BILAN
AVANT UN TRAITEMENT INDUCTEUR
DE L'OVULATION HORS FIV
Alain AUDEBERT
IGF1-35,
rue Turenne-33000 Bordeaux
En pratique quotidienne, la prise en charge d'un couple consultant pour infertilité
repose sur des règles bien établies au fil des progrès
de nos connaissances et des diverses recommandations établies soit par
des groupes d'experts soit par diverses autorités.
Un
éclairage nouveau sur la validité de nos pratiques a été
apporté par la prise en compte des données de l'évidence
basée sur les preuves (Evidence-Based Medicine ou EBM) ; le rationnel
principal de cette approche scientifique est que les décisions médicales
basées sur l'évidence sont meilleures pour les patientes et plus
satisfaisantes pour les praticiens
(1).
Enfin,
on ne saurait aussi se soustraire aujourd'hui aux risques et aux conséquences
économiques de nos décisions diagnostiques ou thérapeutiques,
qui doivent conduire à les faire précéder d'une information
objective, loyale et complète.
Quand
on se trouve au moment de prescrire un traitement d'induction de l'ovulation,
il est logique de supposer que déjà les principales composantes
de la fertilité du couple ont été évaluées
et qu'un diagnostic correct du trouble ovulatoire a été établi.
Nous
n'aborderons donc pas, dans ce contexte, la démarche diagnostique des
troubles ovulatoires. De même, les aspects psychologiques, en particulier
le stress induit par l'infertilité (avec d'ailleurs des études
aux résultats contradictoires), ne seront pas non plus envisagés,
même si, en pratique, ils doivent bine sûr être pris en compte.
Après
avoir rappelé quelques notions générales sur l'infertilité,
les divers examens du " bilan de base " seront analysés brièvement,
en rappelant les données les plus récentes. Ce bilan de base doit
conduire essentiellement à affirmer :
- le bon fonctionnement du col
- la bonne perméabilité tubaire
- la normalité de la cavité utérine
- l'absence d'anomalie pelvienne à type d'endométriose ou d'adhérences
- la normalité du sperme
NOTIONS
GENERALES SUR L'INFERTILITE
Nous
limiterons à quelques données bien classiques…..parfois oubliées
!
1-Définition
: " savoir attendre et donner ses chances au temps " :
L'infertilité
est habituellement définie comme l'impossibilité pour un couple
à concevoir en 12 ou 24 mois (selon les pays), malgré des rapports
sexuels non protégés réguliers.
Si cette définition repose sur des données pratiques anciennes,
elle est aujourd'hui confortée par des données épidémiologiques
et celles en termes de probabilité.
Dans
l'espèce humaine, la fécondité moyenne (ou probabilité
à procréer) par cycle est de l'ordre de 20 à 25 % ; elle
varie, bien sûr d'un couple à l'autre, avec des extrêmes
allant de 0 à 65 % (2).
En retenant le chiffre de 25 %, pour un couple fertile (ayant 2 à 3 rapports
par semaine), le pourcentage cumulatif moyen de grossesse augmente avec le temps
: il passe de 25 % pour le premier mois à 80 % au douzième et
atteint 90 % au dix-huitième mois (3).
C'est dire qu'un délai minimum d'attente (12 à 24 mois selon l'âge)
doit être respecté avant de mettre en uvre un bilan, à
condition qu'aucun signe d'appel évocateur ne soit retrouvé dans
les antécédents ou à l'examen clinique.
2-Rôle
de l'âge : la fécondité baisse significativement après
35 ans :
Plusieurs
études méthodologiques démontrent le déclin de la
fécondité avec l'âge.
Ce déclin est peu significatif avant 35 ans, mais devient marqué
après 40 ans.
Sans
rappeler toutes les études, on peut rappeler la démonstration
claire apportée par le modèle des femmes recourrant à l'IAD
(4) ; dans une cohorte de 2193 femmes, après 12 cycles, le taux observé
de grossesse passe de 73 % avant 25 ans à 54 % après 35 ans (seulement
16 femmes avaient plus de 40 ans).
Une étude similaire plus récente réalisée aux Pays-Bas
(5), retrouve des différences comparables puisque le taux de grossesse
cumulé à 12 mois passe de 70-75 % pour les femmes de moins de
35 ans à 49 % pour celles âgées de plus de 35 ans.
S'il
est difficile d'intervenir dans le projet d'enfant des couples, il est important
de les informer sur les risques de les retarder au-delà de 35 voire 40
ans.
3-Données
épidémiologiques :
Il
est estimé qu'environ 14 % des couples consultent en France pour désir
d'enfant, mais, probablement, seulement 5 % d'entre eux présentent une
infertilité (6).
A l'inverse, on peut supposer que certains couples réellement infertiles
ne viennent pas consulter ; c'est dire que, comme dans des études effectuées
dans d'autres pays, on peut admettre que près de 15 % sont concernés
par un problème, réel ou non d'infertilité, soit environ
400.000 couples chaque année en France.
Il
est aussi classique d'attribuer la responsabilité de l'infertilité
à la femme dans 30 % des cas, à l'homme dans 30 % des cas et aux
deux à la fois dans 25 % autres ; aucune cause n'est retrouvée
les 15 % restants (6).
C'est dire que la découverte d'une cause ne présume de l'absence
d'autre facteur d'hypofertilité associée.
Les
différentes causes attribuées d'infertilité varient selon
les types de recrutement et les caractéristiques des populations concernées.
Nous
avons résumé sur le tableau I. les données de plusieurs
études pour deux pays européens comparables.
Pour l'étude de Collins, il faut retenir que l'infertilité est
inexpliquée dans près de 26 % des cas, une explication claire
est retrouvée chez 22 % des couples, mais que pour les autres couples
les anomalies identifiées peuvent représenter davantage une coïncidence
que la cause réelle de l'infertilité (7).
Tableau
I. : Causes attribuées d'infertilité.
Causes
identifiées |
Thonneau (6)
1219 couples
%
|
Collins
(7)
2198 couples
%
|
|
Inexpliquée |
15
|
25,6
|
Tubaire
(total) |
29
|
23
|
-Occlusion
bilatérale |
|
9,6
|
-Autre
|
|
13,4
|
Ovarienne
(total) |
50
|
17,7
|
-Trouble
ovulatoire |
|
13,5
|
-Aménorrhée
|
|
4,2
|
Endométriose
(total)
|
15
|
6,6
|
-Stades
I-III |
|
5,4
|
-Sade
IV |
|
1,2
|
Cervicale |
10
|
-
|
Masculine
(total) |
|
23,9
|
OAS |
|
16,8
|
Azoospermie
|
|
7,1
|
Autre |
-
|
3,2
|
|
4-Incidence
des infections à Chlamydia trachomatis :
Jusqu'au
milieu des années 90, les séquelles des infections à chlamydiae
étaient pourvoyeuses de près de 70 % des stérilités
tubaires : c'est ce que nous avons observé dans une série personnelle
de 265 plasties tubaires réalisées de 1988 à 1994.
Les
programmes de dépistage, dans les populations à risque (adolescentes…),
mis en place dans certains pays scandinaves, ont permis de réduire très
significativement l'incidence des séquelles ultérieures, à
type de grossesse extra-utérine ou de stérilités tubaires.
En effet, un traitement médical, lorsque chlamydia trachomatis est encore
localisée seulement au niveau cervical, permet d'éviter la propagation
de cet agent vers les voies génitales supérieures et les conséquences
que nous avons rappelées ; cette recherche de l'identification au niveau
cervical doit être particulièrement active car près de 70
% de ces infections sont asymptomatiques.
Dans
notre pays, sans que des données épidémiologiques soient
malheureusement établies, il semble bien, qu'au cours de ces dernières
années, moins de positivités à chlamydia, trachomatis soient
rencontrées dans les populations de stérilités tubaires.
Ceci est probablement le résultat d'une recherche plus précoce
de cette infection et de l'utilisation du traitement médical approprié.
Pour
la prévention des séquelles à long terme, il est intéressant
à noter qu'une conférence de consensus du Royal College of Obstetricians
and Gynaecologists (8) recommande l'utilisation d'azithromycine en dose unique
(1 gr par voie orale). Bien que cet agent ne soit pas plus efficace que la doxycycline,
et deux fois plus coûteux, il s'avère plus rentable en termes de
prévention et de coût final, essentiellement en raison d'une meilleure
compliance.
5-Facteurs
liés au mode de vie :
Ils
sont importants à prendre en considération car ils peuvent contribuer
à réduire la fécondité.
Parmi
les principaux à évaluer figurent :
-le
rôle du tabagisme (20 cigarettes par jour) sur la fertilité
est bine connu ; une large étude de cohortes plus récente a
montré que l'odds ratio (OR) d'infertilité primaire était
de 1,31 (9).
-pour la consommation d'alcool, les données sont moins consistantes.
Pour l'homme, l'OR pour le risque d'infertilité, pour 5 ou plus boissons
par semaine, est de 1,7 (10).
-l'importance du poids est maintenant bien connue.
6-Synthèse
:
En
pratique il faut donc :
-s'assurer de la réalité de l'infertilité ;
-savoir attendre, dans certains cas, et donner au temps ses chances ;
-tenir compte de l'âge pour organiser dans le temps la stratégie
diagnostique ;
-ne pas ignorer les causes associées d'hypofertilité ;
-ne pas négliger les facteurs liés au mode de vie.
ANALYSE
CRITIQUE DES EXAMENS COMPLEMENTAIRES
Nous
n'envisagerons que quelques examens évaluant les autres fonctions que
celle de l'ovaire. Nous ne reviendrons pas sur les notions techniques ou sur
les performances classiques ; mais, nous mettrons volontiers l'accent sur les
aspects controversés, à partir des analyses importantes les plus
récentes et les mieux validées (11) ; afin de générer
des réflexions critiques sur nos pratiques courantes et, si possible,
d'optimaliser nos comportements.
Comme nous l'avons déjà formulé, les examens permettant
d'aboutir au diagnostic étiologique d'un trouble ovulatoire ne serons
pas abordés, y compris la biopsie endométriale.
1-Sérologie
à chlamydia trachomatis :
Aujourd'hui
dans les pays industrialisés, Chlamydia trachomatis est probablement
encore l'agent encore le plus souvent responsable des lésions tubaires
associées à une infertilité ou une grossesse ectopique.
Le
dosage dans le sang des anticorps de chlamydia trachomatis apparaît dès
lors comme un marqueur d'autant plus intéressant, pour le dépistage
de cet agent, que sa prévalence est grande dans la population explorée
; la difficulté est de définir la valeur seuil la plus appropriée.
Une
analyse des données disponibles a clairement démontré la
corrélation entre la sérologie positive à chlamydia trachomatis
(SCT) et une infertilité associée à des altérations
tubaires (6-12).
Une
revue plus récente de la littérature (9 études) montre
que la sensibilité varie de 30 à 88 % et la spécificité
de 45 à 100 %, les valeurs seuils retenues variant selon les études
de 1/8 à 1/32 (7-13).
Une
étude prospective, portant sur 227 patientes consultant pour infertilité,
a recherché quelle était la valeur prédictive de la SCT
pour le dépistage des lésions tubaires confirmées par une
coelioscopie (8-14). Le seuil optimal, pour un compromis entre la sensibilité
et la spécificité, a été calculé comme étant
de 1/16.
La
sérologie à chlamydia trachomatis (SCT), même si on accepte
l'idée que son incidence décroît actuellement, est donc
toujours considérée comme un marqueur intéressant pour
le dépistage des lésions tubaires. Sa détermination est
nécessaire avant la réalisation d'une hystérographie, car,
en cas de positivité, une antibioprollylaxie adaptée est recommandée.
Ce
qu'il faut retenir en pratique:
-ne pas oublier de contrôler la sérologie chlamydia trachomatis
;
-elle est indispensable avant de réaliser une HSG ;
-c'est un bon marqueur d'atteinte tubaire ;
-la valeur seuil recommandée est de 1/16.
2-Le
spermogramme :
Nous
résumerons les principales analyses et recommandations effectuées
par une conférence de consensus (8).
Aucune
anomalie spécifique du sperme ne peut, avec précision, prédire
le potentiel de fécondation et de conception ; en effet, la production,
le stockage et le transport du sperme sont de nature multi factorielle ; par
ailleurs le processus de la fécondation est un phénomène
très complexe.
Cependant,
une interprétation " compréhensive " de l'analyse du
sperme, selon les critères définis par l'OMS (15), est un élément
essentiel de l'évaluation initiale d'un couple infertile ; les critères
définis par l'OMS représentent les variations retrouvées
chez des hommes sains et ne prétendent pas avoir une valeur prédictive
de conception (16).
Compte
tenu de l'important caractère opérateur dépendant de cet
examen, une standardisation, par le laboratoire, de l'analyse de routine du
sperme est indispensable.
Il est donc nécessaire de s'assurer que l'examen a bien été
effectué dans un laboratoire appliquant ce principe.
En
raison de la grande variabilité, dans le temps des caractéristiques
du sperme, deux analyses paraissent souhaitables à 3 à 4 semaines
de distance.
L'interprétation
de l'analyse du sperme doit aussi tenir compte, pour un couple particulier,
de la durée de l'infertilité, de son caractère primaire
ou secondaire et de l'âge de la femme, facteurs les plus importants pour
prédire les chances futures de conception.
Malgré
toutes ces restrictions, il faut avoir bien des repères pour admettre
la "normalité" du sperme, ou au contraire pour poursuivre les
investigations.
Les valeurs seuils retenues par l'OMSet l'ASMR (2001) sont rappelées
sur le tableau II.
Elles sont basées sur les données de la littérature. Ces
valeurs ne prétendent pas définir les valeurs minimales compatibles
avec une conception ; en effet, des hommes ayant des valeurs en dehors de celles
de référence peuvent être fertiles et inversement.
Tableau
II. : Valeurs de référence du sperme retenues par l'OMS et l'ASMR
(2001)
-volume
|
1,5
à 5,0 ml. |
-Ph
|
>
7,2 |
-Concentration
|
>
20 millions / ml. |
-Nombre
total
|
>
40 millions/éjaculat |
-mobilité
progressive
|
>
50 % |
-forme
typiques
|
>
30 à 50 % |
-cellules
rondes |
<
1 millions |
Ce
qu'il faut retenir en pratique :
-le grand caractère opérateur dépendant de cet examen ;
-la nécessité de le faire pratiquer dans un laboratoire dit "
de référence " ;
-l'utilité de faire pratiquer au moins 2 évaluations ;
-la faible valeur prédictive de conception de cette analyse prise isolément.
3-Le
test post coïtal :
Le
Test Post Coïtal de Hühner (TPC) reste un examen classique dans le
bilan de base d'une infertilité.
Sa
subjectivité inhérente explique sa mauvaise reproductibilité
et les grandes variations entre des observateurs différents (17).
On
considère que le test est normal quand au moins 10 spermatozoïdes
sont retrouvés par champ à haut grossissement, avec au moins 50
% d'entre eux ayant une mobilité normale. En fait, le calcul de la valeur
seuil prédictive montre que le seuil le plus discriminant est de 1 spermatozoïde
par champ.
Quand
on étudie la prédictibilité, en termes de conception, du
TPC, sa valeur discriminative est très faible (18).
Sa
sensibilité varie de 10 à 90 % et sa spécificité
de 30 à 97 %. La valeur prédictive d'un résultat normal
varie de 32 à 92 % et celle d'un résultat anormal de 58 à
85 %. En fait, le calcul de la valeur seuil prédictive, vis-à-vis
de la probabilité de conception ultérieure, montre que le seuil
le plus discriminant est de 1 spermatozoïde par champ…..
Malgré
toutes ces réserves, dans le contexte d'une induction de l'ovulation,
la réalisation de ce test est nécessaire, dans la mesure où
son résultat est susceptible de modifier le choix du protocole thérapeutique.
Ce
qu'il faut retenir en pratique :
-la faible valeur prédictive de conception du TPC ;
-sa médiocre reproductibilité ;
-mais, son utilité avant une induction de l'ovulation.
4-L'échographie
et l'échosonographie :
L'échographie
transvaginale est souvent l'examen de première intention dans
le bilan d'une infertilité ovarienne, en raison de son innocuité
(non douloureuse, absence d'irradiation, absence de manuvre endo-utérine…),
de son coût raisonnable et des renseignements qu'elle est susceptible
d'apporter, non seulement sur l'évaluation de l'utérus mais aussi
des annexes (19).
L'utilisation
des sondes endo vaginales a représenté une étape importante
dans l'évolution technique de l'échographie ; il est encore est
trop tôt pour évaluer réellement l'apport de l'échographie
2D et 3D au plan pratique. Elle est réservée pour l'heure, à
quelques opérateurs, en sachant qu'elle est capable d'apporter d'utiles
précisons supplémentaires.
Dans
une étude portant sur 200 patientes infertiles ayant subi une échographie
puis une hystéroscopie le cycle suivant, l'échographie a été
évaluée (20). Sa sensibilité fut de 98,9 % et sa VPP de
94,3 %. La spécificité (31,3 %) et la VPN (71,4 %) ont moins de
signification, en raison du faible nombre de patientes sans anomalie.
Une étude similaire réalisée dans une population de femmes
ayant une stérilité ou primaire ou 3 échecs de FIV a donné
une sensibilité, une spécificité, une VPP et une VPN respectivement
de 100 %, 96,3 %, 91,3 % et 100 % (21). Pour les auteurs de cette étude,
l'échographie permet de sélectionner les patientes pour lesquelles
une hystéroscopie est indiquée.
L'hystérosonographie
est un complément à l'échographie avec infusion
de sérum salé dans la cavité utérine Cette technique
a été rapportée dès 1992 (22).
Dans
une série de 44 patientes devant subir une FIV, l'hystérosonographie,
au sérum physiologique, en comparaison avec l'hystéroscopie (considérée
comme examen de référence), a montré une sensibilité
de 87,5 %, une spécificité de 100 %, une VPP de 100 % et une VPN
de 91,6 % (23).
Une autre étude réalisée chez 83 femmes infertiles a comparé
les résultats de l'HSG (effectuée dans les 6 mois précédents)
de l'hystérosonographie et de l'hystéroscopie et de la clioscopie,
pour déterminer la valeur de l'hystérosonographie pour évaluer
la cavité utérine et la perméabilité tubaire (24).
L'hystérosonographie s'est révélée en accord avec
les données de l'hystéroscopie dans 72,2 % des cas.
Cette technique offre donc de bonnes performances diagnostiques alliant les
avantages de l'HSG et ceux de l'échographie.
Une étude randomisée plus récente a porté sur 41
femmes infertiles et comparé l'HSG, l'hystérosonographie et l'hystéroscopie
ambulatoire (25). Il n'a été retrouvé aucune différence
significative en ce qui concerne l'évaluation de la cavité utérine.
Les scores douloureux de l'HSG et de l'hystéroscopie étaient significativement
plus élevés.
Pour certains elle permet de dépister certaines occlusions tubaires.
L'hystérosonographie apparaît donc comme un examen performant pour
l'évaluation initiale de la cavité utérine chez une femme
infertile. Sa technique est simple à réaliser et l'examen apparaît
moins douloureux.
Ce
qu'il faut retenir en pratique :
-ce mode d'imagerie, peu invasif, est performant pour l'évaluation de
la cavité utérine, du myomètre et des ovaires ;
-l'hystérosonographie améliore l'évaluation des pathologies
endo-cavitaires ;
-il doit être réalisé en première intention.
5-L'hystérographie
:
L'hystérographie
(HSG) garde toute sa valeur dans la mesure où on connaît ses limites,
la nécessaire rigueur de sa réalisation et ses risques, comme
pour toutes manuvres endo utérines. Elle fait toujours partie des
examens dits de base du bilan d'infertilité.
Elle
est réalisée en période pré ovulatoire et divers
temps (réplétion, évacuation…) sont réalisés
systématiquement.
Les
limites de l'HSG concernent essentiellement la partie proximale de la
trompe et les adhérences péri annexielles, expliquant pourquoi
les concordances entre cet examen radiologique ambulatoire et la clioscopie
varient de 55 à 81 % selon une analyse de la littérature (26).
Mais ces deux explorations sont opérateur dépendantes et les discordances
concernent essentiellement ces deux localisations des anomalies potentielles.
Enfin, il faut aussi admettre qu'aujourd'hui, probablement, moins de rigueur
est apportée tant à sa réalisation qu'à son interprétation
…C'est pourquoi, pour les occlusions tubaires distales, nous pensons que
cet examen garde toute sa valeur et doit être réalisé avant
d'envisager une coelioscopie ; en effet, il permet de vérifier la normalité
de la portion proximale et d'apprécier la présence de plis muqueux,
éléments déterminants pour la décision opératoire.
À l'inverse, en cas d'altération bifocale ou de lésions
sévères de l'ampoule tubaire, une solution non chirurgicale peut,
dans certains cas, être envisagée d'emblée.
Une
méta analyse, portant sur 4179 patientes issues de 20 séries publiées,
montre qu'en prenant les données de la coelioscopie comme référence,
l'HSG a une sensibilité de 65 % et une spécificité de 83
% pour le diagnostic des lésions tubaires (27).
Une
étude multicentrique plus récente, portant sur 794 femmes ayant
eu à la fois une HSG et une coelioscopie, retrouve une sensibilité
de 81 % et une spécificité de 75 % pour
l'HSG quand les anomalies tubaires identifiées lors de la coelioscopie
sont prises comme référence (28). Cette étude montre aussi
que quand l'HSG est considérée comme normale, 5 % des patientes
ont quand même une occlusion tubaire bilatérale à la coelioscopie.
Les
risques de l'HSG sont essentiellement infectieux et surviennent dans
environ 0,5 à 2,9 % des cas. La présence d'une sérologie
à chlamydia positive et surtout celle d'un hydrosalpinx augmentent fortement
les risques ; dans ces cas-là, une antibioprophyllaxie nous paraît
être une indispensable précaution.
Ce
qu'il faut retenir, en pratique :
-si la sérologie à chlamydia trachomatis est positive, il faut
prescrire une antibioprophyllaxie systématique pour sa réalisation
;
- sa sensibilité varie de 65 à 81 % et sa spécificité
de 75 à 83 % ;
-quand l'HSG montre une anomalie, dans 70 % des cas, la coelioscopie se révèle
normale;
-quand L'HSG est normale, la coelioscopie ne trouve une anomalie que dans 4
% des cas.
-cet examen est donc indiqué immédiatement en cas de facteur de
risque ou d'anomalie à l'examen clinique ;
-il peut être différé dans les autres cas et réalisé
plus ou moins rapidement en fonction de l'âge et de la durée de
l'infertilité ;
-elle doit bien sûr être réalisé avant d'entreprendre
un traitement inducteur de l'ovulation.
6-L'hystéroscopie
:
L'hystéroscopie
est l'examen de référence en matière d'exploration de la
cavité utérine. Elle est seule capable de visualiser certaines
lésions endométriales non exhubérantes, comme les endométrites
ou les états dystrophiques. Elle permet aussi d'observer les ostiums
tubaires et le canal endocervical. Enfin, elle permet de réaliser divers
gestes opératoires sous contrôle visuel (biopsie dirigée,
cure de synéchies, ablation de polype, résection de myome……).
Au
plan technique, la miniaturisation des optiques rigides ou l'utilisation d'hystéroscope
flexible de petit calibre ont permis de réaliser cet examen sous anesthésie
locale de manière ambulatoire. Actuellement, il existe une tendance pour
recommander le sérum physiologique, plutôt que le CO2. Une étude
comparant le milieu de distension, dans trois groupes de patientes (stérilité
primaire, stérilité secondaire et réperméabilisation
d'une stérilisation), est intéressante. Aucune différence
sur l'incidence des anomalies observées n'est retrouvée entre
les trois groupes ; les incidences varient aussi selon le milieu de distension
utilisée et sont respectivement pour le Dextran et le CO2 et les 3 groupes
de 29 %, 41 % et 33 % et 7,2 %, 11 % et 6 % (29).
Une
étude récente, portant sur 106 femmes pré ménopausiques,
a comparé les performances diagnostiques de l'échographie vaginale,
de l'hystérosonographie, de l'IRM et de l'hystéroscopie (30).
Les résultats globaux figurent sur le tableau IV. L'hystéroscopie
est supérieure pour les lésions endométriales. L'IRM et
l'échographie sont supérieures pour l'évaluation des myomes
sous-muqueux, ce qui n'est pas étonnant.
Tableau
IV : Performances de 3 moyens d'exploration (selon Dueholm (30))
|
Echographie
|
Echosono.
|
IRM
|
Hystéroscopie
|
|
Performance
globales |
Sensibilité
|
0,69
|
0,83
|
0,76
|
0,84
|
Spécificité |
0,83
|
0,90
|
0,92
|
0,88
|
|
Myomes
sous-muqueux |
Sensibilité |
0,83
|
0,90
|
1,0
|
0,82
|
Spécificité
|
0,90
|
0,89
|
0,91
|
0,87
|
|
Selon les
critères de sélection des patientes et leurs caractéristiques,
les taux d'anomalies identifiées sont variables comme nous l'avons vu
précédemment. Il semble que le groupe de patientes subissant une
FIV (avant ou après échec) est celui qui a le plus haut risque
de présenter une anomalie, selon de nombreuses études (31). L'une
des plus récentes, retrouve des lésions significatives non suspectées
chez 18 patientes, dans une série de 100 patientes, après échec
de FIV (32).
Nous avons vu que l'hystéroscopie redresse de nombreux diagnostics erronés,
selon les données des autres méthodes d'imagerie.
Au plan thérapeutique, les résultats dépendent de la sévérité
des lésions. Une étude récente donne un ordre de grandeur
des succès espérés (33). Les taux de conception sont de
62 % après myomectomie, de 66 % après résection de cloison
et de 61 % après cure de synéchies sévères. Pour
certains gestes, il est recommandé d'effectuer une hystéroscopie
de contrôle à distance.
Elle
est bien sûr indiquée en cas d'anomalie utérine à
l'HSG. Elle sera aussi réalisée en cas de signe d'appel (métrorragies…),
d'antécédent évocateur (fausse-couche répétée….)
ou de suspicion d'anomalie dépistée par une échographie.
En
dehors de ces circonstances, son apport mérite d'être démontré
; cependant quand une endoscopie pelvienne est prévue, beaucoup d'opérateurs
associent systématiquement une hystéroscopie, en particulier après
échec de plusieurs cycles de stimulation ovarienne.
On
se pose d'ailleurs toujours la même question sur l'effet bénéfique,
en termes de conception, apporté par le traitement des anomalies utérines
(souvent mineures) ainsi découvertes, lors d'un examen systématique
; aucune étude prospective contrôlée pour apporter une réponse
n'a été réalisée.
Ce
qu'il faut retenir en pratique :
-elle peut être réalisée en ambulatoire sous anesthésie
locale ;
-elle reste l'examen de référence, surtout pour les lésions
mineures de l'endomètre ;
-elle est indiquée en cas d'antécédent ou de symptômes
évocateurs et en cas d'anomalie à l'échographie ;
-elle permet de réaliser des gestes thérapeutiques efficaces.
7-La
clioscopie et la fertiloscopie :
Ces
endoscopies sont les seuls examens permettant d'évaluer correctement
la morphologie tubaire (et de spéculer sur sa valeur fonctionnelle) et
l'environnement annexiel et pelvien (adhérences, endométriose,
inflammation chronique).
La
technique de la coelioscopie diagnostique est suffisamment connue pour qu'il
soit nécessaire de la développer en détail. Il faut simplement
rappeler qu'elle doit être méthodique, dirigée et complète.
Elle permet de classer les lésions tubaires , annexielles ou péritonéales
en utilisant un score validé, d'établir un pronostic et d'aider
au choix de la stratégie thérapeutique la plus appropriée.
Ses
risques non négligeables ont conduit à mettre au point des alternatives
techniques, probablement moins invasives. La micro coelioscopie (34) permet
aujourd'hui tant une visualisation satisfaisante que la réalisation de
gestes opératoires avec une instrumentation adaptée ; son innocuité
et ses performances demandent cependant une évaluation plus complète,
pas seulement limitée à celle effectuée par ses promoteurs..
Les
endoscopies transvaginales, appelées Transvaginal Hydro Laparoscopy (35)
ou fertiloscopie (36) semblent très intéressantes. Elles présentent
des avantages potentiels,en particulier leur innocuité. Elles nous semblent
surtout utiles quand l'HSG s'est révélée normale ou ne
montre que des anomalies mineures (par exemple, en cas de stérilité
inexpliquée). Mais elles nous paraissent limitées en cas d'anomalie
patente, dans la mesure où elles ne permettent pas, aujourd'hui encore
, de réaliser de gestes opératoires majeurs.
Pour
les lésions tubaires, nous avons vu que la sérologie
et l'hystérographie ne représentaient que des examens de dépistage
et qu'une endoscopie était nécessaire pour, non seulement affirmer
leur réalité, mais aussi pour en déterminer leur opérabilité.
La coelioscopie est toujours l'examen clé pour l'exploration des altérations
tubaires distales. Souvent dans un premier temps, pour établir un bilan
précis, une adhésiolyse est nécessaire ; de même
l'évaluation exacte de l 'épithélium tubaire ne peut être
faite qu'après l'ouverture de la trompe ou une tuboscopie. Un score adhérentiel
sera utilisé.
Il faut aussi rechercher tout signe d'inflammation évolutive qui hypothèquerait
fortement tout geste restaurateur. Il faut souligner les difficultés
en préopératoire à mettre en évidence une telle
situation qui ferait bien sûr différer l'intervention après
une gestion thérapeutique adéquate. Parmi les divers scores qui
ont été proposés, celui établi par un groupe d'étude
français (37) nous paraît à la fois le plus simple et assez
bien corrélé aux résultats obtenus en microchirurgie (38)
et en coelioscopie opératoire (39). C'est celui que nous employons depuis
sa mise au point. Une autre classification simple aussi à utiliser pour
les hydrosalpinx est celle de Boer-Meisel (40).
En
dehors des lésions tubaires ou adhérentielles péri
annexielles, l'examen endoscopique, quelle que soit la technique choisie, est
susceptible de dépister d'autres anomalies comme une endométriose,
une inflammation chronique…..
Quand les lésions sont importantes des antécédents ou des
signes cliniques sont retrouvés et conduisent par eux-mêmes à
pratiquer l'endoscopie rapidement.
Mais il s'avère, en pratique, que ces anomalies sont en générales
peu sévères ; leur rôle comme facteur contributif associé
d'hypofertilité est alors souvent incertain ou non clairement démontré.
Leur découverte ou leur traitement ont-ils dans ces conditions un réel
impact sur les succès conceptionels ultérieurs et sur la stratégie
thérapeutique pour aboutir à une grossesse ? Cette question est
malheureusement sans réponse. C'est finalement remettre en cause l'apport
de l'endoscopie et son utilité même dans ces situations.
Néanmoins,
il est classique de proposer une endoscopie en cas d'échec après
6 à 12 mois de stimulation bien conduite, en tenant compte de l'âge
et des autres facteurs pertinents rappelés à plusieurs reprises.
Par contre, l'endoscopie ne doit pas être systématique avant d'entreprendre
la stimulation, en l'absence de signe d'appel ou d'anomalie suspectée
par les autres investigations ; pourtant cette pratique est fréquemment
retrouvée dans d'autres pays.
Ce
qu'il faut retenir :
-un examen endoscopique est indispensable quand la sérologie à
chlamydia trachomatis est positive, quand l'hystérographie est anormale,
ou en cas d'antécédent évocateur ou de signe d'appel, avant
d'entreprendre une stimulation ;
-la clioscopie est l'examen de référence à pratiquer
quand la présence d'une lésion tubaire significative, susceptible
de nécessiter un geste restaurateur, est suspectée ;
-dans les autres cas, les endoscopies par voie vaginale représentent
une alternative moins invasive, qui mérite cependant d'être davantage
validée ;
-une clioscopie est justifiée en cas d'échec de plusieurs
cycles d'induction bien conduits.
STRATEGIE
PRATIQUE DU BILAN AVANT INDUCTION
Si
nous avons détaillé quelques examens para cliniques pouvant être
réalisés avant une induction de l'ovulation, bien évidemment,
l'étude des antécédents et des éventuels symptômes
ainsi que la réalisation d'un examen clinique des deux partenaires sont
des étapes préliminaires indispensables. Nous ne détaillerons
pas ces deux étapes.
L'interrogatoire
recherche principalement :
- tout événement susceptible d'avoir des conséquences sur
les voies de transport des gamètes (infections, interventions…)
et sur l'environnement pelvien chez la femme ;
- tout antécédent ou symptôme pouvant représenter
un facteur de risque pour une atteinte tubaire ou une endométriose ;
- toute anomalie de la vie sexuelle ;
- toute prise de médicament susceptible d'interférer sur le fonctionnement
des gonades ;
- tout facteur environnemental ou professionnel reconnu délétère
pour la fonction de reproduction (surtout pour l'homme).
L'examen
clinique peut, lui aussi, découvrir :
-chez la femme, des anomalies utérines (fibrome...), ovariennes (masses..),
au niveau des ligaments utéro sacrés (endométriose…)
pouvant lui aussi conduire à pratiquer des examens complémentaires
spécifiques ;
-chez l'homme, une anomalie testiculaire, des voies excrétrices ou une
varicocèle par exemple ;
-toute anomalie découverte déclenche une enquête étiologique
complémentaire appropriée.
La
conduite du bilan, en dehors de celui indiqué pour le diagnostic
du trouble ovulatoire ou en cas d'anomalie à l'interrogatoire ou à
l'examen clinique, découle des remarques que nous avons précédemment
faîtes :
Il
comprend systématiquement une sérologie chlamydia trachomatis,
une échographie, une hystérographie, deux spermogrammes et un
test post-coïtal.
Si
ces examens sont dans des limites considérées comme normales,
le traitement inducteur choisi peut être entrepris immédiatement.
Si
une lésion tubaire ou pelvienne est suspectée une endoscopie (clioscopie
ou fertiloscopie selon l'importance de la lésion suspectée) sera
préalablement réalisée, sans inutile délai.
Si
une lésion utérine est évoquée, soit cliniquement
ou soit selon les données des autres explorations, une hystéroscopie
est indiquée. Quand les lésions sont probablement , elle peut
être réalisée de manière ambulatoire. Si un geste
thérapeutique important est prévisible, il paraît logique
de recourir à l'anesthésie générale, afin de pratiquer
les gestes
adéquats dans le même temps.
Enfin,
les examens endoscopiques sont aussi pratiqués en cas d'échec
du traitement inducteur après 6 à 12 cycles, en fonction de l'âge,
de la durée de l'infertilité et du type de traitement inducteur…
Il
s'agit là, bien sûr, d'une schématisation extrême,
qui ne saurait répondre à tous les cas particuliers rencontrés
en pratique courante.
CONCLUSIONS
Le
bilan du couple avant l'induction d'une ovulation doit essentiellement répondre
au double impératif :
1-de
ne pas ignorer un facteur associé susceptible d'expliquer l'échec
du traitement inducteur pourtant bien conduit ; en effet, dans le contexte actuel
" sécuritaire " et de précaution, le risque controversé
des stimulations répétées doit nous conduire à tout
faire pour en réduire le nombre et la durée ;
2-de
ne pas réaliser une débauche d'examens coûteux voire dangereux,
dont le bénéfice pour la patiente, en termes de grossesse, n'a
pas a été démontré.
Nous
avons proposé, à la lumière des données et des tendances
actuelles, un schéma simple pouvant être adapté aux diverses
situations particulières rencontrées en pratique courante.
MOTS
CLES : Induction de l'ovulation-Bilan-Hystérographie-Hystéroscopie-Clioscopie.
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