Hystérosplastie d'agrandissement et
exposition au dés
F. BRETELLE, A. AGOSTINI, B. BLANC*
L'hystéroplastie d'agrandissement
(HA) est une intervention chirurgicale dont le but est de restaurer la taille et
la forme de la cavité utérine afin d'améliorer le pronostic obstétrical.
Le ministre délégué
à la Santé Bernard Kouchner a saisi l'ANAES afin que soient évaluées
l'efficacité et la sécurité de l'HA dans le traitement des anomalies
utérines secondaires à l'exposition au DES.
La réduction de la cavité
utérine observée dans les utérus DES avec aspect d'éperons sous-cornuaux
ou d'un anneau de striction semble due à la présence de myomètre
excédentaire. Un fond arqué, fréquent, majore la dysmorphie et l'hypoplasie.
L'intervention a pour objectif d'augmenter le volume de la cavité en incisant
le myomètre. Cette intervention chirurgicale est inspirée des métroplasties
réalisées dans le traitement des utérus cloisonnés ou des synéchies
utérines.
Le bilan pré thérapeutique
doit comprendre :
• une hystérographie
afin d'apprécier la taille et la forme de l'utérus ;
• une échographie
en 2 ou 3 dimensions permettant d'estimer, outre la taille et la forme de l'utérus,
l'épaisseur de l'endomètre et du myomètre ;
• une hystéroscopie
permettant de visualiser une striction médio-cavitaire, l'irrégularité
des bords avec des pseudo-synéchies ou le caractère déjeté des
ostia en cas d'utérus en « T ».
L'HA est réalisée en phase
folliculaire précoce, immédiatement après les règles (épaisseur
endométriale minimale). Un hystéroscope opératoire est introduit
dans la cavité utérine. Il est équipé d'une électrode monopolaire
ou bipolaire. L'utilisation d'hystéroscopes opératoires de petit calibre
doit être privilégiée afin d'éviter les dilatations forcées
du col, qui étaient réalisées lors des premières interventions
avec des résectoscopes de 9 mm puis de 7 mm. L'intervention est pratiquée
avec instillation électroniquement contrôlée de glycocolle en cas
d'utilisation d'électrode monopolaire, et de sérum physiologique en cas
d'utilisation d'électrode bipolaire.
L'intervention consiste à inciser
sous contrôle visuel le myomètre latéral, en partant d'une corne
utérine en regard de l'ostium et en progressant perpendiculairement à
la paroi utérine vers l'isthme sans l'atteindre. La profondeur de l'incision
décroît au fur et à mesure de la section, et ne dépasse pas
5 à 7 mm. Une seconde incision dans le sillon déterminé par
la première, voire une troisième, sont souvent nécessaires. Les manœuvres
identiques sont répétées du côté opposé. Des incisions
horizontales prudentes peuvent être pratiquées au niveau du fond utérin
en cas de fond arqué.
La section ouvre progressivement le
myomètre permettant la distension de la cavité. L'objectif est d'obtenir
une cavité triangulaire et d'aligner les ostia. La visualisation aisée
de l'ostium tubaire, le plus souvent masqué initialement par l'éperon
latéral, est le témoin du bon résultat anatomique immédiat.
Une hystérographie de contrôle
est réalisée 2 mois après l'intervention.
Cette technique crée des cicatrices
endométriales et myométriales et expose au risque de perforation utérine
peropératoire, comme toute hystérochirurgie. Ces cicatrices pourraient
fragiliser les utérus et être responsables de ruptures utérines pendant
le travail. Ces dernières ont cependant déjà été observées
chez des patientes exposées au DES in utero, enceintes mais non opérées.
Après une HA, l'utérus doit être considéré comme cicatriciel
: les accouchements par voie basse ne peuvent se dérouler qu'en cas de confrontation
céphalo-pelvienne favorable, et sous stricte surveillance clinique et cardio-tocographique.
L'étude de la littérature
concernant cette technique, ses indications et ses résultats, est pauvre. 4
études de faible qualité méthodologique (études rétrospectives
non contrôlées et monocentriques). Deux études ont pour objectif
d'apprécier la faisabilité de l'HA. Les 2 autres avaient pour objectif
d'apprécier les résultats de l'HA dans le traitement des anomalies utérines
liées à une exposition au DES in utero. Il n'existait aucune étude
comparative permettant d'apprécier l'efficacité réelle de cette chirurgie
sur les troubles de la fécondité liés à une exposition in utéro
au DES.
De ces études il ressort que l'HA
est une technique actuellement bien codifiée qui peut être réalisée
par un chirurgien hystéroscopiste expérimenté. Les risques de cette
technique sont cependant importants : perforation utérine per opératoire,
fragilisation de l'utérus et risque de rupture utérine lors d'une grossesse
ultérieure.
Après l'HA l'utérus doit
être considéré comme cicatriciel. L'indication d'une césarienne
ne doit pas être posée de principe : l'accouchement par les voies naturelles
peut être simple en l'absence de disproportion fœto pelvienne, devant une présentation
céphalique et sous stricte surveillance clinique et cardio fœtographique.
L' HA ne doit pas être proposée
de façon systématique : des patientes exposées au DES in utero et
ayant des dysmorphie utérines notables ont pu mener des grossesses à terme.
Il ne s'agit pas d'une intervention de première intention chez des patientes
n'ayant eu aucun antécédent d'infertilité ou d'accident gravidique.
Cette intervention ne permet pas de résoudre l'ensemble des problèmes
de fertilité rencontrés chez les patientes exposées au DES in utéro.
La décision de réalisation d'une HA ne doit donc être prise qu'après
réalisation d'un bilan complet de fertilité du couple, et optimisation
de cette dernière.
L'évaluation de HA est difficile
: le nombre de cas est faible, les anomalies utérines peuvent être variées,
les infertilités rencontrées peuvent avoir un caractère multifactoriel.
La connaissance de la physiopathologie
des troubles de la fertilité et des pathologies gravidiques des patientes DES
n'est plus uniciste, à côté du facteur mécanique qui pourrait
expliquer la fréquence plus élevée des FCS tardives et des MAP, il
pourrait exister un facteur fonctionnel vasculaire qui permettrait d'expliquer certaines
stérilités et un taux accru de FCS précoces.
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* Prof. Bernard BLANC Service
de Gynécologie Obstétrique Hôpital de la Conception 13385 Marseille
Cedex 5. HYSTéROSPLASTIE
D'AGRANDISSEMENT ET EXPOSITION AU DéS 469
470 F.
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