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Titre: Efficacité réelle et théorique des différentes contraceptions disponibles en 2005
Année: 2005
Auteurs: - André G.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Contraception

Efficacité réelle et théorique des différentes contraceptions disponibles en 2005

DR GABRIEL ANDRE*

La France est le pays qui connaît un des plus forts taux d'utilisation de méthodes contraceptives dites efficaces : 61,9 % des femmes en âge de
procréer utilisent soit une contraception hormonale, soit un stérilet. Le paradoxe est que le nombre de grossesses non désirées reste en France extrêmement important : + de 350 000 dont 200 000 interruptions volontaires de grossesse (IVG), ce chiffre restant curieusement stable depuis plusieurs années. Force est donc de constater qu'il y a un monde entre l'efficacité « théorique » des méthodes et leur efficacité réelle « pratique ». L'examen de ces derniers chiffres dont la diffusion reste encore trop « confidentielle » mérite attention et nous force à revoir nos pratiques de prescription.

La situation aux USA

Elle n'est pas sans intérêt et les similitudes avec ce qui se passe en France sont étonnantes. Le tableau 1 rapporte les différences qu'il peut y avoir entre une utilisation parfaite et une utilisation typique. Pour la contraception orale œstroprogestative (OP) par exemple, l'utilisation parfaite d'une pilule combinée donne un taux de grossesse de 0,1 % assez éloigné de l'utilisation typique qui est de 3 %. Il semble qu'il faille encore réviser ces derniers chiffres (déjà peu brillants) à la hausse. Les taux de grossesses sont actuellement encore bien supérieurs, le comportement des utilisatrices s'étant modifié ces dernières années. L'utilisation dans les conditions réelles de la vie d'aujourd'hui doit nous poser question. Pour la contraception OP, l'utilisation « réelle » s'avère encore différente de l'utilisation typique [1]. À cet égard, les données du NSFG (National Survey of Family Group) sont édifiantes [2]. Les taux de grossesses sous OP ont augmenté de façon conséquente avec le temps. Les données de 1973 indiquent 2 % et celles de 1995, 7 % ! Quelle pourrait être la cause de cette diminution d'efficacité de la pilule OP ? Elle n'est probablement pas consécutive à la réduction des doses. Aux États-Unis, en 1995, les contraceptions les plus prescrites étaient encore celles Ž à 35 mg d'Ethinyl Oestradiol (E.E.). Il existe bien depuis 1974 une pilule à 20 mg d'E.E. + 1 mg de Noréthindrone Acétate, mais elle est peu prescrite. Les progestatifs de 3e génération n'avaient à l'époque pas encore fait leur apparition outre-Atlantique. Si la pilule n'est probablement pas en cause, force est de constater une modification des comportements. Lorsqu'on examine les taux de grossesses en tenant compte de facteurs socio-culturels, on constate que les taux les plus bas (3 %) le sont chez des femmes de plus de 30 ans dans les milieux aisés, alors que les taux les plus hauts (32 %) sont rencontrés chez des femmes célibataires de moins de 20 ans avec un niveau de revenus très faible. Quoi qu'il en soit, ces chiffres sont dramatiquement plus élevés que ceux observés dans les différentes études cliniques indépendamment du mode de calcul. Le risque de grossesse pour une patiente donnée ne dépend donc pas des études cliniques, mais bien de la patiente elle-même, de son mode de vie, de la façon dont elle va utiliser la contraception. Toute la question pour le prescripteur est donc de savoir comment prévoir et éviter une utilisation incorrecte face à une patiente donnée.

Regardons de plus près les résultats du NSFG de 1995 concernant l'efficacité réelle durant les 12 premiers mois d'utilisation (ajustés en fonction des avortements non signalés). Les implants et les hormones injectables ont un taux d'échec 2 à 4 %, la pilule 9 %, le diaphragme et la cape cervicale 13 %, le préservatif 15 %, l'abstinence périodique 22 %, le retrait 26 %, le spermicide 28 %.

Un autre sujet étonnant est la variabilité de l'indice de Pearl (IP) suivant les études pour une même pilule [3]. L'IP n'est certes pas parfait, mais il a l'avantage d'être connu de tous : rappelons qu'il représente le nombre d'échecs pour 100 années/femmes d'exposition. Le numérateur de l'équation est le nombre de grossesses et le dénominateur est le nombre cumulé de mois ou de cycles d'exposition depuis le début d'utilisation de la méthode jusqu'à l'arrêt de l'étude, son abandon ou une grossesse. Le quotient est multiplié par 1200 si le dénominateur est évalué en mois ou par 1300 s'il s'agit de cycles. Disons tout de suite qu'un important facteur de variations est la durée de prise de contraception. Plus cette durée est importante, plus bas sera l'IP (au-delà d'1 an, on s'affranchit des effets secondaires, des patientes non satisfaites, des grandes oublieuses à qui la méthode ne convient pas...). Ne sont donc comparables que les IP sur une même durée. Un bon exemple est donné par la pilule triphasique au Lévonorgestrel. Une étude sur 13 cycles donne un IP à 2,18 et cet indice passe à 0,06 dans une étude durant 5 ans. Une 3e étude pour la même pilule durant 1 an donne 0,84 ! De même, une même pilule avec 20 μg d'E.E. contenant de la Noréthindrone, on trouve un IP à 1,06 alors qu'une autre étude de même durée indique un IP à 2,36 !

Tableau 1. Taux de grossesses (%) des différentes méthodes contraceptives

en utilisation typique (de routine) et utilisation parfaite

pendant les 12 premiers mois d'utilisation

   

 

˙MÉTHODE

˙UTILISATION

˙UTILISATION

 
˙  ˙ 

˙TYPIQUE (%)

˙PARFAITE (%)

˙  ˙Pas de contraception

˙85

˙85

˙  ˙Spermicides

˙21

˙6

˙  ˙Abstinence périodique

˙20

˙1-91

˙  ˙Retrait

˙19

˙4

˙  ˙Diaphragme

˙18

˙6

˙  ˙Préservatif masculin

˙21

˙5

˙  ˙Préservatif féminin

˙12

˙3

˙  ˙Pilule progestative

˙3

˙0,5

˙  ˙Pilule combinée

˙3

˙0,1

˙  ˙Stérilet (cuivre)

˙0,8

˙0,6

˙  ˙Stérilet (progestérone)

˙2

˙1,5

˙  ˙Injectables

˙0,3

˙0,3

˙  ˙Implant

˙0,09

˙0,09

En ce qui concerne les nouvelles méthodes (tableau 2), le patch EVRA et le NUVARING, leur efficacité ne diffère pas, selon les estimations actuelles, de la pilule [4]. Il est tout à fait possible que le patch et l'anneau vaginal
puissent avoir une meilleure efficacité que la pilule en utilisation « typique » compte tenu de leur meilleure observance [5]. Cependant, cette efficacité supérieure n'a pas encore été démontrée par des études randomisées. La seule étude dont nous disposons montre un taux d'échec inférieur pour le patch EVRA (1,2 %) à celui d'une pilule OP comparative (2,2 %), mais la différence n'est pas statistiquement significative (p = 0,6). ARCHE a récemment estimé que pour prouver formellement la supériorité du patch sur la pilule durant une utilisation « typique », il faudrait avoir recours à une étude comprenant plus de 20 000 patientes ! L'importance de cet échantillon rend bien sûr illusoire une étude de ce type.

En ce qui concerne l'anneau vaginal, il n'y a aucune étude randomisée comparative versus pilule. Quoi qu'il en soit, les effets secondaires de ces nouvelles méthodes étant plutôt inférieurs comparativement à la pilule, les oublis forcément moins fréquents compte tenu du changement hebdomadaire ou mensuel, l'observance annoncée par les études étant 2 fois meilleure, il est probable que ces méthodes puissent être imputées d'un taux d'échecs inférieur à celui de la pilule contraceptive classique.Tableau 2. Méthode contraceptive utilisée lors de la dernière

grossesse non désirée et raisons de l'échec (étude COCON)

˙
 

˙Méthode

˙Proportion parmi

˙Raison de l'échec

  
˙  ˙contraceptive

˙les grossesses

˙et proportion pour

 
˙  ˙ 

˙non désirées (897)

˙chacune d'elles

 
˙  ˙ 

˙ 

˙NA

˙NA

˙  ˙Pas de contraception

˙34,9

˙ 

˙

˙  ˙Pilule

˙20,9

˙Prise trop tardive ou oubli

˙60,3

˙  ˙ 

˙ 

˙Maladie, médicaments

˙10,6

˙  ˙ 

˙ 

˙Vomissements

˙7,7

˙  ˙ 

˙ 

˙Pas d'explication

˙21,4

˙  ˙Stérilet

˙8,7

˙Mal placé ou tombé

˙31,1

˙  ˙ 

˙ 

˙Maladie, médicaments

˙11,3

˙  ˙ 

˙ 

˙Pas d'explication

˙57,6

 

˙Préservatif

˙11,8

˙Glissé ou déchiré

˙52,9

  
˙  ˙ 

˙ 

˙Pas de contraception cette fois

˙28,1

 
˙  ˙ 

˙ 

˙Pas d'explication

˙19

 
˙  ˙Méthodes naturelles

˙21,8

˙Mauvaise date

˙26,2

˙
˙  ˙(température, retrait, etc...)

˙ 

˙Partenaire se retirant trop tard

˙67,1

 
˙  ˙ 

˙ 

˙Pas d'explication

˙6,7

 
˙  ˙Méthodes locales

˙1,4

˙Utilisation incorrecte

˙32

 
˙  ˙(spermicides, etc...)

˙ 

˙Pas de contraception cette fois

˙51,9

 
˙  ˙ 

˙ 

˙Pas d'explication

˙16,1

 
˙  ˙Autres méthodes

˙0,6

˙NA

˙NA

La situation en France

Elle n'est guère plus brillante si l'on en croit les résultats de l'étude COCON [6].

14 704 foyers français ont été choisis au hasard. Ont été retenues 1 034 femmes ayant subi un avortement dans les 5 années précédentes ou dont la dernière grossesse n'était pas désirée. 1 829 autres femmes ont été retenues et ont constitué un groupe témoin. Les résultats sont plus que surprenants :

-   65 % des grossesses non désirées surviennent chez des femmes sous contraception (aux USA ce pourcentage n'est que de 47 % d'après les résultats du NSFG de 1995).

-   33 % des grossesses n'étaient pas planifiées et la moitié d'entre elles aboutit à une IVG.

-   Seulement 2,7% des femmes de 18 à 25 ans, sexuellement actives et ne voulant pas d'enfant, n'utilisent pas de contraception et contrairement à certaines idées reçues, la plupart des grossesses non désirées surviennent chez des femmes qui sont sous contraception.

L'analyse détaillée des résultats (tableau 3) indique que près d'un quart de ces grossesses non désirées interviennent chez les utilisatrices de pilule. Le plus souvent (60 % des cas), la raison de l'échec de contraception vient d'une prise trop tardive ou d'un oubli. 18 % des femmes invoquent une maladie, des vomissements ou la prise d'un médicament pouvant avoir un effet adverse. 21,4 % n'ont pas d'explication. Moins surprenant est l'échec relatif de l'utilisation d'une méthode naturelle (température, Ogino, retrait) qui fournit un autre quart des grossesses non souhaitées. Erreur de date, retrait trop tardif du partenaire..., ces méthodes sont aléatoires et nous le savons depuis longtemps.

 

Tableau 3. Pourcentage de femmes avec une grossesse

non désirée dans l'année de la 1re utilisation (TRUSSEL 2004)

 

      Utilisation   Utilisation   % femmes

      typique (%)   fréquente (%)   continuant après 1 an

   Pas de contraception   85   85   

   Spermicides   29   18   42

   Retrait   27   4   43

   Abstinence périodique   25

   Cape cervicale

    - Multipares   32   26   46

    - Nullipares   16   9   57

   Éponges

    - Multipares   32   20   46

    - Nullipares   16   9   57

˙
 

˙Diaphragme

˙16

˙6

˙57

 
˙  ˙Préservatifs

˙ 

˙ 

˙

˙  ˙ - Féminin

˙21

˙5

˙49

˙  ˙ - Masculin

˙15

˙ 2

˙53

˙
 

˙Pilule OP et mini

˙8

˙0,3

˙68

 
˙  ˙EVRA

˙8

˙0,3

˙68

˙  ˙NUVARING

˙8

˙0,3

˙68

˙  ˙Dépoprovéra

˙3

˙0,3

˙56

 

˙DIU Cuivre

˙0,8

˙0,6

˙78

 
˙  ˙MIRENA

˙0,1

˙0,1

˙81

˙  ˙Norplant

˙0,05

˙0,05

˙84

˙  ˙Stérilisation féminine

˙0,5

˙0,5

˙100

˙  ˙Stérilisation masculine

˙0,15

˙0,10

˙100

Le stérilet est également responsable de 8,7 % des grossesses non désirées. Les patientes invoquent un stérilet déplacé, expulsé, une interaction médicamenteuse... Cependant, dans plus de 50 % des cas, aucune explication n'est retrouvée et il s'agit potentiellement d'échec vrai de la méthode. Enfin, l'utilisation du préservatif représente 12 % des grossesses non désirées. 1 fois sur 2, il a glissé ou s'est déchiré.

1 grossesse sur 3 non planifiées résulte d'un usage irrégulier de la contraception pour lequel les femmes donnent plusieurs explications. La plus importante est qu'elles pensaient qu'il n'y avait pas de risque de grossesse (63,6 %). 1 sur 8 a déclaré ne pas savoir où aller pour demander conseil. Le Dr BAJOS, un des signataires de cette étude, déclare : « ce que cette étude nous montre très clairement, est qu'il existe une inadaptation entre les besoins contraceptifs d'une femme et la méthode qu'elle utilise ».

Tenir compte des particularités de chaque femme et de ses besoins à un moment particulier est sans doute une démarche trop rarement faite par le corps médical. Par exemple, une pilule OP, théoriquement très efficace, peut ne pas être adaptée à une femme avec des relations sexuelles irrégulières ou un style de vie difficilement compatible avec une prise quotidienne. De plus, les auteurs regrettent que le stérilet ne soit quasiment jamais prescrit aux patientes nullipares, alors que son efficacité pratique est supérieure à la pilule et qu'il convient parfaitement à une relation stable non exposée à des MST.

Sur le plan pratique, comment améliorer la situation ?

La première consultation apparaît capitale. Sa durée est inversement proportionnelle au nombre des échecs.

La connaissance de la patiente, de sa vie, de sa psychologie, de ses besoins, de sa sexualité, de son vécu des contraceptions antérieures, est tout à fait capitale. Adapter la contraception aux besoins de la patiente à un moment donné apparaît essentiel. En cas d'oubli de 2 pilules ou plus, il est important de proposer une contraception additionnelle : soit un préservatif, soit la contraception d'urgence. Il est absolument nécessaire d'informer la patiente de façon à ce qu'elle la connaisse et sache l'utiliser. Les études prouvent que le Norgestrel (Norlevo), 2 comprimés à 0,75 mg en une seule prise, administré le plus rapidement possible après le rapport sexuel non protégé, permet d'éviter 90 % des grossesses. Outre la connaissance de la contraception d'urgence, il est important que la femme y ait rapidement accès. La prescription d'avance de cette contraception d'urgence, en même temps qu'une contraception traditionnelle, en permet l'utilisation pleinement efficace [7]. Les études montrent que la prescription d'une contraception d'urgence ne conduit pas à son utilisation abusive, n'induit pas de comportement à risque (arrêt de la pilule contraceptive, moindre emploi des préservatifs), mais aboutit au contraire à un meilleur usage de la contraception régulière. Le stérilet devrait être discuté et proposé plus fréquemment qu'il ne l'est aux nullipares. S'efforcer de réduire la proportion des patientes utilisant des méthodes contraceptives peu sûres, ceci est bien sûr facilité par l'apparition de nouvelles méthodes permettant vraiment à chacune de faire son choix.

Bibliographie

[1]   Potter LS : How effective are contraceptives? The determination and measurement of pregnancy rates. Obstet Gynecol 1996; 88:13S-23S.

[2]   Steiner MJ : Contraceptive effectiveness: what should the counseling message be? Jama 1999; 282:1405-1407.

[3]   Burkman RT : Clinical pearls: factors affecting reported contraceptive efficacy rates in clinical studies. Int J Fertil Womens Med 2002; 47:153-161.

[4]   Trussell J : Contraceptive failure in the United States. Contraception 2004; 70:89-96.

[5]   Dieben TO, Roumen FJ, Apter D : Efficacy, cycle control, and user acceptability of a novel combined contraceptive vaginal ring. Obstet Gynecol 2002; 100:585-593.

[6]   Bajos N, Leridon H, Goulard H, Oustry P, Job-Spira N : Contraception: from accessibility to efficiency. Hum Reprod 2003; 18:994-999.

[7]   Bouchard P : intérêt de la prescription d'avance en contraception d'urgence. mt endocrinologie et reproduction 2003; 5:146-148.

* Strasbourg.

364   DR Gabriel ANDRE

   EFFICACITE RÉELLE ET THÉORIQUE DES DIFFÉRENTES CONTRACEPTIONS DISPONIBLES EN 2005   365

366   DR Gabriel ANDRE

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368   DR Gabriel ANDRE

   EFFICACITE RÉELLE ET THÉORIQUE DES DIFFÉRENTES CONTRACEPTIONS DISPONIBLES EN 2005   369