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Titre: Les androgènes chez l'homme: les modalités du remplacement hormonal par les androgènes
Année: 1999
Auteurs: - Jamin Ch.
Spécialité: Andrologie
Theme: Androgènes

Les androgènes chez l'homme: les modalités du remplacement hormonal par les androgènes

Ch. Jamin 
Service de Gynécologie-Obstétrique du Pr Madelenat
Hôpital Bichat, Paris
Correspondance: 169 Bd Haussmann 75008 Paris

 

Le traitement hormonal substitutif chez l'homme pose quatre types de problèmes: quel type de traitement proposer?, à qui?, quelle est l'innocuité de cette substitution?, et quelle surveillance faut-il proposer?

Aucune de ces questions n'a à ce jour de réponse simple. Nous nous attacherons dans ce texte à l'étude des deux dernières questions en excluant les problèmes prostatiques traités dans un autre exposé. Par ailleurs nous n'envisagerons que le problème de la substitution testiculaire et non surrénalienne: on sait en effet que la sécrétion de SDHA baisse aussi avec l'âge et que certains proposent une substitution de cet axe.

Rôle de la testostérone.

La testostérone est l'hormone principale de la sécrétion testiculaire.

Elle a trois devenirs possibles:

. action directe sur certaines cibles: le muscle et peut-être la glande sébacée

. action après transformation en dihydrotestostérone par les 5 alpha réductase 1 et 2 (15). Le type 2 prédomine au niveau des organes génitaux, la prostate en particulier. Le type 1 est présent dans la peau avec une activité enzymatique variable suivant la zone considérée.

. enfin nombre de tissus sont équipés d'une activité arômatase transformant les androgènes en estrogènes.

Deux découvertes récentes ont permis de mettre en évidence l'importance de cette transformation en estrogènes.

La première vient de la clinique humaine où l'étude de sujets masculins ayant un déficit en arômatase a permis de découvrir que c'est par l'intermédiaire de cette transformation de la testostérone en estrogènes que l'hormone mâle agit au niveau osseux. L'ostéoporose de ces sujets n'est contrôlable que par l'apport d'estradiol (4).

Le second modèle est celui des souris Knock Out (ERKO) (17). Il s'agit d'animaux chez lesquels le récepteur d'estradiol est inactivé. Ces animaux mâles ont une infertilité par trouble de la spermatogénèse et des anomalies du comportement sexuel.

Enfin la présence d'une arômatose dans certains tissus, l'endothélium vasculaire en particulier, permet d'envisager aussi à ce niveau un passage obligatoire par la transformation en estrogènes pour les androgènes.

Ceci est corroboré par l'effet vasodilatateur de l'estradiol chez l'homme.

Une substitution hormonale chez l'homme devra donc préférentiellement, sauf exception, utiliser une hormone gardant ces trois devenirs possibles, soit la testostérone. En revanche rappelons que la DHT n'est pas arômatisable, donc non active sur les tissus estrogénodépendants. Il est possible que dans l'avenir, une fois mieux définies les différentes cibles d'action de la testostérone et de ses produits de transformation, on puisse agir sélectivement sur tel ou tel tissu.

Tolérance de l'apport androgénique.

L'impact hépatique des androgènes: les effets délétères des androgènes au niveau du foie dépendent à la fois de leurs effets cellulaires et de leurs effets métaboliques.

Pour ce qui est des effets cellulaires l'utilisation des formulations et des doses actuelles ne donne plus guère d'inquiétude. En revanche l'administration orale de dérivés 17 alkylés induit des risques de tumeurs hépatiques.

Pour les effets métaboliques la prise orale d'androgènes lorsqu'existe un premier passage hépatique modifie l'équilibre lipidique dans un sens défavorable. L'administration parentérale a des effets variables suivant les études et les molécules. Pour le cholestérol total et le LDL cholestérol, on assiste le plus souvent à une baisse ou à une stabilité de celui-ci. Le HDL cholestérol baisse. Ceci n'est pas observé lors de l'administration parentérale d'androgènes arômatisables (enanthate). L'adjonction à ce même traitement d'un inhibiteur de l'arômatase (testolactone) induit, comme avec les dérivés 17 alkylés (non arômatisables), une baisse du HDL cholestrol par stimulation de l'hépatique triglycéride lipase.

Les androgènes n'ont pas d'effet délétère sur la coagulation, ils ont même tendance à favoriser la fibrinolyse (8).

La tolérance prostatique sera discutée dans un autre exposé.

Androgènes et hématocrite (2,5,10,21)

L'administration d'androgènes à doses pharmacologiques chez l'adulte peut entraîner une augmentation de l'hématocrite pouvant aller jusqu'à la polycysthémie. Ceci entraîne une augmentaiton de la viscosité sanguine pouvant conduire à la thrombose

Des troubles équivalents apparaissent lors de la supplémentation de sujets hypogonadiques; l'élévation moyenne de l'hématocrite se situe à 7%. Ce phénomène est le plus souvent bénéfique chez les sujets âgés, cependant une élévation exagérée (Ht>48%) a été associée à des accidents vasculaires cérébraux. Une surveillance de l'hématocrite et de l'hémoglobine est donc nécessaire chez les sujets traités.

Effets du THS par les androgènes (20)

L'effet du THS par les androgènes chez l'homme est beaucoup moins bien connu que celui par les estrogènes chez la femme. La principale raison réside dans le fait que les sujets ayant une carence profonde sont en nombre réduit et que les études prospectives sur ce thème sont rares.

Effets des androgènes sur l'os (2,6,14,21).

Des études anciennes (1948) ont permis de mettre en évidence une rétention calcique. Plus récemment plusieurs études ont montré une diminution du turnover osseux mesuré sur l'exécrétion calcique, l'ostréocalcines, l'hydroxyproline, les phosphatases alcalines et une élévation de la 1,2,5 dihydroxyvitane D3.

Peu d'études sont disponibles ayant comme critère l'ostéodensitométrie, avec dans celles-ci un résultat favorable au niveau vertébral.

Effets de l'administration d'androgènes sur la composition corporelle (3,11,12,14,21)

Le déficit en testostérone est marqué chez l'homme jeune par une baisse de l'anabolisme protéique et une augmentation de l'adiposité. Ces modifications de la composition corporelle sont indépendantes de la production de GH et d'IGF1.

L'administration de testostérone chez l'animal augmente la rétention azotée. Chez l'homme l'injection intramusculaire de 100 mg/semaine d'enanthate de testostérone entraîne une augmentation de la masse maigre, du volume musculaire, de la force musculaire sans modification de la masse grasse.

Dans l'administration de testostérone par voie transdermique il a été observé une baisse de l'adiposité viscérale sans modification de la masse maigre. Ni la DHT ni le placebo n'ont provoqué de modifications identiques.

Effets sur le risque cardiovasculaire (1,2,7,14,22)

Il existe de nombreux arguments en faveur du rôle de l'insuffisance gonadique dans le développement du risque cardiovasculaire chez l'homme (16). Ceci se retrouve lorsque l'on mesure les différents marqueurs de risque cardiovasculaire. Il n'existe pas d'études irréprochables sur l'impact de la supplémentation hormonale chez l'homme (ni chez la femme d'ailleurs), et il existe peu d'études d'intervention. Une étude randomisée, 8 études prospectives et 30 études transversales ont analysé l'effet de l'administration de testostérone et de DHA sur le risque cardiovasculaire. Ces études sont en faveur d'un effet favorable pour certaines, neutre pour d'autres sur le risque.

Au niveau des facteurs de risque l'administration orale d'undecanoate de testostérone réduit le niveau du cholestérol total et du LDL cholestérol sans modifier le taux de HDL cholestérol, des apoprotéines A et B, et des triglycérides. L'équilibre hydrocarboné n'est pas défavorablement modifié. Ces mêmes résultats favorables sont trouvés lors de traitement par l'enanthate de testostérone. L'adjonction à ce traitement de testolactone, inhibition de l'arômatase, entraîne en revanche comme lors de l'administration de méthyltestostérone, des modifications délétères du profi métabolique.

Effets de la supplémentation sur l'humeur et la fonction sexuelle (13,19,23,24,25)

La dépression comme les fluctuations de la libido et de l'activité sexuelle sont multifactoriels, et il est bien difficile d'évaluer le rôle de l'hypogonadisme partiel dans leur génèse. En revanche dans les hypogonadismes prouvés le traitement par androgènes améliore le bien-être, l'énergie, diminue l'angoisse et l'irritabilité.

Les anomalies de l'érection ne semblent pas être corréllées aux taux des androgènes circulants. Il n'est pas clairement établi non plus que la baisse de l'activité sexuelle chez l'homme soit en rapport avec la diminution du taux de testostérone libre avec l'âge. Il est encore moins évident que la supplémentation hormonale chez un homme eugonadique apporte sur ce plan le bénéfice attendu.

Pour les troubles de la libido la relation avec le niveau de testostérone est encore moins établie. Quant à l'efficacité du traitement par les androgènes, il est difficile à établir, tant sont nombreux les facteurs qui interviennent. En particulier l'amélioration de l'humeur citée plus haut a certainement un impact sur la libido. Seules des études en double aveugle dans ce domaine ont une signification.

Les modalités thérapeutiques

L'androgène à utiliser doit:

- garder les potentialités de la testostérone, c'est-à-dire être arômatisable et être un substrat de la 5 alpha réductase ( bien que certains aient associé à la testostérone un inhibiteur de la 5 alpha réductase de type 2 pour éviter les effets prostatiques)

- ne pas être alkylé en 17 pour ne pas induire d'hépatotoxicité

- ne pas subir de premier passage hépatique pour éviter de trop importants troubles métaboliques et pour éviter une 5 alpha réduction hépatique trop importante qui surreprésenterait la formation de DHT - la testostérone apportée par voie transcutanée subit aussi une forte 5 alpha réduction en DHT lors du passage cutané scrotal (non disponible en France)-.

- avoir une pharmacocinétique adaptée, ce qui n'est pas le cas ni de la testostérone propionate ni aqueuse

Restent trois types de traitement:

- la forme injectable

Une injection intramusculaire d'énanthate de testostérone à la dose de 100 mg par semaine semble donner un profil pharmacocinétique tout à fait favorable, cependant cette répétition rapprochée des injections est souvent mal vécue. C'est la raison pour laquelle il est souvent proposé 150 à 200 mg de cyprionate, enanthate ou heptilate de testostérone

- les formes orales

. une voie d'administration transbuccale est à l'étude

. undecanoate de testostérone (Pantestone)

Il s'agit d'une forme orale d'administration dont l'absorption se fait par voie lymphatique (18) à la dose de 40 à 160 mg par jour pris en 2 à 3 prises en post prandial. Cette forme galénique permettrait d'éviter l'effet de premier passage hépatique ,donne une pharmacocinétique satisfaisante, sans modifications des paramètres enzymatiques hépatiques. Le produit est désesthérifié, transformé en testostérone et produit des taux substanciels de DHT et de 17 beta estradiol (9).

Enfin une place à part doit être faite au traitement par la DHT en gel.

Elle a l'avantage d'être une supplémentation parentérale, de ne pas être antigonadotrope donc de ne pas freiner la sécrétion androgénique persistante. Mais son inconvénient majeur est de ne pas être arômatisable donc d'être en théorie sans effet bénéfique sur l'os et peut-être sur les vaisseaux.

Traiter une insuffisance en testostérone implique d'utiliser l'hormone native, la testostérone pour en garder l'ensemble des effets physiologiques: effets propres, effets après arômatisation et éventuellement effets après induction bien qu'à cette dernière action puisse être rattachée les effets prostatiques.

Deux produits à ce jour semblent adaptés: l'enanthate de testostérone avec cependant un risque de mauvaise observance dû à l'utilisation de la voie intramusculaire, et l'undecanoate de testostérone per os à absorption lymphatique.

Au-delà du soulagement des symptômes des études cliniques de qualité sont indispensables pour évaluer le rapport bénéfice-risque.

BIBLIOGRAPHIE

 

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