y a-t-il un âge pour être
parents ?
R. FRYDMAN
C'est une question qui a un versant médical et un versant
sociologique voire philosophique.
Peut-on édicter une règle morale qui viserait à
établir les critères nécessaires pour être
parents? Je ne le crois pas. Ni l'âge, ni les supputations
sur le bien-être de l'enfant à être élevé
ne me semblent reposer sur une analyse objective. Elles ne sont
sûrement que de simples projections de nos propres fantasmes
ou désir d'idéal.
Le fond du problème est que je ne crois pas que le médecin
soit un garant d'un modèle de société, en
tous les cas, pas plus que tout citoyen. Par contre, là
où il intervient de façon spécifique c'est
lorsqu'on lui pose la question " la grossesse est-elle possible
? ". Et, si aujourd'hui, il y a peu de limites sur le plan
physiologique pour la composante masculine, il reste que la composante
féminine est fondamentale.
Si bien que le médecin se pose deux questions : est-il
licite d'aider cette femme à être enceinte à
partir de ses propres ovules ou bien faut-il faire appel au don
d'ovules et jusqu'à quel âge ? La loi nous impose
de respecter l'âge naturel de la procréation. Les
informations épidémiologiques nous montrent que
sur les 750 000 naissances en France par an, 600 grossesses après
45 ans vont à terme et la plupart se terminant vers l'âge
de 48 ans. Cela donne un reflet de ce qu'est aujourd'hui l'âge
naturel de la procréation.
La première étape est donc d'essayer d'analyser
très précisément les possibilités
de conception du couple. La qualité de la réponse
ovarienne à la stimulation joue un rôle crucial dans
les résultats de la fécondation in vitro.
Dans le but d'anticiper cette réponse ovarienne, nous avons
développé un test complémentaire des dosages
classiques de FSH plasmatiques en milieu de phase folliculaire.
Nous avons étudié 2 groupes de femmes âgées
de 25 à 41 ans. Ces femmes ont été réparties
en deux groupes selon le type de la réponse ovarienne à
la stimulation précédente. Le groupe A constitué
par des femmes ayant présenté de mauvaises réponses
ovariennes de façons répétées et le
groupe B constitué par des femmes ayant présenté
des réponses ovariennes normales lors des tentatives précédentes
de FIV. Le test consiste en l'administration de 300 unités
de FSH purifiée au 3e jour de leur cycle menstruel. Des
dosages de FSH, de LH et d'Estradiol sont faits juste avant (T0)
et 12, 24 et 48 heures après l'administration de la FSH.
RESULTATS
Nous avons observé que les taux de FSH plasmatique de base
ont été significativement différents entre
les groupes A et B (12,5 mUI/ml contre 16,4 mUI/ml) ainsi que
l'augmentation des taux d'E2 24 heures après l'administration
de la FSH (15 pg/ml dans le groupe A versus 132,5 pg/ml dans le
groupe B).Si ces deux paramètres (FSH de base et DE2 24
heures) sont analysés de façon isolée, leur
valeur prédictive d'une bonne ou mauvaise réponse
ovarienne est insuffisante. En effet, on note de nombreux faux
positifs et faux négatifs quand la FSH de base est dans
les limites de la normale 27,3 % appartiennent au groupe des hyporépondeuses
; quand la FSH plasmatique au contraire se situe au-dessus des
valeurs normales, 28,5 % de ces patientes appartiennent au groupe
des normorépondeuses. Il en va de même pour le groupe
DE2 24 heures. Cependant, si les deux paramètres sont analysés
de façon conjointe, il n'y a plus ni faux positif, ni faux
négatif : si la FSH de base est normale avec un DE2 de
24 heures normal,100 % de normorépondeuses, si la FSH de
base est anormale avec le DE2 insuffisant, 100 % d'hyporépondeuses.
Ainsi, bien que préliminaires, nos résultats suggèrent
que le test de réserve ovarienne à FSH exogène
dans un contexte d'évaluation ovarienne avant FIV peut
servir d'un complément aux dosages habituels de FSH en
début de cycle en améliorant la spécificité
pour prévoir la qualité de la réponse ovarienne
tout en ayant une grande simplicité pratique.
Plus que l'âge administratif, c'est donc l'âge ovarien
qu'il nous importe de cerner. Ce test vient renforcer les études
déjà faites de Toner et coll. qui ont dosé
la FSH à J3, de Muasher et coll. qui ont proposé
l'étude de rapport FSH/LH comme autre façon d'évaluer
le potentiel de la réponse ovarienne, ainsi que différents
tests dynamiques de réserve ovarienne dont celui de Navot
et coll. qui ont proposé une analyse de la performance
endocrinienne des ovaires suite à l'administration de 100
mg de citrate de clomiphène du 5e au 9e jours du cycle.
Enfin, Winslow et coll. suivant un modèle proposé
antérieurement par Padilla et coll. ont observé
une corrélation entre l'augmentation des taux de E2 à
la suite de l'administration d'un agoniste de la GnRH (effet "
flare-up ") et la performance ovarienne sous stimulation
en vue de FIV. Ce travail a été repris par Hugues
et coll.
Une fois après avoir répondu donc à la question
de façon plus objective sur les capacités réelles
d'obtention d'une grossesse, reste à savoir si en cas de
mauvais pronostic l'on passe au don d'ovules dont les contraintes
sont importantes. La Loi du 30 Juillet 1994 autorise le don d'ovules
en France sous certaines conditions : conditions pour la donneuse,
condition pour le couple receveur et conditions pour l'équipe
médicale qui doit effectuer un appariement anonyme et gratuit
en prenant soin de ne pas cumuler lors de cet appariement les
risques de survenue d'une maladie reconnue.
EN CONCLUSION
De façon schématique, on peut proposer habituellement
jusqu'à 40-42 ans, d'assurer une prise en charge médicalement
assistée lorsque les conditions du bilan hormonal, l'autorise.
De 42 à 48 ans maximum, si la patiente a satisfait à
un bilan médical préalable (cardio-vasculaire),
il est possible d'envisager le don d'ovocytes tout en restant
dans le cadre légal. Comme toujours, lorsque des situations
soulèvent beaucoup de passion, il serait nécessaire
que nous donnions un véritable observatoire de nos prises
en charge.
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R. FRYDMAN Service de Gynécologie-Obstétrique, Hôpital
A. Béclère, 157, rue de la Porte de Trivaux, 92141
Clamart.
: JOURNÉES
DE TECHNIQUES AVANCÉES EN GYNÉCOLOGIE OBSTÉTRIQUE
ET PÉRINATALOGIE PMA, Fort de France 11 - 18 janvier 1996
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