Fausses couches à répétition Quel bilan pour 2005 ? Place des nouveaux
traitements
F. BRETELLE*, A. AGOSTINI*,
C. BOHEC*, M. CAPELLE*, I. RONDA*, V. ROGER*, L.
CRAVELLO*, B. BLANC*
Les fausses couches récidivantes
(trois FC ou plus) affectent environ 1 à 2 % des femmes en âge de
procréer. Ce taux est de plus de 5 % pour deux FCS ou plus.
Introduction
Le risque théorique de 2e, 3e,
et 4e FC, si on considère que le taux de FC est de 15 % et
que chaque FC est indépendante, est égal à 2,3 %, 0,3 %,
et 0,05 % respectivement.
En réalité, il apparaît
que pour une femme ayant eu 2 FC, la probabilité d'avoir une 3e
FC est entre 17 et 35 %. Pour une patiente ayant 3 antécédents de
FC ou plus, ce risque est estimé entre 25 et 46 %.
Ainsi, on constate qu'il existe un
risque accru de FC après chaque FC successive, qui ne peut s'expliquer uniquement
par le hasard. En effet, même après 3 FC ou plus, la chance d'avoir une
grossesse sans complication est estimée entre 54 à 75 %, ce qui est
largement inférieur aux 85 % calculés. Ceci conforte donc l'hypothèse
de facteur de risque favorisant et de la nécessité de réaliser un
bilan pour instaurer éventuellement un traitement.
Bilan en cas de fausses couches spontanées
à répétition
Les recommandations de l'ANAES : quel bilan de thrombophilie ?
Comment recommander un bilan pour le futur au
vu de la littérature ? Une analyse des facteurs de risque permet en premier
lieu d'avoir une idée du contexte clinique au sein duquel ces avortements spontanés
précoces surviennent. Au cours de l'année 2003, l'ANAES lors d'une conférence
de consensus a émis des recommandations sur le bilan de thrombophilie conseillé
en cas de perte fœtale précoce et tardive (Tableau 1). Ces recommandations
sont accessibles sur le site de l'ANAES (www.anaes.fr). Depuis ces recommandations
est parue dans le Lancet une méta-analyse de 31 études qui met en évidence
des résultats un peu différents. [1] Il existait une association entre
FCS précoces à répétition et la mutation du facteur V Leiden
(OR 2.01 IC 95 % 1,13-3,58) ainsi que la résistance à la Protéine
C activée (OR 3,48 IC 95 % 1,58-7,69). Ces données devraient modifier
les données du tableau 1.
|
ÿContexte
clinique |
ÿExamen |
ÿExamen |
ÿExamens |
|
ÿ |
ÿ |
ÿde 1re intention |
ÿde 2e intention |
ÿnon recommandés |
En dehors • ACL • Si
ACL et ACC • AT de la grossesse
si • TCA avec négatifs • PC recherche
d'ACC anti b2GPI • PS
|
ÿ>
3 FCS avant 10 sa |
ÿ• NFS |
ÿ• Si hyperhomo- |
ÿ• RPCA ou V |
|
ÿ |
ÿ |
ÿ• Homocystéinémie |
ÿ cystéinémie : |
ÿ Leiden |
ÿ |
ÿ |
ÿ |
ÿ MTHFR 677T |
Femme enceinte • SAPL
(ACL, LA) • Si ACL négatif • PS avec
ATCD • AT anti b2GPI de
1 ou plusieurs • PC
• PF > 12 sa • RPCA
ou V
• Accouchement Leiden
avant 34 sa et PE • F II 20210A
• PVP sévères ou
multiples
Facteurs de risque d'avortements spontanés précoces
En dehors de facteurs bien établis tels que
les maladies auto-immunes et le SAPL, un certain nombre de facteurs de risque sont
mis en évidence dans les avortements spontanés précoces. La prévalence
de la mutation du facteur V Leiden est identique chez les patientes présentant
des pertes fœtales récidivantes au premier trimestre. Cette prévalence
est plus élevée si ces pertes fœtales sont survenues au 2e
et 3e trimestres de la grossesse. La maladie cœliaque est associée
à une augmentation des avortements spontanés précoces et de RCIU,
augmentation qui est corrigée par un régime pauvre en gluten. Le type
de régime alimentaire semble influencer le risque d'avortement précoce
: les régimes riches en lipides augmentent ce risque (OR 2 ; IC 95 1,1-3,6)
, tandis que les régimes riches en légumes verts (OR 0,6 IC 95 %
0,4-0,8) ou en fruits (OR 0,3 IC 95 % 0,2-0,3) le diminuent. [2] La proportion
de viande ingérée ne l'influence pas.
Un antécédent d'avortement
précoce (OR 1,7 ; IC 95 % 1,4-2,1), une infection pelvienne (OR 5,1
; 1-26,2), la consommation de café (OR 1,9 ; IC 95% 1,5-2,6), une consommation
de plus de 5 verres d'alcool par semaine (OR 3,7 IC 95 % 2,0-6,8), plus de 10 cigarettes/J
(OR 1,4 ; IC 95 % 1-2,1) ou la consommation de cocaïne augmentent
le risque d'avortement spontané au premier trimestre. De même un antécédent
d'ovaire polykystique, l'insuffisance lutéale, un âge maternel avancé
ou une translocation équilibrée sont des facteurs d'avortement spontané.
Le diabète bien équilibré n'est pas un facteur de risque d'avortement,
en revanche le diabète déséquilibré multiplie ce risque par
3. Au sein d'une population de patientes présentant une infertilité, la
présence d'une infection vaginale est un facteur de risque d'avortement
spontané au premier trimestre. Un antécédent d'interruption volontaire
de grossesse n'est pas un facteur reconnu d'avortement spontané précoce
bien que cette notion soit controversée, en particulier lorsqu'il existe plusieurs
antécédents. Le stress est un facteur de risque d'avortement précoce :
ainsi un travail stressant (OR 2,45 ; 95 % IC 1,03-5,81) ou un stress psychologique
(OR 2,67 IC 95 % 1,39-5,11 ) augmentent les pertes fœtales au premier trimestre
(NP4). Ceci est particulièrement marqué pour les avortements spontanés
après 11 SA (OR 2,9 IC 95 % 1,4-6,2).
Les malformations utérines
sont une cause d'avortements spontanés. Dans les utérus unicornes, le
risque global de perte fœtale est de 60 %. [2] Le taux global de perte est estimé
à 36 % dans les utérus didelphes et à 43 % dans les utérus bicornes
[3]. Le taux de survie dans les utérus cloisonnés est de 15 à 28
%. Dans les anomalies utérines acquises : le syndrome d'Asherman (synéchies
postpartum ou postabortum) et l'exposition au distilbène sont associés
à des pertes fœtales (respectivement 70 et 48 %). Un taux d'avortement de 41
% est rapporté dans la littérature, cependant le pronostic dépend
de la localisation du ou des fibromes.
Les connectivites (sclérodermie,
syndrome de Sjögren) et les maladies rhumatismales inflammatoires sont
associées à un risque de prééclampsie et de RCIU [4]. Il est
actuellement impossible de définir un niveau de risque mais il ne semble pas
présenter d'augmentation du risque de perte fœtale précoce.
Une thrombocytémie essentielle
semble associée à un risque de perte fœtale. Cincotta et al. dans une
série de 30 grossesses rapporte des taux élevés d'avortements précoces
(17 %), de mort fœtale in utero (23 %) et de décollement placentaire
(17 %). Dans une plus courte série (n=16), le taux d'avortement précoce
est identique à la série précédente, mais aucun cas de MFIU
ni de décollement placentaire n'est rapporté. Une revue de la littérature
de 1996 (n=106) retrouve un taux de perte fœtale de 43 %, dont 36 % au premier
trimestre. Les autres complications : mort fœtale in utero (5 %), accouchement
prématuré (8 %), prééclampsie (4 %), RCIU (4 %).
Quel complément au bilan de thrombophilie ?
En fonction de ces facteurs de risque, on peut
retenir comme indiqué une exploration de la cavité utérine (échographie
et hystéroscopie ou hystérosalpingographie en fonction des habitudes).
Un bilan général de l'état de santé et du retentissement psychologique
des avortements à répétition est à réaliser. Le bilan comprend
également des caryotypes parentaux. Ces caryotypes parentaux sont anormaux
dans 3 à 10 % des cas selon les séries. Une étude rétrospective
a comparé, au sein d'une population ayant de 3 à 16 FCS avant 20 sa, le
devenir obstétrical de 99 patientes ayant une translocation équilibrée
à 817 patientes présentant un caryotype normal [5]. Dans cette étude,
toutes les patientes avaient un bilan complet incluant outre le caryotype : HSG
ou hystérosopie, sérologie toxoplasmose, hyperglycémie orale provoquée,
évaluation de la fonction thyroïdienne (T3, T4 TSH US), dosage de la prolactine
et de la LH en phase lutéale (longueur de la phase lutéale et dosage plasmatique
en milieu de cycle) et facteur antinucléaire, anticorps anticardiolipine, lupus
anticoagulant. 73,7 % des patientes présentant une aberration chromosomique
et 72 % des patientes ont eu une grossesse. Parmi celles-ci, 45,2 % des patientes
avec aberration chromosomique et 55,3 % des patientes sans ont mené leur
grossesse à terme (ns). Ainsi les couples porteurs d'une anomalie chromosomique
n'ont pas de risque augmenté de fausse couche par rapport à une population
à haut risque. Ces auteurs proposent une étude plus large pour évaluer
l'intérêt d'un éventuel traitement, le caryotype parental étant
finalement très peu prédictif du pronostic des grossesses.
Figure 1. Devenir des grossesses en
fonction du nombre de fausses couches. Le risque relatif pour une prochaine fausse
couche n'est pas significatif entre les différents groupes (risque relatif
= 1,43, 95% IC 0,40_1,54). Fertil Steril 2004
Les cas particuliers
Lupus érythémateux disséminé (LED)
Le taux moyen des pertes fœtales chez la patiente
lupique est de 22 % en moyenne dans la littérature [6]. La seule étude
contrôlée montre un taux moyen d'avortement spontané au premier trimestre
comparable à la population générale (aux environs de 10 %).
Le taux moyen de perte fœtale aux 2e et 3e trimestres est
de 6 % (contre 1 à 3 % dans la population générale). La majorité
des pertes fœtales surviennent au 2 et 3e trimestres, les trois quarts
correspondant à des morts fœtales in utero.
La plupart des patientes lupiques ayant
subi des pertes fœtales ont des taux significatifs d'anticorps antiphospholipides
(aPL) : anticoagulant de type lupique (OR 4,8 ; 95 % IC 1- 23,6) et anticorps
anticardiolipine (OR 20,0 ; 95 % IC 1,3 à 97,0). Un antécédent
de perte fœtale et la présence d'anticorps antiphospholipides sont associés
à un risque élevé de récidive d'une nouvelle perte fœtale sans
traitement.
Il existe plusieurs facteurs influençant
le risque de perte fœtale chez la patiente lupique : le niveau d'activité
du lupus avant la conception. Une poussée de moins de 6 mois est associée
à un risque de perte fœtale de 32 %, tandis qu'il diminue à 12 %
si cette poussée date de plus de 6 mois. La fonction rénale, ainsi que
l'existence d'une protéinurie [7] sont liés au risque de perte fœtale.
L'apparition d'un lupus lors de la grossesse semble être associée à
un risque accru de perte fœtale comme en témoignent plusieurs petites séries.
Une prééclampsie survient
dans 20 à 30 % des LED. Cette complication est d'autant plus fréquente
qu'il existe une atteinte rénale (37 % versus 14 %).
L'apparition d'un RCIU est fréquente
dans le LED. Sa fréquence est variable, l'incidence retenue d'après une
étude prospective est de 23 % contre 4 % dans le groupe témoin. Les facteurs
de risque de RCIU sont la prééclampsie, l'atteinte rénale et l'existence
d'un syndrome des antiphospholipides.
Le syndrome des antiphospholipides (SAPL)
Le SAPL est caractérisé par la
production d'anticorps antiphospholipides à des taux modérés ou élevés.
Les pertes fœtales font partie des critères diagnostiques depuis 1987. Ces
critères ont été redéfinis et précisés en 1999 [8].
Trois types de pertes fœtales peuvent être considérées :
- une ou plusieurs
morts fœtales in utero après 12 semaines d'aménorrhée avec
une analyse morphologique fœtale normale ;
- un ou plusieurs
accouchements prématurés avant 34 semaines d'aménorrhée liés
à une prééclampsie ou une insuffisance placentaire ;
- au moins trois
avortements spontanés précoces avant 10 semaines d'aménorrhée
(après exclusion des anomalies chromosomiques parentales ou des autres causes
d'avortements spontanés à répétition).
Le lien entre les titres et les isotypes
des anticorps concernés est controversé. Néanmoins, une conférence
de consensus retient comme critère de positivité au moins 20 UI pour un
anticorps anticardiolipine ou un anticoagulant circulant. Ces anticorps doivent
être contrôlés et positifs à 6 à 8 semaines d'intervalle.
Le consensus est clair pour les patientes présentant des titres modérés
ou élevés de type IgG ainsi que des complications obstétricales.
En ce qui concerne les taux faibles d'IgG, des taux isolés élevés
ou faibles d'IgM, IgA les avis sont partagés et ces patientes n'entrent pas
dans la définition du syndrome des antiphospholipides. Cependant, la conférence
de consensus considère qu'une IgM de plus de 20 UI associée à une
perte fœtale, selon la définition, définit un SAPL.
La prééclampsie est
une complication fréquente des patientes présentant un SAPL. L'incidence
est variable selon les séries de 18 à 48 %. Un RCIU est retrouvé
dans 15 à 30 % des grossesses chez des patientes ayant un SAPL. Le taux
d'avortement spontané chez les patientes présentant un SAPL sans traitement
est estimé à 91 %. Des titres faibles IgM aCL sont présents parmi
3 à 5 % des patientes normales. Il a été démontré
dans une étude que le pronostic obstétrical de patientes présentant
des taux faibles IgG ou des IgM a CL isolés était identique à celui
de la population témoins sans a CL. Le lien entre la présence IgA aCL
isolé a été évoqué, mais le rapport entre ces anticorps
et le risque de perte fœtale n'est pas établi actuellement [9].
Plusieurs études prospectives
montrent une augmentation des pertes fœtales à répétition parmi les
patientes présentant des anticorps aPL [10]. Pattison et al. ont mesuré
en situation à bas risque chez 900 patientes la présence d'un anticoagulant
circulant ou d'un anticorps anticardiolipine [11]. Le risque de perte fœtale était
de 16 % dans le groupe présentant un aPL tandis qu'il n'était retrouvé
que chez 2 % des patientes ne présentant pas d'aPL.
Dans une population sélectionnée
de patientes ayant présenté au moins deux pertes foetales consécutives,
76 des 366 patientes (21 %) présentaient un anticoagulant de type lupique
ou un aCL de plus de 20 IU. La moitié des pertes foetales chez les patientes
présentant un aCL correspondaient à des morts fœtales in utero
(MFIU) en comparaison à 15 % des patientes ne présentant pas d'aCL.
Plus de 80 % des patientes présentant un aCL ont présenté au
moins une MFIU comparé à 25 % des patientes sans aCL (P<0,001)
[12].
Valeur pronostique des antiphospholipides en population
à bas risque
Des taux d'aPL peuvent être retrouvés
au sein d'une population normale sans relation à un pronostic obstétrical
défavorable [13]. La présence d'un aCL lors d'un premier épisode
de perte fœtale ou d'avortement précoce sans antécédents n'est pas
un facteur de mauvais pronostic obstétrical [14]. La présence d'un anticorps
anti_2GPI chez des patientes ne présentant pas d'anticorps anticardiolipines
n'est pas un facteur de risque d'échec de FIV ou d'avortement spontané
à répétition. Ces données ont été confirmées
par Lee et al. qui montrent une forte corrélation entre la présence d'un
aCL et d'un anti_2GPI de type IgM et/ou IgG (les IgA n'étaient pas recherchés)
mais pas de relation entre le pronostic obstétrical et la présence d'un
anti_2GPI. Greco et al. ont évalué la valeur diagnostique de la présence
d'anti anti_2GPI (IgG, Ig A, IgM). Ces auteurs ont montré que la recherche
d'anticorps anti_2GPI est supérieure à la recherche d'aCL pour le diagnostique
de SAPL. L'association des deux tests permet de poser le diagnostic jusque dans
75% des cas quel que soit le stade de la maladie. Dans ce cadre le type le plus
fréquemment mis en évidence est de type IgA.
La relation entre la présence
des autres aPL et les pertes fœtales n'est pas établi actuellement. Une
large étude cas témoin compare des patientes sans antécédent
de thrombose mais ayant présenté au moins 3 pertes fœtales entre 10 et
22 semaines d'aménorrhée à des patientes témoins ayant présenté
des pertes fœtales expliquées. Certains aPL sont corrélés aux pertes
fœtales : les anti-phosphatidylethanolamine IgM (OR : 6,0, IC 95 % 2,3-15,7,
p = 0,0003), les anti-beta2-glycoprotein I IgG (OR 4,4, IC 95 % 1,6-11,7,
p = 0,0035), les anti-annexine V IgG (OR 3,2 ; IC 95 % 1,2-8,1, p = 0,015) [15].
La présence de ces anticorps (ACantiphosphatidylserine, phosphatidylinositol,
phosphatidylglycerol, phosophatidylethanolamine, acide phosphatidique) a été
mise en évidence chez des patientes présentant des pertes fœtales inexpliquées
[16]. L'étude d'Aoki et al. incluant 336 patientes confirme ces données
[17]. Parmi ces patientes, 38 ont présenté une seconde grossesse avec
un risque de perte fœtale de 82 % chez les patientes présentant un IgG et de
40 % chez celle présentant un aPL de type IgM. Dans ces études la présence
d'anticoagulant circulant n'était pas recherchée, or il s'agit d'un des
critères diagnostic de SAPL, syndrome associé à un pronostic obstétrical
défavorable. Dans une étude cas-témoin comparant un groupe patientes
ayant présenté des pertes fœtales à répétition, un aCL
été mis en évidence dans 17 % vs 4 %, parmi les patientes
aCL négative 10 % présentaient un autre aPL [18]. Ces données
sont néanmoins controversées. En particulier, deux études ne montrent
pas de différence pour la présence d'autres aPL entre les groupes avec
perte fœtale à répétition et les contrôles dans une population
ne présentant pas d'aCL ou anticoagulant circulant. Cependant, ces mêmes
anticorps ont été mis en évidence dans le sérum de patientes
asymptomatiques sans association à un pronostic obstétrical défavorable
[19]. De plus les méthodes de mises en évidence de ces anticorps n'est
pas standardisée actuellement et les comparaisons entre les différentes
études sont délicates. Il existe également une possibilité de
réaction croisée entre les différents tests utilisés.
Devant les données limitées
et controversées sur les autres aPL (en dehors des aCL et des lupus anticoagulants),
il n'est pas recommandé des les rechercher en routine.
Valeur pronostique des anticorps antinucléaires
Plusieurs études ont retrouvé des taux
détectables d'anticorps anti-nucléaires (ACAN) chez des patientes
présentant des pertes fœtales à répétition. Edelman et al. retrouvent
un ACAN chez 5 % des 130 patientes présentant des pertes fœtales à répétition
contre 2 % des 50 contrôles. Cowchock et al. ont comparé 61 patientes
ayant présenté des pertes fœtales à répétition à 21
patientes ayant présenté des pertes fœtales expliquées. Les auteurs
mettent en évidence un ACAN chez 29 % vs 14% des patientes [20]. De
la même manière Maier et al. retrouvent la présence d'un ACAN chez
20 % des cas contre 14 % des contrôles [21]. D'autres travaux retrouvent des
résultats similaires. Harger et al. retrouvent des ACAN chez 16 % patientes
présentant des pertes fœtales à répétition. Le pronostic de
la grossesse suivante était identique entre le groupe de patientes présentant
un ACAN et le groupe sans ACAN (naissances vivantes 52 % versus 67 %) [22].
Cependant d'après ces études, il n'est pas possible de déterminer
un niveau de risque, ni de déterminer si la présence d'ACAN est facteur
de risque indépendant de perte fœtale, les études disponibles donnant
des taux de récurrence de perte fœtale de 17 à 100 %.
Les autres anticorps
AntiRo/SSA
Mavragani et al. dans une étude
rétrospective compare 154 patientes présentant un AntiRo/SSA positif (78
LED et 76 sans LED) à 142 patientes AntiRo/SSA négative (71 LED et 71
non LED). Les taux de perte fœtale et de complications obstétricales ne différaient
pas entre les deux groupes [23]. Dans une analyse en sous-groupe, les patientes
avec un AntiRo/SSA ne présentant pas un LED présentaient plus de pertes
fœtales à répétition (23,7 %) que le groupe sans AntiRo/SSA (7,04 %
; p=0,0063) et que les contrôles (6,4 % ; p=0,0004). Ainsi les auteurs concluent
que la présence d'un AntiRo/SSA n'influence pas le pronostic obstétrical.
Anticorps antithyroïde
Dans une étude de cohorte sur
une population non sélectionnée, Stagnaro-Green et al. ont mis en évidence
la présence d'anticorps antithyroglobuline ou thyroïde peroxydase chez
20 % des patientes. Les pertes fœtales survenaient plus fréquemment dans le
groupe présentant des anticorps (ie 17 % versus 8,4 %). Cette association
a été retrouvée dans une large étude prospective [24].
Plusieurs études ne montrent pas d'augmentation de la fréquence anticorps
antithyroglobuline et antiperoxydase chez les patientes présentant des pertes
fœtales à répétition. L'avidité et le titre des anticorps antiperoxydase
sont plus élevés chez les patientes qui présenteront une perte fœtale.
Inversement, les taux de ces anticorps diminuent avec l'évolution de la grossesse
dans les grossesses se poursuivant [25].
Il n'est pas possible actuellement
de préciser le risque de perte fœtale chez une patiente présentant un
anticorps antithyroglobuline ou peroxydase.
Quel traitement pour 2005 ?
Initialement, les corticoïdes ont été
considérés comme le traitement logique pour cette affection rapportée
au cours du Lupus érythémateux systémique, mais ils sont de moins
en moins prescrits, faute de démonstration d'une réelle efficacité,
avec par ailleurs une morbidité non négligeable, touchant aussi bien la
mère que le fœtus ou le nouveau-né.
La physiopathologie présumée
des accidents gravidiques dus aux APL, qui fait une large place aux phénomènes
thrombotiques non inflammatoires, a rendu logique la prévention de récidive
de fausses couches par l'utilisation d'anticoagulant et antiagregant plaquettaire.
L'association héparine aspirine, dont les essais randomisés ont montré
la supériorité par rapport à l'aspirine seule, est actuellement largement
utilisée, diminuant le taux de fausses couches à 54 %.
L'utilisation d'immunoglobulines intraveineuses,
n'a pas montré de bénéfice évident et leur coût très
élevé en rend l'intérêt limité.
Récemment l'équipe de J.C.
Gris a rapporté une série de 160 patientes ayant un antécédent
de perte fœtale après 10 sa et une thrombophilie (la population est hétérogène
constituée de patientes porteuses d'une mutation hétérozygote du
facteur Leiden, de la prothrombine et d'un déficit en Protéine S. Les
patientes ont été randomisées aspirine versus HBPM 40mg/j
à partir de la 8e sa. Cette étude montre clairement que le
traitement par HBPM augmente le taux de naissance vivantes (OR 15,5 ; IC 95 % 7-37
; p<0,001) [26]. Toutes les patientes ont bénéficié d'un traitement
par acide folique 5 mg/j avant la conception. Cet effet est observé dans tous
les sous-groupes. Cette étude concerne cependant une population ayant majoritairement
des pertes fœtales tardives (au moins la moitié de la population) et ne répond
donc pas à la question de savoir si il faut traiter les patientes ayant un
ou deux antécédent de FC précoce. Plusieurs études non randomisées
cas témoin montrent que sur des patientes présentant au moins 3 pertes
fœtales un traitement par HBPM augmente le pourcentage de naissances vivantes [27,
28]. Le problème est que ces études traitaient communément les pertes
fœtales précoces et tardives, pour laquelle la physiopathologie n'est probablement
pas identique.
Les inquiétudes concernant ces
traitements par HBPM sont progressivement levées par les différentes études
qui ne montrent pas de morbidité maternelle de ces traitement prolongés
et en particulier n'ont pas d'influence sur la densité [29].
En conclusion, le bilan à effectuer
en cas de FC précoces à répétition commence à être
relativement précis au vu de la littérature. Le choix d'un éventuel
traitement reste en revanche difficile.
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* Hôpital de la Conception,
147 Boulevard Baille, 13385 Marseille Cedex 05.
FAUSSES
COUCHES À RÉPÉTITION 305
Tableau 1. Bilan à effectuer en cas
d'ATCD de pertes fœtales 306 F.
BRETELLE, A. AGOSTINI, C. BOHEC, M. CAPELLE, I. RONDA, V. ROGER,
L. CRAVELLO, B. BLANC FAUSSES
COUCHES À RÉPÉTITION 307
308 F.
BRETELLE, A. AGOSTINI, C. BOHEC, M. CAPELLE, I. RONDA, V. ROGER,
L. CRAVELLO, B. BLANC FAUSSES
COUCHES À RÉPÉTITION 309
310 F.
BRETELLE, A. AGOSTINI, C. BOHEC, M. CAPELLE, I. RONDA, V. ROGER,
L. CRAVELLO, B. BLANC FAUSSES
COUCHES À RÉPÉTITION 311
312 F.
BRETELLE, A. AGOSTINI, C. BOHEC, M. CAPELLE, I. RONDA, V. ROGER,
L. CRAVELLO, B. BLANC FAUSSES
COUCHES À RÉPÉTITION 313
314 F.
BRETELLE, A. AGOSTINI, C. BOHEC, M. CAPELLE, I. RONDA, V. ROGER,
L. CRAVELLO, B. BLANC FAUSSES
COUCHES À RÉPÉTITION 315 |