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Titre: THM : quelle durée pour l'os et quelles conséquences pour le sein et le cœur ?
Année: 2004
Auteurs:
Spécialité: Gynécologie
Theme: Ménopause

THM : quelle durée pour l'os
et quelles conséquences
pour le sein et le cœur ?

C. JAMIN

Les bénéfices osseux du THM

Le traitement hormonal substitutif de la ménopause (THM) a sans aucun doute démontré son efficacité dans la prévention primaire et secondaire du risque de perte osseuse post-ménopausique ainsi que du risque fracturaire. Il a été démontré que les estrogènes administrés en début de ménopause prévenaient la perte osseuse post-ménopausique et qu'il s'agissait d'un maintien du contenu minéral osseux et d'une prévention de l'altération de la structure osseuse. Cet effet se poursuit tout au long de la prise du traitement et la perte osseuse reprend son rythme normal à l'arrêt de la substitution hormonale (2, 7).

Les femmes sous traitement ont un contenu minéral osseux supérieur à celles qui n'en ont jamais pris ou qui ont cessé d'en prendre. Si l'on compare à des femmes qui n'ont jamais pris de traitement, des femmes qui ont commencé ou tôt ou tard un THM, seules celles encore sous traitement au moment de l'évaluation ont un contenu minéral osseux différent de celui des femmes n'ayant jamais utilisé le traitement. En revanche les femmes ayant utilisé dans le passé un THS ont un contenu minéral osseux peu différent de celles n'en ayant jamais utilisé. Une petite différence doit être cependant notée : lorsque le traitement a été commencé tôt après le début de la ménopause, il persiste à distance un petit effet bénéfique (1).

Lorsqu'on compare le contenu minéral osseux des femmes en cours de traitement, on constate que celles qui ont commencé la prise d'hormones tout de suite après la ménopause ont un contenu minéral osseux sur tous les sites supérieur à celui des femmes ayant commencé le traitement à distance de la ménopause (8).

Le risque fracturaire est diminué chez les femmes en cours de traitement, que celui-ci ait été débuté tard ou tôt (2, 11). La diminution du risque fracturaire est cependant plus importante chez les femmes ayant débuté le traitement tôt après la ménopause (2,9). L'efficacité préventive du THS s'observe quel que soit le groupe de femmes étudié, en particulier la diminution du risque relatif de fracture est le même quel que soit l'âge, le poids, le statut tabagique, l'histoire des chutes et les antécédents personnels ou familiaux de fracture, la prise de calcium, l'utilisation d'un traitement hormonal subsitutif antérieur et le poids (11).

Bien évidemment ceci n'est vrai qu'en termes de risque relatif (RR) et en termes de risque attribuable, l'influence du RR augmentant avec les facteurs de risque de fracture classiques.

Après l'arrêt du traitement le bénéfice en termes de contenu minéral osseux de même qu'en termes de risque fracturaire, tant au niveau vertébral qu'osseux, semble disparaître rapidement.

Pour conclure on peut dire à ce jour que l'efficacité du THM en termes de contenu minéral osseux est d'autant plus important que le traitement a été commencé plus tôt et poursuivi sur une plus longue durée. Le bénéfice pour le contenu minéral osseux s'amenuise rapidement avec l'arrêt du traitement. Pour le risque fracturaire la diminution est elle aussi d'autant plus importante que le traitement a été débuté tôt et pris pendant longtemps. Cependant tant pour le contenu minéral osseux que pour le risque fracturaire, le traitement reste efficace quel que soit l'âge auquel il a été débuté, y compris pour des débuts très tardifs.

Ceci peut s'expliquer ainsi : il existe en début de ménopause une destruction de la micro architecture osseuse, ce qui entraîne une baisse du contenu minéral osseux et une fragilisation de l'os. Sous traitement hormonal les estrogènes ralentissent fortement cette altération de la micro-architecture ainsi que la diminution de la charge calcique. Or si le traitement est débuté tardivement la destruction de la micro-architecture a déjà eu lieu et est irréversible. Le traitement hormonal substitutif n'agit alors plus que sur la diminution de la charge caicique et la poursuite de la destruction de la trame protéique. Ainsi un traitement débuté tardivement diminue le risque fracturaire mais ne sera jamais aussi efficace que si, ayant été débuté tôt, il avait prévenu les altérations irréversibles de la structure osseuse.

Il existe par ailleurs des effets anti-fracturaires des traitements hormonaux de la ménopause, par d'autres biais que la structure osseuse ou son contenu en calcium. La diminution du risque fracturaire à distance de la ménopause est beaucoup trop rapide pour être expliquée par ces simples phénomènes structurels.

Ainsi, pour être efficace en termes osseux, le THS doit être débuté tôt et poursuivi très longtemps.

Les risques du THS

Les risques du traitement hormonal substitutif dépendent de l'âge et de la durée de celui-ci.

Le risque de thrombose veineuse est maximum en termes de RR en début de traitement, mais se poursuit tout au long de sa durée, pour peu que l'estrogène soit administré par voie orale. Comme le risque spontané est relativement faible à l'âge de 50 ans, l'augmentation du risque attribuable, hors des femmes à risque, est modeste jusqu'à l'âge de 65 ans. Au-delà l'augmentation du risque spontané rend l'augmentation du RR beaucoup moins acceptable. 65 ans est précisément l'âge auquel le THM est efficace en termes de diminution du risque fracturaire vertébral. En première approche on peut donc dire que si un THS est prescrit pour la prévention fracturaire, l'utilisation des formes orales est contre-indiquée au-delà d'un certain âge, âge mal défini mais probablement supérieur à 60 ans.

Le risque coronarien n'a été démontré qu'avec l'estrogénothérapie orale administrée en association avec du médroxyprogestérone acétate, et même s'il existe des arguments pour penser que cette augmentation du risque serait moindre ou inexistante avec les formes non orales et/ou avec d'autres progestatifs, rien ne permet aujourd'hui de l'affirmer. Le risque coronarien comme le risque vasculaire cérébral est maximum en début de traitement, mais là encore le risque spontané augmentant avec l'âge, le risque attribuable est relativement faible chez les femmes récemment ménopausées, mais devient préoccupant au-delà d'un certain âge, en particulier le risque d'accident vasculaire cérébral est non acceptable chez des femmes au-delà de 65 ans avec le traitement testé, oestrogènes conjugués équins oraux plus médroxyprogestérone acétate.

Si on intègre ceci dans le risque global, l'augmentation du risque artériel, coronarien et vasculaire cérébral, est maximum en termes de risque attribuable à l'âge où le traitement est efficace en termes de risque ostéoporotique.

Le cancer du sein

Le THM augmente les découvertes de cancer du sein globalement de manière relativement mineure, avec un RR à 1,2.

Il n'y a à ce jour pas de raison de penser que le risque est différent suivant l'estrogène utilisé, sa voie d'administration ainsi que le progestatif utilisé.

Mais là, contrairement à ce qui touche au risque vasculaire, le risque relatif augmente avec la durée du traitement.

L'augmentation du risque disparaît rapidement à l'arrêt du traitement : il est donc probable qu'il s'agit d'un phénomène de promotion de cancers existants. Ainsi comme le risque spontané de cancer du sein augmente avec l'âge, la révélation de ces cancers par stimulation exogène augmente elle aussi logiquement avec l'âge. Globalement le RR est faible mais il semble que sur de longues durées de traitement (7 à 10 ans), le RR devient élevé, induisant de ce fait un risque attribuable élevé.

On manque de données sur l'influence des traitements sur de plus longues durées. En effet s'il s'agit bien d'un effet de promotion, il serait logique de constater une diminution après un certain temps. Cette diminution, possible d'après certains travaux, est cependant loin d'être prouvée.

L'influence des traitements sur la mortalité globale par cancer du sein est aujourd'hui encore objet de débats. Il reste admis, malgré les récents résultats de l'étude WHI, que les cancers découverts seraient de forme histologique mieux différenciée et de meilleur pronostic.

Ainsi le risque de cancer du sein en termes de découverte devient non acceptable pour des durées compatibles avec une protection osseuse.

Pour conclure, on se trouve donc face à ce paradoxe (4, 5) : le THM a une efficacité prouvée vis à vis de la prévention de la perte osseuse et du risque fracturaire, à la condition que celui-ci soit débuté tôt et poursuivi longtemps. Le risque est diminué même s'il est commencé de manière tardive. Si le traitement est commencé tôt et poursuivi longtemps, les bénéfices osseux sont à terme obérés par l'augmentation du risque attribuable en termes vasculaires et par l'augmentation des risques relatifs et attribuables de cancer du sein. Si le traitement est commencé tard son efficacité anti-fracturaire existe même si elle est moindre, mais dans ce cas c'est l'induction du traitement qui devient dangereuse en termes vasculaire, sachant que nous disposons de peu de données pour le sein, même si dans l'étude WHI les traitements de courte durée chez les femmes d'un âge avancé ne semblent pas augmenter le risque de cancer du sein.

Y a-t-il d'autres stratégies ?

Le THM est efficace dans la première partie de la ménopause sur la symptômalogie ménopausique et sur la préservation de la micro-architecture osseuse. Pour peu que les traitements soient bien choisis et les terrains sélectionnés, il ne semble pas y avoir d'inconvénient majeur à l'utilisation de ces traitements hormonaux en début de ménopause sur des durées de 5 à 7 ans. L'arrêt du traitement fait disparaître le bénéfice osseux, il faut donc chez les femmes à risque trouver une solution ultérieure.

Le raloxifène donne les mêmes inconvénients au niveau veineux que le THM oral et on ne sait rien sur son influence sur les risques artériels. Il n'a pas d'effet néfaste, même au contraire, sur le risque mammaire. Malheureusement ce traitement n'a démontré d'efficacité que sur les fractures vertébrales : il pourrait donc malgré tout représenter une réponse au problème posé en relais chez les femmes n'ayant qu'un risque vertébral (10).

Les bisphosphonates ont eux démontré une efficacité au niveau fémoral et vertébral en prévention de la perte osseuse, y compris avec de faibles doses, et en diminution du risque fracturaire avec les doses classiques. Ils pourraient représenter une solution chez les femmes chez qui on arrête un THM après la durée définie ci-dessus chez les femmes à risque osseux, évalué sur la mesure du contenu minéral osseux. Cependant nul ne sait quelles seraient les conséquences de l'utilisation au-delà de 10 ans de ce type de traitement, donc statistiquement au-delà de 65 ans. Même si leur effet rémanent est supérieur à celui du THS, l'arrêt des biphosphonates à 65 ans fera à terme perdre tout effet protecteur osseux. Il y a donc une nécessité urgente de poursuivre l'évaluation de ces traitements sur de très longues durées, en particulier en relais du THM.

La tibolone

La tibolone pourrait elle être proposée en début de ménopause à la place du traitement hormonal classique ou en relais de celui-ci. Elle est en effet efficace sur la symptômatologie ménopausique. La tibolone prévient la perte osseuse post-ménopausique au même titre que les traitements estrogéniques et représente donc indiscutablement un outil dans la prévention primaire (10). Des travaux sur le risque fracturaire sont en cours mais aujourd'hui ce traitement n'est pas proposé en prévention secondaire ou primo-secondaire, à savoir chez les femmes qui ont un contenu minéral osseux très bas. Certains arguments et études suggèrent que ce traitement n'aurait pas les mêmes inconvénients mammaires que le traitement hormonal classique, ce qui permettrait de le poursuivre bien au-delà des durées admises aujourd'hui pour le THM. Les travaux disponibles sur le risque veineux ne nous donnent pas les mêmes inquiétudes qu'avec le THM oral. Nous manquons en revanche de résultats sur le risque vasculaire artériel, coronarien et vasculaire cérébral. Les résultats seront certainement disponibles dans les critères secondaires des études en cours sur l'ostéoporose et le cancer du sein.

La tibolone pourrait donc représenter un traitement alternatif intéressant pour la prévention du risque fracturaire, grâce à une utilisation de plus longue durée.

Ainsi la prise en charge préventive du risque d'ostéoporose est aujourd'hui encore ouverte à discussion (6). Le THM, soit estro-progestatif classique, soit tibolone, peut être utilisé dans la prévention de l'altération de la micro-architecture osseuse et de la baisse du contenu calcique en début de ménopause. Le traitement estroprogestatif devra être interrompu au fur et à mesure que les facteurs de risque vasculaire et mammaire apparaissent : un relais est donc nécessaire, soit par le raloxifène, soit par les biphosphonates, sachant qu'aujourd'hui ni l'un ni l'autre ne représentent de solution validée sur de très longues durées de traitement. Il est possible que la tibolone puisse être poursuivie bien au-delà des durées admises aujourd'hui pour le traitement estroprogestatif, mais il faut attendre les résultats des études en cours pour pouvoir être affirmatif.

Bibliographie

[1]   Bagger Y, Tanko LB, Alexandersen P et al : Short courses of hormone replacement treatment in healthy women have long-term preventive effects on bone mass and osteoporotic fractures. 30th European Symposium on Calcified Tissues, Rome, Italy, 8-12 May 2003-11-03

[2]   Cauley J, Zmuda J, Ensrud K et al : Timing of estrogen replacement therapy for optimal osteoporosis prevention. J Clin Endocrinol Metab 2001; 86: 5700-5

[3]   Grady D, Cumings S: Postmenopausal hormone therapy for prevention of fractures. How good is the evidence? JAMA, 2001; 285: 2909-10

[4]   Mc Lennan A, Sturdee D: Is hormone therapy still an option for the management of osteoporosis? Climacteric 2003; 6: 89-91

[5]   Miller E: Therapeutic options: an evidence-based approach to prevention and treatment of osteoporosis. Int J Fertil 2003; 48: 122-6

[6]   NIH : Osteoporosis prevention, diagnosis, and therapy. JAMA 2001; 285: 785-95

[7]   PEPI : Bone mass response to discontinuation of long-term hormone replacement therapy. Arch Intern Med 2002; 162: 665-72

[8]   Schneider D, Barrett-Connor E, Morton D : Timing of postmenopausal estrogen for optimal bone mineral density. JAMA 1997; 277: 543-7

[9]   Torgerson D, Bell-Syer S : Hormone replacement therapy and prevention of nonvertebral fractures. JAMA 2001; 285: 2891-97

[10]   Tremollieres F : Hormonothérapie substitutive et traitements apparentés dans la prévention de l'ostéoporose : données actuelles. Lettre Rhumatol septembre 2003 :2-5

[11]   WHI : Effects of estrogen plus progestin on risk of fracture ans bone mineral density. JAMA 2003; 290: 1729-38.

   THM : QUELLE DURéE POUR L'OS ET QUELLES CONSéQUENCES POUR LE SEIN ET LE CœUR ?   333

334   C. JAMIN

   THM : QUELLE DURéE POUR L'OS ET QUELLES CONSéQUENCES POUR LE SEIN ET LE CœUR ?   335

336   C. JAMIN

   THM : QUELLE DURéE POUR L'OS ET QUELLES CONSéQUENCES POUR LE SEIN ET LE CœUR ?   337

338   C. JAMIN