Les XXIIe JTA
> Présentation
> Programme
> Comité scientifique
> Intervenants
> Contacter les JTA

En pratique
> S'inscrire
> Renseignements
> Hébergement
> Programme social
> Post-congrès

Les archives
> Andrologie
> Biologie
> Gynécologie
> Infertilité
> Médecine foetale
> Néonatologie
> Nutrition
> Obstétrique
> Pédiatrie
> Périnatalité
> Périnéologie
> Phlébologie
> Psychosomatique

Rechercher

Titre: Le virus de l'hépatite B et la grossesse
Année: 2003
Auteurs:
Spécialité: Obstétrique
Theme: Hépatopathies et grossesse

Le virus de l'hépatite B
et la grossesse

Françoise DEGOS

Le virus de l'hépatite B, (VHB) est le virus le plus fréquent à l'échelon mondial, et le plus contagieux, posant le problème extrêmement préoccupant de la prévention de l'infection néonatale. Ce virus sévit à l'état endémique avec une prévalence différente selon les régions du globe, et la contamination néonatale est majeure dans les pays où la prévalence est > 5 %, en pratique l'Asie du Sud Est et l'Afrique subtropicale

1. Données virologiques

Le virus de l'hépatite B (VHB) est un virus à ADN, enveloppé, appartenant à la famille Hepadnaviridae. Il se présente sous la forme d'une particule sphérique de 42 nm de diamètre appelée particule de Dane. Ce virus se compose d'une enveloppe externe et d'une nucléocapside interne ou « core » contenant le génome viral.

La réplication du VHB comporte une première phase durant laquelle les nucléocapsides virales (antigène HBc) s'accumulent dans le noyau des hépatocytes infectés. Puis, vient la phase de maturation du virus dans le cytoplasme cellulaire avec acquisition de l'enveloppe (antigène HBs). La réplication complète permet la libération, dans le sérum, de particules de Dane infectieuses et d'antigène HBe. On détecte alors dasn le sérum l'ADN du VHB, mesurable et quantifiable. À cette phase de réplication complète peuvent succéder des cycles de réplication abortive : seules les particules virales non infectieuses sont présentes. Les particules de Dane sont absentes l'antigène HBe et l'ADN VHB ne sont pas détectables.

Des formes mutantes du VHB peuvent apparaître au cours de la réplication virale. La mutation la plus fréquemment identifiée est une mutation survenant au niveau de la région pré-C du gène C,

568   F. DEGOS

empêchant la synthèse d'antigène HBe malgré une réplication virale complète et la présence d'ADN viral dans le sérum.

2. Données épidémiologiques et cliniques

L'endémie du VHB est variable selon les zones géographiques. Elle est faible (0,2 à 0,5 % de porteurs chroniques de l'antigène HBs), intermédiaire (2 à 7 %) ou forte (8 à 20 %). Les zones de forte endémie sont l'Asie du Sud-Est, l'Afrique tropicale, l'Extrême-Orient. L'hépatite aiguë B est particulièrement fréquente chez les partenaires sexuelles non vaccinées des sujets porteurs chroniques du VHB. L'infection aiguë initiale par le VHB est asymptomatique dans 2/3 des cas. La période d'incubation de l'hépatite aiguë B est de 2 à 3 mois. Les lésions hépatiques sont dues à la réaction immunitaire de l'hôte dirigée contre le virus. La réplication virale cesse le plus souvent dans le mois qui suit le début des symptômes cliniques.

Le diagnostic d'hépatite B repose sur la détection précoce de l'antigène HBs. La recherche d'anticorps anti-HBc de type IgM oriente ensuite le diagnostic vers l'hépatite aiguë. Le diagnostic d'hépatite aiguë B peut, dans 10 à 15 % des cas, reposer uniquement sur la détection des IgM anti-HBc, l'antigène HBs étant devenu rapidement non détectable avant ou au tout début des symptômes cliniques.

La guérison intervient en 1 à 6 mois. On admet que le risque de développer une infection chronique après primo-infection par le VHB chez un adulte non immunodéprimé ne dépasse pas 5 %.

L'hépatite chronique B est peu symptomatique. La maladie évolue en trois phases. La première phase est caractérisée par une forte multiplication virale, et une quantité importante d'ADN VHB dans le sérum, une activité biologique (élévation des aminotransférases) et histologique modérées. Elle peut durer plusieurs années. La deuxième phase est caractérisée par une diminution de la multiplication virale, une diminution de l'ADN VHB sérique, et une augmentation de l'activité biologique et histologique. Cette phase va aboutir à la disparition de l'AgHBe avec apparition de l'anti HBe. On l'appelle parfois de ce fait phase de séroconversion. La troisième phase est caractérisée par l'absence de réplication virale et l'absence d'activité. On peut observer au cours de la phase sans multiplication virale, une réactivation de l'hépatite, avec réapparition de la multiplication virale, élévation des aminotransférases et réapparition de l'activité histologique.

   LE VIRUS DE L'HéPATITE B ET LA GROSSESSE   569

Chez les mère atteintes d'hépatite chronique B, il faut déterminer s'il existe une réplication virale ou pas. Cette réplication virale peut être évaluée par deux paramètres : le système HBe et la quantification du génome viral (ADN VHB). La présence d'antigène HBe sérique est associée à une réplication virale complète et indique que la patiente est « contagieuse » ; il n'y a pas d'anticorps anti-HBe. En cas d'arrêt de la réplication virale, il y aura négativation de l'antigène HBe, apparition des anticorps anti-HBe. Le meilleur marqueur de réplication virale est l'ADN VHB, dont la présence est synonyme de présence de particules virales infectieuses. La quantification de l'ADN VHB par des techniques de biologie moléculaire.

Chez les patientes atteintes d'hépatite chronique B, trois situations peuvent se présenter :

•   l'AgHBs est présent dans le sérum, sans AgHBe ni ADN VHB détectables : il n'y a pas de multiplication virale. Le risque de transmission du VHB à l'enfant est minime ;

•    l'antigène HBs est présent ; il existe des signes de multiplication virale : présence d'ADN VHB et AgHBe positif. Le risque de transmission est élevé ;

•   l'antigène HBs est présent ; l'ADN VHB est présent mais l'AgHBe n'est pas détectable, et il existe des anticorps anti-HBe. Ce profil sérologique est rencontré chez des patientes infectées par un virus mutant du gène C (mutation empêchant la synthèse d'antigène HBe. L'ADN VHB constitue alors le seul marqueur de multiplication virale. Le risque de transmission est élevé, comme dans le cas précédent.

3. Hépatite B et grossesse

L'hépatite aiguë B survenant chez la femme enceinte n'a pas de particularité clinique. Cependant, elle semble plus mal tolérée au troisième trimestre. La grossesse n'augmente pas le risque d'évolution vers l'hépatite fulminante. Elle ne semble pas, non plus, augmenter le risque de développer une infection chronique après primo-infection par le VHB. Chez un sujet dont le statut sérologique antérieur n'était pas connu, la primo-infection est difficile à distinguer d'une hépatite aiguë par réactivation du VHB qui peut être observée pendant la grossesse. La recherche de l'antiHBc de type IgM est alors d'un intérêt majeur.

L'infection chronique par le VHB n'a pas d'influence délétère sur la grossesse, elle n'est pas aggravée par la grossesse et n'est pas

570   F. DEGOS

une contre-indication à une grossesse. Cependant, il est licite de proposer, avant procréation, un traitement anti-viral aux femmes ayant une multiplication virale, afin de diminuer le risque de transmission materno-fœtale (voir ci-après).

4. Transmission materno-foetale du VHB

Il n'y a pas de transmission transplacentaire du VHB, sauf exception. La contamination fœtale est per-natale. Elle survient pendant l'accouchement, soit par échanges sanguins tardifs mère-enfant, soit par déglutition des sécrétions lors du passage des voies génitales. La naissance par césarienne n'empêche pas la contamination de l'enfant. La contamination post-natale, lors du maternage, est possible.

Le risque de transmission varie selon la date de survenue de l'hépatite aiguë B pendant la grossesse. Au premier trimestre, ce risque est pratiquement nul ; au deuxième trimestre, il est de l'ordre de 10 %-20 %. Au troisième trimestre de la grossesse ou dans les deux premiers mois du post-partum, il dépasse 80 %.

Chez la femme enceinte ayant une hépatite chronique B, le risque de transmission materno-foetale du VHB dépend du niveau de réplication virale au moment de l'accouchement. Il est de plus de 90 % chez les femmes avec réplication virale, contre 5-20 % chez les femmes sans réplication virale. Lorsqu'il existe une multiplication virale importante chez la mère, il se pourrait que la présence de l'AgHBe circulant au cours de la grossesse entraîne une immuno-tolérance, l'absence de réaction immunitaire contre le VHB de la part du nouveau-né, et explique ainsi la fréquence du portage chronique du VHB chez les nouveaux nés contaminés.

5. Transmission paternelle du VHB
en période néo-natale

Le risque doit être envisagé dans les familles originaires de zones géographiques de forte endémie pour le VHB, et cela, même si la mère n'est pas elle-même porteuse chronique du virus. Si on détecte un portage chronique du VHB chez le père, les auteurs recommandent la séro-vaccination du nouveau-né à la naissance est recommandée.

   LE VIRUS DE L'HéPATITE B ET LA GROSSESSE   571

6. Infection du nouveau-né

Chez l'enfant contaminé avant trois mois en l'absence de séro-vaccination
il existe un risque très faible d'hépatite fulminante. Par contre, le risque d'évolution vers l'hépatite chronique est de 90 à 100 %.

7. Stratégie de dépistage et de diagnostic
de l'infection materno-fœtale

Le risque de transmission materno-fœtale de l'hépatite B ainsi que ses conséquences chez l'enfant ont amené à mettre en place une surveillance obligatoire de cette infection durant la grossesse. Le décret N° 92-143 du 14 Février 1992 relatif aux examens prénuptial, prénatal et postnatal impose une recherche d'antigène HBs au cours du sixième mois de grossesse.

8. Traitement

Mère

L'hépatite aiguë B chez la femme enceinte ne nécessite aucun traitement. La survenue d'une hépatite aiguë B dans l'entourage proche d'une femme enceinte non immunisée vis-à-vis du VHB est une indication à sa vaccination immédiate et à la séro-vaccination de l'enfant à la naissance.

A la condition stricte que la séro-vaccination du nouveau-né soit correctement effectuée, l'allaitement maternel par une femme porteuse de l'antigène HBs est autorisé, même s'il existe une réplication virale. Il faut rappeler que les traitements anti-viraux sont contre-indiqués au cours de la grossesse et de l'allaitement.

Enfant

La sérovaccination est la technique de choix, démontrée comme capable de prévenir plus de 95 % des contaminations néonatales, quel que soit le statut sérologique de la mère par rapport au VHB. Tout nouveau-né de mère ayant développé une

572   F. DEGOS

hépatite aiguë B pendant sa grossesse, quelle que soit la date de l'infection maternelle, doit recevoir une séro-vaccination. Tout nouveau-né de mère atteinte d'hépatite chronique B, quel que soit le niveau de réplication virale chez la mère, doit aussi recevoir cette séro-vaccination. La séro-vaccination combine l'immunisation passive, par injection d'immunoglobulines anti-HBs, à la vaccination. Cette séro-vaccination du nouveau-né comporte, dans les 24 h suivant la naissance, une injection d'immunoglobulines anti-HBs (0,5ml en IM) et une première injection, en un point différent, de vaccin recombinant contre l'hépatite B. La vaccination sera complétée par une injection à 1 mois d'âge, puis à 6 mois (schéma 0, 1, 6). L'efficacité du vaccin chez les nouveau-nés est supérieure à 95 %.

La vaccination de tous les nouveaux-nés (en l'absence de problème de contamination néonatale) fait partie du calendrier vaccinal, et reste mal pratiquée en France puisque les dernières évaluations montrent que seulement 30% des enfants de moins de 1 an sont actuellement immunisés contre le VHB.

Père et fratrie

Il est utile de déterminer le profil sérologique du père et des autres enfants afin de proposer, si nécessaire, une vaccination contre l'hépatite B.

HéPATITE DELTA

Le virus de l'hépatite Delta (VHD), aussi appelé agent Delta, est un virus à ARN. Le VHD est un virus défectif, sa réplication virale n'étant possible qu'en présence d'un virus auxiliaire, le VHB. Le VHD est un virus enveloppé par l'enveloppe du VHB, qu'il a empruntée.

1. Données épidémiologiques et cliniques

Le VHD infecte surtout les toxicomanes par voie intraveineuse et leurs partenaires sexuels. La vaccination contre le VHB de ces derniers assure donc la prévention à la fois de l'hépatite B et de l'hépatite D (ou delta).

L'infection par le virus Delta peut s'observer soit simultanément par rapport à l'infection VHB (co-infection), soit chez un patient

   LE VIRUS DE L'HéPATITE B ET LA GROSSESSE   573

préalablement porteur du VHB : (surinfection). La co-infection peut être responsable d' une hépatite aiguë sévère, la surinfection s'accompagne généralement d'une disparition de la multiplication virale, et sa gravité dépend de la sévérité de l'atteinte hépatique antérieure, attribuable au VHB.

Diagnostic de l'infection Delta

Le diagnostic d'hépatite Delta se fait à partir de trois marqueurs : l'antigène Delta, les IgM anti-Delta et les anticorps totaux anti-Delta. Lors de l'infection Delta, l'antigénémie Delta est souvent transitoire ; elle est suivie par la synthèse d'IgM anti-Delta puis d'IgG anti-Delta.

Diagnostic de coinfection

Cette primo-infection simultanée par le VHB et le VHD se traduit par un profil sérologique d'hépatite aiguë B (présence d'antigène HBs et d'IgM anti-HBc) associé à des marqueurs Delta ; la détection de l'antigène Delta est peu fréquente ; les IgM anti-Delta sont détectés avant les anticorps totaux anti-Delta.

Diagnostic de surinfection

Cette primo-infection par le VHD chez un patient atteint d'hépatite chronique B se traduit par un profil sérologique d'hépatite chronique B (présence d'antigène HBs, absence d'IgM anti-HBc) associé à des marqueurs Delta. On note souvent un arrêt de réplication virale.

2. Hépatite D et grossesse

La survenue d'une hépatite aiguë D au cours de la grossesse a rarement été documentée.La transmission néo-natale du VHD n'est possible que s'il existe une réplication du VHB chez la mère. La recherche des marqueurs Delta est particulièrement indiquée chez les femmes enceintes ayant une hépatite chronique B sans réplication virale, et une augmentation même minime des aminotransférases.

574   F. DEGOS

Conclusion

La détection et la prise en charge de la mère, de l'enfant et du reste de la famille en cas d'infection par le VHB est absolument indispensable. En effet, nous disposons de la vaccination , associée ou non à l'administration d'immunoglobulines anti-HBs, traitement capable de prévenir dans la plupart des cas la transmission néonatale du VHB au nouveau-né.

Ceci est d'autant plus important que l'évolution d'une infection par le VHB contractée au cours de la période néonatale est particulièrement sévère, entraînant une infection chronique dans 90% des cas, et la possibilité de survenue de carcinome hépatocellulaire avant la dixième année. Les études de séro-vaccination menées dans les pays de forte endémie ont démontré qu'une politique de prévention bien conduite aboutissait en 10 ans à la disparition des cas de carcinome hépato-cellulaire, la complication la plus grave du portage chronique du VHB. On peut ainsi considérer que le vaccin contre le VHB est le premier vaccin contre un cancer.

Bibliographie

[1]   RIZZETTO M. Viral infections of the liver. In : Bircher J, Benhamou JP, McIntyre N, Rizzetto M, Rodès J, editors. Oxford Textbook of Clinical Hepatology. Oxford Medical Publications ; 1999. p. 827-975.

[2]   LEMON SM, THOMAS DL. Vaccines to prevent viral hepatitis. N Engl J Med 1997;336:196-204.

[3]   WU JS, HWANG LY, GOODMAN KJ, BEASLEY RP. Hepatitis B vaccination in high-risk infants : 10-year follow-up. J Infect Dis 1999;179:1319-25.

[4]   RAWAL BK, PARIDA S, WATKINS RPF, GHOSH P, SMITH H. Symptomatic reactivation of hepatitis B in pregnancy. Lancet 1991;337:364.

[5]   RANCKX R, ALISJAHBANA A, MEHEUS A. Hepatitis B virus vaccination and antenatal transmission of HBV markers to neonates. J Viral Hepat 1999;6:135-9.

[6]   SOULIé JC, UZAN M. L'allaitement accroît-il le risque de transmission de l'état de porteur chronique du virus de l'hépatite B ? Gastroenterol Clin Biol 1997; 21:197-9.

[7]   ZANETTI AR, FERRONI P, MAGLIANO EM, PIROVANO P, LAVARINI C, MASSARO AL, GAVINELLI R, FABRIS C, RIZZETTO M. Perinatal transmission of the hepatitis B virus and of the HBV-associated Delta agent from mothers to offspring in northern Italy. J Med Virol 1982;9:139-48.