Don d'ovocytes - transfert tardif ou précoce ?
Dr
Dominique CORNET - Hôpital Tenon - Paris
INTRODUCTION
:
La
stratégie de transfert des embryons en fécondation in vitro concerne
en général le nombre d'embryons à replacer, afin de minimiser
le risque de grossesses multiples. Elle peut s'appliquer également au
temps de culture in vitro, et lorsque les embryons sont congelés au choix
du jour du transfert par rapport à l'âge de l'endomètre.
En effet, un embryon ayant pu atteindre un stade plus avancé dans son
développement aura de plus grandes chances de s'implanter. D'autre part,
il est possible de transférer un embryon congelé à un stade
bien précis d'une façon synchrone ou non par rapport au stade
de maturation endométriale.
La spécificité du don d'ovocytes en France est liée à
l'obligation de quarantaine des embryons impliquant leur congélation
systématique. Cette situation diffère de celle de la fécondation
in vitro classique où seuls les embryons surnuméraires seront
congelés, ce qui conduit à replacer un nombre un peu plus important
d'embryons, en tenant compte des risques de perte à la congélation.
Faut-il synchroniser le stade de développement de l'embryon avec celui
de l'endomètre ? En fécondation in vitro classique, la vitesse
de croissance des embryons peut varier, et la différenciation sécrétoire
de l'endomètre se faire plus précocement comme en cas de lutéinisation
prématurée. Les transferts d'embryons congelés sont donc
un modèle d'étude tout à fait privilégié
des effets de la désynchronisation entre âge embryonnaire et endométrial.
Par ailleurs, la nécessité du traitement hormonal substitutif
dans les cas d'insuffisance ovarienne offre une singularité propre au
don d'ovocytes, susceptible d'influencer également la différenciation
sécrétoire de l'endomètre et dont il faudra tenir compte.
DISCUSSION
:
Transfert
en fonction du stade embryonnaire :
Dans
les conditions idéales, le blastocyste présente les qualités
les plus favorables pour obtenir une grossesse, néanmoins cette stratégie
pose deux problèmes d'ordre pratique. Le premier est lié au risque
pour l'embryon de ne pas trouver in vitro les conditions optimales pour assurer
son développement jusqu'à un tel stade. Les milieux synthétiques
de culture in vitro semblent sub-optimaux par rapport aux techniques de coculture
puisqu'ils ne permettent pas d'obtenir le même pourcentage de blastocystes.
Toutefois une meilleure connaissance des besoins de l'embryon devrait permettre
d'améliorer les caractéristiques de ces milieux. Le recours aux
cocultures sur cellules " Vero " ou sur cellules propres maternelles
d'origine endométriale ou provenant de cellules de la granulosa présente
des difficultés qui en limitent actuellement leur usage.
Le deuxième point concerne la nécessité de la congélation
systématique avec ses conséquences sur l'embryon qui pourra perdre
une partie, voire la totalité de ses blastomères. Si la perte
embryonnaire est de l'ordre de 25%, son impact sera beaucoup plus lourd aux
stades plus avancés par rapport au stade de 2 pronuclei, à condition
qu'elle concerne une proportion similaire d'embryons.
La stratégie actuelle à l'hôpital Tenon est donc plutôt
de congeler au stade le plus précoce pour minimiser l'impact de la congélation.
Ce choix pose par contre des problèmes au moment de la décongélation
puisque la qualité embryonnaire ne peut pas être prévisible
et que la décongélation de deux zygotes la veille de leur transfert
ne garantit pas l'obtention de deux embryons de belle qualité. Cette
situation s'apparente d'ailleurs à celle qui règne en Allemagne
où la législation y impose une congélation au stade de
deux pronuclei.
Le
transfert peut-être précoce ou tardif par rapport à la "fenêtre
d'implantation"
L'existence
d'une fenêtre d'implantation est aujourd'hui parfaitement
documentée. Il existe en effet une période réfractaire
à l'implantation qui fait suite à l'ouverture de cette fenêtre.
La fenêtre de transfert d'embryons devra donc tenir compte de la largeur
de la fenêtre d'implantation et se situera quelques jours plus tôt,
en amont. Quelle rigueur dans la synchronisation faut-il respecter entre l'âge
de l'embryon et celui de l'endomètre ? Un certain nombre d'études
ont montré qu'un transfert trop tardif était associé à
une chute des taux de succès. Ces données ne font toutefois pas
l'unanimité, et Edwards en 95 rappelait que la fenêtre pouvait
être beaucoup large. Toujours est-il qu'un certain nombre d'équipes
montrent l'absence d'implantation à partir de deux jours d'avance de
l'endomètre par rapport à l'âge embryonnaire (Salat-Baroux,
Navot et Prapas).
Il semble que l'ouverture de la fenêtre d'implantation soit plus précoce
dans les cycles stimulés du fait de l'élévation plus rapide
de la progestéronémie, ainsi que dans les cycles de traitement
hormonal substitutif pour don d'ovocytes, où l'introduction de la progestérone
vaginale entraîne une accélération de la différenciation
sécrétoire de l'endomètre.
CONCLUSION
:
Il
est vraisemblable qu'une des évolutions futures, majeures en assistance
médicale à la procréation consistera à mieux choisir
les embryons les plus aptes à s'implanter. La culture prolongée
jusqu'au stade de blastocystes est un moyen indirect de sélection qui
permet déjà de réduire le nombre d'embryons transférés
et donc de mieux gérer le risque de grossesses multiples.
D'autre part,la congélation des embryons surnuméraires en FIV,
et de tous les embryons issus du don d'ovocytes, nécessite de respecter
au moment du transfert les " âges " respectifs de l'embryon
et de l'endomètre, bien qu'un replacement plus précoce semble
offrir des chances comparables, à l'inverse par contre d'un replacement
trop tardif.
BIBLIOGRAPHIE
1/
Edwards.R.G.Clinical approaches to increasing uterine receptivity during human
implantation Hum.Reprod, 10, Suppl. 2, 1995, 60-66.2 / Navot.D, Scott.R.T, Droesch.K,
Veeck.L.L, Liu H.C, Rosenwaks.Z.
The Window of embryo transfer and the efficiency of human conception in vitro
Ferti and Stéril, 1991, 55, 114-118
3
/ Prapas Y, Prapas N, Jones EE The window for embryo transfer in oocyte donation
cycles depends on the duration of pregesterone therapy Hum Reprod, 1998, 13,
720-723.
/ Salat-Baroux.J, Mandelbaum.J, Cornet.D, Alvarez.S, Plachot.M.La fenêtre
d'implantation naturelle et artificielle chez la femme.
In : Le bilan de la fertilité, Paris, 1990.
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