L'ENDOMETRE ET LES SAIGNEMENTS DANS LES THS
C. Bergeron* Laboratoire Cerba, 95066
Cergy-Pontoise Cedex 9.
I. INTRODUCTION
L'endomètre a des aspects différents selon le type de
traitement substitutif suivi et le mode de saignement. Ces
aspects ont été étudiés par la biopsie d'endomètre. Elle
permet de mettre en évidence une transformation sécrétoire ou
un aspect atrophique de la muqueuse endométriale, de confirmer
la présence d'un polype et de diagnostiquer une éventuelle
hyperplasie ou un cancer. Un traitement estrogénique isolé
prescrit à la ménopause augmente le risque de développer une
hyperplasie sans atypie mais aussi un cancer bien différencié
de l'endomètre. Ce risque est considéré par rapport à la
population normale de 2,3 (2,1-2,5, 95 %) [1]. Il augmente avec
une utilisation prolongée, et persiste même après l'arrêt du
traitement [1]. Les progestatifs ont un effet antiestrogénique
en inhibant la synthèse des récepteurs des estrogènes et en
transformant les estrogènes en estrone par l'intermédiaire de
la deshydrogénase. L'estrone a une affinité moindre pour les
récepteurs des estrogènes. Les progestatifs sont donc
maintenant toujours associés aux estrogènes dans les
traitements substitutifs de la ménopause pour prévenir le
développement d'une hyperplasie ou d'un cancer de l'endomètre.
Leur effet antiestrogénique dépend de la dose, de la durée et
de la compliance.
II. LES SAIGNEMENTS AU COURS DU TRAITEMENT SUBSTITUTIF
SEQUENTIEL
Au cours des traitements séquentiels, la progestérone induit
une différentiation sécrétoire sur une muqueuse qui a été
imprégnée d'estrogènes. Cette différentiation sécrétoire
est comparable à ce que l'on voit pendant le cycle menstruel ou
a un aspect morphologique particulier induit par des doses de
progestatifs plus importantes. Le meilleur moment pour faire la
biopsie dans un traitement séquentiel se situe entre le 6e et le
10e jour après la prise de progestatifs. Il existe alors une
bonne imprégnation progestative, à la fois au niveau des
glandes et du stroma qui permet de donner un diagnostic
reproductible entre pathologistes. La muqueuse a alors un aspect
sécrétoire, non spécifique d'une molécule, mais identique à
l'aspect de la muqueuse au cours du cycle menstruel entre le 20e
et 24e jour du cycle. Il peut exister également une réponse
individuelle de la muqueuse endométriale pour des doses
identiques, qui est bien individualisée par l'hystéroscopie. La
muqueuse montre alors des aspects hétérogènes entre
différentes parties de la muqueuse ou entre la composante
glandulaire et stromale.
La biopsie de l'endomètre doit être pratiquée s'il existe
un saignement anormal. Par saignement anormal, on sous-entend une
hémorragie de privation trop abondante ou un saignement
survenant en dehors de cette hémorragie de privation. L'étude
de la muqueuse endométriale peut mettre alors en évidence une
absence d'effet progestatif qui se traduit par une hyperplasie
sans atypie cytologique, le plus souvent due à une durée de
prise des progestatifs insuffisante, c'est-à-dire inférieure à
10 jours. La biopsie peut aussi mettre en évidence une atrophie,
induite par une dose trop importante de progestatifs. La biopsie
met en évidence exceptionnellement un cancer endométrial bien
différencié. Dans ce cas, le traitement estrogénique sert de
révélateur d'une tumeur préexistante de petite taille en
induisant une hyperplasie concomitante qui saigne et favorise le
développement de la prolifération tumorale. Les cas publiés
sont le plus souvent associés à des traitements progestatifs de
moins de 10 jours [1, 3]. En cas de saignement, la biopsie fait
aussi souvent le diagnostic d'un polype ulcéré en surface qui
est la lésion endométriale la plus fréquente. Les polypes ne
répondent pas ou répondent partiellement au traitement hormonal
et comportent souvent des aspects prolifératifs, ou même
hyperplasiques sans atypie cytologique. La biopsie peut faire
plus rarement le diagnostic d'une endométrite chronique
préexistante au traitement dont le diagnostic reste
morphologique et repose sur la présence de lymphoplasmocytes
dans le stroma endométrial.
III. LES SAIGNEMENTS AU COURS DU TRAITEMENT SUBSTITUTIF
CONTINU
Le traitement continu induit le plus souvent un aspect
atrophique car la muqueuse ne peut pas proliférer sous l'effet
des estrogènes qui ne sont pas donnés de manière isolée. Les
traitements continus induisent souvent des spottings pendant les
6 premiers mois dont le mécanisme n'est pas clair. L'atrophie ne
permet pas de l'expliquer puisque la plupart des femmes
ménopausées sans traitement ne saignent pas bien qu'elles aient
un endomètre atrophique. L'explication la plus convaincante est
celle d'une microvascularisation anormale et d'une dilatation des
capillaires qui sont ainsi fragilisés.
La biopsie de l'endomètre doit être pratiquée en cas de
saignement anormal. Par saignement anormal dans un traitement
continu, on sous-entend des spottings qui persistent depuis au
moins six mois et des saignements qui surviennent après une
période d'aménorrhée. La biopsie met alors en évidence le
plus souvent là encore une atrophie qui est secondaire aux
progestatifs donnés en continu. La biopsie montre
exceptionnellement une hyperplasie sans atypie qui ne survient
qu'en cas de non compliance au traitement. Elle met en évidence
parfois une hyperplasie avec atypie cytologique ou un cancer de
petite taille sur une biopsie qui est faite sous hystéroscopie.
Ces hyperplasies avec atypie cytologique ou ces cancers qui
surviennent sur un terrain d'atrophie sont diagnostiqués plus
fréquemment depuis que l'on explore l'endomètre des femmes
ménopausées sous traitement continu avec un hystéroscope. Ces
lésions sont diagnostiquées après une période d'aménorrhée
[2]. Elles sont non hormono-dépendantes et ne contiennent pas de
récepteurs aux estrogènes ou à la progestérone. Le traitement
n'est pas responsable de leur développement et ne sert que de
révélateur. Les facteurs initiateurs de ces lésions sont
inconnus.
BIBLIOGRAPHIE
[1] GRABY D., GEBRETSADIK T., KERLIKOWSKE K., ERNSTER V.,
PETITTI D. : Hormone replacement therapy and endometrial cancer
risk : a meta-analysis. Obstet. Gynecol., 1995, 85, 304-313.
[2] LEATHER A.T., SAVVAS M., STUDD J.W.W. : Endometrial
histology and bleeding patterns after 8 years of continuous
combined estrogen and progestagen therapy in postmenopausal
women. Obstet. Gynecol., 1991, 78, 1008-1010.
[3] VOIGT L., WEISS N., CHU J., DALING J., MCKNIGHT B.,
VANBELLE G. : Progestagen supplementation of exogenous estrogens
and risk of endometrial cancer. Lancet, 1991, 338, 274-277.
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