NOUVELLES TECHNIQUES DE LABORATOIRE
Vrai ou faux Progrès ?
CULTURE PROLONGEE ET ECLOSION ASSISTEE DES EMBRYONS
M. DUMONT-HASSAN 1.2.3 ; P. COHEN-BACRIE 1 ;
A.HAZOUT2 ; FX.AUBRIOT3 ; S. DOUARD 3 ;
A. GLISSANT 3 ; C. NATHAN 3 ; A. STANOVICI
3
1- A.M.P. EYLAU – 55 rue Saint Didier 75116 PARIS
2- CLINIQUE DE LA MUETTE – 46-48 rue Nicolo 75116 PARIS
3- CLINIQUE CHEREST - 5 rue Pierre Cherest 92200 NEUILLY SUR SEINE
INTRODUCTION
En fécondation in vitro, l’objectif à atteindre est de permettre
à des couples infertiles ou stériles d’avoir un enfant en
bonne santé, en essayant de limiter le nombre des tentatives donc
en optimisant chacune d’entre elles. Les laboratoires de fécondation
in vitro ,ont été amenés, progressivement, à
développer différentes techniques pour tenter de répondre
aux problèmes posés par des situations difficiles telles
que des situations :
- D’échecs de maturation ovocytaire in vivo
- D’échecs de fécondation
- D’échecs d’implantation.
Pour les échecs de maturation ovocytaire in vivo, la maturation
in vitro se développe dans plusieurs laboratoires avec des succès
encore très faibles. Cette technique, lorsqu’elle sera, plus efficiente,
permettra également, de limiter les stimulations ovariennes chez
certaines femmes et de développer des banques d’ovocytes immatures.
Pour les échecs de fécondation essentiellement
dû à des pathologies masculines ; les années
90 avec l’essor de l’ICSI ont permis à un grand nombre de couples
d’être parents.
Pour les échecs d’implantation embryonnaire, plusieurs
techniques on été proposées :
- La culture prolongée des embryons pour adapter
le stade embryonnaire à la fenêtre d’implantation c’est-à-dire
réaliser un transfert intra-utérin d’un ou deux blastocystes,
- L’assistance à l’éclosion embryonnaire par perforation,
amincissement ou dissolution de la zone pellucide dans le but de favoriser
l’éclosion de l’embryon donc son implantation.
- Le diagnostic préimplantatoire (DPI) initialement développé
pour des couples fertiles ou stériles à risque génétique
élevé pourrait également avoir un intérêt
chez les couples à échecs répétés d’implantation,
ou avortements à répétition et chez des couples à
femme d’âge élevé pour essayer de ne transférer
que des embryons chromosomiquement normaux.
Nous parlerons ici des techniques utilisées pour
essayer de favoriser l’implantation embryonnaire : La culture prolongée
et l’éclosion assistée des embryons.
I. La culture prolongée des embryons ; in vitro
Chez l’humain, contrairement aux autres espèces de mammifères,
le transfert dans l’utérus d’embryons précoces ( obtenus
après 2 jours de culture in vitro ) permet d’obtenir des grossesses.
C’est l’obtention de ces résultats , avec des protocoles simples
qui a retardé la mise au point de techniques et de milieux permettant
le développement embryonnaire jusqu’au stade blastocyste.
Cependant, notre incapacité à produire des grossesses chez
certaines femmes ayant eu plusieurs fois des transferts d’embryons précoces
nous a fait prendre conscience de la nécessité de reconsidérer
toutes les étapes du protocole de fécondation in vitro.
Le faible taux d’implantation des embryons âgés de 2 jours
(10 à 15 %) peut s’expliquer en partie par la fréquence
relativement élevée des anomalies chromosomiques embryonnaires
mais aussi par la période inappropriée du transfert (à
ce stade, les embryons devraient être dans la trompe) et l’impossibilité
de prédire le développement des embryons transférés.
Les méthodes de culture prolongée des embryons humains,
revues par MENEZO et coll, 1998, permettent d’obtenir des blastocystes
dans le but d’augmenter le taux d’implantation embryonnaire. La culture
prolongée permet d’identifier et d’éliminer les ufs dont
la segmentation s’arrête après quelques divisions et de réaliser
un transfert approprié plus physiologique : transfert de blastocystes
dans l’utérus.
A- Les cocultures
Chez la plupart des espèces de mammifères, l’embryon est
soumis, in vitro, à un arrêt de développement au moment
de l’activation du génome embryonnaire. Il y a plus d’une dizaine
d’années ; cet arrêt progressif du développement
embryonnaire ne permettait d’obtenir qu’un pourcentage modeste de blastocystes
lorsque les embryons étaient cultivés dans des milieux simples.
Pour lever le blocage des divisions cellulaires, in vitro, et apprécier
l’aptitude des zygotes au développement, les embryons de plusieurs
espèces de mammifères (bovins, ovins, caprins, porcins,
murins, primates) ont été cultivés sur des tapis
cellulaires de différentes origines, jusqu’au stade blastocyste.
Depuis le début des années 90 , différents supports
cellulaires ont été utilisés en embryologie humaine :
des tapis cellulaires d’origine génitale (cellules du cumulus,
de la granulosa, de l’oviducte, de l’utérus) mais aussi sur un
support d’origine extragénitale : la lignée VERO qui
est une lignée cellulaire établie de cellules épithéliales
de reins de singe. Un certain nombre d’études comparant la culture
des embryons en milieux simples avec la coculture ont montré la
supériorité de la coculture pour l’obtention de blastocystes
(tableau 1). En général, les embryons cocultivés
avaient toujours un nombre de cellules plus élevés qu’en
milieux simples (MENEZO et coll, 1995). De plus, TURNER et LENTON 1996,
ont montré dans une étude randomisée que les blastocystes
obtenus sur cellules VERO produisaient plus d’HCG que ceux obtenus en
milieu simple.
L’utilisation de la coculture est particulièrement intéressante
dans quatre situations (OLIVENNES et coll, 1994).
- Les échecs répétés de transferts embryonnaires
à J2 :les taux de grossesses cliniques par transfert sont
de 37,2 % à 42 % (JANNY et coll, 1993).
- L’obtention d’une grossesse unique :
Le taux d’implantation plus élevé des blastocystes (21%
par blastocyste transféré ) autorise un transfert numériquement
plus faible sans altération des résultats. (36,4 % grossesse/
transfert). Cela est intéressant pour les patientes ayant un utérus
malformé ou de petite taille.
– L’analyse de l’aptitude au développement des embryons
Lorsqu’un problème de qualité ovocytaire est suspecté
(patientes âgées et/ou ayant un taux de FSH élevé,
patientes souffrant d’infertilité primaire inexpliquée)
la coculture permet d’apprécier l’aptitude des zygotes au développement.
– La congélation des embryons
La coculture permet de sélectionner les meilleurs
embryons à congeler (MENEZO et coll, 1992 ; KAUFMANN et coll,
1995 ; SHOUKIR et coll, 1998) Notre propre expérience (tableau
2) sur 6 années montre que les blastocystes obtenus à J5
et J6 congelés et décongelés donnent 20 % de grossesse
évolutive par transfert et 19 % d’accouchement par transfert.
Les blastocystes expansés obtenus à J7 donnent très
peu de grossesse lorsqu’ils sont transférés frais alors
que s’ils sont congelés et décongelés. Le taux d’accouchement
par transfert est de 16 % (DUMONT-HASSAN et coll, 1998).
Globalement sur 6 années d’expérience
(tableau 2 ), le nombre d’enfants nés par blastocyste congelé
est de 10,7 % ce qui est le double de ce que l’on obtient avec les embryons
congelés aux stades précoces.
– La coculture permet donc :
- Le maintien de la qualité embryonnaire in vitro :
après culture prolongée ; les taux d’implantation sont
satisfaisants après transferts.
– Une sélection cytogénétique des
embryons : la moitié des embryons bloqués en coculture
sont porteurs d’anomalies cytogénétiques (BENKHALIFA et
coll, 1996 ; MENEZO et coll, 1997).
– D’obtenir des blastocystes résistant au processus
de congélation-décongélation.
B- LA CULTURE PROLONGEE EN MILIEUX SEQUENTIELS
La pratique de la coculture a permis une meilleure connaissance de la
biochimie de l’embryon et la fabrication de milieux de culture capables
de maintenir le développement jusqu’au stade blastocyste sans coculture.
Pour suivre au plus près les besoins de l’embryon au cours de son
développement, on expose successivement les embryons à des
milieux de culture différents c’est la culture en milieux séquentiels.
Cette culture nécessite un premier milieu de J0 à J2, avant
l’activation du génome embryonnaire, puis un deuxième milieu
à J3 pour favoriser la compaction de l’embryon et l’obtention du
blastocyste.
La mise au point par différentes sociétés internationales,
de milieux séquentiels faciles à utiliser permet aux biologistes
de FIV d’envisager le transfert de blastocyste non seulement pour essayer
de résoudre certains échecs d’implantation mais aussi comme
technique de routine en FIV.
Dans un protocole de don d’embryons, BUSTER et coll, 1985, ont montré
que des blastocystes obtenus in vivo et récupérés
par lavage utérin ont un taux d’implantation de 60 % lorsqu’ils
sont transférés dans l’utérus d’une femme receveuse.
Le transfert au stade blastocyste devrait donner la meilleure chance à
une femme d’être enceinte tout en lui évitant une grossesse
multiple.
Pour des raisons pratiques, les équipes de FIV sont parfois amenées
à proposer le transfert des embryons à J3. Cette pratique
n’est pas délétère puisqu’il n’y a pas de différence
entre les taux de grossesses obtenus respectivement à J2 ou à
J3. De plus, elle permet de repérer les embryons qui se développent
le mieux pendant cette période d’observation.
Lors d’une étude prospective randomisée,
SCHOLTES et coll, 1996, ont comparé les taux d’implantation après
transfert systématique des embryons à J3 ou à J5
(quel que soit leur stade de développement). Ils n’ont pas trouvé
de différence significative que ce soit entre les taux de grossesses
(26 % et 25 % respectivement) ou entre les taux d’implantation embryonnaire
(13 % et 12 % respectivement).
Lorsque les résultats sont analysés en fonction de l’aspect
morphologique des embryons transférés : Les taux de
grossesse et d’implantation obtenus avec les embryons sans fragments ou
avec moins de 20 % de fragments à J3 sont respectivement égaux
à 32 % et 27 % ; 18 % et 12 %. Le transfert de 1 ou 2 blastocyste
(s) expansé (s) à J5 permet d’obtenir 49 % de grossesse
par transfert et 35 % d’implantation par embryon ; ce qui est significativement
plus élevé que ce qui est obtenu avec les plus beaux embryons
à J3. D’après GARDNER et coll, 1998, il faut transférer
en moyenne 3,8 embryons à J3 contre 2,7 à J5 pour obtenir
des taux de grossesses équivalents (47 % versus 63 %) . Avec
les milieux séquentiels développés par GARDNER (G1,
G2), il est possible d’obtenir 52 % de blastocystes (JONES et coll, 1998).
Le développement des embryons en culture prolongée dépend
de leur morphologie à J2 ; Placés dans les mêmes
conditions de culture ; 47 % des embryons ayant entre 0 et 20 % de
fragments atteignent le stade blastocyste contre 21 % pour les embryons
ayant plus de 20 % de fragments (RIJNDERS et coll, 1998). Néanmoins
seulement 51 % des embryons transférés à J5 avaient
été présélectionnés pour un transfert
à J3. La morphologie embryonnaire à J3 a donc une valeur
prédictive limitée.
Le pourcentage de transferts d’au moins 1 blastocyste à J5 dépend
essentiellement du nombre d’ovocytes récupérés à
la ponction. Il varie d’environ 48 % pour moins de 5 ovocytes à
80 % pour des cohortes d’environ 15 ovocytes (SCHOLTES et coll, 1998).
En première intention, il est donc recommandé de réserver
le transfert de blastocyste uniquement aux femmes ayant au moins 10 à
12 ovocytes matures.
Notre expérience préliminaire avec des patientes ayant eu
plusieurs échecs d’implantation embryonnaire à J2 montre
que la culture prolongée en milieux séquentiels (IVF50 puis
S2) offre à certaines femmes ; la possibilité d’obtenir
une grossesse évolutive (24 cycles (14 ICSI + 10 FIV ), 23 transferts,
8 grossesses ). Par contre, on ne sait pas encore si les blastocystes
congelés obtenus par cette méthode permettront d’obtenir
les mêmes taux d’implantation que ceux obtenus après coculture
sur cellules VERO.
TABLEAU 1 :
OBTENTION DE BLASTOCYSTES HUMAINS SUR DIFFERENTS SUPPORTS CELLULAIRES
COCULTURE
|
AUTEURS
|
POURCENTAGE DE BLASTOCYSTES
|
|
|
COCULTURE
|
TEMOINS
|
Supports d’origine Génitale :
Cellules oviducte
|
YEUNG et al, 1992
BONGSO et al, 1989
|
51 %
30 %
|
46 %
28 %
|
Cellules endomètre
|
PLACHOT et al, 1994
JAYOT et al, 1995
|
47 %
45 %
|
3 %
-
|
Séquence :
Cellules oviducte
Puis cellules endomètre
|
BONGSO et al, 1994
|
63 %
|
41 %
|
Cellules cumulus
|
QUINN et al, 1996
|
45 %
|
31 %
|
Cellules granulosa
|
PLACHOT et al, 1996
FREEMAN et al, 1995
|
30 %
67,7 %
|
3 %
-
|
Lignée cellules endomètre
|
DESAI et al, 1994
|
69 %
|
29 %
|
Cellules oviductes bovin
|
WIEMER et al, 1993
|
58,5 %
|
29,3 %
|
Support d’origine extra génitale :
Cellules épithéliales de
Rein, de singe :
Lignée VERO
|
MENEZO et al, 1990 ,1992
SCHILLACI et al, 1994
SAKKAS et al, 1994
VAN BLERKOM et al, 1993
TURNER et LENTON, 1996
|
61 %
57 %
68 %
62 %
45,6 %
77 %
|
3 %
17 %
1 %
53,6 %
38,5 %
46 %
|
TABLEAU 2
RESULTATS DES TRANSFERTS DE BLASTOCYSTES DE FIV CONGELES ;
OBTENUS PAR CULTURE SUR CELLULES VERO
(Activité 1992-1997 – AMP EYLAU)
CYCLES
|
506
|
TRANSFERTS
|
471
|
Nb BLASTO CONGELES
|
931
|
Nb BLASTO AYANT RECUPERES
|
787
|
Nb GROSSESSES EVOLUTIVES
|
95 (90 accouchements, 5 FCS 2nd
trimestre)
|
Nb ENFANTS NES
|
100
|
BEBE / EMB. CONG.
|
10,7 %
|
BEBE / EMB. TRANSFERES
|
12,7 %
|
II. L’éclosion embryonnaire assistée
In vivo, la perte de la zone pellucide (ZP) est
un phénomène, étroitement lié à l’implantation .
Si cette étape du développement embryonnaire intervient
en retard ou ne se fait pas, alors l’implantation de l’embryon sera compromise.
Deux mécanismes interviendraient dans la perte de la Zone Pellucide :
- un facteur lytique utérin hormono dépendant.
- Un procédé actif d’éclosion engagé
par le blastocyste indépendamment d’un stimulus hormonal. Ce
procédé ferait intervenir des lysines embryonnaires mais
aussi des cycles de contraction et de réexpansion du blastocyste.
Les changements biochimiques que subit la Zone
Pellucide, au moment de la fécondation, la rendent plus résistante
aux protéases. Cette modification est appelée durcissement
de la zone pellucide. En plus de ce durcissement induit par la fécondation,
la Zone Pellucide peut subir un durcissement spontané après
culture in vitro ou après vieillissement in vivo.
L’hypothèse selon laquelle des défauts
d’éclosion pourraient être responsables d’échecs d’implantation
a été émise par l ‘équipe américaine
de COHEN et coll 1990, suite à deux observations :
- les embryons à Zone Pellucide épaisse (supérieure
à 15 µm) s’implantent moins que ceux à Zone Pellucide
fine et régulière (10% contre 29%).
- les embryons issus d’une fécondation assistée,
par incision de la Zone Pellucide de l’ovocyte avant sa mise en contact
avec les spermatozoides, s’implantent mieux que ceux à Zone Pellucide
intacte.
L’assistance à l’éclosion embryonnaire
serait bénéfique pour faciliter l’éclosion des embryons
dont la Zone Pellucide seraient anormalement durcie ou épaisse,
permettant également une interaction plus précoce entre
l’endomètre et l’embryon donc une meilleure implantation (LIU et
coll, 1993).
Plusieurs techniques ont été proposées
pour perforer ou amincir la Zone Pellucide.
- La première a été la technique
de perforation mécanique qui consiste à inciser la Zone
Pellucide avec une aiguille de verre (PZD = " Partial Zona Dissection "
= Dissection partielle de la Zone Pellucide) (MALTER et COHEN 1989). La
difficulté avec cette technique, est de toujours réaliser
une brèche qui soit de taille suffisante pour permettre à
l’embryon d’éclore sans traumatisme
- Une technique de perforation chimique a été
mise au point pour faciliter la réalisation de trous de taille
semblable (GORDON et coll, 1986). Elle consiste à créer
un orifice dans la Zone Pellucide en appliquant une solution de tyrode
acide (pH 2.3) à l’aide d’une micropipette en verre. Les trous
obtenus sont de taille plus importante (20 à 25 µm de diamètre).
Pour éviter ou minimiser l’effet délétère
du tyrode acide sur l’embryon, certaines équipes ne font qu’un
amincissement de la zone pellucide (dissolution partielle au tyrode acide).
L’amincissement de la Zone Pellucide peut également être
obtenu en lui appliquant des protéases ou en cultivant les embryons
en présence de pronase ou de protéinase K (ROH, 1998).
Une troisième technique a été développée,
c’est la perforation au laser proposée pour essayer de mieux contrôler
la taille du trou et éviter les effets délétères
du pH acide sur l’embryon (OBRUCA et coll, 1994).
In vitro, le taux d’éclosion des blastocystes
est augmenté en perçant la zone pellucide des embryons précoces
(DOKRAS et coll, 1994 ; MANDELBAUM et coll, 1994).
In vivo, il a été rapporté
que seulement 25 à 30% des blastocystes pouvaient éclore.
Si ce taux est le même in vivo, il est logique de proposer l’éclosion
assistée de tous les embryons avant le transfert pour favoriser
leur éclosion. L’équipe pionnière de J. COHEN qui
a fait ce travail, a montré, une diminution des grossesses cliniques
lorsque l’éclosion assistée était réalisée
sur des embryons à Zone Pellucide fine (inf. ou égal à
13µm) alors qu’il y avait une augmentation de l’implantation, lorsque
celle-ci était réalisée sur des embryons à
Zone Pellucide épaisse (sup. ou égal à 15µm) (COHEN
et coll, 1992) d’où l’idée de proposer, ensuite, une éclosion
embryonnaire assistée sélective. Selon COHEN et coll, pour
observer un effet bénéfique de l’éclosion assistée
en clinique humaine,avec le tyrode acide, il faut :
- faire une sélection des patientes :
- femmes d’âge supérieures à 38 ans,
- femmes dont la FSH basale à J3 du cycle est supérieure
à 15 mUI/ml d’après les normes de leur technique.
- femmes ayant eu des échecs répétés
d’implantation.
- faire une sélection des embryons à
micromanipuler :
- embryons de développement lent :
moins de six cellules à J3 de culture in vitro,
- embryons fragmentés : plus de 15% de fragments,
- embryons à Zone Pellucide épaisse :
- sup. ou égal à 17 µm si l’âge de la femme
est inférieur à 34 ans,
- sup. ou égal à 15 µm si l’âge de la femme
est compris entre 34 et 39 ans,
- au delà de 39 ans, tous les embryons sont micromanipulés
quelle que soit l’épaisseur de la Zone Pellucide.
- bien contrôler toute la procédure de micromanipulation,
- mesurer avec précision la taille du trou 20 à
25 µm de diamètre,
- minimiser l’exposition de l’embryon au tyrode acide.
- réaliser un transfert sans traumatisme pour les embryons
devenus plus vulnérables.
Cette technique utilisée en routine sur
2855 cycles (période d’août 1995 à mars 1998) a permis
à cette équipe d’obtenir un taux d’implantation embryonnaire
avec activité cardiaque de 28.7 % et un taux de grossesses cliniques
de 55, 8%.
De même SCHOOLCRAFT et coll, 1994, en appliquant
les critères défini par COHEN et coll, et en utilisant la
même technique ont obtenu un taux de grossesses évolutives
de 64% dans le groupe éclosion assistée contre 19% dans
le groupe contrôle. Le taux d’implantation étant respectivement
de 33% contre 6.5%. Chez les patientes de 40 ans et plus (SCHOOLCRAFT
et coll, 1995), ces taux sont respectivement de 47% et 22% contre 11%
et 6% dans le groupe contrôle. Dans cette équipe, le taux
d’accouchement est passé de 34% à 56% en appliquant l’éclosion
assistée en routine.
Il faut préciser aussi que pour obtenir
ces résultats, en moyenne 4.5 embryons ont été transférés
dans le groupe témoin contre 4.6 dans le groupe expérimental.
Dans ce dernier groupe, 50% des grossesses étaient multiples pour
celles qui étaient de rang supérieur à 2, elles se
sont spontanément réduites à 2. L’éclosion
assistée bénéficie surtout aux femmes de mauvais
pronostic ayant suffisamment d’embryons à transférer.
MAGLI et coll, 1998, observent aussi un effet bénéfique
de l’éclosion assistée au tyrode acide dans 2 groupes de
femmes ayant un mauvais pronostic de grossesse (âge supérieur
à 38 ans ; au moins 3 échecs d’implantation). En transférant
en moyenne 3.7 embryons, ils obtiennent des taux de grossesses significativement
plus élevés que ceux des contrôles : 31% versus
10% dans le premier groupe et 36% versus 17% dans le deuxième groupe..
De même les taux d’implantation sont augmentés :
11.5% versus 4% et 15% versus 6.3%. Il faut signaler que dans cette étude,
les fragments embryonnaires étaient également retirés
lorsqu’ils excédaient 10%. Cette pratique de retrait des fragments
au cours de l’éclosion assistée est également appliquée
par les meilleures équipes américaines. Bien maîtrisée,
c’est peut-être ce qui explique en partie leur taux de succès.
D’autres équipes dans le monde ont essayé
d’appliquer les différentes techniques d’éclosion assistée
avec plus ou moins de succès. La controverse existe, la comparaison
des résultats est difficile car :
- les techniques utilisées pour rompre la Zone Pellucide
ne sont pas les mêmes,
- ces techniques sont-elles bien maîtrisées ?
Elles demandent un entraînement intensif de la part du manipulateur
pour être appliquées avec succès.
- la technique du transfert embryonnaire peut également
modifier les résultats. Les embryons ainsi manipulés sont
fragiles et peuvent être facilement endommagés,
- les populations de patientes étudiées ne sont
pas toujours les mêmes,
Malgré l’hétérogénéité
des études publiées, une méta-analyse rapportée
par BRINSDEN et coll, 1997, sur 14 publications parues entre 1992 et 1996
montre que l’éclosion assistée aurait effectivement un intérêt
chez les femmes d’âge supérieur ou égal à 38
ans.
L’étude multicentrique de MELDRUN et coll,
1998, portant sur 4043 cycles de FIV réalisés dans 54 centres,
montre un meilleur taux de succès dans les programmes de FIV qui
appliquent l’éclosion assistée. Avant 40 ans, les taux de
grossesses et d’accouchements sont améliorés. Entre 40 et
42 ans, le taux de grossesses est significativement augmenté, par
contre le taux d’accouchements n’est pas statistiquement différent.
Au delà de 42 ans, on ne constate pas d’amélioration des
résultats. Cela est certainement dû au taux d’aneuploïdie
élevé dans les embryons.
CONCLUSION
Pouvoir obtenir et disposer d’embryons au stade
blastocyste in vitro constitue un vrai progrès pour les biologistes
et pour les patientes.
En effet, le biologiste peut contrôler le
bon déroulement du développement embryonnaire jusqu’au stade
blastocyste. Pour optimiser l’interaction blastocyste-endomètre,
il peut provoquer l'éclosion de l’embryon in vitro en retirant
la totalité de la Zone Pellucide, par un traitement enzymatique
à la pronase. D’après FONG et coll, 1998, cette technique
ne semble pas délétère et permet d’obtenir 33% d’implantation
par blastocyste.
La culture prolongée a pour but de repérer
au sein d’une cohorte embryonnaire importante, les embryons les plus évolutifs
pour diminuer leur nombre au transfert et obtenir une grossesse unique.
Pour les patientes ayant beaucoup d’ovocytes matures
au recueil, le transfert d’un blastocyste peut leur permettre d’avoir
une grossesse unique avec un maximum de chances. Cette pratique permet
également l’obtention de grossesses dans les échecs répétés
d’implantation à J2.
De plus l’obtention de blastocyste in vitro devrait
permettre d’optimiser la technique du diagnostic génétique
préimplantatoire et son application clinique.
Faut-il généraliser le transfert
d’embryons au stade blastocyste lorsque l’on a beaucoup d’ovocytes matures
au recueil, donc probablement beaucoup d’embryons ?
A propos du transfert de blastocyste, il faut savoir
que 20% des femmes ayant beaucoup d’ovocytes , donc beaucoup d’embryons
n’auront pas de blastocyste. Doit on les décourager dés
le premier cycle en ne réalisant pas le transfert d’embryons ?
ou bien faut-il tenir compte du nombre et de la qualité des embryons
avant de décider de prolonger la culture jusqu’à J5 , au
moins pour le premier cycle ?
Inversement, on sait que certaines femmes ayant
peu d’ovocytes (moins de 5 ovocytes) au recueil peuvent avoir un blastocyste.
C’est pourquoi on peut leur proposer le transfert tardif après
des échecs de transfert à J2 pour s’assurer du bon développement
de certains embryons.
Quand faut-il proposer l’éclosion assistée ?
Les équipes ayant de très bons résultats
avec l’éclosion assistée chez des femmes de mauvais pronostic
réalisent souvent des transferts de 3 à 5 embryons en prenant
le risque de grossesses multiples.
Là encore, cette technique semble s’adresser
à des femmes ayant suffisamment d’embryons à transférer
pour compenser la " mauvaise qualité " de ces
derniers (taux d’aneuploïdie élevé, développement
lent, fragmentation supérieure à 20%).
L’ éclosion assistée a pour
but l’obtention d’une grossesse chez les femmes dont la qualité
embryonnaire plutôt moyenne ou médiocre ne permet pas l’obtention
de blastocyste à J5, in vitro, c’est pourquoi il serait préférable
d’essayer d’optimiser le développement des embryons in vivo, en
pratiquant préalablement l’éclosion assistée éventuellement
couplée au retrait de fragments avant le transfert embryonnaire.
Dans tous les cas, ces techniques ont pour but
de faciliter l’implantation de l’embryon le plus viable. En aucun cas,
elles ne changent la qualité intrinsèque des embryons et
pour certaines femmes se pose toujours la question : Comment améliorer
la qualité embryonnaire ?
BIBLIOGRAPHIE
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