet (malade ou en apparente bonne santé) doit être le premier élément à prendre en considération. Mais selon nous la réponse est le plus souvent plutôt positive.

Avant la mise en œuvre de l'androgénothérapie, il est désormais indispensable de rechercher attentivement d'éventuels antécédents personnels et familiaux ( par exemple ceux de thrombose veineuse ou de cancer de la prostate) et d'éviter cette sorte de traitement chez les sujets prédisposés, alors qu'aujourd'hui on ne peut pas considérer que les bénéfices à en attendre sont indiscutables.

Si la décision est prise, on ne dépassera pas les doses physiologiques et le suivi doit être très rigoureux : contrôle du poids, de la pression artérielle, de l'existence d'apnées du sommeil, du taux de testostérone (certains prônent celui de la testostérone libre plus incertain car difficile à doser) des lipides et peut-être de l'épaisseur des parois des carotides, de la prostate par la clinique et le dosage des PSA, enfin par l'évaluation de l'hématocrite. Et on n'hésitera pas à interrompre temporairement ou définitivement le traitement devant toute anomalie. A propos de prostate, il n'est pas exclu, comme F. COMHAIRE l'a évoqué, que le risque de cancer de la prostate suive la même courbe en U que le risque d'athérosclérose et que des taux physiologiques de testostérone plasmatiques n'aient un effet protecteur(8).

220   JEAN BELAISCH

7. Conclusion

Avant les résultats de la WHI, BHASIN et BUCKWALTER, en 2001, croyaient pouvoir insister sur l'intérêt de très vastes études cliniques, placebo contrôlées ; ils cherchaient à obtenir chez 5 000 à 10 000 hommes traités pendant 5 à 7 ans, une concentration plasmatique normale, moyenne à haute, de la testostérone. Ce qui aurait permis, écrivaient-ils, de confirmer les avantages de l'androgénothérapie, et en même temps de répondre aux inquiétudes concernant la prostate (6).

De telles études paraissent dorénavant ne pas correspondre aux besoins des médecins et de la population, et il est probable qu'elles ne seront jamais entreprises.

Aujourd'hui en se fondant sur les données qui viennent d'être exposées, la décision de traiter ou non les hommes âgés dont les concentrations de testostérone sont faibles, ne peut être généralisée et elle ne pourra être prise que sur un plan individuel et après un long dialogue sur les avantages et les inconvénients des hormones males.

C'est précisément cette sorte d'étude qu'il faudrait pouvoir réaliser !

Il est indispensable de comprendre que l'on ne doit chercher à traiter que les hommes qui en éprouvent le besoin. Car ils ont plus de chances que les autres d'adhérer à cette forme de thérapeutique. Mieux vaut aussi qu'ils ne craignent pas d'affronter les risques d'une augmentation de fréquence du cancer de la prostate, peu probable mais qui ne peut être écartée. Ce seront donc des hommes cultivés qui ayant appris les avantages potentiels, en particulier sur l'arbre vasculaire, souhaitent adopter une attitude préventive même si sa réalité n'est pas encore entièrement démontrée. Le suivi de ces patients qui, a priori, devraient être des volontaires très coopérants fournira les meilleurs outils pour la gestion de la prévention artérielle des générations futures.

8. Bibliographie

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