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Titre: Les accidents de la chirurgie du prolapsus et de l’incontinence urinaire
Année: 2001
Auteurs: - Jacquetin B.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Prolapsus

Les accidents de la chirurgie du prolapsus et de l’incontinence urinaire

Brigitte FATTON, Bernard JACQUETIN

 

Unité d’Urogynécologie
Maternité Hôtel Dieu
Clermont – Ferrand

« Primun non nocere » !! Cet adage n’a t’il jamais eu de meilleure justification qu’en matière de chirurgie fonctionnelle ? La chirurgie des troubles de la statique pelvienne et celle de l’incontinence urinaire d’effort ou de l’incontinence anale se conjuguent, aujourd’hui, en terme de qualité de vie et scores de symptômes, obéissent à une obligation de résultats et sont soumises à la pression du concept de « minimal invasive surgery ». Pourtant, toute chirurgie expose, quelque soient les techniques, à des accidents per-opératoires et/ou des complications post-opératoires plus ou moins sévères.
Notre propos, établi selon une revue – non exhaustive – de la littérature concerne les complications per-opératoires et post-opératoires précoces de cette chirurgie dont nous essaierons d’évaluer la fréquence, la gravité et les éventuels facteurs de risque. Nous insisterons plus spécifiquement sur notre expérience et nous accorderons donc une place privilégiée à la chirurgie vaginale. Nous avons par ailleurs décidé de ne pas aborder les problèmes infectieux pariétaux.

I – Chirurgie gynécologique et complications péri-opératoires

Même si ce chapitre paraît quelque peu en marge de notre propos, il nous est apparu intéressant de donner ici quelques chiffres généraux, notamment en terme de complications urinaires et de légitimer, en conséquence, certaines précautions per-opératoires.

1. Lésions urinaires (13,14,17)
Dans les séries ne pratiquant pas de contrôle cystoscopique per-opératoire systématique, on retiendra les données suivantes :

  • Plaies urétérales : leur fréquence varie entre 0 et 14,6 pour 1000 avec une valeur moyenne de 1,6 pour 1000
  • Plaies vésicales : elles sont rapportées selon les séries avec une fréquence variant de 0,2 à 19,5 pour 1000 pour une valeur moyenne de 2,6 pour 1000.
  • Seulement 11,5% des lésions urétérales et 51,6% des lésions vésicales sont reconnues et traitées en per-opératoires.
    Dans les équipes ayant recours au contrôle cystoscopique de principe, les chiffres sont les suivants :
  • 0 à 26,8 pour 1000 de plaies urétérales avec un chiffre moyen de 6,2 pour 1000.
  • 0 à 29,2 pour 1000 de plaies vésicales avec un chiffre moyen de 10,4 pour 1000.
  • Plus de 90% des plaies urétérales et 85% des plaies vésicales non suspectées durant l’intervention sont identifiées au cours de la cystocopie. Pour 69% de l’ensemble de ces lésions la prise en charge per-opératoire consiste en l’ablation de la suture responsable (suivi de son repositionnement) ou de la suture simple de la cystotomie accidentelle.

L’analyse de la littérature sur la question retrouve d’autres plaidoyers pour l’utilisation de routine de la cystoscopie per-opératoire (17,19) que certains proposent de réaliser par abord transvésical arguant d’une meilleure visibilité notamment de la région cervicale (33).

2. Les complications digestives
Les publications sur les complications digestives de la chirurgie gynécologique sont beaucoup plus rares que celles concernant les complications urinaires. Ces complications sont rares estimées à 0,5% dans la chirurgie pour lésions bénignes (5). Krebs (25) rapporte sur une période de 1973 à 1982, un total de 128 plaies digestives aux cours des interventions gynécologiques. 37% de ces lésions surviennent à l’entrée dans la cavité péritonéale, 35% au cours des dissections ou des adhésiolyses par voie abdominale, 10% au cours de laparoscopies, 9% durant la chirurgie vaginale et 9% durant les dilatations et curetages utérins.
Chapron (7) rapporte sur une étude rétrospective concernant des interventions gynécologiques par laparoscopies, 62 cas de lésions gastrointestinales : 32,2% de ces lésions surviennent pendant la phase d’installation de la coelioscopie, % sont imputables à des incidents d’electrocoagulation (risque accru par l’utilisation de la pince monopolaire). Le diagnostic de ces lésions n’est fait pendant l’intervention que dans 35,7% des cas. La latence moyenne intervention –diagnostic de la complication digestive est de 4 +/- 5,4 (0-23) jours.

3. Les incidents thrombo-emboliques
La chirurgie pelvienne est à haut risque thrombo-embolique qui justifie une prévention pré et post-opératoire systématique. Ce risque est augmenté chez les patientes obèses, en cas de pathologie cancéreuse ou d’infection pelvienne chronique, en cas d’antécédents d’insuffisance veineuse ou thrombotique, ou en cas de radiothérapie préalable. Par ailleurs, une intervention hémorragique ou une anesthésie prolongée augmente encore ce risque (9).

Evaluation du risque thrombo-embolique en chirurgie gynécologique d’après Bonnar (4)

Complic. thrombo-emboliques

Risque faible *

Risque modéré**

Risque élevé***

Thrombose veineuse du mollet

< 3%

10% - 30%

30% - 60%

Thrombose veineuse profonde ou proximale

< 1%

2% - 8%

6% - 12%

Embolie pulmonaire

< 0,01%

0,1% - 0,7%

1% - 2%

* moins de 40 ans, intervention de moins de 30 min, pas d’immobilisation
** plus de 40 ans, intervention de plus de 30 min, oestrogénothérapie, obésité, infection post-opératoire
*** antécédent thrombo-embolique, chirurgie pour pathologie maligne, immobilisation

4. Hernies et éventrations post-opératoires
Le taux global rapporté en chirurgie gynécologique varie de 0 à 3% (31) avec un risque de déhiscence, en cas d’incision verticale (1% à 3%), supérieur à celui constaté après incision transversale (0,37% - 0,69%) (23). La généralisation de l’abord coelioscopique a vu apparaître les lésions spécifiques (29) que représentent les hernies et éventrations au travers des orifices de trocard (0,4%) dont l’étroitesse peut exposer à l’étranglement des viscères engoués.
L’éviscération vaginale est rare, avec moins de 40 cas décrits dans la littérature (9) : elle survient habituellement dans les suites immédiates de l’intervention, mais quelques cas ont été décrits plus d’un an après la chirurgie (39).

5. Complications neurologiques (38)
Nous n’insisterons que sur les plus fréquentes en réservant une place particulière à l’atteinte du nerf honteux interne qui sera abordée dans le chapitre de la sacrospinofixation.
Neuropathie fémorale : 2 mécanismes sont classiquement en cause :
L’utilisation d’un écarteur autostatique
Une incision transversale ou de Pfannenstiel
Sciatique et neuropathie péronière
Les interventions réalisées en position « gynécologique » peuvent exposer à ce type de lésions. Sur une série de 2000 interventions par voie vaginale, seulement 5 cas ont été rapportés (0,2%) [3 cas d’étirement du nerf péronier et 2 cas de lésions du sciatique] (6)
Ces chiffres rejoignent les 0,3% de lésions du nerf sciatique après hystérectomie vaginale dans une série de 1000 cas (30)
Neuropathie obturatrice : elle est habituellement constatée après chirurgie radicale ou dans les suites des lymphadenectomies pelviennes.

II - L’hystérectomie

Geste le plus fréquent de la chirurgie gynécologique, l’hystérectomie a fait l’objet de nombreux travaux dont plusieurs ont analysé le taux de complications et leurs éventuelles spécificités en fonction de la technique opératoire utilisée (abdominale, vaginale ou plus récemment laparoscopique [1ère description en 1989] ). Nous ne retiendrons dans notre analyse que les hystérectomies réalisées pour pathologie bénignes ou, dans les cas de lésions plus sévères (endométriose, néoplasie endométriale stade I etc…), les hystérectomies sans gestes associés complexes. L’hystérectomie pour prolapsus ne peut, le plus souvent, être individualisée des différentes études, et dans cette indication, elle est incluse dans les séries rapportées qu’en cas de geste associé simple type colporraphie antérieure ou postérieure.

1. L’hémorragie
Ne seront considérés que les accidents hémorragiques survenus en per-opératoires ou en post-opératoire immédiat. Les critères les plus fréquemment retenus dans la littérature pour définir cette hémorragie sont la perte sanguine supérieure à 1000 ml, le recours à une transfusion sanguine per-opératoire, une chute du taux d’hémoglobine de plus de 3 à 5 mg/dl, le passage à la voie abdominale en cas d’hystérectomie vaginale ou coelioscopique.
Dans la revue de W.J.Harris (20), et sur les bases d’un saignement per-op de plus de 1 litre ou de la nécessité d’une transfusion, on peut retenir un chiffre moyen global de 1 à 2%. Ce chiffre peut être modulé selon les séries comme rapporté dans le tableau ci après (les chiffres publiés dans le CREST – Collaborative Review of Sterilization – en 1982 (12), sont individualisés, pouvant servir de référence aux séries les plus récentes qui confirment une réduction du taux des transfusions depuis, entre autre, la meilleure connaissance des risques transfusionnels).

 

Hystérectomie abdominale

Hystérectomie vaginale

toutes séries (%)

taux les + fréquents (%)

CREST (%)

toutes séries (%)

taux les + fréquents (%)

CREST (%)

Per-op

0,2-3,7

1-2

0,2

0,5-3,5

0,7-2,5

0,7

Post-op

0,24-2,3

1-2

1,6

0,4-5,7

1,0-5,0

1,9

transfusion

2,2

2-12

15

0,7-13

2,0-8,3

8,3


2. Plaies vésicales
Le traumatisme vésical survient le plus souvent pendant la dissection de l’isthme ou du col utérins. Il survient dans 0,5 à 1% des hystérectomies, et plus volontiers dans l’approche abdominale ou laparoscopique ; néanmoins le recours de plus en plus fréquent à l’abord vaginal (9), notamment dans des indications difficiles (morcellation sur volumineux utérus, hémisection, myomectomie première…) explique l’augmentation des plaies vésicales au cours des hystérectomies vaginales.
Un antécédent de césarienne, de myomectomie ou l’existence d’un gros utérus polymyomateux ou endométriosique, en modifiant l’anatomie du cul de sac vésico-utérin, expose davantage à la plaie vésicale.
La gravité de ces traumatismes vésicaux tient avant tout à leur méconnaissance qui peut aboutir à la fistule vésico-vaginale. Reconnus en per-opératoire, leur évolution est le plus souvent favorable après une réparation dans le même temps qui prend en compte leur situation par rapport aux orifices urétéraux. Lorsqu’ils sont diagnostiqués au stade de la fistule, la réparation par voie vaginale en post-opératoire immédiat donne encore un taux de réussite de 90 à 95%.

3. Lésions urétérales
Elles sont rapportées, au cours de l’hystérectomie, avec une fréquence de 0,1 à 0,5% (9,20). Ils surviennent dans une des localisations suivantes : au niveau ou au dessus du ligament lombo-ovarien, à la base du ligament large, au croisement des vaisseaux utérins, le long du mur latéral du pelvis au dessus des ligaments utéro-sacrés et à la jonction urétéro-vésicale.
Les mécanismes en cause sont au nombre de 6 : écrasement par clampage accidentel (clips, pinces…), ligature, section partielle ou complète, angulation responsable d’une obstruction d’amont, dévascularisation pouvant conduire à des lésions d’ischémie et résection segmentaire.
La plupart des traumatismes urétéraux sont observés dans les 3 derniers centimètres, entre l’artère utérine et la vessie et près de 75% des plaies de l’uretère surviennent au cours des laparotomies, la voie vaginale exposant beaucoup moins à ce type d’accidents (0,1% en moyenne versus 0,5-1% en moyenne au cours de la voie abdominale)

Hystérectomie abdominale

Hystérectomie vaginale

toutes séries (%)

taux les + fréquents (%)

CREST (%)

toutes séries (%)

taux les + fréquents (%)

CREST (%)

Vessie

0,2-2,3

1-2

0,3

0,3-1,5

0,5-1,5

1,4

Uretère

0,1-1,7

0,1-0,5

0,2

0-0,1

0,05-0,1

0

Fistule vésicovaginale

0-0,25

0,1-0,2

0

0,05-0,6

0,1-0,2

0,2



4. Les lésions intestinales
Elles sont rares, et les données rapportées dans la littérature font état d’un taux de 0,3% pour l’hystérectomie par voie abdominale et de 0,4% pour l’hystérectomie vaginale (20). Certains font état de chiffres supérieurs, notamment au cours de l’abord vaginal –1,1%- en partie explicables par l’existence d’adhérences chez des patientes antérieurement opérées. Pour Lambaudie (26) le taux est de 0,6% sur une série de 1604 hystérectomies pour pathologies bégnines avec un risque accru en cas d’abord abdominal (2,4%)
La fréquence de l’iléus paralytique dans les suites d’une hystérectomie abdominale est évaluée selon les auteurs de 1 à 4%. Ce risque serait réduit après hystérectomie vaginale atteignant seulement 0,2% (12).
L’occlusion post-opératoire aiguë est généralement rapportée avec une fréquence moins élevée de 0,1 à 1% (20)

5. Le prolapsus des trompes
Il s’agit d’une complication rare, survenant le plus souvent assez tardivement après l’hystérectomie qui a presque toujours été réalisée par voie vaginale (9).

6. Le cas spécifique de l’hystérectomie coelioscopique
Le risque urétéral serait supérieur après chirurgie coelioscopique (13,9 pour 1000) qu’après chirurgie classique (0,4 pour 1000 après laparotomie et 0,2 pour 1000 après chirurgie vaginale) (18).
Sur une revue de la littérature allant de 1970 à 1996, Ostrzenski rapporte une incidence de plaies vésicales variant de 0,02 à 8,3% (32).

III – Les gestes urinaires

Difficile bien sûr de fournir des données globales tant les techniques sont variées, exposant de ce fait, à des risques différents. Nous ne prendrons pas en compte ici les troubles urinaires induits ni les décompensations secondaires de la statique pelvienne. Nous ne considèrerons pas non plus les résultats en terme de continence qui nous éloigneraient de notre sujet initial. Nous individualiserons la technique du TVT (Tension Free Vaginal Tape) en raison de son engouement actuel et la colposuspension selon Burch qui reste encore aujourd’hui le gold standard (pour combien de temps ?). Nous insisterons aussi sur les complications spécifiques des slings prothétiques classiques (hors TVT) dont nous connaissons les risques d’intolérance et de lésions urétrales

1. Le TVT d’Ulmsten (22)
On lui reproche peu de complications per-opératoires même dans la période d’apprentissage. La complication la plus fréquemment rapportée est la plaie vésicale retrouvée selon les équipes dans 5 à 8% des cas, avec un risque nettement majoré en cas d’antécédent de cure chirurgicale d’incontinence.
Les complications hémorragiques sont ensuite les plus fréquentes avec un taux de saignement per-opératoires d’environ 5%. Nous n’avons jamais constaté dans notre expérience de plaies des gros vaisseaux mais il semble que 11 cas de lacération des vaisseaux iliaques aient été recensés sur 20000 cas de TVT (0,055%). Cet accident est néanmoins évitable en rasant la face postérieure du pubis.
Si les ecchymoses vulvaires ou supra-pubiennes sont assez fréquentes, les volumineux hématomes du Retzius sont plus rares (0,25%).

2. La colposuspension selon Burch

  • Les plaies vésicales : retrouvées dans 3,7% par Ryckebush (34 bis) sur une série de 108 cas, leur seule gravité est de rester méconnue en per-opératoire. Cette fréquence est bien sûr variable selon les équipes, la population étudiée et les conditions opératoires. Il est important de rementionner ici l’intérêt du contrôle cystoscopique per-opératoire qui (réalisé rigoureusement) est capable de détecter une suture intravésicale qui pourra n’être diagnostiquée que beaucoup plus tardivement dans le bilan d’infections urinaires récidivantes ou la constatation de lithiases vésicales.
  • Les lésions de l’uretère : elles sont plus rares, chiffrées à 0,66% par Mansoor (150 cas) (28), 0,43% par Deval (232 cas) (11), 0,27% pour Demerci (360 cas) (10).
  • Les hémorragies per-opératoires : rapportées avec une fréquence variant de 0 à 2,7% selon les équipes, elles sont dues à la blessure des veines retziennes dont l’hémostase se fait le plus souvent par compression (directe ou par réplétion vésicale).

3. L’aléas du matériel prothétique dans la chirurgie de l’incontinence d’effort
Cette question a fait l’objet de nombreux travaux dont Ghoneim (17bis) a fait une synthèse qui regroupe 12 études et 956 cas de slings. On retiendra les conclusions suivantes :

  • Un taux d’érosion de 9,43 +/- 3,07%
  • Un chiffre de fistules de 3,7 +/- 0,65%
  • Un taux de « révisions » simples de 24,2%
  • Un taux d’ablation de 6,62 +/- 1,33%

Nous avons rapportés une série personnelle de 97 observations colligées entre Janvier 89 et Septembre 93, et réévaluées avec un recul moyen de 30 mois (15). L’intolérance au matériel prothétique a été constaté dans 22,7% des cas repartis comme suit :

  • rejet simple avec défaut de cicatrisation : 50%
  • érosions ou transsections urétrales : 36,3%
  • instabilité vésicourétrale majeure : 13,7

4. Les risques spécifiques des amarrages au périoste
Les fixations urinaires à la symphyse pubienne expose au risque d’ostéite pubienne dont la fréquence reste fort heureusement rare (24).

IV – La sacrospinofixation

Actuellement devenue incontournable dans la prise en charge du prolapsus par voie vaginale, la sacrospinofixation reste encore, pour certains, une technique à « risque » réservée à quelques initiés. Notre expérience de plus de 15 ans nous conduit à démentir cette réputation ; les résultats rapportés par Sze (36) dans une très rigoureuse revue de la littérature plaide dans le sens de nos constatations.

1. La plaie vasculaire
C’est la complication la plus redoutée : cette crainte est légitimée par la proximité du pédicule honteux que toute dissection conduite « trop loin en profondeur » peut léser. Cependant, le taux de transfusions sanguines sur 1229 cas de sacrospinofixations n’excède pas 2%. S’ils sont rares et évitables en respectant les limites de dissection (1), les accidents hémorragiques peuvent être graves, à la fois par l’importance du saignement et surtout par les difficultés d’hémostase, pouvant même mettre en jeu le pronostic vital.
Il s’agit le plus souvent de blessures du plexus veineux hypogastrique ou de la veine honteuse interne, mais les veines péri-rectales, les veines sacrées ou l’artère honteuse interne peuvent être lésées.

2. Les plaies vésicales
Elles sont rapportées avec une fréquence moyenne de 3,6% (36). Nous ne déplorons pour notre part et avec actuellement une série de 1300 patientes opérées depuis 1985, aucune plaie urinaire imputables à la sacrospinofixation.

3. Les plaies rectales
Leur fréquence est évaluée à 4,5%, et comme pour les plaies vésicales, ce sont habituellement des plaies sans gravité dont le seul risque véritable est de ne pas être reconnues en per-opératoire (36).

4. Les douleurs spécifiques
Un distinguo s’impose d’emblée entre les algies fessières ou les simples coccygodynies irradiant peu et le plus souvent assez rapidement résolutives, et les véritables sciatalgies ou névralgies pudendales, rebelles aux thérapeutiques classiques et pouvant éventuellement conduire à la réintervention pour ablation du ou des points de sacrospinofixation. Les douleurs transitoires sont rapportées avec une fréquence moyenne de 3% (36, 37). Sur une série personnelle (16) de 800 cas (juin 1985-décembre 1996), nous avons retrouvé des chiffres comparables avec 4,5% de douleurs post-opératoires imputées à la sacrospinofixation : ces douleurs sont glutéales dans 41,7% des cas, pudendales dans 30,5% des cas, sciatiques dans 13,9% des cas et vaginales, responsables de dyspareunie dans 13,9% des cas. Seules 8 patientes, soit 1% de la population de départ, auront une douleur persistante ou permanente. Ces douleurs prolongées sont glutéales dans 2 cas, sciatique dans 1 cas, pudendales dans 2 cas et vaginales dans 3 cas. Au total, les algies rebelles de type neuropathie pudendale sont chiffrées à 0,25% des sacrospinofixations de notre série.
Ce travail répond de façon objective aux conclusions alarmantes de Benson (2) qui rapporte, à 6 semaines post-opératoires, une élévation des latences terminales des nerfs pudendal et périnéaux dans 74% des cas après chirurgie par voie vaginale (contre 33% après chirurgie par voie abdominale) et corrobore l’hypothèse d’une récupération progressive.
Il est probable néanmoins, que ni le recours aux techniques « minimal invasives », ni une plus grande expérience de l’intervention ne puisse réduire ce risque à 0, des travaux anatomiques sur cadavres ayant confirmés l’existence d’une innervation diffuse du ligament (même si elle est plus dense dans sa portion médiale) et de rameaux nerveux de trajet aberrant qu’une prise prudente et contrôlée ne peut éviter « à coup sûr » ! (16)

V – Les promontofixations et ligamentopexies

1. Les plaies vasculaires
Les hémorragies surviennent essentiellement lors de l’abord du promontoire par blessure des veines pré-sacrées ou de la veine iliaque primitive gauche. Sur une série de 232 promontofixations rétropéritonéales, Deval (11) rapporte des incidents hémorragiques dans 1,7% des cas (répartis équitablement entre plaies de la veine iliaque primitve gauche –aisémment suturées- et plaies des veines pré-sacrées).
Ces incidents hémorragiques voient leur fréquence accrue si l’on réalise une fixation dans la concavité sacrée, en regard de S3, comme décrit par certains (3) ; ce risque explique d’ailleurs que l’on ait progressivement renoncé à la technique malgré un axe vaginal plus physiologique en fin d’intervention.

2. Les lésions urinaires
La ligamentopexie étant quasi-systématiquement associée à une colposuspension vésicale (type Burch), le taux de complications urologiques rapporté dans les études fait souvent l’amalgame entre les 2 temps de l’intervention. Cette réserve étant faite, la fréquence moyenne des plaies vésicales se situe entre 2 et 3% (11, 28), les lésions urétérales étant plus rare évaluée à 0,5%.

3. Les complications digestives
Les plaies digestives (grêle ou rectum) sont rares (0 à 0,7% (11, 8) de même que les vrais syndrômes occlusifs post-opératoires -0,4% pour Deval (11)- ces derniers seraient d’autant plus fréquents qu’une cure chirurgicale d’un éventuel prolapsus du rectum lui est associée.

4. Les complications infectieuses
Redoutées des défenseurs de la cure de prolapsus par voie abdominale, ces complications infectieuses restent exceptionnelles. Sur une étude rétrospective portant sur 132 spondilodiscites d’inoculation, Rouaud (34) n’a retrouvé que 11 cas imputables à une promontofixation soit 8% des cas. La littérature fait par ailleurs état d’un risque moyen de 0,3 à 0,43% (27,35).

5. Les rejets prothétiques
Cette analyse est difficile en raison du temps de latence qui peut séparer l’intervention du rejet de matériel (plus de 12 ans dans un cas de notre série personnelle!) ; on peut donc objecter que les chiffres de la littérature sous-estiment en partie le risque en raison d’un recul souvent insuffisant. On peut retenir le chiffre de 1,8% rapporté par Cosson (8) ; l’auteur retient 2 facteurs de risque, d’une part l’utilisation d’une prothèse de Goretex et d’autre part le recours à un agrafage automatique de la prothèse sur le vagin.

6. Les variantes chirurgie abdominale-chirurgie laparoscopique
La série de Cosson (8) qui compare 217 ligamentopexies par laparotomie avec un recul pouvant atteindre 10 ans et 58 ligamentopexies coelioscopiques dont le recul est plus faible (30 mois maximum), révèle un taux de plaies vésicales significativement plus élevée après abord coelioscopique, alors que la laparotomie expose davantage aux plaies digestives.

C

omplications per-opératoires : comparaison coelio-laparo d’après Cosson (8)

Ligamentopexies

Coelioscopie (n=58)

Laparotomie (n=271)

Plaie vésicale

2 (3,4%)

1 (0,3%)

Plaie digestive

0

2 (0,7%)

Plaie urétérale

0

0

Hémorragie

1 (1,7%)

2 (0,7%)

 

VI – Les autres interventions pour prolapsus

Nous voulions quand même exposer ici les complications spécifiques des cures de cystocèles et de rectocèles par voie vaginale.

  • La cure de cystocèle : incontestable point faible de la chirurgie par voie vaginale, la cure de cystocèle reste la préoccupation de tout chirurgien vaginaliste. Le recours au « paravaginal repair » ou l’utilisation de matériel prothétique (prothèse intervésico-vaginale) ou vaginal (plastron vaginal) donne des résultats prometteurs mais expose à des complications propres :
    - Plicature du bas uretère au cours de la réfection du paravagin reconnaissable en per-opératoire par une cystoscopie avec contrôle de l’éjaculation urétérale.
    - Rejet en cas de recours au matériel prothétique (pouvant dépasser les 20% selon les matériaux utilisés) mais dont la fréquence serait abaissée avec l’utilisation de matériel type Vypro*
    - Mucocèle après utilisation de lambeau vaginal (ce risque est réduit par désépithélialisation du lambeau)

  • La cure de rectocèle : elle peut bien sûr exposer à la plaie rectale au cours d’une simple myorraphie des releveurs (intérêt du toucher rectal systématique) mais peut aussi, dans les cas où l’importance de la rectocèle et la mauvaise qualité tissulaire a fait recourir au choix d’un renfort prothétique, entraîner les complications spécifiques au matériel hétérologue.

Au terme de ce travail (qui reste incomplet), il apparaît que la chirurgie du prolapsus, comme toute chirurgie, expose à un certain nombre de complications, qui, si elles restent rares, sont préoccupantes pour le chirurgien dont l’objectif est une amélioration du confort de vie de ses patientes. La majorité de ces accidents sont évitables (respect des règles techniques, expérience du chirurgien..) ou diagnosticables en per-opératoire par des procédés simples. Dans une époque où la chirurgie fonctionnelle est soumise à une obligation de moyens et de résultats, l’information des patientes semble plus que jamais incontournable.

BIBLIOGRAPHIE

1- Barksdale PA, Elkins TE, Sanders CK, Jaramillo FE, Gasser RF.
An anatomic approach to pelvic hemorrhage during sacrospinous ligament fixation of the vaginal vault.
Obstet Gynecol, 1998; 91: 715-718

2 - Benson JT, McClellan E.
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Obstet Gynecol, 1993; 82: 387-389

3 - Birnbaum SJ.
Rational therapy for the prolapsed vagina.
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4 - Bonnar J.
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Clin Obstet Gynecol, 1985; 28: 435

5 - Burke TW, Levenback C.
Gastrointestinal tract.
In Complications in Gynecologic Surgery: Prevention, Recognition and Management.
Edited by JW Orr and HM Shingleton
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Sciatic and peroneal nerve injury : a complication of vaginal operations.
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Gastrointestinal injuries during gynecological laparoscopy.
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8 - Cosson M, Narducci F, Occelli B, Bogaert E, Querleu D, Crépin G.
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