Place des prothèses dans la cure
chirurgicale du prolapsus
A. PIGNE
Le vieillissement de la population va faire
exploser le nombre de consultations et de demande de réparation des troubles
de la statique pelvienne dans les 30 ans à venir. Choisir la meilleure voie
d'abord avec le maximum de sécurité, la morbidité la plus faible
possible et les résultats à long terme les plus pérennes font partie
du challenge qui sera proposé aux chirurgiens d'aujourd'hui et de demain.
La chirurgie du prolapsus pose plusieurs
questions fondamentales en terme de choix tactique :
• Voie abdominale ou voie vaginale
?
• Utilisation de protheses ou
non ?
La chirurgie du prolapsus a comme voie
d'abord naturel la voie vaginale et la plupart des auteurs s'accordent pour ne reconnaître
a la voie abdominale que les contre-indications de la voie vaginale. Celles-ci au
cours des dernières années se sont progressivement réduites et ne
persistent actuellement que l'inaccessibilité au vagin du fait par exemple
d'une pathologie de hanches ou chez des nullipares vierges dans la post ménopause
ou l'atrophie tissulaire rend le champ opératoire par trop réduit., l'existence
d'une pathologie collatérale rendant la voie abdominale impérative : pathologie
ovarienne ou masse utérine telle que la voie vaginale paraît peu recommandée.
Pourquoi utiliser des prothèses ?
Par voie abdominale
Tous les auteurs s'accordent pour reconnaître
le bénéfice des prothèses et donc nous ne discuterons pas cette indication
en soulignant toutefois les complications inhérentes à l'utilisation de
matériel exogène comme par exemple les érosions vaginales. Celles-ci
peuvent être précoces en rapport avec une infection ou une cause technique
(trop de tension mise dans la prothèse), ou retardées de quelques mois
voire quelques années sans que l'on puisse retrouver des facteurs déclenchants
spécifiques. Le taux d'érosion varie dans la littérature entre 4
et 12 %. Il semblerait toutefois que le taux de complication est opérateur
dépendant mais aussi et surtout fonction du type de matériau utilisé
les moins bons résultats obtenus pour le gore tex, devant le téflon, le
mersilène. Le meilleur matériau actuellement semble être le prolène.
Par voie vaginale
Les partisans des prothèses prétendent
obtenir de meilleurs résultas à long terme en renforçant les tissus
de la patiente par l'adjonction de matériau exogène. Julian en 1996 présente
un premier travail prospectif randomisé et montre un bénéfice avec
l'utilisation de prothèse cependant le nombre de patientes est peu important
(24) et un recul faible 2 ans. Par ailleurs son taux d'exposition de prothèse
est très élevé 3 / 12 soit 25 %. P. Sand en 2001 sur un nombre de
patientes conséquent (180) retrouve un bénéfice à peine significatif
mais aucune complication n'est retrouvée
Pourquoi ne pas utiliser de prothèses ?
La première raison serait pourquoi compliquer
une méthode lorsque la même technique sans prothèse donne de bons
résultats (tableau I).
Résultat du paravaginal repair dans la cure de cystocèle
sans prothèse
D'autres travaux confirment ses bons résultats
:
- Safir 92 % de bons résultats
sur 130 patientes avec un suivi moyen de 21 mois
- Cosson 93 % de bons résultats
sur 47 patientes avec un suivi moyen de 16 mois
- Young 98 % de bons résultats
sur 100 patientes avec un suivi moyen de 10 mois.
Ces bons résultats ne doivent
pas cependant faire oublier le peu de recul de ces études surtout lorsque l'on
sait que les récidives surviennent plus tardivement. Heinonem lorsqu'il analyse
ses résultats a 2,8 ans trouve un taux d'échec de 12 % sur 25 patientes
ayant une éversion complète du vagin et traitées par Richter exclusif
L'intervention de Bologna très
prisée en France au début des années 80 donna aussi d'excellents
résultats sur la cystocèle (Tableau II).
Résultat de l'intervention de Bologna
Une autre excellente raison de ne pas utiliser
de prothèse est le risque infectieux et la morbidité propre des prothèses
chez des patientes la plupart du temps âgées (l'âge moyen de la cure
de prolapsus, est aux environs de 60 ans).
Résultat de l'utilisation de prothèse de polypropilène
par voie vaginale (tableau III)
Récemment l'apparition de nouveau matériau
permet peut-être d'être plus large dans l'utilisation de prothèse
par voie vaginale. L'expérience du T.V.T nous a permis de démontrer qu'il
était possible d'insérer des prothèses par voie vaginale avec une
faible morbidité (Tableau III). Cette nouvelle approche devrait contredire
ce qui était le guideline dans les publications anglo-saxonnes en 2002.
Bibliographie
[1] Barrat J, Pigné A, Marpeau
L (1990). Le prolapsus génital et son traitement. Editions Masson Paris
[2] Bologna U (1978).
A new surgical procedure for the correction of urinary stress incontinence in the
female. Urol Int 33 : 150-158
[3] Crepin G, Querleu
D, Decocq J, Dubrulle R, Serilas M (1988). Le traitement de l'incontinence urinaire
d'effort associée au prolapsus génital par la technique de Bologna (115
cas) : indications chez les patientes âgées. Bull Acad Natle Med 172 :
987-993
[4] Debodinance P,
Querleu D (1993). Comparison of the Bologna and Ingelman-Sundberg procedures for
stress incontinence associated with genital prolapse : prospective randomized study.
Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol 52 : 35-40
[5] Kjolhede P, Ryden
G (1994). Prognostic factors and long-term results of the Burch colposuspension.
Acta Obstet Gynecol Scand 73 : 642-647
[6] Klein P, Treisser
A, Renaud R (1985). La cure d'incontinence urinaire à l'effort selon Bologna,
une technique intéressante dans les grosses cystocèles. Rev Fr Gynecol
Obstet 80 : 391-394
[7] Pigné A,
Boyer de Latour F, Keske J, Laroussinie MP, Maghioracos P, Marpeau L, Barrat J (1988).
Traitement des prolapsus uro-génitaux avec incontinence urinaire d'effort par
l'intervention de Bologna, à propos de 90 cas. J Gynecol Obst Biol Reprod 17
: 379-386
[8] Porges RF, Smilen
SW (1994). Long-term analysis of the surgical management of pelvic support defects.
Am J Obstet Gynecol 171 : 1518-1528
[9] Salet-Lizee D,
Rolet F, Zamora A, Lefranc JP, Blondon J (1987). Résultats de la cure et de
la prévention de l'incontinence urinaire d'effort par l'intervention de Bologna
dans les prolapsus avec volumineuse cystocèle. J Urologie 93 : 279-283
[10] Zhioua F, Mouelhi
C, Mamdoun L, Ferchiou M, Srasra M, Meriah S (1993). L'intervention de Bologna.
J Urologie 99 : 162-168. 368 A.
PIGNE
Auteur |
˙Patiente |
˙Succès |
˙Récidive |
˙Suivi |
˙White |
˙19 |
˙19 (100 %) |
˙0 |
˙> 3 ans |
˙Shull |
˙62 |
˙47 (76 %) |
˙15 (24 %) |
˙1,6 - 5,6 ans |
˙Grody |
˙72 |
˙71 (99 %) |
˙1 (1 %) |
˙0,5-3 ans |
˙Farrell Ling |
˙27 |
˙22 (80 %) |
˙5 (20 %) |
˙8 mois |
˙Nguyen-Bhatia |
˙10 |
˙10 (100 %) |
˙0 |
˙12 mois |
˙Ekins |
˙25 |
˙23 (92 %) |
˙2 (8 %) |
˙0,5 - 3 ans |
˙Malipeddi |
˙45 |
˙42 (93,4 %) |
˙3 (6,6 %) |
˙2 ans |
˙Total |
˙260 |
˙234 (90 %) |
˙26 (10 %) |
PLACE
DES PROTHèSES DANS LA CURE CHIRURGICALE DU
PROLAPSUS 369
Auteur |
˙Patiente |
˙IUE post-on |
˙Cure de cystocèle |
˙Recul (mois) |
˙Crépin |
˙115 |
˙11,3 % |
˙99 % |
˙3,36 |
˙Dubrulle |
˙40 |
˙5,5 % |
˙97,5 % |
˙24 |
˙Jacquetin |
˙143 |
˙14 % |
˙43 % |
˙18-84 |
˙Klein |
˙25 |
˙12,5 % |
˙96 % |
˙6-24 |
˙Pigné |
˙81 |
˙8,6 % |
˙92,6 % |
˙12-36 |
˙Salet-Lizée |
˙60 |
˙0 |
˙77 % |
˙16 |
˙Zhioua |
˙30 |
˙6,7 % |
˙96,6 % |
˙17,5 |
˙Khader |
˙54 |
˙9,3 % |
˙89 % |
˙16-48 |
Auteurs |
˙Patientes |
˙Suivi (mois) |
˙Echec |
˙Exposition |
˙Infection |
˙ |
˙ |
˙ |
˙ |
˙de prothèse |
˙vaginale |
˙Julian (1999) |
˙12 |
˙24 |
˙0 % |
˙0 % |
˙0 % |
˙Migliari 2000) |
˙17 |
˙20 |
˙17 % |
˙0 % |
˙0 % |
˙Bassini (2000) |
˙22 |
˙11 |
˙0 % |
˙43 % |
˙21 % |
˙Hardiman (2000) |
˙18 |
˙6 |
˙0 % |
˙11,1 % |
˙0 % |
˙Salvatore (2000) |
˙78 |
˙12 |
˙0 % |
˙5 % |
˙6 % |
˙De Tayrac (2001) |
˙36 |
˙13 |
˙0 % |
˙2,8 % |
˙0 % |
370 A.
PIGNE PLACE
DES PROTHèSES DANS LA CURE CHIRURGICALE DU
PROLAPSUS 371 |