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Titre: DPI et choix du sexe
Année: 2005
Auteurs: - Van Steirteghem A.
Spécialité: Infertilité
Theme: AMP

DPI et choix du sexe

ANDRé VAN STEIRTEGHEM*

Introduction

La mise en pratique des techniques de reproduction médicalement assistée s'accompagne de nombreux problèmes éthiques. Parmi ceux-ci, nous pouvons mentionner la recherche sur l'embryon, la prévention ou la réduction des grossesses multiples, le DPI avec typage HLA et le DPI pour choix du sexe pour raison familiale. Dans cette communication, nous nous attachons brièvement aux problèmes éthiques et à la pratique actuelle en matière de sélection du sexe pour raison sociale.

Réflexions éthiques sur la sélection du sexe

pour raisons non médicales par DPI

La sélection du sexe pour raison non médicale est considérée comme
inacceptable pour une grande partie de la population. Dans de nombreux pays, des textes de loi sont en préparation ou sont déjà en application, visant à interdire une telle pratique. Dans la loi belge sur la protection de l'embryon humain in vitro (ratifiée en mai 2003), et qui est plutôt libérale, les deux pratiques clairement interdites sont le clonage reproductif et la sélection du sexe pour raison non médicale. Le Conseil de l'Europe s'est prononcé dans
l'article 14 de la Convention sur les Droits Humains et la Biomédecine : l'usage des techniques de reproduction médicalement assistée ne sera pas autorisé pour choisir le sexe d'un futur enfant, sauf lorsqu'il s'agit d'éviter la survenue d'une maladie héréditaire grave, liée au sexe [1]. Néanmoins, la discussion a refait surface au cours des années récentes, suite au développement de techniques de séparation cytométriques des spermatozoïdes X ou Y. La cytométrie de flux est la première technique préconceptionelle ayant prouvé son efficacité, bien que la sélection du sexe féminin soit significativement plus efficace que la sélection du sexe masculin [2]. Des recherches complémentaires sont nécessaires pour démontrer l'innocuité de la méthode [3]. Le second développement est l'usage du DPI pour sélection du sexe pour raisons sociales. Dans le rapport présenté par le Consortium DPI de l'ESHRE de 2001, apparaissent pour la première fois des données provenant de trois cliniques, concernant la sélection du sexe d'embryons préimplantatoires, pour raison non-médicale [4]. L'utilisation du DPI dans un tel but, a provoqué l'indignation de plusieurs membres du Consortium, qui étaient même opposés à la publication de ces résultats [5]. Le Comité Ethique de l'ASRM (American Society of Reproductive Medicine) a également discuté ce type d'indication et a conclu que l'utilisation du DPI dans un tel contexte devrait être découragée [6]. Lorsque la PMA est utilisée sur indication médicale, la combinaison avec un DPI pour sélection du sexe sans motif médical devrait être également découragée. Alors que ce Comité d'Éthique considère le choix du sexe pour raison non médicale avec beaucoup de prudence en général, il insiste spécifiquement sur les traitements médicaux non nécessaires, les coûts très importants pour les futurs parents, et l'utilisation inappropriée de
ressources médicales. Le Président du Comité d'Éthique a également
présenté le statut de l'embryon comme raison essentielle pour ne pas accepter la sélection du sexe pour raison sociale. La création et la destruction
d'embryons dans ce seul but est en conflit avec le respect particulier dû aux ovocytes fécondés et aux embryons préimplantatoires. Ce statut particulier du fœtus a également été avancé dans le débat sur l'acceptabilité du
diagnostic prénatal, éventuellement suivi d'une interruption de grossesse, utilisée comme moyen de sélection du sexe pour raison sociale. Pour d'autres, le statut moral de moindre valeur des embryons préimplantatoires ainsi que l'absence d'avortement, sont suffisants pour justifier l'usage du DPI dans
certaines circonstances [7]. Pour les partisans de la sélection du sexe pour
raison sociale, l'argument qu'il est déraisonnable d'utiliser la PMA combinée au DPI uniquement en vue de choisir le sexe de l'enfant, relève du paternalisme médical. Le grand avantage du DPI en comparaison avec les autres techniques préconceptionnelles est sa grande fiabilité [8, 9]. Cependant, le DPI soufre nécessairement de tous les désavantages de la PMA elle-même, à savoir son coût, ses aspects invasifs, et ses chances de succès limité (taux d'enfants vivants). La faible disponibilité de la technique préserverait indirectement de la plupart des conséquences sociales redoutées en cas d'application à grande échelle, comme par exemple une modification du sexe « ratio », ou une modification du statut de la femme. Pour certains, la crainte que l'usage de DPI dans ce but, pourrait discréditer cette technologie globalement, constitue un argument majeur contre la sélection du sexe pour raison sociale. Pour d'autres, la raison principale de ne pas admettre cette indication, est qu'elle créerait un précédent pour une application eugénique positive comme la sélection de phénotype (intelligent ou athlétique). Un tel danger n'implique pas nécessairement le rejet catégorique de la sélection du sexe pour raison sociale, mais nous incite à postposer cette indication jusqu'à ce que les implications et les conséquences possibles en aient étaient étudiées de manière approfondie [10]. Cependant, pour les partisans de la sélection du sexe, ce type d'argument de « la pente glissante » qui fait également référence aux « bébés sur commande » semble exagéré ou non valable [7]. Un argument avancé par les opposants à l'usage de cette technique médicale (même s'il s'agit de sélection de spermatozoïdes en vue de DPI), est que ces méthodes sont coûteuses et uniquement accessibles aux couples à haut pouvoir financier. Cet accès limité violerait le principe d'égalité. Un système de santé équitable implique simplement un accès universel et égal à « un niveau adéquat » ou « un minimum décent » de soins de santé. Dans la mesure où la majorité du public considère la sélection du sexe pour raison non médicale comme un soin de santé électif, elle ne devrait pas faire partie d'un système de santé normal et ne devrait pas être remboursée. Ceci éviterait une discrimination envers les couples qui sont incapables de payer un tel traitement élitiste. Permettre l'application n'implique pas de le subsidier [7].

Au cours des 10 dernières années, une tendance croissante à accepter l'idée de la sélection du sexe pour équilibrer la famille s'est dessinée. Le concept d'équilibrage de la famille paraît plus cohérent et restreint l'application de la sélection du sexe. Bien qu'il ne représente pas une solution parfaite pour
chacun des problèmes posés, il apporte une réponse aux problèmes de l'ordre de naissance, de la modification du sexe « ratio » et à l'objection sexiste [11]. Le problème de l'ordre de naissance concerne l'injuste avantage des premiers nés comparés aux enfants qui naissent ultérieurement, et le lien entre le sexe et les caractéristiques de personnalité propres au premier né. Bien que cette préoccupation soit largement spéculative, un effet de ce type ne peut se
produire, puisque l'équilibrage de la famille ne permet pas la sélection du sexe du premier enfant. Puisque le concept implique que seul le sexe sous-représenté dans la famille peut être choisi, une modification du sexe « ratio » dans la société est tout à fait improbable (même si la technologie rencontrait un nombre important de demandes). Finalement, le concept d'équilibrage de la famille implique que les parents ne choisissent pas pour ou contre un certain sexe, mais choisissent simplement pour l'autre. Bien que les motivations sexistes éventuelles des parents ne soient pas exclues, cette éventualité est minimisée par le système. Même les opposants à la sélection du sexe ont conclu qu'il n'y avait pas de lien intrinsèque entre sexisme et le désir d'une famille équilibrée pour le sexe des enfants. Cependant, il n'existe pas de consensus parmi ceux qui acceptent le « sexing » compte tenu de ces restrictions, pour ce qui concerne la méthode utilisée pour atteindre le but souhaité. Un compromis serait d'accepter la sélection du sexe pour l'équilibrage familial par DPI lorsque celui-ci est nécessaire dans un contexte médical [12]. Cette solution répond à l'exigence de rationalisation des soins de santé, en ne gaspillant pas une technologie coûteuse. Il est clair que, étant donné le devoir moral des médecins à donner priorité aux soins de santé nécessaires plutôt qu'aux traitements électifs de moindre importance, l'usage du DPI pour sexing social ne devrait pas désavantager les patients pour qui la technologie est nécessaire en vue de prévenir la survenue d'une maladie génétique.

Il est cependant important de garder à l'esprit que la distinction médicale/non médicale est assez grossière. Deux catégories intermédiaires devraient être prises en considération. Premièrement, certains cas apparaissant en pratique clinique relèvent d'indications mixtes. Le typage HLA afin d'obtenir une lignée souche hématopoïétique en vue de transplantation constitue une illustration de cette catégorie. Un autre exemple est la sélection d'embryons de sexe masculin dans le cas où le partenaire est porteur d'une affection liée au chromosome X comme dans l'hémophilie A. Dans ce cas, les fils ne seront pas porteurs du gène affecté, alors que toutes les filles le seraient. La sélection d'embryons masculins, non porteurs, constitue une indication mixte : d'un côté, il n'y a pas de raison de pratiquer un DPI puisque les filles porteuses sont saines, par contre, les futurs parents pourraient préférer des garçons, les filles étant à nouveau à haut risque d'avoir elles-mêmes des enfants de sexe mâle, affectés. Ceci implique des décisions reproductives complexes. Deuxièmement, une indication médicale pour la sélection du sexe n'est pas nécessairement une justification suffisante. Une maladie comme la spondylite ankylosante touche surtout les garçons et les symptômes sont généralement plus sévères chez les garçons que chez les filles. La question de savoir si cette différence de pénétrance et d'expression du gène entre les sexes justifie une sélection du sexe sera inévitablement posée dans le futur.

Rapport sur la pratique du DPI

pour sélection du sexe sur indication non-médicale

Comme mentionné ci dessus, le rapport du Consortium DPI ESHRE publié en 2002 [4], mentionne que le DPI a été utilisé pour sélectionner le sexe sur indication sociale. Les centres pratiquant cette technique utilisent essentiellement la technique du FISH pour le diagnostic. L'âge moyen des femmes était de 33 ans. Un total de 93 cycles ayant conduit à un recueil d'ovocytes est rapporté, le nombre moyen d'ovocytes est 12,7, la FIV a été utilisée dans 77 % des cycles. Les embryons ont été biopsiés en utilisant la technique du laser dans 88 % des cas et tous les embryons ont été testés au stade 8 cellules. Parmi les 91 % d'embryons biopsiés avec succès, un diagnostic a pu être posé dans 88 % des cas. Le taux de transfert d'embryons était de 78 % et le taux de grossesse clinique de 30 % par prélèvement d'ovocytes. Une moyenne de deux embryons avait été transférée. Ce taux de grossesse est élevé (28 %) en comparaison des taux de grossesses obtenus dans d'autres indications de DPI. Aucune information n'était disponible concernant le sexe sélectionné.

Les résultats de DPI pour sexing social [13] dans le dernier rapport du Consortium révèlent que l'âge moyen des patientes était de 36,6 ans ; 84 cycles avec prélèvement d'ovocytes sont rapportés avec une moyenne de 13,1 ovocytes par recueil. Un diagnostic était établi dans 97 % des embryons biopsiés avec succès et un transfert avait pu être effectué dans 69 % des prélèvements d'ovocytes, une moyenne de 2,7 embryons étant transférée. Le taux de grossesse est inférieur de 10 % en comparaison de celui rapporté dans la première série et est comparable au taux de grossesse après DPI dans d'autres indications. Seuls 89 cycles ont été analysés et seuls deux centres sont impliqués. Il est difficile de tirer des conclusions de ces données. Aucune information n'est fournie concernant le sexe choisi.

Un rapport concernant l'utilisation du DPI en vue de sélection du sexe pour équilibrage familial en Inde a été rapporté [9]. Il existe dans ce pays, une préférence à l'égard des garçons, qui s'inscrit dans un contexte culturel. Tous les couples d'origine indienne désirent un enfant de sexe mâle. Un total de 42 cycles de DPI avait été effectué. Tous les couples avaient au moins déjà une fille. De nombreux couples avaient précédemment déjà utilisé la détermination du sexe par diagnostic anténatal, suivi d'une interruption des grossesses de sexe féminin, bien que cette pratique soit illégale en Inde depuis 1996.

Les résultats étaient les suivants. Un total de 696 complexes cumulus ovocytes (COC) avaient étés obtenus au cours de 42 cycles de traitement (36 couples). Dans deux cycles, la donation d'ovocytes avait été utilisée, et dans un cycle, des embryons décongelés. Un cycle avait du être annulé en raison d'un échec de fécondation. Un total de 443 embryons fécondés (2PN) avaient été obtenus et une biopsie d'embryons avait été effectuée sur 380 embryons, dont 373 avec succès (98,2 %). Une information par FISH avait été obtenue sur 307 embryons (82,3 %) dont 131 (42,5 %) avaient été diagnostiqués XY et 111 (36,21 %) XX. Le génotype aneuploïde le plus souvent identifié était une monosomie X, dans 26 embryons (8 %), suivi par XXY dans 14 (4,5 %) embryons. Sur un total de 106 embryons transférés, 16 grossesses biochimiques et 14 grossesses cliniques (présence d'une activité cardiaque) avaient été obtenues. Parmi celles-ci, jusqu'à présent, six avaient mené à un accouchement et il y avait eu 9 naissances vivantes (3 enfants uniques et 3 paires de jumeaux). Le sexe était confirmé à la naissance par examen clinique de l'enfant, et les 9 bébés nés étaient des garçons. Parmi les grossesses évolutives, 3 étaient des grossesses uniques et les autres des grossesses gémellaires. Deux patientes ont présenté une grossesse non évolutive du premier trimestre (œufs clairs). Le taux de grossesse était de 35,8 % (14/39) et le taux d'implantation (nombre de fœtus avec activité cardiaque) par nombre d'embryons transférés était de 19,8 % (21/106).

Bibliographie

[1]   Council of Europe (1996) Convention for the protection of human rights and dignity of the human being with regard to the application of biology and medicine. Convention of Human Rights and Biomedicine. Council of Europe, Strasbourg.

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[3]   Ethics Committee of the American Society for Reproductive Medicine (2001) : Preconception gender selection for nonmedical reasons. Fertil Steril 75, 861-864.

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[5]   Ray PF, Munnich A, Nisand I, Frydman R, Vekemans M, Viville S : French GET-DPI (2002) The place of 'social sexing' in medicine and science (Letter) Hum Reprod 17, 248-249.

[6]   Ethics Committee of the American Society for Reproductive Medicine (1999) : Sex selection and preimplantation genetic diagnosis. Fertil Steril 72, 595-598.

[7]   Pembrey M (2002) : Social sex selection by preimplantation genetic diagnosis. Reprod Biomed 4, 157-159.

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[9]   Malpani A and Malpani A (2002) : The use of preimplantation genetic diagnosis in sex selection for family balancing in India. Reprod Biomed 4, 16-20.

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[11]   Pennings G. (1996) : Family balancing as a morally acceptable application of sex selection. Hum Reprod 11, 2339-2343.

[12]   Health Council of the Netherlands : Standing Committee for Medical Ethics and Health Law (1995) : Sex selection for Non-medical Reasons. Health Council of the Netherlands. The Hague.

[13]   Sermon K, Moutou C, Harper J, Geraedts J, Scriven P, Wilton L, Magli MC, Michiels A, Viville S, and C. Die C : ESHRE PGD Consortium data collection IV: May-December 2001. Hum Reprod, in press.

* Centre de Médecine de la Reproduction. Centre de Recherche Reproduction et Génétique. Université Libre de Bruxelles Néerlandophone (Vrije Universiteit Brussel - VUB).

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