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Titre: L'induction de l'ovulation non suivie d'insémination. Est-elle encore licite dans les infertilités à trompes saines ?
Année: 1999
Auteurs: - Bélaisch-Allart J.
Spécialité: Infertilité
Theme: induction de l’ovulation

L’INDUCTION DE L’OVULATION NON SUIVIE D’INSEMINATION EST-ELLE ENCORE LICITE DANS LES INFERTILITES A TROMPES SAINES ?

 

Joëlle BELAISCH-ALLART* , Jean Marc MAYENGA*

  • Bases physiologiques de l’IIU

  • Stimulation de l’ovulation et rapports programmés ou IIU

  • . infertilités masculines

  • . infertilités inexpliquées

  • Risques

  • Bibliographie

  •  

    Est-il licite de stimuler l’ovulation en 1999 sans y associer une insémination intra-utérine (IIU). La question se pose légitimement devant le coût des inductions de l’ovulation et après qu’ait été mise en doute leur innocuité même si les dernières études sont rassurantes. Il faut (désormais ? ...) prescrire à bon escient et si l’association stimulation de l’ovulation + IIU est plus efficace (et donc finalement moins chère) c’est elle qu’il faut choisir. La réponse n’est que partiellement simple. On peut (on doit ?) toujours stimuler l’ovulation des patientes qui n’ovulent pas ou mal par clomifène ou gonadotrophines voire association sans y adjoindre d’insémination intra utérine, mais on ne devrait plus voir de patientes traitées pendant un an par du citrate de clomifène, d’autant que c’est le seul cas où l’augmentation de cancer de l’ovaire est réellement démontrée [Rossing et al, 1994 (1)].

    Le vrai problème concerne les inductions de l’ovulation faites jusqu’à présent larga manu en cas d’infertilité masculine légère ou d’infertilité inexpliquée. A-t-on encore le droit de stimuler avec des gonadotrophines dans ces cas sans y adjoindre des inséminations intra-utérines (IIU) pour augmenter leur efficacité ?

    Bases physiologiques de l’IIU

    L’insémination intra-utérine (IIU) a été proposée depuis plusieurs décennies dans la prise en charge des infertilités masculines et inexpliquées avec des résultats décevants qui avaient jeté le discrédit sur la méthode. C’est paradoxalement depuis le développement des techniques d’assistance médicale à la procréation (AMP) que l’association stimulation de l’ovulation - IIU connaît un regain d’intérêt, et représente désormais la première AMP à proposer en cas d’infertilité à trompes saines. La fécondation in vitro a permis de définir les bases physiologiques des IIU. On sait que l’ovocyte humain maintient sa fécondabilité in vitro pendant au moins 16 heures après son recueil à l’état mature (2). Il y a donc possibilité de fécondation si des spermatozoïdes fécondants sont présents dans la trompe entre 0 et 16 heures après la rupture folliculaire, soit entre 37 et 53 heures après le stimulus ovulatoire puisque l’on sait que la rupture folliculaire survient entre 37 et 39 heures après le début de la décharge de LH ou l’injection d’hCG (3). Il faut pratiquer les IIU au moment le plus opportun par rapport à l’émission de l’ovocyte. La détection de l’horaire exact de l’ovulation est donc fondamentale, ce qui ne peut être réalisé que par un monitorage soigneux de l’ovulation avec dosages hormonaux rapides d’oestradiol et de LH, échographies et administration d’hCG. La courbe thermique n’est pas une technique fiable pour déterminer le moment de l’ovulation. Le Nadir, classiquement reconnu comme correspondant au jour de la décharge de LH n’est qu’un moyen approximatif de déterminer le jour de l’ovulation non seulement parce qu’il n’est pas toujours très aisé à identifier sur les courbes de température, mais surtout parce qu’il n’y a pas de correspondance stricte entre ce dernier point bas et le jour de la décharge de LH. De même, le score cervical, la taille du ou des follicules à l’échographie ou le dosage isolé de l’oestradiol ne sont pas en liaison étroite avec le moment de la rupture folliculaire. Seule la décharge pré-ovulatoire de LH est un bon marqueur chronologique de l’ovulation mais sauf à réaliser plusieurs prélèvements sanguin quotidiens il n’est pas possible de prédire le moment de l’ovulation avec une acuité de quelques heures. En pratique, il est donc plus simple de provoquer le processus de l’ovulation par l’injection d’hCG. A partir de ces bases physiologiques, il est possible de définir une nouvelle approche type AMP des IIU. Cette approche consiste à stimuler l’ovulation par clomifène FSH ou FSH seules, à surveiller le recrutement folliculaire par dosages plasmatiques répétés d’oestradiol et de LH et par échographie, à déclencher l’ovulation par injection d’hCG lorsque 2 à 3 follicules matures ont été obtenus, à préparer le sperme comme pour une FIV, à réaliser l’IIU 35 à 37 heures après l’hCG.

    Stimulation de l’ovulation et rapports programmés ou IIU ?

    Infertilités masculines

    Parmi les études récemment publiées (avec stimulation et déclenchement de l’ovulation et intervalle correct hCG-IIU), rares sont celles qui en cas d’hypofertilité masculine relative ne concluent pas à la supériorité de l’IIU. Buvat et al n’observent pas de supériorité des IIU mais la moitié de leur population présente une oligoasthénotératospermie sévère qui aurait dû les faire inclure d’emblée dans un programme de FIV voire de fécondation assistée (4). A l’inverse, la majorité des études récente concluent à la supériorité de l’IIU sur les rapports programmés (5, 6, 7).

    La méta analyse de Cohlen qui porte sur 18 études conclut que l’insémination augmente la probabilité de conception dans les cycles naturels et dans les cycles stimulés par rapport aux rapports sexuels programmés, et que la stimulation de l’ovulation augmente encore l’efficacité de l’insémination intra-utérine (8).

    Pour que les IIU soient efficaces en matière d’infertilité masculine, il faut respecter leurs limites. Nous avons démontré à Sèvres qu’en dessous de 500.000 spermatozoïdes mobiles par préparation, le taux de grossesse est nul (tableau 1 (9)). De ces données, nous avons déduit qu’en cas d’hypofertilité masculine, un test de migration-survie du sperme doit précéder toute tentative d’IIU. Si après préparation du sperme la concentration obtenue est inférieure à 500.000 il est préférable de passer directement à la FIV voire à l’ICSI. De même, une tératospermie confirmée supérieure à 80 % contre-indique la pratique d’IIU. Après échec de 4 IIU il est préférable de recourir à la FIV afin de s’assurer du pouvoir fécondant du sperme.

    Infertilités inexpliquées

    La majorité des études (6, 10, 11, 12) montrent qu’en cas d’infertilité inexpliquée l’association stimulation de l’ovulation + IIU est plus efficace que la stimulation de l’ovulation suivie de rapports sexuels. Seules les études de Kalstrom et al (13), de Zikopoulos et al (14) et de Melis et al (15) concluent différemment. L’étude de Zikopoulos et al (14) n’observe pas de supériorité de l’association à l’IIU mais ils utilisent systématiquement des analogues du GnRH, en protocole long, ils demandent aux couples d’avoir des rapports sexuels 36 à 40 heures après l’injection d’hCG et rapportent des taux de grossesses multiples de 20 % en rapports programmés et 50 % après IIU ! L’étude de Kalstrom et al (13) conclut à l’absence de différence mais ses effectifs sont très réduits et les taux de grossesses observés (3/15 soit 20 % après IIU et 3/24 soit 12,5 % après rapports) sont en faveur de l’IIU même si la différence n’atteint pas la significativité. Plus intéressante est l’étude de Melis et al (15) qui porte sur les infertilités inexpliquées et masculines légères et n’observe pas d’amélioration dans le groupe IIU, tout au plus peut-on noter des taux de grossesses étonnamment bas dans les groupes stérilité masculine : rapports 10,9 %, IIU 10,6 % (tableau 2).

    Deux méta analyses récentes confirment cependant la supériorité de l’association stimulation de l’ovulation - IIU en cas d’infertilité inexpliquée. Hughes en 1997, sur 22 études et 5214 cycles, relève un effet significativement positif de l’IIU plus net encore si elle est pratiquée après stimulation par gonadotrophines (tableau 3) (16). Guzick et al (17) analysant 45 études aboutissent aux mêmes conclusions en faveur de l’IIU associée. Les taux de succès rapportés sont 1,3 % en l’absence de traitement, 3,8 % en cas d’IIU seule, 5,6 % après citrate de clomifène, 8,3 % en cas d’association citrate de clomifène IIU et 17 % en cas d’association hMG et IIU contre 20 % en cas de FIV. De plus ils estiment le coût d’une grossesse à 10.000 dollars si elle est obtenue par clomifène IIU, 17.000 dollars par hMG IIU et 50 000 dollars par FIV !

     

    Risques

    Les risques de l’association stimulation de l’ovulation IIU sont essentiellement les risques de l’induction de l’ovulation, sous réserve qu’une spermoculture et des sérologies des hépatites B et C, et du sida aient été effectuées récemment et que les précautions élémentaires d’asepsie nécessaire à tout geste endo-utérin aient été respectées.

    Une stimulation adaptée à chaque patiente, sans analogues du GnRH, un monitorage soigneux de l’ovulation, l’absence de déclenchement de l’ovulation si le recrutement folliculaire est excessif, permettent de réduire les risques d’hyperstimulation de l’ovulation et de grossesse multiple.

    Le taux d’hyperstimulation sévère est nul si ces conditions sont respectées (5,9). Ces précautions permettent le plus souvent d’éviter les grossesses triples, mais le taux moyen de grossesses gémellaires dans la littérature est de l’ordre de 16 % (9).

     

    En conclusion, l’association stimulation de l’ovulation-IIU est une technique efficace si elle est correctement effectuée.

    La rigueur doit être la même qu’en AMP dans la sélection des patientes (pas d’IIU sans s’être préalablement assuré de la perméabilité tubaire) dans la stimulation et le monitorage de l’ovulation, dans la préparation du sperme, dans l’intervalle stimulus déclenchant de l’ovulation-IIU. Il faut également savoir s’arrêter et passer à la FIV après 4 à 6 cycles d’échecs. Si toute ces conditions ne sont pas remplies, l’association stimulation de l’ovulation-IIU est, comme le proclament ses détracteurs, une technique lourde, coûteuse et inefficace, si elles sont remplies c’est la première AMP à mettre en oeuvre devant une infertilité à trompes saines.

    Plus que que jamais il est désormais légitime d’être rapidement efficace. Tout plaide donc pour utiliser l’association clomifène FSH en association avec les inséminations intra-utérines afin d’augmenter leur efficacité.

    Il n’est donc presque plus légitime d’utiliser les gonadotrophines sans IIU en dehors des problèmes démontrés d’ovulation.

     

    Tableau 1 :

    Résultats des inséminations intra utérines

    selon le nombre de spermatozoïdes inséminés (1993, 1994 et 1995)

    dans les infertilités masculines pures

    Centre d’AMP de Sèvres (9)

    Concentration après préparation

    > 5 M

    2 à 5 M

    1 à 2 M

    1 à 500 000

    500 000 à 10 000

    Total

    IIU N

    19

    41

    21

    11

    11

    103

    Patientes N

    16

    23

    16

    11

    9

    75

    Grossesses cliniques

    4

    7

    3

    3

    0

    17

    % par IIU

    21,1 %

    17,1 %

    14,3 %

    27,3 %

    -

    16,5 %

    % par patiente

    25,0 %

    30,4 %

    18,8 %

    27,3 %

    -

    22,7 %

    Grossesses évolutives

    3

    7

    3

    3

    -

    16

    % par IIU

    15,8 %

    17,1 %

    14,3 %

    27,3 %

    -

    15,5 %

    % par patiente

    18,8 %

    30,4 %

    18,8 %

    27,3 %

    -

    21,3 %

     

    Tableau 2 :

    Comparaison des résultats après IIU ou rapports programmés

    Melis et al (15)

    Stérilité inexpliquée et masculine légère

     

    Masculine légère

    Inexpliquée

     

    RP

    IIU

    RP

    IIU

    IIU

    110

    103

    126

    123

    Grossesses cliniques

    (%)

    12

    (10,9)

    11

    (10,7)

    23

    (18,3)

    22

    (17,9)

    Naissances

    (%)

    9

    (8,2)

    8

    (7,8)

    18

    (14,3)

    16

    (13,0)

    Grossesses multiples

    (%)

    0

    1

    (12,5)

    3

    (16,7)

    3

    (18,7)

    (Hum Reprod, 1997)

     

    Tableau 3 :

    Infertilité persistante

    Méta analyse de Hugues (16)

    (22 études, 5214 cycles)

     

     

    Taux de grossesse

    Stimulation

    IIU

    RP

    Aucune

    80/1306

    (6 %)

    27/1354

    (2 %)

    Clomifène

    42/644

    (7 %)

    5/54

    (9 %)

    FSH

    171/1156

    (15 %)

    47/700

    (7 %)

    Total

    292/3106

    (9,8 %)

    79/2108

    (3,7 %)

    (Hum Reprod, 1997)

    Bibliographie

    1. ROSSING M.A., DALING J.R., WEISS N.S., MOORE D.E., SELF S.G. : Ovarian tumors in a cohort of infertile women. New Engl J Med, 1994, 331, 12, 771-776.

    2. HARRISON K., WILSON L., BREEN T., POPE A., CUMMINS J., HENNESSEY J.: Fertilization of human oocytes in relation to varying delay before insemination. Fertil Steril, 1988, 50, 294-297.

    3. TESTART J., FRYDMAN R.: Minimum time lapse between luteinizing hormone surge or human choronic gonadotropin administration and follicular rupture. Fertil Steril, 1982, 37, 50-53.

    4. BUVAT J., BUVAT-HERBAUT M., MARCOLIN G., GUITTARD L., HERBAUT J.C., LOUVET A.L., COUPLET G., VERBECQ P., DEHAEWE J.L., RENOUARD O.: Hypofertilité masculine. Comparaison randomisée insémination intra-utérine versus rapport sexuel programmé après superovulation de la femme. Contracept Fertil Sex, 1990, 18, 435-438.

    5. CHAFFKIN L., NULSEN J., LUCIANO A., METZER D.: A comparative analysis of the cycle fecundity rates associated with combined human menopausal gonadotrophin (hMG) and intra uterine insemination (IIU) versus either hMG or IIU alone. Fertil Steril, 1991, 55, 252-257.

    6. MARTINEZ A., BERNADUS R., VOORHORST F., VERMEIDEN J., SCHOEMAKER J.: Intra uterine insemination does and clomiphene citrate does not improve fecundity in couple with infertility due to male or idopathic factors: a prospective randomized, controlled study. Fertil Steril, 1990, 53, 847-853.

    7. NAN P., COHLEN B., VELDE E., VAN KOOIJ R., EIMERS J., VAN ZONNEVELD P.V., HABBEMA J.D.: Intra uterine insemination or timed intercourse after ovarian stimulation for male infertility? A controlled study. Hum Reprod, 1994, 9, 2022-2026.

    8. COHLEN B.J., VANDEKERCKHOVE P. and VELDE E.R. : Is IIU for male subfertility based on any evidence? 13th Annual meeting ESHRE, Edinburgh, June 22-25 1997, 0135.

    9 BELAISCH-ALLART J., MAYENGA J.M., PLACHOT M., MANDELBAUM J.: Place des inséminations intra-utérines et de la FIV classique dans le traitement des infertilités masculines. Reproduction Humaine et Hormones, 1996, 9, 589-594.

    10. CROSSIGNANI P.G., WALTERS D.E., SOALIANI A.: The ESHRE multicentre trial on the treatment of unexplained infertility: a preliminary report. Hum Reprod, 1991, 6, 953-958.

    11. SERHAL P., KATZ M., LITTLE V., WORONOWSKI H.: Unexplained infertility. The value of Pergonal superovulation combined with intra uterine insemination. Fertil Steril, 1988, 49, 602-606.

    12. CHUNG C., FLEMMING R., JAMIESON M.E., YATES R., COUTTS J.: Randomized comparison of ovulation inudction with and without intra uterine insemination in the treatment of unexplained infertility. Hum Reprod, 1990, 10, 3139-3141.

    13. KARLSTROM P., BERGH T., LUNDKVIST O.: A prospective randomized trial of artificial insemination versus intercourse in cycle stimulated with human menopausal gonadotrophin or clomifene hMG. Fertil Steril, 1993, 59, 554-559.

    14. ZIKOPOULOS K., WEST C., WEN THONG P., MKACSER E., MORRISON J., WU F.: Homologous intra uterine insemination has no advantage over timed natural intercourse when used in combination with ovulation induction of the treatment of unexplained infertility. Hum Reprod, 1993, 8, 563-567.

    15. MELIS J.B., PAOLETTI A.M., AJOSSA S., GUERRIERO S., DEPAU G.F., MAIS V.: Ovulation induction with gonadotropins as soli treatment in infertile couples with open tubes: a randomized prospective comparison between intra-uterine insemination and timed vaginal intercourse. Fertil Steril, 1995, 64, 1088-1092.

    16. HUGHES S.: The effectiveness of ovulation induction and intra uterine insemination in the treatment of persistent infertility: a meta analysis. Hum Reprod, 1997, 12, 1865-1872.

    17. GUZICK D., SULLIVAN M., ADAMSON G., CEDARS M., FALK R., PETERSON E., STEIN KAMPF M.: Efficacy of treatment for unexplained infertility. Fertil Steril, 1998, 70, 207-213.