Dermatite atopique et allergie alimentaire
en pratique
Fabienne RANCé
La dermatite atopique (DA) est l'une
des manifestations principales de l'atopie. À ce titre, comme l'asthme et les
rhinites allergiques, sa fréquence a considérablement progressé au
cours des 10 dernières années (1). Les données internationales les
plus récentes estiment la prévalence cumulée de la DA en France,
aux âges de 13-14 ans, entre 21 et 25,1 % sur un effectif de 18 544 enfants
(2). Une enquête épidémiologique effectuée en région Midi-Pyrénées
chez 1020 enfants âgés de 3-4 ans à l'occasion du bilan de santé
à l'entrée en maternelle révèle que 258 d'entre eux ont (ou
ont eu) une DA soit une prévalence cumulée de 25,4 % (3). Toutefois, dans
cette étude, pour toutes les manifestations suggérant l'intervention de
facteurs allergiques, une exploration allergologique n'a été réalisée
que chez 76 enfants (soit 7,6 % de l'effectif).
Le rôle des sensibilisations IgE
dépendantes dans l'induction et/ou l'entretien de la DA a longtemps constitué
un sujet idéal de controverses. À l'heure actuelle, à côté
de nombreux autres facteurs (environnement, surinfection à Staphylococcus
aureus ou à Pityrosporum ovale, Herpes simplex virus, allergènes
de contact...), le rôle des allergènes alimentaires chez le jeune enfant
comme facteur aggravant de la dermatite atopique est reconnu.
La dermatite atopique est un symptôme de
l'allergie alimentaire
Chez l'enfant, la peau est l'organe le plus souvent
atteint au cours des réactions adverses aux aliments. Les données enregistrées
par le Cercle d'Investigations Cliniques et Biologiques en Allergologie Alimentaire
(CICBAA) précisent, en France, les principales manifestations rencontrées
au cours de l'allergie alimentaire 630 F. RANCé
de l'enfant (4). Les observations répertoriées
entre les services de médecine interne de Nancy et de Médecine infantile
de Toulouse, sont validées par les critères standardisés du groupe
européen d'étude des allergies alimentaires (5-7). Les symptômes
sont décrits par ordre de fréquence sur la Figure 1, à partir de
544 observations pédiatriques d'allergie alimentaire. La DA est la manifestation
principale de l'allergie alimentaire de l'enfant. Elle représente 50,5 % des
tableaux cliniques de l'allergie alimentaire des enfants âgés de moins
de 15 ans contre 3,7 % chez l'adulte.
DA:
dermatite atopique; U: urticaire; O: dème; CA: choc anaphylactique; s. oral:
syndrome oral; RC: rhino-conjonctivite. Figure
1. Les signes de l'allergie alimentaire chez 544 enfants. D'après Rancé
F. et al (4). Figure
2. Les signes de l'allergie alimentaire selon l'âge. D'après Rancé
F. et al (4).
DERMATITE
ATOPIQUE ET ALLERGIE ALIMENTAIRE EN PRATIQUE 631
La DA, symptôme de l'allergie alimentaire,
est d'autant plus fréquente que l'enfant est jeune (Figure 2). En effet, l'analyse
des symptômes cliniques en fonction l'âge montre que la DA est impliquée
dans 80 % des observations d'allergie alimentaire avant l'âge de 1 an (60 %
à 1-3 ans, 35 % à 3-6 ans, et 15 % à 6-15 ans).
DA: dermatite atopique; U: urticaire; O: dème;
CA: choc anaphylactique; s. oral: syndrome oral; RC: rhino-conjonctivite.
L'allergie alimentaire est un facteur inducteur de
la dermatite atopique
Le concept du rôle inducteur de l'allergie
dans la DA est ancien. Il est mentionné dès 1890 par Besnier (in
8). En 1936, Engman (9) et Grulee (10) signalent le rôle aggravant de l'ingestion
d'aliment dans la DA. Plus récemment, dans le cadre d'une enquête, Steinman
et Potter (11) enregistrent par questionnaire une aggravation de la DA après
ingestion d'aliments variés, chez 112 enfants atteint de DA. Le rôle de
l'allergie est argumenté par le fait que les deux tiers des enfants atteints
de DA ont des antécédents familiaux d'atopie, développent dans 50
à 80 % des cas d'autres manifestations atopiques, ont une élévation
des IgE sériques totales dans 80 % des cas et, pour la majorité, présentent
une positivité des explorations allergologiques. Les protéines allergéniques
alimentaires ingérées sont capables d'activer les mastocytes. Une élévation
de l'histamine plasmatique et une activation des éosinophiles sont enregistrées
au cours des tests de provocation alimentaires. Les enfants atteints de dermatite
atopique et allergiques au lait de vache ont des cellules T réactives au lait.
Les cellules de Langerhans peuvent présenter les allergènes aux cellules
T. Les données scientifiques des dix dernières années, établies
sur la base des tests de provocation par voie orale en double aveugle, démontrent
l'importance des sensibilisations et des allergies alimentaires au cours de la DA
de l'enfant (12-15) : les explorations d'allergie alimentaire sont positives dans
35 à 63 % des cas.
La sévérité de la DA
Elle serait associée plus fréquemment
à une allergie alimentaire. Guillet et al. (16) enregistrent chez 251 patients
atteints de DA, une positivité des explorations allergologiques différentes
selon la gravité de l'affection : sensibilisation aux aéro-allergènes
chez 44 % des formes modérées (versus 66 % des formes sévères),
sensibi 632 F. RANCé
lisations alimentaires jamais relevées
dans les dermatoses modérées, mais observées dans 91 % des formes
sévères (16). Toutefois, cette étude n'a pas comporté de test
de provocation par voie orale en double aveugle.
L'âge
Est certainement un facteur en prendre en considération.
Dans notre expérience portant chez 137 enfants atteints de dermatite atopique,
l'enquête allergologique est globalement positive chez 84 % des enfants (17).
Une sensibilisation alimentaire est enregistrée chez près d'un enfant
sur 2 (42,2 % des cas). Sur la base des tests de provocation par voie orale, une
allergie alimentaire est confirmée dans un cas sur 3 (34,7 % des cas). Elle
est plus fréquente chez les enfants de moins de 2 ans (66,7 % versus 22,5 %
après cet âge) ce qui représente une différence significative
(p<0,001). Les aliments en cause sont l'uf, l'arachide, la moutarde, le lait
de vache, le poisson et des allergènes très divers (crevette, buf, noisette,
blé, vanille, banane et pois). Plus récemment, nous avons évalué
284 enfants atteints de dermatite atopique, âgés en moyenne de 4,6 ans
(18). L'exploration allergologique était réalisée dans le cadre d'une
consultation multidisciplinaire effectuée conjointement par un dermatologue
allergologue et un pédiatre allergologue. Elle comprenait la recherche de manifestations
d'hypersensibilité immédiate par la réalisation de prick-tests aux
aéroallergènes et aux aliments et de manifestations d'hypersensibilité
retardée par la mise en place de tests épicutanés lus à 48 et
72 heures selon les critères de l'ICDRG avec une recherche systématique
de pertinence. Les enfants étaient revus à 6 semaines, 1 et 2 ans. Une
nouvelle exploration allergologique était conduite de manière identique
au suivi de 2 ans. À la visite initiale, 24,3 % des enfants étaient considérés
asthmatiques et 8,6 % d'entre eux avaient une rhinite allergique. Une allergie de
contact était objectivée chez 53,8 % des enfants, alors que 32,3 % étaient
sensibilisés aux allergènes et une allergie alimentaire prouvée par
test de provocation par voie orale dans 28,4 % des cas. L'analyse statistique objective
une association significative entre la sévérité de la DA et la positivité
des tests allergologiques. L'allergie de contact est plus fréquente chez les
grands enfants (âge moyen 4 ans, p < 0,05) alors que l'allergie alimentaire
concernent des enfants jeunes (age moyen 2 ans, p < 0,0001). Les enfants évalués
au suivi de 2 ans présentent un asthme dans 23,4 % des cas et une rhinite allergique
pour 23,4 % de l'effectif. Une allergie de DERMATITE
ATOPIQUE ET ALLERGIE ALIMENTAIRE EN PRATIQUE 633
contact est enregistrée chez 40 % des
enfants, une sensibilisation aux aéroallergènes dans 38,3 % des cas et
une allergie alimentaire prouvée est relevée chez 4,2 % d'entre eux. Il
est intéressant de noter qu'une guérison de l'allergie alimentaire est
observée chez 64,5 % des enfants testés par test de provocation. Les conclusions
de cette étude sont que les suivantes : l'allergie en général concerne
des enfants souffrant d'eczéma de forme modérée à sévère,
l'allergie de contact est plus fréquente chez les enfants âgés de
plus de 4 ans alors que l'allergie alimentaire est l'apanage des enfants jeunes,
l'allergie alimentaire disparaît dans une grande majorité des cas et l'allergie
respiratoire augmente avec l'âge. Il est donc essentiel de suivre les enfants
atteints de DA.
Les études conduites en double aveugle
D'après Sampson (13), l'allergie alimentaire
est authentifiée par de test de provocation par voie orale en double aveugle
chez 63 % des enfants atteints de DA. L'étude est établie chez 320 enfants
atteints de DA modérée à sévère. Une atopie familiale est
enregistrée dans 95 % des cas (304 enfants). L'uf (30 %), l'arachide (15 %)
et le lait de vache (22 %) sont les principaux aliments en cause. Les symptômes
observés au cours du test de provocation par voie orale en double aveugle sont
cutanés dans 74 % des cas (573 tests positifs sur 1521 tests réalisés),
digestifs dans 53 % des cas et respiratoires dans 46 %.
Businco et al. (19) observant
une aggravation de l'eczéma au cours de 32 tests de provocation parmi les 186
tests effectués (40 % des cas). L'analyse concerne 122 enfants atteints de
DA. Le test de provocation est positif dans 41 % des tests réalisés pour
le lait de vache (46/111) et dans 39 % de ceux réalisés pour l'uf de
poule (24/62).
L'étude de Burks (20) enregistre
chez 46 enfants atteints de DA une positivité du de test de provocation par
voie orale en double aveugle 27 fois sur les 65 tests réalisés (42 %).
L'uf, l'arachide et le lait représentent 78 % des aliments impliqués.
Les réactions sont cutanés dans 96 % des cas, respiratoires dans 52 %
des cas et digestives pour 30 % de l'effectif. Ultérieurement, Burks et
al. (11), chez 165 enfants atteints de DA notent une positivité des prick-tests
alimentaires chez 98 d'entre eux (60 % des cas). Le test de provocation par voie
orale en double aveugle confirme la responsabilité de l'aliment chez 64 enfants
(38,7 % des observations). L'âge moyen est significativement inférieur
chez les enfants 634 F. RANCé
atteints de DA et d'allergie alimentaire, en
comparaison avec ceux sans allergie alimentaire (p = 0,003).
L'analyse prospective de Eigenmann et al.
(14) est conduite chez 63 enfants atteints de DA, âgés en moyenne de 2
ans 8 mois. Les explorations allergologiques sont guidées par le résultat
du dosage des IgE spécifiques en CAP system® pour 6 aliments : lait, uf,
blé, soja, arachide et poisson. Finalement, une allergie alimentaire est retenue
chez 37 % des enfants (23/63).
Le travail de Niggenmann et al.
(15) est établi chez 107 enfants présentant une DA. Les auteurs ont pratiqué
387 tests de provocation par voie orale en double aveugle (259 tests avec les aliments
et 128 avec un placebo). La moitié (51 %) des tests pratiqués avec les
aliments sont positifs. Les aliments incriminés sont l'uf (70 %), le lait
de vache (51 %), la farine de blé (44 %), le soja (16 %). Les réactions
observées au cours du test de provocation touchent fréquemment la peau
(64 %) : il s'agit pour les deux tiers des observations d'une DA d'apparition immédiate.
Les signes sont digestifs dans 25 % des observations et respiratoires dans 11 %
des cas. Cette étude, dont la méthodologie est irréprochable, montre
que la prévalence de l'allergie alimentaire dans cette population d'enfants
est de un sur deux.
L'allergie alimentaire concerne un
sous-groupe d'enfants atteints de dermatite atopique :
• d'âge
inférieur à 3 ans ;
• atteint d'une
forme modérée à sévère ;
• récidivant
sous traitement conventionnel ;
• associant
des signes évocateurs d'allergie alimentaire.
La démarche diagnostique d'une allergie alimentaire
dans la dermatite atopique
La démarche diagnostique générale
L'exploration allergologique débute toujours
par la pratique des pricks-tests cutanés. La valeur prédictive positive
des pricks-tests est excellente, de sorte que leur négativité est suffisante
pour éliminer une allergie alimentaire. Le dosage des IgE spécifiques
apporte une confirmation de la sensibilisation IgE-médiée dépistée
par les tests cutanés. Il est effectué en première intention lorsque
les tests cutanés ne sont pas réalisables. L'enquête diagnostique
DERMATITE
ATOPIQUE ET ALLERGIE ALIMENTAIRE EN PRATIQUE 635
est poursuivie par un régime d'exclusion,
et dans la majorité des cas l'allergie alimentaire est authentifiée par
les tests de provocation. Le test de provocation se définit comme un test d'ingestion
de l'aliment dans le but de reproduire l'histoire clinique en respectant le temps,
la quantité des aliments et les symptômes. Il permet de départager
ce qui est une simple sensibilisation, de ce qui est une authentique allergie alimentaire.
Ce test représente un élément diagnostique fiable et permet de mettre
en place des évictions alimentaires limitées.
Les données récentes
1. La valeur des IgE spécifiques
On accorde actuellement beaucoup d'importance
à la valeur quantitative du taux d'IgE spécifiques, mesurée avec
la technique CAP system® FEIA (Pharmacia), pour 4 aliments. Sampson a établi
pour le blanc d'uf, l'arachide, le poisson, le lait de vache, le blé et le
soja, des valeurs seuils qui permettent de guider les mesures d'éviction et
réduisent les indications des tests de provocation (21) (tableau 1). La valeur
seuil pour la moutarde est de 18 kUA/L (22). Pour les autres aliments dont les valeurs
prédictives positives et négatives n'ont pas été précisées,
des investigations complémentaires sont nécessaires.
* Chez les patients avec histoire clinique
d'allergie IgE-médiée, le test de provocation (TPO) doit être réalisé
sous surveillance médicale, en fonction des valeurs d'IgE.
** Si la valeur des IgE est inférieure
à 0,35 kUA/L et les prick tests négatifs, le TPO peut être
réalisé à domicile, sauf s'il existe une histoire de réaction.
2. Les patch-tests ou tests
épicutanés
Les tests d'allergie immédiate
ne permettent pas de relier avec certitude la dermatite atopique et l'allergie alimentaire.
Les tests épicutanés aux aliments, reproduisant le mécanisme expérimental
de l'eczéma, apparaissent donc comme une technique séduisante d'avenir
de la dermatite atopique. Ils sont réalisés avec les aliments naturels
(par exemple le lait de vache, l'uf, la farine de blé Tableau
1. Interprétation recommandée des concentrations d'IgE spécifiques
(exprimées en kUA/L avec la technique CAP system FEIA) pour le diagnostic
d'allergie alimentaire (21).
|
˙Valeurs |
˙uf |
˙Lait |
˙Arachide |
˙Poisson |
˙Soja |
˙Blé |
˙Réalisation |
|
˙ |
˙ |
˙ |
˙ |
˙ |
˙ |
˙ |
˙ |
˙d'un TPO |
˙ |
˙> à |
˙7 |
˙15 |
˙14 |
˙20 |
˙65 |
˙80 |
˙Non nécessaire |
˙ |
˙< à |
˙7 |
˙15 |
˙14 |
˙20 |
˙30 |
˙26 |
˙Nécessaire* |
˙ |
˙< à |
˙0,35 |
˙A domicile** |
636 F. RANCé
et le soja pour une dermatite atopique du nourrisson).
Les tests allergologiques immédiats donnent des réponses plus faibles
chez l'enfant jeune et sont aussi parfois faussement négatifs, en particulier
dans l'allergie aux protéines du lait de vache (23-27). Ces données sont
confortées par les travaux de Rasanen et al. au cours de l'allergie/intolérance
au lait de vache (23). Les patch-tests et la prolifération lymphocytaire sont
positifs dans les formes retardées, alors que les prick-tests et l'histaminolibération
sont représentatifs des formes immédiates. Ces travaux ont été
suivis de ceux de Isaulori et al. démontrant l'utilité des patch-tests
alimentaires dans les observations d'allergie aux protéines du lait de vache
avec prick-tests négatifs et manifestations retardées (24). Chez 183 enfants
âgés de deux à 36 mois atteints de dermatite atopique dont l'allergie
alimentaire est prouvée par test de provocation par voie orale en double insu,
les prick-tests sont positifs dans 48 % des cas et les patch-tests dans 61 % des
cas. La sensibilité des patch-tests est de 61 % et la spécificité
de 81 %. Les patch-tests améliorent donc le diagnostic d'allergie alimentaire
pour les enfants aux réactions retardées. Des résultats identiques
sont obtenus par Majamaa et al. pour le lait de vache (26) et la farine de
blé (27).
Récemment, Niggemann et al. ont confirmé
la supériorité des tests épicutanés pour le diagnostic d'une
allergie aux protéines du lait de vache dans les formes à manifestations
retardées (28). La valeur diagnostique des tests allergologiques au lait de
vache est analysée chez 75 enfants âgés en moyenne de deux ans ;
21 d'entre eux présentent une symptomatologie retardée. La sensibilité
des patch-test est de 76 % (58 % en prick-test), la spécificité
de 95 % (70 % en prick-test), la valeur prédictive positive de 81 %
(41 % en prick-test) et la valeur prédictive négative de 93 % (81
% en prick-test).
Notre expérience (non publiée)
semble montrer la possibilité de réaction irritative avec certains allergènes
comme l'arachide ou la moutarde. Les extraits alimentaires frais donneraient de
meilleurs résultats. L'interprétation doit tenir compte d'éventuelles
urticaires au contact de la zone d'application des tests, surtout décrites
pour l'uf, et qui n'ont aucune valeur diagnostique. Une étude européenne
est en cours pour préciser la concentration, le véhicule et la durée
d'occlusion des patch-tests alimentaires.
Récemment, Roehr et al.
suggèrent de réduire les indications des tests de provocation par voie
orale en combinant patch tests aux aliments et dosage des IgE spécifiques chez
les enfants souffrant de dermatite atopique et suspects d'allergie alimentaire (29).
Les DERMATITE
ATOPIQUE ET ALLERGIE ALIMENTAIRE EN PRATIQUE 637
auteurs ont déterminé une valeur
seuil des IgE supérieure à 0,35 kU/L pour le lait de vache et supérieure
à 17,5 kU/L pour l'uf de poule qui associée à une positivité
des patch-tests pour ces aliments fournies une probabilité de 100 %
d'être allergique (29).
Les régimes d'éviction appropriés améliorent
la dermatite atopique
L'éviction d'un aliment incriminé par
des preuves suffisantes améliore la DA. Le régime d'éviction est
limité à l'aliment identifié par une exploration allergologique rigoureuse,
basée, en dehors de l'anaphylaxie, sur le test de provocation par voie orale.
L'éviction concerne un seul aliment pour 60 % des enfants atteints d'une allergie
alimentaire (4). Les polyallergies alimentaires sont rares chez les enfants : 24,6
% sont atteints de 2 allergies alimentaires, 7 % de 3 allergies alimentaires, 2,9
% de 4 allergies alimentaires et 1,8 % ont 5 allergies alimentaires.
L'amélioration des symptômes
sous éviction de l'aliment permet d'évoquer son rôle dans le déclenchement
des manifestations. De même, la réapparition des symptômes à
la ré-introduction de l'aliment est un argument en faveur de l'allergie. Toutefois,
les effets de l'éviction de l'allergène alimentaire, identifiés par
les tests allergologiques, ne sont pas rapide au cours de la DA. L'amélioration
après éviction appropriée est observée chez 69 % des enfants
atteints de DA après 2 mois de régime d'éviction, dans 80 % des cas
après 6 mois d'éviction et 91 % à 1 an (30). L'aide d'une diététicienne
permet d'éviter l'ingestion d'allergènes masqués, d'éviter les
carences nutritionnelles, d'obtenir un équilibre dans les apports alimentaires
et de proposer des remplacements d'aliments.
Les régimes oligo-antigéniques
ou « monotones » n'ont pas leur place chez l'enfant. Ils peuvent être
responsable de déséquilibre nutritionnel et de trouble du comportement
alimentaire. Ils ont été à l'origine de réactions généralisées,
voire de choc anaphylactique lors de réintroduction, accidentelle ou intentionnelle,
des aliments (31).
Les autres évictions alimentaires
sont plus des mesures générales de prévention retardant l'introduction
des aliments à risque (32, 33). Les aliments à risque correspondent aux
aliments très fréquemment impliqués dans l'allergie alimentaire de
l'enfant. 638 F. RANCé
Le suivi indispensable des enfants atteints
de dermatite atopique
La DA, premier signe de l'atopie, est de plus
en plus fréquente. Les rapports étroits entre DA, rhinite et asthme nécessitent
un suivi précis de ces patients et une information sur les risques encourus.
Si la DA guérit dans plus de 70 % des cas, la survenue d'un asthme est fréquente
(20 à 85 % des cas), d'autant que le début de la DA est précoce,
avant l'âge de 2 ans, et sévère (34, 35). Une hyper-réactivité
bronchique non spécifique, enregistrée dans 58 à 72 % des DA isolées,
est quasi-constante (92 %) si asthme et DA sont associées (36, 37).
Conclusion
Les indications de l'enquête et des investigations
allergologiques alimentaires sont limitées à la dermatite atopique (i)
modérée à sévère, (ii) de l'enfant âgé de moins
de trois ans, (iii) qui ne s'améliore pas sous traitement dermatologique conventionnel.
Sauf situation particulière détectée par l'interrogatoire, il est
inutile de réaliser un bilan allergologique pour toutes les DA car « explorer »
toutes les DA reviendrait à demander une consultation (et/ou des examens) spécialisés
pour un enfant sur quatre de la naissance à 3 ans. En définitive, l'allergie
alimentaire est présente chez moins d'un enfant sur deux atteint de dermatite
atopique. Les investigations allergologiques chez l'enfant atopique sont limitées
à des indications bien ciblées. Enfin, il est impensable d'envisager des
recherches allergologiques sans avoir au préalable déterminée la
prise en charge générale et locale adaptée à l'enfant atopique.
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