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Titre: La compliance à la substitution hormonale après la ménopause
Année: 1998
Auteurs: - Robyn C.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Ménopause

La compliance à la substitution hormonale après la ménopause.

Robyn C.

Laboratoire de Recherche sur la Reproduction, Faculté de Médecine, Université Libre de Bruxelles, 180 route de Lennik, 1070 Bruxelles.

 

Dans le contexte de ce symposium, le mot "compliance" devrait être évité : il implique une notion d'obéissance à un traitement, qui est quasi unanimement rejetée aujourd'hui, tout au moins si on veut évité d'être taxé de sexiste (Sarel et Sarel 1994). Le terme "acceptabilité" me paraît plus approprié. Il met l'accent sur l'importance de convaincre, d'entraîner une participation active des femmes concernées. Aujourd'hui, l'accent est de plus en plus mis sur les aspects préventifs de la substitution hormonale post-ménopausique. Il me parait dés lors utile de rappeler les critères de qualité en matière de contraception hormonale : la méthode doit être efficace, sûre, réversible et acceptable. En dehors de la réversibilité de la fertilité, ces critères s'appliquent parfaitement bien à la substitution hormonale post-ménopausique. Si on veut insister sur les aspects préventifs, il est aussi indiqué d'éviter les mots "traitement" et "patientes". Des trois critères repris ci-dessus, l'acceptabilité est très certainement celui qui interpelle le plus. L'acceptabilité de la substitution hormonale ne concerne pas que la femme qui consulte mais aussi et plus largement les gynécologues, les généralistes, les média, le cercle familial et l'entourage (amies, collègues de travail, etc.). Les média constituent aujourd'hui une importante source d'information concernant la substitution hormonale et ses effets secondaires. Et le scoop met souvent plus l'accent sur les effets secondaires nuisibles que sur les apports bénéfiques.

De nombreuses publications rapportent, d'une manière générale, une très faible acceptabilité de la substitution hormonale (Nachtigall 1994, Lopes et Mensier 1996). Avant d'en donner quelques exemples, il est important de souligner la grande difficulté d'évaluer correctement ce paramètre en dehors d'études ponctuelles réalisées dans ce but. Et dans ces cas divers biais viennent compliquer l'analyse des données recueillies. En Belgique en 1993, si on se base sur le nombre de prescriptions, quelle qu'en soit la nature ou l'efficacité des produits, on estime à 13% le pourcentage des femmes de plus de 50 ans qui étaient "traitées". En 1990, il n'était que de 7%. Si on se limite à la tranche d'âge de 50 à 75 ans, le pourcentage de 1993 monte à 19%. Mais il s'agit là d'une surestimation. En effet, toutes les femmes qui se procurent un "traitement" ne le prennent pas. Et parmi celles qui le commencent beaucoup l'abandonnent plus ou moins rapidement. Ces chiffres ne donnent donc aucune idée sur la qualité du suivi d'une substitution hormonale. Pour certains, la durée moyenne d'utilisation ne dépasse pas 3 ans (Lopes et Mensier 1996). Ravnikar (1987) dans une étude faite sur 2500 femmes rapporte que 20 à 30% d'entre elles ne s'étaient pas procuré le traitement prescrit, 10% ne l'avaient jamais pris, 10% ne l'avaient pris qu'épisodiquement et que 20% l'avait stoppé dans les neuf mois. Pour Wren et Brown (1991), 61% des femmes étaient toujours sous traitement après un an. Dans une étude plus récente (Cano 1995) ayant porté sur 331 femmes suivies entre 1 et 5 ans dans une clinique de la ménopause , 29 (9%) n'avaient pas acheté le traitement, 50 (15%) avaient abandonné le traitement dès la première année et 46 (14%) l'avaient suivi irrégulièrement. Pour l'auteur, l'association d'un progestatif et la voie orale ont influencé négativement le suivi de la substitution hormonale. L'analyse des raison invoquées pour ne pas commencer ou ne pas continuer la prise d'hormones devrait permettre d'orienter les efforts devant viser à une meilleure acceptabilité. Il ressort d'une étude ayant porté sur 220 femmes post ménopausées de classe moyenne (43-62 ans) convaincues du rapport favorable bénéfices/risques de la substitution hormonale, que seulement 7% d'entre elles avaient abandonné après un an (Nachtigall 1994). Parmi celles-ci la moitié invoquait les saignements réguliers ou non, comme motif d'abandon. Une proportion d'abandon pour le même motif se retrouve dans l'analyse multivariée d'une population de 1330 femmes traitées par oestrogènes transdermiques associés à un progestatif. Les conclusions qui semblent se dégager de ces deux études sont que l'observance est excellente lorsque les femmes sont convaincues et qu'en cas d'abandon ce sont les saignements qui sont le plus souvent avancés comme justification. Lorsque la femme ne désire plus saigner, il existe également des adaptations de l'association oestro-progestative qui permettent de répondre à son souhait.

Parmi les effets secondaires, il faut faire la distinction entre ceux qui sont désagréables et ceux qui sont nuisibles.

Parmi les effets secondaires désagréables invoqués pour interrompre une substitution hormonale (Nachtigall 1994, Lopes et Mensier 1996), sont cités :

les pertes de sang (régulières ou non)

le gain de poids

la tension mammaire

le gonflement abdominal (ballonnement)

un syndrome prémenstruel

des nausées

des céphalées (migraines)

Après les pertes de sang, c'est bien souvent la crainte de prendre du poids qui est invoquée pour ne pas prendre ou pour arrêter une substitution hormonale : l'idée que les hormones font grossir est encore solidement répandue dans notre population. La prise de poids à l'âge de la ménopause est considérée comme très fréquente : c'est une réalité mal vécue. Les auteurs sont cependant unanimes pour considérer que cette prise de poids n'a rien à voir avec la ménopause proprement dite et donc avec la carence oestrogénique qui en est la conséquence (Schleinger et Pradignac 1993, Wing 1996). En fait, les femmes prennent en moyenne régulièrement du poids à partir de 20-25 ans et ceci jusqu'à 60-65 ans. Le gain moyen est de 2 kg par période de 6 ans. Il se réduit même à 1 kg par 6 ans à partir de 45 ans. Cette évolution pondérale est exactement la même sur le plan quantitatif chez la femme et chez l'homme (Scleinger et Pradignac 1993). L'exercice physique a un effet plutôt bénéfique : les femmes qui en font régulièrement maîtrisent mieux cette tendance à grossir (Schleinger et Pradignac 1993). Il existe cependant une différence majeure entre hommes et femmes : la graisse s'accumule au niveau abdominal (omental, mésentérique) chez les hommes et au niveau pelvien (cuisses et fesses) chez les femmes. Cette différence sexuelle est bien évidemment sous contrôle hormonal : les stéroïdes sexuels ont des récepteurs spécifiques au niveau des adipocytes (Schleinger et Pradignac 1993). Ces adipocytes ont des localisations différentes suivant qu'il s'agit d'oestrogènes ou d'androgènes. Après la ménopause, les femmes continuent de gagner du poids comme avant, ni plus ni moins. Mais à tous les âges, les variations individuelles sont considérables : ceci sous-entend vraisemblablement l'existence de populations différentes dont le poids corporel est influencé par des conditions particulières. A l'analyse des données de l'Université de Pittsburgh rapportée par Wing et coll. (1991), à la ménopause le gain de poids était de 2,25 kg en trois ans. Mais 20% des femmes prenaient plus de 4,5 kg et 3% des femmes perdaient plus de 4,5 kg, pendant la même période. La seule évolution réellement liée à la ménopause et à la carence en oestrogènes, concerne la répartition des graisses : la distribution de gynécoïde devient androïde (Schleinger et Pradignac 1993, Wing 1996).

La plupart des auteurs n'observent aucune augmentation significative de poids pendant la prise d'oestrogènes associés ou non à un progestatif et ceci même dans des études avec placebo (Schleinger et Pradignac 1993). Mais, ici également les variations individuelles sont énormes. Dans le futur, il s'agira de découvrir les causes d'une telle hétérogénéité : certaines femmes pourraient présenter des dispositions particulières à la prise de poids sous l'influence des oestrogènes. Quoi qu'il en soit la prescription d'oestrogènes exogènes n'est indiquée qu'en cas de carence en oestrogènes ovariens. Il faut rappeler à ce sujet que les bouffées de chaleur ne sont qu'un très mauvais marqueur d'une carence oestrogénique définitive. Ils représentent plutôt une manifestation de la pré-ménopause caractérisée par une forte instabilité de la sécrétion des oestrogènes. Certes, en pré- ménopause, la prise d'oestrogènes va faire disparaître les bouffées. Mais, si cette prise est maintenue de manière intempestive, les hormones exogènes s'ajoutant aux oestrogènes provenant d'une reprise d'activité ovarienne vont souvent donner des effets secondaires tout aussi mal vécus si pas plus que les bouffées de chaleur : mastodynie, bouffissure du visage, prise de poids, sensation de gonflement, céphalées, syndrome prémenstruel. Ces expériences négatives influencent très défavorablement l'acceptabilité.

Le syndrome prémenstruel est également invoqué comme raison pour interrompre une association oestro-progestative en post ménopause (Nachtigall 1994, Lobes et Mensier 1996). Mais dans ce cas, la plupart du temps, une solution peut être trouvée en changeant le type, la dose, la durée ou les modalités d'administration (continue ou séquentielle) du progestatif. Le message simpliste, parfois amplifié par certains médias, de la substitution hormonale généralisée et dépourvue de tout désagrément est in fine lui aussi très nuisible à l'acceptabilité. L'information en cette matière doit toujours être bien équilibrée et porter sur tous les aspects aussi bien positifs que négatifs.

Les effets secondaires nuisibles avérés de la substitution hormonale post-ménopausique concernent l'endomètre et dans une moindre mesure le système veineux. Les oestrogènes seuls augmentent environ huit fois le risque de cancer de l'endomètre (Nachtigall 1994). Cet effet secondaire nuisible est totalement aboli lorsqu'on associe aux oestrogènes un progestatif à une dose et pendant une durée adéquate (10-14 jours). Néanmoins, la simple allusion au cancer dans l'argumentation exprimée par le médecin peut suffire à orienter le choix vers le renoncement à une substitution hormonale. Des études récentes mentionnent une augmentation significative du risque thromboembolique (veineux) sous substitution hormonale (Daly et coll. 1996) : mais cette augmentation est extrêmement faible en valeur absolue (1/5000 femmes par an). Enfin, l'impact de la substitution hormonale post ménopausique sur l'incidence du cancer du sein reste aujourd'hui encore très imprécise. Si l'augmentation du risque est significative (Colditz et al. 1995), en valeur absolue, l'augmentation de l'incidence reste faible (Dupont et Page 1991). Néanmoins, cette incertitude est alimentée par des informations qui paraissent dans les médias chaque fois qu'un article sur le sujet est publié dans un journal scientifique en vogue. Ce battage médiatique influence d'une manière très négative l'acceptabilité de la substitution hormonale post-ménopausique et ceci d'autant plus que la population féminine concernée est à un âge où l'incidence du cancer du sein est en plein essor. Il convient d'insister sur l'intérêt du dépistage du cancer du sein qui sera d'autant plus facilement réalisé que la femme est prise en charge pour le suivi d'une substitution hormonale.

Si l'on désire améliorer l'acceptabilité de la substitution hormonale après la ménopause, il convient de :

Informer l'ensemble du corps médical et les femmes sur les bénéfices/risques et sur les modalités de la substitution hormonale .

Etablir un consensus en matière de bénéfices et de risques

Collaborer avec les médias de manière à ce qu'ils soient bien informé de l'évolution de ce consensus.

Tenir compte des effets désagréables et adapter la substitution hormonale en conséquence

Simplifier au mieux les modalités pratiques

Simplifier et rendre plus attrayants les conditionnements

En conclusion, si les progrès des connaissances en matière de ménopause et les progrès en matière de produits efficaces et sûrs ont été importants et rapides au cours de ces 10-15 dernières années, les avancées en matière d'acceptabilité sont restées particulièrement médiocres. Connaître les raisons de cette discordance et en tenir compte est essentiel si on veut espère faire évoluer le choix des femmes.

 

Références

1. CANO A. "Compliance to hormone replacement therapy". Maturitas 1995:, 20, 91-99.

2. SOLDIEZ G.A., HANKINSON S.E., HUNTER D.J., WILLETT W.C., MANSON J.E., STAMPFER M.J., HENNEKENS C., ROSNER B. et SPEIZER F.E. "The use of estrogens and progestins and the risk of breast cancer in postmenopausal women". N. Engl. J. Med., 1995: 332, 1589-1593.

3. DALY E., VESSEY M.P., HAWKINS M.M., CARSON J.L., GOUGH P. et MARSH S., "Risk of venous tromboembolism in users of hormone replacement therapy". Lancet, 1996: 348, 977-980.

4. DUPONT W.D. et PAGE D.L. "Menopausal estrogen replacement therapy and breast cancer". Arch. Int. Med., 1991: 151, 67.

5. LOPES P. et MENSIER A., "Evaluation de l'équilibre risque-bénéfice du traitement hormonal substitutif de la ménopause et éléments susceptibles de maximiser l'observance". J. Gyn. Obst. Biol. Reprod., 1996: 25, 694-698.

6. NACHTIGALL L.E. "Compliance with hormone replacement therapy : where we stand today". In The modern management of the menopause, BERG G. et HAMMAR M. (ed), The Parthenon Publishing Group, New York-London, 1994: pp. 439-443.

7. RAVNIKAR V.A. "Compliance with hormone therapy". Am. J. Obstet. Gynecol., 1987 : 156, 1332-1334.

8. SARREL L. et SARREL P.M. "Helping women to decide about hormone replacement therapy : approaches to counselling and medical pratices". In The modern management of the menopause, BERG G. et HAMMAR M. (ed), The Parthenon Publishing Group, New York-London, 1994: pp. 499-509.

9. SCHLIENGER J.L. et PRADIGNAC A. "Relations entre poids et ménopause". Rev. Fr. Gynécol. Obstet. 1993: 88, 291-295.

10. WING R. "Prevention of obesity in adults". In Progress in obesity research, Angel A., Anderson H., Bouchard C., Lau D., Leiter L. et Mendelson R. (ed), John Libbey & Company Ltd., London, 1996: pp. 489-494.

11. WREN B.G. et BROWN L. "Compliance with hormone replacement therapy". Maturitas 1991: 13, 17-21.

 

Questions de type QCM.

 

1. Quelle est la raison le plus souvent invoquée pour l'arret d'une substitution hormonale après la ménopause :

a) Les saignements

b) Le gain de poids

c) Tension mammaire

d) Nausées

e)Céphalées.

2. Après la ménopause

a) Le poids corporel augmente nettement en raison de la carence oestrogénique

b) Le poids corporel diminue

c) Le poids corporel moyen augmente de manière considérable lors de la prise d'une association oestroprogestative

d) Le poids corporel se redistribue avec accumulation de graisse au niveau abdominal

e) Le poids corporel se redistribue avec accumulation au niveau pelvien (fesses, cuisses)

3. Sur quel tissu ou système, les effets secondaires de la substitution hormonale post ménopausique, sont-ils bénéfiques ?

a) le sein

b) l'endomètre

c) le système veineux

d) le système cardio-vasculaire (artériel)

e) les adipolyses

4. Parmi les modalités suivantes, quelle est celle qui donne le moins de saignements (pseudo-règles)?

a) Progestatif en fin d'une période de prise d'oestrogènes per os suivie d'une période sans traitement.

b) Oestrogènes en continu avec un progestatif administré de manière séquentielle.

c) Association oestroprogestative en continu.

d) Séquences comprenant une période avec oestrogènes suivie d'une période avec progestatif.

e) Progestatif en fin d'une période de prise d'oestrogènes par voie transdermique suivi d'une période sans traitement.