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Titre: Protection cardiovasculaire de l'estradiol : impact sur la prostacycline et le NO
Année: 1998
Auteurs: - Foidart J.-M.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Oestrogénes

Protection cardiovasculaire de l’estradiol :
impact sur la prostacycline et le NO.

Professeur J.M. FOIDART

Département de Gynécologie-Obstétrique, CHR de la Citadelle,
1 bd du 12ème de Ligne, B-4000 Liège, Belgique.

 

Les hormones sexuelles sont des substances vasoactives qui affectent la vascularisation de nombreux systèmes, outre les organes de la reproduction. Les estrogènes naturels, et en particulier l’estradiol, relâchent la musculature des artères coronaires et cérébrales, animales et humaines. Il est probable que l’effet cardioprotecteur de l’hormonothérapie substitutive de la ménopause est au moins en partie lié à l’effet direct des estrogènes sur le système vasculaire. Les mécanismes impliqués ne sont toutefois pas complètement élucidés.

Les estrogènes augmentent le débit sanguin utérin et le débit cardiaque. Ils diminuent les résistances artérielles utérines et systémiques à la fois chez la femme et l’animal. Magness et Rosenfeld (1989) ont perfusé de l’estradiol 17b localement dans les artères utérines de brebis ovariectomisées. Endéans les 20 minutes, ils ont observé une augmentation importante du débit sanguin utérin et une diminution proportionnelle de la résistance vasculaire artérielle utérine sans modification systémique. Toutefois, 30 minutes après une deuxième perfusion d’estradiol 17b par voie générale, ils ont observé une augmentation du débit cardiaque et une diminution correspondante de la résistance artérielle systémique sans modification de la pression artérielle.

Le groupe de Peter Collins (1995) a procédé à des études comparables chez la femme postménopausée en bonne santé. L’administration aiguë sublinguale d’estradiol 17b augmente le débit sanguin de l’avant-bras et diminue proportionnellement la résistance artérielle périphérique sans modification de la pression artérielle moyenne.

Diverses études pharmacologiques ont étudié l’effet des stéroïdes sur la vasodilatation induite par l’acétylcholine. L’administration intraveineuse d’estradiol potentie les effets de l’acétylcholine chez la femme postménopausée normale présentant des lésions athéromateuses. De même, Ganger et coll. (1991) ont démontré chez la femme postménopausée en bonne santé que le traitement au long cours par de l’estradiol percutané aboutit à une diminution de 30 % de l’indice de pulsatilité des artères carotides qui témoigne de la résistance au débit sanguin.

Un certain nombre de mécanismes ont été proposés afin d’expliquer l’effet direct des estrogènes sur la paroi artérielle. Ces mécanismes peuvent d’ailleurs différer selon la nature aiguë ou chronique de l’effet cardioprotecteur évalué.

Des effets génomiques sont impliqués dans la protection cardiovasculaire au long terme. Les récepteurs b1 et b2 de l’estradiol ont été localisés dans les artères coronaires humaines. Toutefois, les réponses aiguës des artères à l’estradiol sont observées en l’espace de quelques minutes. Elles ne pourraient donc pas être associées à un effet génomique nécessitant une transcription puis une traduction d’un gène en une protéine. Ces résultats suggèrent donc un effet direct membranaire des estrogènes. Ces effets directs aigus des estrogènes sur les artères coronaires impliquent l’intégrité de l’endothélium. L’endothélium est en effet une couche continue de cellules qui joue un rôle clé dans la modulation du tonus vasomoteur artériel par sa capacité de sécréter localement divers types de molécules vasoactives.

Le monoxyde d’azote (NO), autrefois appelé EDRF (Endothelium Derived Releasing Factor), est une de ces molécules. L’EDRF-NO est libéré en réponse à de nombreux facteurs parmi lesquels l’acétylcholine, mais aussi l’ATP, la bradykinine ... Sa libération entraîne une relaxation de la paroi vasculaire. Les artères endommagées ou celles dont l’endothélium a été expérimentalement éliminé ne réagissent plus à l’acétylcholine par une vasodilatation mais au contraire par une vasoconstriction. En effet, cet acétylcholine se lie alors aux récepteurs muscariniques des cellules musculaires lisses entraînant la vasoconstriction. Au contraire, lorsque la paroi artérielle est intacte en présence d’un endothélium sain, l’acétylcholine se lie à la membrane cellulaire endothéliale et stimule la libération locale de NO en activant les récepteurs muscariniques endothéliaux. Ceci aboutit alors à l’activation de la NO-synthase qui convertit l’arginine en NO + citrulline.

Les estrogènes sont donc capables de moduler la production de NO-synthase et la libération accrue de NO. Ils potentient en outre les effets de l’acétylcholine sur le récepteur muscarinique et prolongent la demi-vie du NO produit car l’estradiol exerce des propriétés anti-oxydantes.

Le NO, à son tour, provoque le relâchement des cellules musculaires lisses vasculaires, inhibe leur prolifération et favorise celle des cellules endothéliales. Des études in vitro réalisées dans notre laboratoire démontrent que l’estradiol stimule bien la production basale de NO.

Sudhir et coll. (1996) ont montré que chez les femmes en période de périménopause, la supplémentation estrogénique pendant 8 semaines diminue la pression artérielle périphérique, augmente la libération de NO et l’élimination urinaire de son métabolite stable, le NO2. Ces résultats suggèrent que l’augmentation de la libération de NO dans des conditions physiologiques peut contribuer à la protection cardiovasculaire conférée par le traitement hormonal substitutif de la ménopause. Dans cette étude, l’administration cyclique d’acétate de noréthistérone atténue les effets bénéfiques de l’estradiol en réduisant la libération de NO. Des résultats comparables ont été récemment obtenus par le même groupe qui a montré que d’autres progestatifs, tels que l’acétate de cyprostérone ou l’acétate de médroxyprogestérone, diminuent également la libération accrue de NO favorisée par l’estradiol. De plus, Rosselli et coll. (1995) ont montré récemment que l’estradiol appliqué par voie transdermique augmente les taux plasmatiques de NO et qu’une bonne corrélation existe entre les taux d’estradiol obtenus et la production locale de NO.

D’autre part, la prostacycline est une prostaglandine vasodilatatrice et anti-agrégante produite par les cellules endothéliales. Sa synthèse est stimulée in vivo et in vitro par l’estradiol, tandis que celle de l’endothéline, un peptide vasoconstricteur, ne l’est pas.

Finalement, un lien entre les estrogènes et le système rénine-angiotensine-aldostérone a été mis en évidence. Les effets d’une castration et d’une hormonothérapie substitutive estrogénique sur la pression artérielle et la production de NO ont été étudiés chez les rats normotendus et hypertendus. L’estradiol semble contrecarrer l’hypertension induite par la libération accrue de rénine. Cet estradiol semble avoir un effet vasodilatateur et anti-hypertenseur en favorisant localement une libération accrue de NO par l’endothélium (Brosnihan et coll., 1994).

Finalement, très peu d’études fiables randomisées et prospectives se sont attaché à étudier l’effet de l’hormonothérapie substitutive sur la pression artérielle chez l’homme. La plupart des études n’ont pas mis en évidence de modification de la pression artérielle chez les utilisatrices d’estradiol par rapport aux non-utilisatrices, à la fois chez les femmes normotendues ou hypertendues. Luotala (1983), à Helsinki, a montré que l’estradiol peut diminuer la pression artérielle systolo-diastolique chez la femme postménopausée. et coll. ont, par contre, montré que ni les estrogènes ni les progestatifs seuls ne peuvent augmenter ou diminuer significativement la pression Regensteiner et coll. (1991) ont, par contre, montré que ni les estrogènes, ni les progestatifs seuls ne peuvent augmenter ou diminuer significativement la pression artérielle, tandis que l’administration conjointe d’estradiol et de progestatifs diminue la pression systolique et diastolique ainsi que les pressions artérielles moyennes de 6 à 7 mm de Hg.

Ces divers travaux démontrent donc que l’hormonothérapie substitutive de la ménopause, soit sous forme d’estrogènes ou sous forme de combinaison estroprogestative exerce un effet cardioprotecteur. La découverte des effets systémiques vasculaires des estrogènes indépendamment de la circulation au sein des organes de la reproduction a des implications fascinantes, non seulement chez la femme ménopausée bien-portante, mais également chez celle présentant une hypertension et une affection coronarienne athérogène.

Bibliographie

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GANGER K.F., VYAS S., WHITEHEAD M., CROOK D., MEIRE H. et CAMPBELL S., “Pulsatility index in internal carotid artery in relation to transdermal estradiol and time since menopause”. Lancet, 1991 : 338, 839-842.

LUOTOLA H., “Blood pressure and hemodynamics in postmenopausal women during estradiol-17b substitution”. Ann. Clinical Res., 1983 :
15 (suppl. 38).

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