acides gras
polyinsaturés et développement cérébral et sensoriel du nourrisson
J. GHISOLFI*
* Service Médecine Infantile D, CHR Purpan, 31059 Toulouse Cedex.
Jusqu'à ces dernières années, les acides gras polyinsaturés (AGPI) ont
surtout été considérés sous l'angle des syndromes de carence d'apport en acides
linoléique et alpha linolénique. La progression des connaissances en matière de
biochimie des membranes, de mécanismes de synthèses et de modes d'actions des
eicosanoïdes, a attiré secondairement l'attention sur le rôle majeur que jouaient les
métabolites issus de ces deux acides gras essentiels (AGE), particulièrement ceux de la
série n-3, acide eicosapentaénoïque ou EPA(20:5 n-3) et acide docosahexaénoïque ou
DHA (22:6 n-3). Par ailleurs les études expérimentales, mais aussi les données qui
commencent à être recueillies chez les nourrissons, montrent que des variations des
apports alimentaires en AGE ou en AGPI en C20 ou C22 modifient la composition des
membranes de tous les tissus. Ceci est particulièrement vrai pour le cerveau et les
organes sensoriels, notamment au moment de la phase de croissance rapide in utero et
après la naissance. Il en résulte des troubles des fonctions de ces organes, mis en
évidence pendant et immédiatement après la phase de déséquilibre alimentaire, mais
dont on ne sait s'ils persistent à long terme.
AGPI DES TISSUS NERVEUX ET SENSORIELS PENDANT LA PHASE DE CROISSANCE PRE
ET POST NATALE.
Les tissus nerveux et sensoriels sont très riches en AGPI, constituants
essentiels de leur couche bilipidique membranaire. Ils se caractérisent par leur faible
teneur en acides linoléique (C 18:2 n-6) et alpha linolénique (C 18:3 n-3) qui
représentent moins de 1% des acides gras totaux, une concentration élevée en AGPI de la
série n-6 (C 20:4 n-6, C 22:4 n-6, C 22:5 n-6) et surtout de la série n-3 (C 20:5 n-3, C
22:6 n-3) (1-3).Chez le ftus humain, comme chez les autres mammifères, il y a
d'abord accumulation d'acide arachidonique (C20:4 n-6), acide gras prépondérant lors la
phase précoce du développement cérébral [4]. Jusqu'à la dixième semaine de
gestation, les acides gras polyinsaturés de la série n-3 ne sont présents qu'en faible
quantité dans le cerveau. Leur concentration ne commence véritablement à devenir
importante qu'après la 26e semaine. Il se déposerait à partir de ce stade en moyenne
14,5+7,3 mg/semaine d'AGPI n-3 [4]. Pendant cette période, la concentration en C22:6 n-3
double dans le cerveau humain, cet acide gras devenant quantitativement prépondérant
après la 33e semaine [4,5]. Après la naissance, l'accumulation de DHA se poursuivrait au
rythme de 4,7 mg/jour pendant la première année de vie [6]. Durant la phase terminale,
post-natale, de croissance du tissu nerveux est aussi observée une augmentation de la
concentration en acide monoénoïque, en particulier dans la myéline.Les photorécepteurs
de la rétine et le cortex visuel se caractérisent également par leur teneur très
élevée en DHA [7,8]. Leur maturation subit une accélération importante pendant le
dernier trimestre de la grossesse et le premier semestre post-natal correspondant à une
accumulation du DHA dans ces tissus. L'étude des modificatlons des fonctions visuelles
durant cette phase a donc une signification particulière [9].La période de croissance
ftale accélérée (de la 28e à la 40e semaine de gestation chez la femme) et
post-natale (jusqu'à l'âge de 18 mois chez le nourrisson ), est une phase de
développement et de maturation des systèmes nerveux et sensoriels particulièrement
rapide. Elle correspond à un besoin considérable en AGPI nécessaires pour les
synthèses et le développement des différentes membranes cellulaires et subcellulaires
des neurones, de leurs prolongements dendritiques, formant les synapses, des astrocytes,
des oligodentrocytes, des composants de la myéline. Ce besoin ne peut être couvert que
par des transferts maternels d'AGPI pendant la grossesse, et des apports alimentaires
après la naissance. Même si les informations disponibles sont encore très
insuffisantes, il semble bien en effet que la capacité de synthèse in situ des AGPI du
cerveau et des organes sensoriels soit très limitée chez l'enfant [1]. Les astrocytes et
les cellules endothéliales, mais pas les cellules neuronales, ont certes la capacité de
synthétiser le C20:4 n-6 et le DHA par désaturation et élongation du C18:n-6 et du
C18:3 n-3, mais en quantité très probablement insuffisante par rapport aux besoins de
cet organisme en développement [10,11]. Même chez l'homme adulte, les études utilisant
les isotopes stables n'ont pas encore permis d'estimer réellement les capacités
tissulaires, en particulier cérébrale, de désaturation et d'élongation des acides
linoléique et alpha linolénique [12,13]. Cette période de croissance et de maturation
rapide, au cours de laquelle le ftus et le jeune enfant sont dépendants des apports
extérieurs en AGPI correspond aussi, du fait de la séquence immuable de maturation
anatomique et fonctionnelle du cerveau, à un stade de développement de particulière
susceptibilité. Cette phase de vulnérabilité est chez l'homme beaucoup plus longue que
chez la plupart des autres mammifères [1], s'étendant jusqu'à 24-30 mois [8]. Elle est
probablement encore plus à considérer chez l'enfant né prématurément, qui a de
faibles réserves en AGPI dans son tissu adipeux. Il convient sans doute aussi de prendre
en compte, mais ce fait n'est pas démontré formellement en dehors de situations
pathologiques graves et d'apports très élevés d'acide linoléique [14, 15] que le
prématuré a une capacité de désaturation et d'élongation des acides gras encore plus
réduite.Quelle que soit la source des AGPI, transfert placentaire ou origine alimentaire,
ces acides gras sont véhiculés par la circulation sanguine, puis sont l'objet d'une
captation active faisant intervenir un transporteur, qui semble être une
alphaftoprotéine, et des récepteurs spécifiques [1].
APPORTS ALIMENTAIRES EN AGPI ET COMPOSITION TISSULAIRE EN ACIDES GRAS.
La
composition en acides gras des phospholipides (PL) des couches bilipidiques des membranes
de tous les organes est modifiée par les apports lipidiques alimentaires. Ces effets ne
sont pas seulement notés en situation de carence extrême. Chez les porcelets nourris
avec des préparations pour nourrissons non supplémentées en AGPI en C20 et C22 des
séries n-3 et n-6, on note en quelques jours une baisse significative de la teneur en
acides gras des phospholipides du plasma, des erythrocytes, du foie, du cerveau, des
synaptosomes et de la rétine non observée chez des porcelets de même âge nourris avec
le lait de leur mère [8, 16].Chaque organe ne modifie cependant pas de façon identique
sa teneur en acides gras en réponse à ces changements des graisses alimentaires. C'est
ainsi qu'en situation de carence sévère en acides linoléique et alpha linolénique, on
note un effondrement des AGPI au niveau des phospholipides du plasma, des érythrocytes,
du foie, mais pas au niveau des muscles et du cur [17,18]. Ces études soulignent
une donnée que l'on devrait davantage considérer. Les variations quantitatives et
qualitatives de composition en AGPI de tous les tissus, en réponse à des modifications
des graisses alimentaires, ne peuvent être appréciées par les seules analyses des
acides gras des phospholipides plasmatiques ou érythrocitaires.Les changements de la
composition lipidique des membranes en fonction de la nature des graisses alimentaires
entraînent des altérations de leurs fonctions : fluidité, activités enzymatiques,
liaisons avec les récepteurs, transferts membranaires. Il en résulte des capacités
fonctionnelles des organes, bien étudiées au niveau du cerveau et de la rétine. Chez le
singe et le rat une carence d'apport en acide alpha linolénique, et plus généralement
en AGPI de la série n-3, est à l'origine d'anomalies de la fonction rétinienne, des
capacités d'apprentissage et d'acquisition comportementale, corrélées à la diminution
de concentration en DHA dans les organes correspondant aux fonctions testées
[3,7,8,19,20]. Il a aussi été montré chez l'animal que la réduction des apports en
AGPI n-3 entraîne une diminution de la teneur en DHA et EPA de la rhodopsine, à
l'origine d'une réduction de la sensibilité à la lumière [9].Des observations
similaires ont été faites chez l'enfant. Les variations des apports alimentaires en
graisses entraînent aussi des modifications de la composition des acides gras des
phospholipides des tissus. Ces effets biochimiques structuraux ont été notés au niveau
de tous les tissus chez des nourrissons, dans des situations extrêmes de carence d'apport
ou d'apports excessifs en acide linoléique au cours de nutrition parentérale prolongée
[14,15]. Chez l'enfant normal, né prématurément ou à terme, pour des raisons éthiques
évidentes, ils ont été seulement recherchés au niveau du plasma et des globules
rouges. Il est ainsi bien démontré que la teneur en AGPI n-6 ou n-3 des phospholipides
plasmatiques et érythrocytaires est plus élevée chez le nourrisson au sein que chez
celui recevant une formule lactée" habituelle " non supplémentée en AGPI à
longue chaîne [21, 22]. La composition en acides gras n-3 des phospholipides des globules
rouges des nourrissons alimentés artificiellement ne devient comparable à celle des
enfants au sein, que si ces formules lactées sont supplémentées en huiles de poissons,
naturellement riches en EPA et DHA [23]. Ces effets ont été aussi notés au niveau du
tissu cérébral chez deux enfants nés prétermes et vingt enfants nés à terme,
décédés entre l'âge de cinq et quarante semaines, nourris soit au lait maternel, soit
au biberon, la composition des phospholipides de leur tissu cérébral étant corrélée
aux apports alimentaires en AGPI n-3 [24]. Le mode d'alimentation du nourrisson n'est donc
pas rapidement sans conséquences sur la composition des couches bilipiques membranaires
de tous les tissus.Ces modifications biochimiques sont suivies, comme chez l'animal,
d'effets fonctionnels mesurables. Ceux-ci ont surtout été étudiés au niveau des
fonctions visuelles, les plus aisément accessibles. Chez l'enfant né prématurément
[8,25], mais aussi chez l'enfant né à terme [26], l'acuité visuelle, la capacité à
percevoir les formes et les couleurs, la rapidité et l'amplitude de la réponse visuelle
à une stimulation, les potentiels évoqués, l'electrorétinogramme, sont
significativement différents chez le nourrisson au sein et chez celui alimenté
artificiellement avec une formule lactée non enrichie en AGPI n-3 à longue chaîne,
même si ces formules contiennent de grandes quantités d'acide alpha linolénique. Ces
différences fonctionnelles ne sont plus observées si ces formules sont supplémentées
en huiles de poissons [25,27,28], la qualité de la fonction visuelle étant corrélée à
la teneur en DHA des globules rouges [26,27]. Il a été aussi évoqué que les enfants
nés prématurément alimentés au lait maternel, auraient un développement intellectuel
supérieur à celui des prématurés nourris avec des préparations non enrichies en AGPI,
[29,30], mais ceci reste discuté.Les études conduites chez l'animal, comme celles
menées chez l'enfant préterme ou né à terme, apportent donc des données concordantes
témoignant de l'importance des apports alimentaires en AGPI pendant la vie ftale et
immédiatement post-natale, particulièrement sur le plan du développement cérébral et
sensoriel. La supplémentation en AGPI des formules lactées pour nourrissons doit donc
être envisagée.
SUPPLEMENTATION EN AGPI DES FORMULES LACTEES POUR NOURRISSONS.
La
nature et le niveau de cette supplémentation peuvent être discutés sur la base des
résultats des de travaux conduits chez l'animal. Chez l'enfant ils doivent être
envisagés à partir des rares analyses tissulaires, des dosages des acides gras des
phospholipides du plasma et des globules rouges, et depuis peu, des études des fonctions
nerveuses et sensorielles dépendantes de la teneur des membranes en acides gras. Ils
peuvent être aussi estimés par comparaison au lait maternel. Cette dernière approche
prête à discussion pour plusieurs raisons. Les données disponibles dans la littérature
sont souvent incomplètes, laissant des incertitudes quant aux méthodes de dosage, de
collecte et de traitement des échantillons [31, 32]. La teneur en acides gras du lait de
femme varie d'autre part en fonction de la quantité et de la qualité de l'alimentation
maternelle [31]. Il est sur ce plan généralement considéré comme référence la
composition " moyenne " du lait des femmes des pays occidentaux, mais même dans
cette population a priori plus homogène, des variations importantes des teneurs en AGPI
existent [31, 33]. De plus, assez fréquemment dans ces régions, du fait des habitudes
alimentaires des mères, leur lait n'apporterait pas assez d'acides gras polyinsaturés
n-3 [34]. Enfin on ne dispose d'aucune information sur les conséquences physiologiques,
pour les nouveau-nés et les jeunes nourrissons au sein, des modifications souvent
importantes des apports en acides gras au cours de l'allaitement. Il est donc abusif
d'affirmer que l'apport optimal en AGPI à recommander pour les nourrissons peut être
estimé à partir de la composition moyenne du lait de femme. Aucune donnée ne permet
aujourd'hui d'évaluer ce que doit être un apport optimal en AGPI.Supplémentation des
formules lactéees en acides linoléique et alpha linoléniqueLa supplémentation des
formules lactées pour nourrissons en acides linoléique et alpha linolénique n'est pas
discutée. Il est généralement admis que l'acide linoléique doit représenter 3 à 5 %
(350 mg/kg en moyenne) et l'acide alpha linolénique 1 % (75-100 mg/kg) de l'apport
énergétique total [35]. Les discussions concernant l'indispensable complémentation en
AGPI des laits pour nourrissons ne se situe donc plus à ce niveau. Ces deux acides gras
essentiels n'ont en réalité véritablement d'importance nutritionnelle que parce qu'ils
sont les précurseurs des AGPI à longue chaîne. La question qui reste donc aujourd'hui
posée est de savoir si les apports en acides linoléique et alpha linolénique, tels
qu'ils sont réalisés habituellement par les formules lactées, permettent une synthèse
suffisante des acides gras en C20 et C22, ou s'il est nécessaire de complémenter ces
laits avec ces AGPI pour répondre aux besoins des jeunes enfants.Comme chez le porcelet
[16,35,36] il est bien établi que les nourrissons au biberon recevant un apport en 18:3
n-3 à un niveau comparable à celui du lait maternel ont un taux de DHA dans leurs
phospholipides plasmatiques et erythrocytaires inférieur à celui des enfants nourris au
sein [25,37,38]. Une augmentation du DHA de ces phospholipides n'est observée que si la
supplémentation en acide alpha linolénique est deux à trois fois supérieure à
l'apport moyen du lait de femme [39-41]. S'il semble y avoir une corrélation entre les
niveaux d'apports en C1 8:3 n-3 et la teneur des phospholipides du plasma et des globules
rouges en DHA, cette relation n'est pas retrouvée au niveau du cerveau [24]. Il reste
donc à démontrer que des apports en acides linoléique et alpha linolénique permettent
une synthèse suffisante des AGPI à longue chaine des séries n-6 et n-3 pour couvrir les
besoins du nourrisson et définir à quel niveau cette supplémentation doit se situer
pour permettre une synthèse optimale de ces AGPI.S
SUPPLEMENTATION EN AGPI EN C20 ET C22 n-3.
Une
supplémentation des formules lactées en EPA et DHA de l'ordre de 0,3-0,5 % pour l'EPA et
0,2-0,3 % pour le DHA permet de maintenir le taux de DHA du plasma et des érythrocytes
des enfants nourris artificiellement au niveau de celui des enfants au sein [42-44].
Cependant on ne connaît pas la conséquence de cette supplémentation sur les teneurs en
EPA et DHA des tissus, en particulier cérébral et sensoriels. Compte tenu de ce que l'on
observe chez l'animal [45,46], et des modifications des fonctions sensorielles notées
chez le nourrisson lorsqu'une telle supplémentation est réalisée [25,26], la
supériorité de l'EPA et du DHA par comparaison au C18:3 n-3 comme source de C22:6 n-3
pour les tissus en développement semble pouvoir être retenue [33].
RISQUES POTENTIELS D'UNE SUPPLEMENTATION EN AGPI DES FORMULES LACTEES.
La
supplémentation en AGPI des formules lactées pour nourrissons doit être envisagée avec
prudence car il n'est pas formellement démontré qu'elle soit sans conséquence
négative.Un niveau d'apport trop élevé en acide linoléique ou en acide alpha
linolénique inhibe l'incorporation tissulaire de l'acide arachidonique et interfère sur
la synthèse de l'EPA et du DHA [16,33,36], par inhibition compétitive de la delta 6
désaturase [47]. Aucune étude ne permet d'estimer à partir de quel niveau d'apport de
l'acide alpha linolénique se produit cet effet sur le métabolisme des acides gras en
n-6. Chez l'animal des apports de l'ordre de1,7 % de l'énergie totale paraissent modifier
ce métabolisme [33,45], alors que chez l'enfant des apports de l'ordre de 2 % ne font pas
varier significativement les taux de l'acide arachidonique des PL du plasma et des
globules rouges [41]. Rappelons toutefois que ces données doivent être considérées
avec prudence puisque les teneurs en acides gras du plasma et des érythrocytes ne sont
qu'un reflet imparfait des variations des concentrations en AGPI des autres tissus [33].
Le rapport optimal acide linoléique/acide alpha linolénique est aussi difficile à
déterminer quand on considère qu'il varie de 4/1 à 45/1 dans le lait de femme [31,
32,48].La supplémentation en AGPI en C20 et C22 n-3 doit probablement être envisagée
avec encore plus de prudence. On dispose en effet de nombreuses données, tant chez
l'animal que chez l'enfant, qui montrent que des déséquilibres d'apports en EPA et DHA
peuvent avoir des conséquences physiologiques encore mal appréciées. L'addition aux
formules lactées d'huiles de poissons, qui contiennent plus d'EPA que le lait maternel,
entraine une diminution de la teneur en acide arachidonique des membranes tissulaires
[43,44]. La supplémentation en DHA a le même effet [33]. Ce fait doit être considéré
avec la plus grande attention puisque l'acide arachidonique a un rôle fondamental dans le
fonctionnement membranaire et que la croissance somatique et le développement
psychomoteur semblent corrélés au taux de cet acide gras dans les PL des globules rouges
[49]. Pour répondre à cet effet indésirable, il a été proposé de supplémenter ces
laits en acide arachidonique [49]. Les autres conséquences de ces modifications de la
teneur des membranes de chaque tissu en acides arachidonique, eicosapentaénoïque et
docosahexaénoïque en réponse aux variations des apports lipidiques alimentaires sont
encore mal appréciées. On sait cependant qu'elles sont susceptibles d'entraîner des
altérations de la synthèse des métabolites issus du C20:4 n-6 par action de la
cyclooxygénase et de la lipooxygénase [50], de l'activité de la protéine-kinase des
photorécepteurs [51], du flux calcique membranaire [52], de la susceptibilité des
membranes cellulaires aux dommages oxydatifs [53], et de la production du platelet
activating factor [54].
CONCLUSION.
Si des
données concordantes permettent d'affirmer que les jeunes enfants en croissance, et
particulièrement les nouveau-nés prématurés, ont besoin d'un apport exogène en AGPI
en C20 et C22, il est difficile de faire aujourd'hui des recommandations véritablement
étayées sur ce que doivent être le mode et le niveau de la supplémentation en AGPI des
formules lactées pour nourrissons . En outre on dispose de trop peu d'informations sur
les effets à long terme d'une carence d'apport, dont on sait qu'ils peuvent être
compensés après plusieurs mois [25-28], sur les besoins et l'utilisation spécifique des
acides gras par chaque tissu, et sur les conséquences physiologiques ultérieures d'une
telle supplémentation. Tout ceci doit conduire à être particulièrement prudent
lorsqu'on envisage de complémenter les formules lactées pour nourrissons avec des AGPI
en C20 et C22, d'autant plus que l'on ignore les besoins spécifiques en chacun de ces
acides gras polyinsaturés chez le préterme, l'enfant à terme et le nourrisson. De
nombreuses études sont donc encore nécessaires pour évaluer, en fonction de la période
de croissance et du capital génétique qui conditionne les capacités adaptatives, ce que
devraient être les apports en AGPI pour assurer un développement optimal de l'enfant et
pour peut-être minimiser ou prévenir le développement de diverses pathologies.
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