Particularités diagnostiques et
thérapeutiques des ménopauses précoces
P. LOPES
Introduction - Définition
La survenue avant l'âge de 40 ans d'une insuffisance
ovarienne primitive (IOP) définit généralement la ménopause
précoce. Certains auteurs anglo-saxon différentient la ménopause
précoce qui survient entre 40 et 45 ans de la ménopause prématurée
qui survient avant l'âge de 40 ans (POF premature ovarian failure) (Santoro
2003). L'âge de la ménopause est fortement influencé par les facteurs
génétiques.
La fréquence de la ménopause
précoce reste faible car elle représente en moyenne 1 % des femmes caucasiennes
(Luborsky 2003) et touche 0,1 % des femmes de moins de 30 ans. Cela correspond à10
à 30% des cas d'aménorrhées primaires, et à 4 à 18% des
cas d'aménorrhées secondaires.
La prise en charge des ménopauses
précoces est d'actualité car :
1 - Les progrès de la biologie
moléculaire permettent un diagnostic génétique de plus en plus précis,
qui doit déboucher éventuellement sur un conseil génétique.
Citons le cas de Mme F... qui consulte pour ménopause précoce à 35
ans. L'ensemble du bilan s'avère normal. Elle a accouché à l'âge
de 25 ans d'une petite fille et demande quels conseils il faudra donner à sa
fille ? Que dire devant cette ménopause précoce idiopathique ?
2 - Les progrès de l'assistance
médicale à la procréation font discuter :
- de la cryopréservation
ovarienne
- des possibilités de maturation
folliculaires in vitro
- du recours au don d'ovocytes.
Ce thème ne sera pas traité
car il fait l'objet de l'intervention de Catherine Rongières.
3 - La substitution hormonale
doit être réfléchie non seulement en ce qui concerne les posologies,
les voies d'administration et les durées de traitement depuis la WHI et la
MWS (cf article d' Henri Rozenbaum) mais plus généralement pour certaines
de ses contre indications : ce qui peut être considéré comme contre
indication du THS chez la femme de plus de 50 ans, doit être mis en balance
avec les risques engendrés plus spécifiquement par la ménopause précoce.
Deux cas clinique peuvent illustrer
cette problématique :
Cas clinique durée du THS :
Mme GOU Lydie vient en consultation
à l'âge de 63 ans pour l'association ostéoporose et ménopause.
Nulligeste, elle a subi à l'âge de 35 ans une hystérectomie avec
castration pour cysadénome mucineux borderline.
Elle est suivie depuis 1985 et suis
un THM associant estrogel 1/2 dose par jour et progestogel. Son suivi mammographique
réalisé tous les 2 ans ne montre aucune anomalie mammaire
Elle a réalisé le 2/1/2003
une ostéodensitométrie qui a objectivé
- un T score lombaire à
- 3,66 (L2-L4)
- un T score au nniveau du col
fémoral à -2,69.
A cette date, la posologie d'estrogel
a été augmenté à 1 dose par jour et une association calcium
vitamine D prescrite. Les marqueurs ont révélé :
- Des cross laps à 1108
pmol/l (N : 1100-3500)
- Ostéocalcine à 20
ng/ml (N 12.0 à 56.0).
Une DMO avait été réalisée
5 ans avant et l'évolution du T score est :
- de -1,14 % an au niveau
lombaire
- de - 2,35 % par an au
niveau du col fémoral.
Mme G.. prend son THS depuis 28 ans.
Que faut-il proposer ?
Cas clinique Contre indications au
THS :
Madame M. Isabelle née en septembre
1967 revient en consultation à l'âge de 35 ans pour discussion d'un traitement
hormonal de la ménopause dans le cadre d'une ménopause précoce associé
à un lupus et un à syndrome des antiphospholipides.
Cette patiente n'a pas d'antécédent
familial particulier, sur le plan personnel elle est traitée depuis 1988 pour
un lupus érythémateux aigu disséminé. Ce lupus s'est compliqué
d'un syndrome des antiphospholipides et elle est traitée au long cours par
l'association triatec Cortancyl, préviscan. Elle a bénéficié
entre 1988 et 1989 d'une chimiothérapie par Endoxan*. Le dernier bilan biologique
datant d'il y a 1 an était satisfaisant avec un taux d'hémoglobine normal,
un taux de plaquettes normal, une CRP à 3 mg et une VS à 32. Cette patiente
est nulligeste, elle a adopté un enfant.
On note dans ses antécédents
gynécologiques, une chirurgie en septembre 91 par laparotomie pour un kyste
ovarien multi-loculaire de 20cm lors de la laparotomie était effectuée
une ovariectomie droite. Le Compte rendu histopathologique de la pièce d'ovariectomie
droite de 852 grammes révèle l'existence d'un cystadénome muqueux
Borderline. Suite à cette ovariectomie faite en septembre 91, la patiente présente
une aménorrhée secondaire dont le bilan objective un syndrome de ménopause
précoce avec une FSH à 83 UI, une LH à 103 UI, un taux d'oestradiol
à 18 (fin d'année 91).
Le bilan a été recontrolé
en 1992 avec une FSH à 93, et un oestradiol à 4pg.
La patiente est mise sous un traitement
associant OESTROGEL et PROMEGESTONE. Revue en 2001, elle a présenté une
fracture de côte et les médecins internistes ont objectivé une insuffisance
coronarienne et une ostéoporose.
Le Bilan biologique révèle
la présence d' anticorps-anticardiolipides à 52 UI en décembre 91
(normal inférieur à 8). Anticorps antinucléaires positifs supérieur
au 1/800ème en décembre 91, la présence d'un anticoagulant circulant
de type antiprothrombinase a été objectivé en septembre 93.
Les questions du diagnostic et du traitement
de cette ménopause précoce se posent.
Quel est l'origine de la ménopause
précoce ?
Plusieurs hypothèses : hypothèse
immunitaire, hypothèse chirurgical mais lors de l'ovariectomie pour Borderline,
l'ovaire contro-latéral était sain, hypothèse médicamenteuse
car la chimiothérapie par ENDOXAN lui a été indispensable de 1988
à 1989 pour sa pathologie auto-immune.
Quel le surveillance faut-il proposer
?
Devant cette maladie lupique non stabilisée
: thrombopénie modérée, forte activité anti-thrombinase, présence
d'anticorps anti-nucléaire qui est supérieur à 1/800ème, la
patiente est revue en médecine interne en mai 94. Le traitement par corticoïdes
est maintenu. Le diagnostic d'insuffisance coronarienne rentrant dans le cadre d'un
syndrome des antiphospholipides est retenue et un traitement sous antivitamine K
est proposé. En septembre 2000, la patiente a présenté une douleur
précordial et dyspnée, l'échographie cardiaque a retrouvé une
hyposynésie de la paroi antérieure, une gamma-angiographie isotopique
a été programmée. Compte rendu du cardiologue : exploration coronaro-angiographique,
antécédent d'altération de la fonction systolique avec des éléments
compatibles avec des séquelles d'un infarctus confirmé par les données
scintigraphiques (cadre d'un syndrome des anticorps anti-phospholipides). Il est
confirmé qu'existe une akinésie inféro-apicale correspondant à
une séquelle d'infarctus avec des artères coronaires irrégulières
mais sans sténose significative pouvant faire évoquer la survenue d'un
thrombus.
Le diagnostic possible de cardiomyopathie
au PLAQUENIL avait été évoqué mais non retenue. L'ostéodensitométrie
réalisée en 2000 révèle une ostéoporose vertébrale
avec un T score inférieur à -2,78. Revue par l'interniste en janvier
2001, le traitement comportait CORTANCYL 3mg, PLAQUENIL 2 comprimés par jour,
TRIATEC 2.5 mg par jour, PREVISCAN 1, 5 comprimé par jour, DITRONEL, OROCAL.
Peux-t-on proposer un traitement hormonal
substitutif de la ménopause ?
Ces observations rappellent la complexité
de certaines situations diagnostiques et la difficulté de proposer un choix
thérapeutique rationnel.
Rappel concernant le diagnostic positif
La ménopause précoce est une insuffisance
ovarienne prématurée (IOP) ou hypogonadisme hypergonadotrope.
Le signe d'appel le plus caractéristique
est en général une aménorrhée primaire ou une aménorrhée
secondaire chez une femme âgée de moins de 40 ans.
Certains autres signes d'appel peuvent
faire évoquer une forte probabilité d'IOP, les diagnostics précoces
et les formes incomplètes. Ce sont les troubles du cycle (cycles courts ou
au contraire spanioménorrhée), l'infertilité (fausses couches spontanées
à répétition) l'infécondité.
Contrairement aux ménopauses chirurgicales,
les manifestations fonctionnelles sont souvent moins marquées. Les signes cliniques
d'hypoestrogénie peuvent être discrets : bouffées vaso-motrices,
troubles génito-urinaires, absence de glaire.
Les dosages de FSH et de LH sont élevés
à plus de 30 UI/l (dosages à répéter compte tenu des fluctuations
et de la nécessité d'éliminer un dosage fait lors des pics ovulatoires).
Un taux d'estradiol inférieur à 30 pg/ml confirme le diagnostic et dans
ce cas, le test à la progestérone n'est pas nécessaire.
L'échographie pelvienne est nécessaire
et doit préciser la taille des ovaires et renseigner sur la présence de
follicules (nombre et taille).
Rappel concernant le diagnostic étiologique
En dehors des causes évidentes, le diagnostic
étiologique est fondé sur un bilan comportant :
- Un entretien détaillé
des antécédents personnels et familiaux
- L'établissement de l'arbre
généalogique
- Le caryotype et les études
génétiques à la recherche de mutations
- L'échographie : taille,
vascularisation et compte des follicules
- Un bilan général
à la recherche d'une maladie auto-immune ou d'une maladie métabolique
- Une éventuelle coelioscopie
avec biopsie d'ovaire.
Celle ci n'est pas nécessaire
en dehors des cas ou l'échographie a objectivé la présence d'ovaires
de taille normale avec développement folliculaire débutant. Une étude
histologique voir dans le cadre de la recherche une étude de l'enzymologie
ovarienne peut être proposée.
Les étiologies
Les causes évidentes sont souvent iatrogènes
Causes chirurgicales, médicamenteuses (chimiothérapie
avec les agents alkylants : chlorambucil, le busolfan, la cyclophosphamide), et
radiothérapie.
La toxicité de la chimiothérapie
et de la radiothérapie est d'autant plus importante que l'âge de la patiente
est avancée. Cependant les cancers chez l'enfant de sexe féminin expose
après radiothérapie et / ou chimiothérapie à un risque plus
élevé d'IOP puisque 1 fille sur 6 traitée pour un cancer dans l'enfance
aura une IOP. Il est donc important d'informer les jeunes femmes traitées dans
leur enfance pour un cancer de ce risque et de leur conseiller de débuter relativement
tôt une grossesse. (Larsen EC, 2003).
L' hystérectomie totale avec conservation
annexielle est parfois responsable de ménopause précoce si la vascularisation
annexielle était d'origine utérine prédominante.
Citons également les risques d'IOP
provoqués par l'embolisation des fibromes (Marx M 2003).
Les causes chromosomiques
Les Anomalies peuvent toucher les gonosomes :
chromosome X, la dysgénésie gonadique est responsable de 50 % des cas
d'aménorrhée primaire) :
- Absence d'un X (formule 45X0
ou syndrome de Turner) est typique mais d'autres formules sont possibles : 47XXX,
mosaïques XX/X0, X bicentrique. Parmi les femmes ayant une IOP, 3,8 % ont un
syndrome du triple X. Ces cas s'associent régulièrement à une pathologie
thyroïdienne auto-immune. (Goswami 2003).
- Les anomalies en mosaïque:
la mise en évidence d'un chromosome Y imposera la gonadectomie pour éviter
le gonadoblastome.
- X fragile. Les femmes porteuses
de la prémutation X-Fra ont souvent une ménopause qui survient plus précocément,
30 % des femmes porteuses de la prémutation présenteraient une ménopause
avant l'âge de 40 ans. Cette prémutation X Fra toucherai 2 à 12 %
des IOP à caryotype normal (Gersak 2003). Le conseil génétique est
dans ce cas fondamental.
- Microdélétions de
l'X (Xq13 - Xq26). Dans la majorité des cas, il s'agit de cas sporadiques bien
que des cas familiaux aient été décrits.
Les anomalies peuvent également
toucher les autosomes : chromosomes non sexuels avec des atteintes des chromosomes
2, 3 et 11. Différents syndromes ont été décrits : (blépharophimosis,
galactosémie, déficit des enzymes de la stéroidogénèse,
altération du récepteur de la FSH), ils seront revus dans les causes géniques.
Le syndrome de Lundberg ou polyneuropathie oligophrénie est une maladie autosomique
récessive associant habituellement un nanisme, avec retard mental et conduction
nerveuse anormale.
Les causes géniques
De nombreux gènes sont rresponsables de l'acquisition
du capital folliculaire et du maintien du stock ovocytaire dont nous ne ferons que
citer quelques exemples : Gènes de la différentiation folliculaire : Migration
et maintenantce des cellules germinales : c-kit, DAZL, Méïose : Spo 11
; DMC1 ; MSH4 ; MSH5, Maturation folliculaire : c-kit, GDF9, connexin 37 ; Croissance
folliculaire ou apoptose : bax, Bcl2, Autres gènes : FOXL2.
Les gènes candidats sont évoqués
selon les résultats de l'échographie et de la biopsie d'ovaire :
- En l'absence de follicules,
on évoque des anomalies des gènes interférant dans la migration,
la maintenance et la méïose des cellules germinales.
- En cas de maturation folliculaire
partielle , les gènes responsable de l'apoptose et de la maturation folliculaire
peuvent être responsable de l'IOP. Ce chapitre mérite d'être détaillé
car la présence de follicules en échographie incite à effectuer des
recherches pour essayer d'objectiver des anomalies du chromosome X : recherche de
micro-délétions de la région région Xq26.Xq28, des translocations
réciproques Xq21 et des autosomes 15 Mb : 8 gènes différents sont
impliqués dans la genèse de l'IOP. Des cas familiaux de mutations du récepteur
FSH dont le gène est situé sur le chromosome 2p, ont été décrits
(Meduri G, 2003). Les mutations en 3q23 sont responsables du syndrome BPES : blépharophimosis
Ptosis Epicanthus syndrome.
Les études génétiques
font l'objet de recherche et compte tenu des propgrès constants, devant un
cas clinique particulier, des équipes peuvent être contactés pour
améliorer la pertinence diagnostique (ex : Equipe de R Frydman à clamart,
Equipe de P Touraine et M Misrahi à l'hôpital Necker INSERM UT84 Paris,
Equipe de Patricia Barbarino-monnier à Nancy.)
Les causes auto-immunes et certaines maladies générales
Elles seraient responsables de 20 % des ménopauses
précoces. La coexistence d'une maladie auto-immune : maladie de Basedow, thyroïdite
d'Hashimoto, maladie d'Addison, diabète insulino-dépendant, lupus érythémateux
aigü disséminé, polyarthrite rhumatoïde, myasthénie et
la maladie de Crohn, oriente vers cette hypothèse.
Les causes infectieuses virales
Elles sont souvent évoqués mais rarement
prouvés (oreillons, rubéole, varicelle, CMV).
Les causes idiopathiques
Elles restent malheureusement trop nombreuses.
Evaluation des risques liés à la ménopause
précoce
La singularité de la ménopause précoce
rend compte de la possibilité d'éviter certains risques.
Il faut ici intégrer plusieurs
natures de risques :
1 - Les risques imputables à
l'étiologie de la ménopause précoce ou aux conséquences des
traitements :
- cause de la chirurgie ayant
imposé la castration : cancer, pathologie endométriosique, adhérences,
pathologie infectieuse etc.,
- conséquences extra
gynécologique de la chimiothérapie, de la radiothérapie. Rappelons
que les femmes traitées pour maladie de hodgkin ont un risque accru de cancer
du sein par effets de la chimio et ou de la radiothérapie,
- les causes et conséquences
de la pathologie auto-immune sont responsables de pathologie particulière.
2 - Les risques liés à
l'hypoestrogénie prolongée qui doivent être analysés :
- altération de la qualité
de vie, troubles génito-urinaires,
- risques d' athéroslérose
: les risques cardio-vasculaires sont augmentés,
- risques d'ostéoporoses.
Le risque d'ostéoporose est majeur en l'absence de substitution à doses
efficaces. Il est possible que certaines pathologies responsables de la ménopause
précoce soit aussi responsable de l'ostéoporose.
- risques de maladie d'Alzheimer.
Ils sont suspecté mais ne sont pas évalué actuellement.
3 - Les risques du THS qui ne
sont pas transposables pour la durée de traitement aux risques connus chez
les femmes ayant une ménopause climatérique.
En effet, l'incidence des pathologies
est très différente selon l'âge. L'âge est un facteur de risque
important de cancer du sein et d'accident thrombo-embolique. L'application de la
règle du risque relatif explique le nombre faible de risques absolus en fonction
de l'âge du début de traitement.
Classiquement, le risque cardiovasculaire
est corrélé à l'âge de la ménopause (Van der Schouw 1996),
mais récemment, Nilsson (2003) a comparé l'espérance de vie de 152
femmes ayant eu une castration pour salpingite dans les années 1930 à
Malmöe sans ravoir reçu ultérieurement de THS avec la population
de référence suédoise. L'espérance de vie n'est pas différente
: 74,8 ans pour les femmes castrées sans THS versus 74,7 ans pour la population
témoin. Parmi les femmes castrées 50% sont décédées de
maladie cardio-vasculaire et 16,7% de cancers (aucun cas de cancer du sein).
Particularités de la prise en charge thérapeutique
Le conseil génétique
Il est fondé sur la découverte d'anomalies
génétiques transmissibles. Il est fondamental en cas d'X fra car il permet
par le diagnostic prénatal d'éviter la naissance de garçons débiles
profonds. (Layman LC 2003). Le risque de ménopause précoce dans la descendance
incite à informer les filles des femmes atteintes des risques d'hypofertilité.
Les particularités de la prise en charge thérapeutique en
dehors de l'infertilité
La prise en charge psychologique ne doit pas être
négligée car ces jeunes femmes sont souvent perturbées par le diagnostic
et le terme de ménopause précoce doit être évité au profit
des insuffisances ovariennes prématurées.
Le pronostic fonctionnel est, dans
le cas de la ménopause précoce, particulier car il expose aux conséquences
organiques de la carence estrogénique prolongée, notamment osseuse et
cardio-vasculaire et nécessite donc une prise en charge thérapeutique
précoce, adaptée et prolongée.
Le traitement doit être précoce,
à posologie efficace et le traitement doit être prolongé.
La substitution par le traitement estrogénique
est ici essentielle. L'estrogénothérapie seule est recommandée en
cas d'hystérectomie, sinon le traitement est estro-progestatif.
Le THS doit être initialement
prescrit à dose suffisante pour éviter les symptômes d'insuffisance
estrogénique et prévenir la perte osseuse. Lorsque les posologies sont
inférieures à 2 mg pour l'estradiol oral, à 50 mcg/j pour les patchs,
à moins de 1,5 mg de gel pour la voie transcutané et à moins de 300
mcg pour la voie nasale, un contrôle ostéodensitométrique à
2 ans s'impose. Le dosage des marqueurs osseux pourrait permettre plus rapidement
d'ajuster les posologies d'estradiol.
L'observance du THS est un point fondamental
sur lequel il faut insister. Toutes les recettes permettant cette amélioration
de l'observance doivent être employées car la durée du THS conditionne
la prévention des maladies induites par la ménopause.
Questions et choix particuliers
1 - Le type et le schéma du THS est
libre chez les femmes sans contre-indication. Le traitement séquentiel est
peut-être psychologiquement mieux adapté. Il est même possible de
prescrire une pilule estro-progestative.
2 - La reprise de cycles ovulatoires
est possible (même si cela est exceptionnel) en cas de ménopause précoce
et des grossesses spontanées ont été publiées, en particulier
au début de l'instauration du THS (Jamin 1995, Patel 2003).
3 - Le THS peut-il être
prescrit, chez les femmes opérées pour cancers de l'ovaire ? Compte tenu
des résultats récents des effets du THS sur les risques de cancer de l'ovaire,
et du pronostic des cancers ovariens, le gynécologue peut être amené
à discuter la prescription d'un THS dans certains cas : en cas BVM très
invalidantes par exemple ou après chirurgie radicale d'une tumeur borderline
ce d'autant que l'ovariectomie a été bilatérale.Cependant, une certaine
prudence s'impose, sachant que le niveau de risque des récidives dépends
du stade initiale du cancer ovarien. Pour les stades I voir II, l'importance de
la qualité de vie et de la prévention de l'ostéoporose justifie très
souvent la prescription de ce THS.
4 - Dans certaines situations
ou les contre-indications du THS sont discutées. C'est le cas de la première
observation écrite ci dessus. Le lupus est théoriquement une contre-indication
au THS mais, si cette pathologie altère gravement la qualité de vie, si
l'ostéoporose est importante, la prescription peut être envisagé
avec l'accord des médecins internistes en privilégiant les voies percutané,
transdermique ou nasale associées aux progerstatifs les moins thrombo-emboligènes
(progestérone naturelle ou semi-naturelle, acétate de chlormadinone).
5 - Faut-il limiter les durées
de traitement ? Compte tenu de l'incidence faible avant 40 ans des pathologies induites
par le THS (maladie thrombo-embolique et cancer du sein) il ne faut prendre en considération
les durées de traitement qu'à partir de cet âge sans cumuler la durée
totale du THS. La balance risque bénéfice sera réévaluée
après l'âge de 50 ans.
6 - Faut-il discuter la substitution
en androgènes ? Cette question se pose particulièrement chez la femme
ovariectomisée. En effet, les androgènes chez la femme sont synthétisés
et sécrétés par les surrénales et les ovaires. L'ovaire est
responsable de la synthèse d'environ 50 % de la testostérone. La prescription
peut être envisagé si un syndrome de déclin androgénique (SDA)
est suspecté chez la femme ménopausée précocément (lopes
2003).
Le syndrome de déclin androgénique
chez la femme n'est pas spécifique mais le clinicien doit être atttentif
à plusieurs signes surtout an l'absence de correction par le THS :
a - Des signes fonctionnels comme
la diminution de la vitalité, de la sensation de bien être, l'asthénie
et la fatigabilité
b - Des troubles du comportement
: un syndrome anxio-dépressif, une perte de l'estime de soi.
c - Des modifications corporelles
comme la raréfaction et la perte de forticilisation des poils pubiens. Une
atrophie génitale ne répondant pas au THS estro-progestatif de la ménopause.
Une diminution de la masse, de la force et du tonus musculaire. Une anomalie de
répartition des graisses
d - Des troubles sexuels : la
perte du désir, des fantasmes et des rêves érotiques une diminution
de l'excitabilité, de la capacité orgasmique, une diminution de l'activité
sexuelle.
Les androgènes, par leurs effets
anabolisants, améliorent l'état général en diminuant l'asthénie
et la fatigabilité.Leur action sur l'insomnie, la dépression, la sensation
de bien être méritent cependant une évaluation complémentaire.
Certains progestatifs à effets androgéniques (NETA) améliore par
rapport aux estrogènes seuls, le maintien ou l'augmentation du contenu minéral
osseux. Les androgènes ont également un effet positif sur l'os en inhibant
le remodelage osseux.
L'étude de schifren (2000) a confirmé
l'intérêt chez les femmes ovariectomisées de l'apport de testostérone
en patch (150 à 300 mcg/j). L' amélioration de la libido, de la fréquence
des rapports sexuels, l'amélioration des dysfonctions sexuelles est prouvée,
mais il faut souligner l'importance également de l'effet du placebo (amélioration
significative à 12 semaines des index sexuels). La tolérance du traitement
a été évaluée sur une période d'observation de 36 semaines
et la seule différence significative a été le nombre d'épilation
faciale avec le dosage de testostérone à 300 mcg/j.
Il n'y a pas actuellement d'androgènes
ayant l'AMM pour traiter le syndrome de déficit androgénique en France.
La tibolone (stéroïde de synthèse de type 19-norstéroïde)
possède après métabolisme tissulaire (3 dérivés : 3a- et
la 3ß-hydroxy-tibolone et le ³4-isomère) certaines propriétés
androgéniques faibles.
En conclusion
La ménopause précoce doit faire l'objet
d'une attention particulière pour en trouver l'étiologie. Le conseil génétique
doit être adaptée. La prise en charge doit être médicale et
psychologique. Le traitement hormonal susbtitutif reste le traitement le mieux adapté
à la prévention des risques chez ces femmes exposées à une insuffisance
oestrogénique intense et prolongée. Les résultats des publications
récentes de la WHI ne peuvent, compte tenu de l'âge moyen des femmes exposées
au THS, être appliquées au THS des femmes ménopausées précocément.
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