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Titre: Leucomalacie périventriculaire du prématuré : une origine ante-natale
Année: 1995
Auteurs: - Gabila
Spécialité: Néonatologie
Theme: Prématuré

Chapitre 2

leucomalacie périventriculaire du prématuré : une origine ante-natale

J-C. GABILAN, V. ZUPAN

Service de Pédiatrie et Réanimation Néonatales. Hôpital Antoine Béclère.
92141 Clamart

introduction

La leucomalacie périventriculaire (LPV) est actuellement la cause majeure d'infirmité cérébrale chez le nouveau-né prématuré survivant, et la prévention de la survenue de LPV est devenue le défit le plus important en médecine périnatale. En effet, malgré des progrès récents considérables dans les soins intensifs néonataux, l'incidence de la LPV cavitaire chez le grand prématuré (AG < 33s) est restée au cours des dernières années, dans notre expérience, a un taux constant, voisin de 10%, alors que la fréquence des hémorragies intra et périventriculaires graves a diminué (stades III et IV de Papile).

D'autre part, il existe peu de corrélations entre les évènements post-nataux et la survenue de LPV. Ces faits nous ont amenés à considérer que l'origine anténatale de la LPV du prématuré était sans doute actuellement beaucoup plus fréquente que nous le pensions et que l'incidence de la LPV pouvait avoir un rapport étroit avec les circonstances étiologiques de la prématurité. Nous avons donc, dans un premier temps, effectué sur la population des prématurés hospitalisés dans notre unité de réanimation et soins intensifs durant les années 89-90-91, une étude préliminaire, comparant l'incidence des LPV cavitaires en cas de prématurité par toxémie gravidique avec décision de césarienne (prématurité de décision médicale) et en cas de prématurité par échec de tocolyse, dans le cadre d'une menace d'accouchement prématuré (prématurité spontanée). Pour une population comparable dans les deux groupes de prématurés de 29 à 35 semaines d'âge gestationnel (AG), la différence du taux des LPV est considérable : 34 sur 298, soit 11,4% pour les échecs de tocolyse ; 2 sur 110, soit 1,8% pour les toxémies avec césarienne (Figures I, 2). Nous avons mené secondairement une étude rétrospective complémentaire plus détaillée, dont le but a été de décrire le taux de LPV en fonction de l'AG et du contexte périnatal dans ses différentes présentations cliniques, et de déterminer les facteurs de risques périnataux pour la survenue de LPV.

i méthodes

La population étudiée est représentée par 508 enfants pré-terme admis à la naissance dans l'Unité de Soins Intensifs pour nouveau-nés de l'hôpital Antoine Béclère, de juillet 1991 à mars 1994, nés entre 24 et 32 semaines de gestation et ayant survécu au moins 7 jours. La décision de n'étudier que les grands prématurés de moins de 32 semaines d'âge gestationnel a été prise car la survenue de leucomalacie périventriculaire est rare chez les enfants pré-terme d'âge gestationnel supérieur à 32 semaines : un seul cas (< 1%) pendant la période d'étude. Tous les enfants sont examinés de façon systématique par échographie cérébrale transfontanellaire avec un appareil ACUSON utilisant une sonde de 7,5 MHz ; deux échographies au moins ont été effectuées pendant la première semaine de vie et ensuite au moins une fois par semaine, jusqu'à la sortie de l'enfant. Seules les LPV indiscutables, évoluant vers un aspect cavitaire, ont été retenues pour l'étude. Nous avons étudié l'incidence des LPV en fonction de l'âge gestationnel (AG) et du contexte périnatal :

u toxémie gravidique [éclampsie et hématome rétroplacentaire (HRP)exclus].

u grossesse hémorragique incluant placenta previa et HRP.

u  rupture prématurée des membranes (ouverture de la poche des eaux de durée supérieure à 12 heures (RPM).

u infection materno-foetale (IMF) avec au moins deux des critères suivants : chorioamniotite clinique, tests inflammatoires sanguins positifs chez le nouveau-né, cultures bactériologiques positives.

u tocolyse : traitement tocolytique durant 24 heures ou plus avant l'accouchement prématuré, sans IMF - RPM.

u accouchement inopiné : naissance prématurée après un travail soudain, apyrétique, rapide, n'ayant pas permis un traitement tocolytique, sans IMF.

u retard de croissance intra-utérin sévère (RCIU) avec un poids de naissance inférieur au 3ème percentile pour l'âge gestationnel.

u grossesse gémellaire avec shunt vasculaire placentaire.

ii résultats

Sur les 508 nouveau-né pré-terme étudiés, 48 (9,4%) ont présenté des LPV certaines à évolution kystique. Chez tous ces enfants sauf trois, les LPV ont été suspectées dès les premiers jours de la vie (hyperéchogénicité périventriculaire dense et hétérogène, pointes positives rolandiques à l'électroencéphalogramme) et l'évolution vers les LPV cavitaires a été confirmée dans le premier mois de la vie (LPV cavitaire certaine notée entre le 8ème et le 30ème jour, moyenne 18 jours). Les résultats sont regroupés dans les figures 3, 4 et 5.

iii commentaires

La fréquence des LPV est élevée entre 27 et 30 semaines d'AG (environ 15%), mais est très basse avant 27 semaines et après 32 semaines ; ces résultats témoignent d'une période foetale de particulière sensibilité pour la survenue des LPV cavitaires (Figure 3).

Chez le grand prématuré (moins de 32 semaines d'AG), la fréquence de survenue des LPV dépend considérablement des causes et circonstances de l'accouchement (Figure 4). En particulier, IMF et RPM, deux événements souvent liés, semblent être les deux facteurs de risques majeurs de survenue de LPV : l'incidence des LPV est d'environ 25% chez les enfants infectés de 28 à 32 semaines d'AG. Chez ces enfants infectés, la survenue des LPV n'est pas corrélée avec les événements de survenue postnatale, comme les syndromes de détresse respiratoire (SDR) ou les troubles hémodynamiques nécessitant un traitement par des inotropes (Figure 5). Au contraire, chez les enfants présentant une IMF, à haut risque de LPV, une meilleure adaptation à la vie extra-utérine est observée chez ceux qui vont développer des LPV. Ces résultats confirment l'hypothèse de Leviton (1), qui propose que des facteurs anté-nataux et non post-nataux, puissent être à l'origine des lésions cérébrales, ainsi d'ailleurs que de l'accouchement prématuré, par l'intermédiaire de la libération de cytokines et en particulier de tumor necrosis factor (TNF) (Figures 6 et 7).

Comme Adinolfi (2) l'a suggéré, l'infection amniotique peut en particulier être à l'origine d'un processus immunologique avec sécrétion de médiateurs comme les cytokines. Romero (3, 4) a effectivement montré qu'en cas d'accouchement pré-terme avec rupture prématurée des membranes, le taux de TNF du liquide amniotique est plus élevé si la bactériologie du liquide amniotique est positive ; le même auteur avait précédemment rapporté un taux plus élevé de prostaglandines du liquide amniotique en cas d'accouchement prématuré, avec infection amniotique, suggérant que l'infection amniotique déclenchait l'accouchement prématuré par le biais d'une sécrétion de prostaglandine (Figure 6 ). Steinborn rapporte également (5) un taux élevé d'interleukine 6 et 8 et une bioactivité mesurable d'interleukine 1b et de TNF amniotiques en cas d'infection amniotique, alors que dans le liquide amniotique de grossesses normales, le taux d'interleukine 6 et 8 est habituellement bas, et celui d'interleukine 1b et de TNF non mesurable.

Une fréquence élevée de LPV a été également mise en évidence en cas de shunt placentaire dans les grossesses monochoriales.

Ces résultats sont en accord avec les publications de Béjar (6) qui a attiré dès 1988 l'attention sur la fréquence des grossesses multiples avec anastomose vasculaire placentaire et surtout des chorioamniotites dans les antécédents obstétricaux de 13 nouveau-nés présentant des leucomalacies cavitaires très précoces.

Une incidence augmentée de LPV a été, par ailleurs, décelée en cas de placenta praevia et d'hématome rétroplacentaire, comme Gibbs l'a d'autre part rapporté (7).

De façon surprenante, les nouveau-nés ayant présenté une souffrance foetale chronique due à une toxémie maternelle (en excluant éclampsie et hématome retro-placentaire) et les enfants avec RCIU sévère, présentent rarement des LPV cavitaires (risque < 2%), comme le confirme par ailleurs la publication de U. Verma (8).

Le risque de LPV est également très faible (environ 2%) chez les enfants nés après un accouchement inopiné rapide, non fébrile. Au contraire, le risque de LPV est d'environ 10% chez les prématurés nés après échec de tocolyse ayant duré au moins 24 heures en dehors d'IMF confirmée et/ou de RPM. Il n'est pas possible actuellement de savoir si les LPV sont dues à l'action des agents tocolytiques [Groome (9)] ou si, plus probablement, la tocolyse donne à des facteurs anté-nataux le temps nécessaire pour entraîner des lésions cérébrales. Ces résultats sont également en accord avec ceux de Silver (10), qui note une corrélation entre le taux de l'interleukine-6 dans le liquide amniotique et les circonstances de l'accouchement : taux bas en cas de toxémie et de RCIU, taux élevés en cas d'accouchement prématuré avec échec de tocolyse.

conclusion

Nos résultats démontrent que les LPV ont le plus souvent une origine anté-natale et vont dans le sens de l'hypothèse que des facteurs identiques ou similaires, comme des endotoxines bactériennes ou des cytokines, peuvent entraîner à la fois l'accouchement prématuré et des lésions cérébrales anté-natales.

Ces résultats nécessitent des études prospectives pour d'une part confirmation des conclusions de ce travail préliminaire et d'autre part recherche de corrélation entre le taux de différentes cytokines au niveau du sang et du liquide amniotique, et la survenue de LPV chez le prématuré. Ces différentes études pourraient ouvrir une voie à la prévention des LPV.

TABLEAUX ET FIGURES

 

BIBLIOGRAPHIE

1. LEVITON A, Preterm birth and cerebral palsy : is tumor necrosis factor the missing link. Developmental Medicine and Child Neurology 1993 ; 35 : 553-8.

2. ADINOLFI M, Infectious diseases in pregnancy, cytokines and neurological impairment : an hypotesis. Developmental Medicine an Child Neurology 1993 ; 35 : 549-53.

3. ROMERO R, MAZOR M, SEPULVEDA W, AVILA C, COPELAND D, WILLIAMS J. Tumor necrosis factor in preterm and term labor. Am J Obstet Gynecol. 1992 ; 166 : 1576-87.

4. ROMERO R, EMANIAN M, WAN M, QUINTERO R, HOBBINS JC, MITCHELL MD, PHIL D. Prostaglandin concentrations in amniotic fluid of women with intraamniotic infection and preterm labor. Am J Obstet Gynecol 1987 ; 157 : 1461-67.

5. STEINBORN A, GATJE R, KRAMER P, KUHNERT M, HALBERSTADT E. Zytokine in der diagnostik des amnion-infekt-syndroms. Z. Geburtsh u. Perinat. 1994 ; 198 : 1-5.

6. BEJAR R, WOZNIAK P, ALLARD M, BENIRSCHKE K and coll. Antenatal origin of neurologic damage in newborn infants. I : Preterm infants. Am J Obstet Gynecol 1988 ; 159 : 357-63.

7. GIBBS JM, WEINDLING AM. Neonatal intacranial lesions following placental abruption. Eur J Pediatr 1994 ; 153 : 195-7.

8. VERMA U, TEJANI N, KLEIN S, JEANTY W. Obstetrical antecedents of neonatal periventricular leucomalacia. Am J Obstet Gynecol 1994 ; 170 : 264 (Abstract 1).

9. GROOME LJ, GOLDENBERG RL, CLIVER SP, DAVIS RO and coll. Neonatal periventricular-intraventricular hemorrhage after maternal b-sympathomimetic tocolysis. Am J Obstet Gynecol 1992 ; 167 : 873-79.

10. SILVER RM, SCHWINZER B, McGREGOR JA. Interleukin-6 levels in amniotic fluid in normal and abnormal pregnancies : Preeclampsia, small-for-gestational-age fetus, and premature labor. Am J Obstet Gynecol 1993; 169 : 1101-5.