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Titre: Aspects cliniques et evolutifs des condylomes genitaux au cours de la grossesse
Année: 1996
Auteurs: - Mergui J.-L.
Spécialité: Obstétrique
Theme: Condylomes

aspects cliniques et évolutifs des condylomes génitaux au cours de la grossesse

J.-L. Mergui* et B. Lemaire **

La grossesse est l'occasion de consultations spécialisées systématiques comprenant outre l'examen obstétrical habituel un examen du col et du vagin, de la vulve et du périnée.

La découverte d'une anomalie clinique ou cytologique, la notion de dyscariose et/ou d'infection virale antérieures, la survenue de métrorragies provoquées sans Etiologie bien précise, doivent conduire à la réalisation d'un examen colposcopique.

La colposcopie est sans aucun doute d'un grand intérêt tant dans le diagnostic d'orientation des lésions que dans leur surveillance tout au long de la grossesse.

Les aspects colposcopiques à cette période sont bien loin d'être toujours évidents et peuvent être trompeurs ou d'interprétation difficile en raison des modifications histologiques qui s'y développent.

Les modifications histologiques de la grossesse

Elles affectent l'épithélium malpighien et glandulaire, le stroma :

l'épithélium malpighien est épaissi par la multiplication des cellules intermédiaires. L'hyperactivité basale y est constante caractérisée par un accroissement du nombre des mitoses et la présence de cellules peu différenciées ;

l'épithélium glandulaire est le siège d'une hyperplasie et d'une hypertrophie glandulaire avec hypersécrétion muqueuse. L'hypertrophie épithéliale affecte les cellules de réserve à l'origine du processus métaplasique ; la vascularisation du stroma est plus dense et hyperplasique s'accompagnant d'œdèmes et de congestion. La transformation déciduale et la réaction inflammatoire sont fréquentes.

Toutes ces modifications ont pour conséquences :

- un col augmenté de volume congestif et œdémateux parfois difficile à examiner par sa morphologie nouvelle, sa fragilité et la présence d'un mucus épais obstruant l'orifice externe ;ñ une éversion de l'endocol qui tend à s'accroître au cours de la grossesse exposant facilement la zone de jonction squamo-cylindrique et faisant de la colposcopie une méthode bien adaptée à l'examen des cols gravides.

La colposcopie dans le diagnostic des lésions

Qu'elle ait été alertée par des métrorragies, une anomalie clinique ou une cytologie anormale, la colposcopie est une étape indispensable au diagnostic des lésions.

1 - L'ectropion est une lésion fréquente à cette période mais lorsqu'il est antérieur à la grossesse, il peut devenir exubérant et hémorragique parfois inquiétant à l'œil nu.

Les papilles glandulaires gonflées d'œdème et de taille irrégulière prennent volontiers un caractère polypoïde. Parfois ulcérées et responsables de métrorragies, leur fragilité est encore accrue par l'infiltration déciduale qui se traduit par une réaction acidophile ivoirée caractéristique.

Les cryptes glandulaires tapissées de papilles remaniées parfois volumineuses s'élargissent et se déforment, les failles sont plus profondes et irrégulières. La colposcopie permet facilement d'affirmer l'ectropion polypoïde ou une faille et de s'assurer de l'absence de lésion atypique associées. L'ectropion ne nécessite aucun geste agressif mais une vigilance accrue en raison du risque d'infection cervicale et de prématurité.

2- La déciduose apporte des images spécifiques, bien décrites par Coupez et qu'un simple examen au spéculum ne peut identifier affectant l'ectropion polypoïde souvent exubérant, elle peut au niveau de l'épithélium malpighien, revêtir des aspects variés :

- zones rouges congestives planes ou ulcérées, boursouflures violacées réalisant parfois la forme pseudo-tumorale qui prend un caractère alarmant quand elle érode l'épithélium de surface. La réaction givrée ou l'érosion acidophile, iode faible ou nulle à contours toujours flous, permet le diagnostic.

- les polypes muqueux fréquents au cours de la grossesse subissent souvent une décidualisation parfois marquée. Prenant alors un aspect blanc cru, identique à celui d'une caduque, il est indispensable de les différencier. Grâce à la colposcopie on distinguera les contours lisses du polype, des bords frangés de l'élimination de caduque que l'on parvient facilement à dégager.

Régressant après l'accouchement, la déciduose peut au cours de la grossesse provoquer des métrorragies trompeuses entraînant des thérapeutiques abusives que la colposcopie doit permettre díÈviter.

3 Les infections à HPV et les dysplasies

La fréquence des infections à HPV a augmenté ces dernières années variant selon les auteurs entre 2 à 5 %, voire 30 % au cours de cette période de la vie génitale.

L'infection par le Papilloma Virus Humain ou HPV pose un certain nombre de problèmes au cours de la grossesse car son incidence est augmentée. Le retentissement fœtal peut être sévère sous forme d'une papillomatose laryngée juvénile parfois tardive mais souvent dramatique qui impose la réalisation d'une stratégie de dépistage et de traitement adapté au type des lésions. Il est d'emblée important de séparer les lésions purement condylomateuses planes des lésions condylomateuses exophytiques qui n'ont pas le même potentiel évolutif au cours de la grossesse ni les mêmes risques de transmission néonatale.

La grossesse apparaît comme une circonstance particulièrement favorisante pouvant être liée à deux facteurs : 'l'état d'immuno-dépression relative des premiers mois et l'augmentation du taux des hormones stéroidiennes circulantes qui agiraient comme co-facteurs en accélérant la réplication virale.

Actuellement il semble qu'il existe deux types d'infection à HPV : l'une associée aux types 6-11, à potentiel évolutif négligeable que l'on retrouve dans les lésions condylomateuses exophytiques ou planes, l'autre associée aux types 16-18-33... qui est généralement retrouvée dans les néoplasies intraépithéliales où le risque évolutif existe même s'il varie en fonction du site ou d'autres co-facteurs.

Les lésions exophytiques

a - le risque de transmission fœtale

Les lésions condylomateuses exophytiques posent par contre le problème de leur transmission au fœtus lors de l'accouchement par les voies naturelles. En effet on sait que la papillomatose laryngée juvénile depuis les travaux de Roch en 1986 est liée à une infestation par un HPV 6-11 donc tout à fait identique à celui retrouvé dans les condylomes exophytiques bénins de la vulve, du vagin ou du col.

Néanmoins le risque de transmission au fœtus est faible puisque sur une étude pratiquée par Shah en 1986, le risque de transmission fœtale est de 1/1 500 grossesses chez les femmes porteuses de lésions génito-vulvaires à HPV.

Si le risque est faible, il n'en est pas moins présent puisque sur deux études rétrospectives présentées par Halden, Cook et Quick, chez 44 enfants présentant une papillomatose laryngée, on retrouve 54 % d'antécédents maternels de condylomes vulvaires. Sedlacek en 1989, sur une étude pratiquée par hybridation moléculaire tente d'élucider le mécanisme de transmission materno-foetale. Chez 45 femmes présentant des lésions condylomateuses génito-vulvaires, le typage viral a permis de retrouver dans 55 % des cas un HPV positif au niveau cervico-vaginal. Dans 27 % des cas, il s'agissait d'un HPV potentiellement oncogène, (HPV16 ou 18), dans 9 % des cas un HPV 31-33 ou 35, dans 20 % des cas un HPV X et jamais d'HPV 6 ou 11. Les prélèvements virologiques pratiqués chez les 45 enfants de ces femmes ont été réalisés. Dans 36 % des cas, líenfant était positif pour HPV lorsque l'accouchement avait eu lieu par voie basse alors qu'il n'avait jamais été retrouvé positif lors des aspirations naso-pharyngées chez les patientes ayant accouché par césarienne.

Par contre, lorsque le virus était recherché par typage dans le liquide amniotique et sur 13 cas, 3 fois celui-ci était revenu positif chez des patientes ayant eu un prélèvement du liquide amniotique à membranes rompues mais une fois l'HPV était positif dans le liquide amniotique chez une patiente à membranes intactes qui a été césarisée, ce qui pose le problème et les risques théoriques de la transmission materno-fœtale par voie sanguine transplacentaire.

La gravité des lésions de papillomatose laryngée juvénile ou enfantine justifie le traitement destructeur des lésions exophytiques cervico-vaginales ou périnéales même si le risque de transmision est faible puisque de l'ordre de 1/1 500 grossesses

b - Les aspects cliniques

Elles prennent volontiers au niveau du vagin et de la sphère génito-anale un caractère floride bien visible à l'oeil nu. Plus rares au niveau du col, la colposcopie permet d'en confirmer le diagnostic, l'intérêt essentiel de l'examen étant de dépister des aspects atypiques éventuellement associés.

Souvent situé en bordure d'un ectropion, le condylome se présente comme une tuméfaction rouge framboise au sein de laquelle se distinguent de nombreux axes vasculaires réagissant fortement à l'acide acétique, le papilles accolées seront d'autant plus blanches que l'hyperacanthose est plus marquée. Iode positif au Test de Schiller, il se différencie aisément d'une papille cylindrique hypertrophique.

Prenant parfois l'aspect d'une lésion kératinisée, c'est là encore le test au Lugol qui permettra le diagnostic.

c - Aspects thérapeutiques

Les traitements autorisés au cours de la grossesse pour ces lésions condylomateuses exophytiques sont représentés par les applications d'acide trichloracétique à 50 ou à 80 %, par les vaporisations au laser, sous anesthésie locale ou générale et par l'application de cryothérapie.

Rappelons que la Podophylline et le 5 FU (Efudix) sont formellement contre-indiqués au cours de la grossesse en raison de leur risque tératogène.

En principe, l'application de laser permet d'obtenir 80 à 90 % de bons résultats, l'association d'acide trichloracétique combinée au laser sur les échecs du laser ou l'inverse c'est-à-dire l'association du laser sur les échecs d'application d'acide trichloracétique permet d'obtenir un bon résultat global, de l'ordre de 97 % sur les lésions condylomateuses génitales au cours de la grossesse.

Il est important de détruire celles-ci afin d'éviter un risque de transmission fœtale et dans notre expérience, il est nécessaire de traiter celles-ci dès leur diagnostic afin d'éliminer une éventuelle récurrence près du terme.

Dans les formes paucifocales, on pourra se contenter d'une application d'acide trichloracétique avec vaporisation au laser en cas d'échec.

Dans les lésions multifocales, au contraire, volontiers exubérantes au cours de la grossesse, il est important de commencer par un traitement véritablement actif ; le seul qui permet un bon rapport efficacité/effet secondaire nous semble représenté par la vaporisation laser sous anesthésie locale ou générale dès lors qu'il existe une multifocalité des lésions dans la filière génitale. L'application díacide trichloracétique pourra avoir lieu éventuellement sur les récidives qui pourraient survenir dans le dernier trimestre, lors du contrôle colposcopique.

Enfin il est important de mettre en route un dépistage du partenaire masculin afin de dépister une éventuelle lésion masculine qu'il serait souhaitable de traiter afin d'éviter une récidive locale, et enfin de conseiller des rapports protégés.

Les infections à HPV et les néoplasies intra-épithéliales

Très différents sont les condylomes plans cervicaux. Invisibles à l'œil nu, ils apparaissent cependant trois fois plus fréquents au cours de la grossesse.

Sur une étude pratiquée en 1984 sur 7 600 lésions condylomateuses, nous avons étudié l'évolution spontanée (au cours de la grossesse) de 102 lésions condylomateuses et dysplasiques cervicales. Celle-ci a montré d'une part une incidence trois fois plus élevée des lésions condylomateuses au cours de la grossesse que dans une population témoin ou l'incidence était de 0,7 % alors que celle-ci était de 2,12 % au cours de la grossesse. La répartition des lésions condylomateuses et dysplasiques était identique au cours de la grossesse et dans la population témoin, la seule différence significative concernait l'évolutivité des lésions condylomateuses pures ou légèrement atypiques (dysplasie légère) au cours de la grossesse et en dehors de la grossesse. L'étude rétrospective a montré que 83 % des lésions condylomateuses pures ou légèrement atypiques régressent au cours ou au décours de la grossesse c'est-à-dire dans les trois mois qui suivent le post partum. Cette disparition importante des lésions purement infectieuses au décours de la grossesse laisse à penser que la grossesse favorise par sa dépression immunitaire l'expression du virus comme en témoigne l'apparition d'une symptomatologie cytologique. D'autres études pratiquées dans la littérature montrent également l'incidence 3 fois plus élevée des anomalies cytologiques au cours de la grossesse puisque celles-ci passent de 2 à 6 % au cours de la grossesse. Les études pratiquées en virologie détectant la présence de la molécule díADN du virus HPV ont montré là encore une augmentation significative de la présence du virus au cours de la grossesse puisque Schneider et Zurhausen retrouvent respectivement 28 % et 30 % d'HPV au cours de la grossesse alors que dans la population témoin, le typage viral à HPV est retrouvé positif dans 12,5 % des cas et dans 5 à 10 % d'une population témoin sur une revue de la littérature.

L'évolution des dysplasies cervicales au cours de la grossesse ne semble pas influencée par la grossesse elle-même et si l'on compare l'évolution des lésions dysplasiques au cours de la grossesse et dans une population témoin, on peut noter l'absence de différence d'évolutivité significative au cours de la grossesse et notamment pas d'aggravation significative des lésions de CIN 3 ou de haut grade qui subissent une évolution tout à fait identique dans les 12 mois de surveillance per gravidique, ce qui autorise l'absence de toute thérapeutique agressive de ces lésions au cours de la grossesse.

C'est dire aussi l'importance du frottis cervico-vaginal systématique au cours de la grossesse. Cette période gravidique est d'autant plus importante qu'elle soumet une tranche de population jeune à une consultation spécialisée systématique qui fait généralement défaut chez les patientes à risque (âge, parité, profil socio-économique).La présence d'un frottis anormal en début de grossesse implique impérativement un bilan lésionnel grâce à la colposcopie dont l'intérêt est capital pour le diagnostic :- elle permet de préciser le tableau colposcopique selon les critères définis par la Société Française de Pathologie Cervico-Vaginale ;- facilitée par l'éversion de l'endocol liée à l'état gravidique, elle permet bien souvent de visualiser les limites de la lÈsion ;ñ elle permet enfin de designer la zone la plus pathologique au niveau de laquelle doit porter le prélèvement biopsique.

Depuis le consensus de Bethesda, ces lésions sont classées en deux groupes, les lésions de bas grade regroupent les condylomes et les néoplasies intraépithéliales de grade I(CIN I), les lésions de haut grade correspondent aux néoplasies intraépithéliales de grade II et III (CIN II et CIN III).

1 Les lésions de bas grade

Colposcopiquement la virose plane se traduit par des aspects de colpite assez caractéristique. Située souvent à la périphérie d'un ectropion, invisible sans préparation et après acide acétique, elle n'est révélée qu'au test de Schiller. L'application de lugol fait apparaître des images le plus souvent associées : éléments annelés, striés, volutes, ponctuations assez grosses, aspects mosaïformes iodo-positifs (mosaïque inversée, " cols cachemires ").

Facilement reconnaissable, la virose plane ne nécessite pas de geste biopsique. Bien plus fréquemment, la virose s'intègre dans un tableau de transformation atypique de grade I.

Au cours de la grossesse on observe généralement le stade I A en raison de l'extériorisation des plages cylindriques.

Sans préparation, la lésion peut n'avoir aucune traduction colposcopique ou se révéler par une zone rouge banale. Le diagnostic est alors évoqué par l'apparition, en bordure d'un ectropion, díune réaction acidophile sans orifice glandulaire (sauf dans la zone de progression) où se dessinent des éléments mosaïformes arrondis ou ovalaires, des ponctuations fines et irrégulières. Les contours externes peuvent garder leur netteté mais l'œdème et la congestion gravidiques les effacent souvent et la plage iodo-négative déborde assez largement la réaction acidophile.

Lorsque la lésion affleure l'orifice cervical, elle réalise le stade I B où se dessinent là encore des images de surimpression mais où les orifices glandulaires ont totalement disparu.

La modification des contours qui devient moins nette, la petite irrégularité de surface semblent assez caractéristiques de la gravidité quand elle n'entraîne pas d'autres modifications plus trompeuses.

La présence d'une virose sera suspectée par les images de colpite précédemment décrites, iodo-positives au sein de la plage iodo-négative.

De telles lésions justifient le frottis de balayage appuyé sur la zone de jonction extériorisée. Souvent suffisant au diagnostic, il pourra etre complète au moindre doute par un contrôle histologique orienté, peu hémorragique au cours des premiers mois.

Ce tableau colposcopique de transformation atypique grade I est la traduction habituelle des dystrophies mais aussi des lésions de bas grade, la grossesse pouvant toutefois le modifier au point de simuler une transformation atypique suspecte.

2 - Les lésions de haut grade

Les atypies épithéliales de transformation atypique de grade II apparaissent plus étendues et congestives souvent hémorragiques au cours de la grossesse.

Au stade II A, la lésion est très congestive sans préparation et la vascularisation augmentée est parfois irrégulière et anormale (ponctuations, réseau en mailles de filet).La forte réaction acidophile le plus souvent mosaiforme ou ponctuée s'associe à des zones rouges atypiques congestives ou érosives facilement hémorragiques. Les cernes glandulaires et les images en goutte sont accentuées. Les contours périphériques difficiles précisés à l'acide acétique sont toujours flous au test de Schiller.

La kératinisation intense qui caractérise le stade II B en dehors de la leucoplasie s'associe à des zones rouges congestives fortement acidophiles et à des zones érosives ou ulcérées.

Toutes les anomalies colposcopiques impliquent la nécessité d'une biopsie immédiate qui, orientée sur la zone la plus suspecte, permettra le diagnostic histologique final.

Quand la jonction est visualisée la littérature fait état de bonnes corrélations, colpo-histologiques et lorqu'il y a discordance l'aspect colposcopique est plus pessimiste que le diagnostic histologique. Le trépied cytologie-colposcopie-biopsie dirigée permet une grande fiabilité diagnostique au cours de la grossesse et s'il peut dans de rares cas laisser passer une micro-invasion sans conséquence sur la conduite à tenir, il n'ignorera pas un cancer I B occulte.

Par contre si la lésion pénètre dans l'endocol sans limite visible en colposcopie, la colpo-microscopie peut apporter un complément diagnostique de grande valeur. Seule la suspicion d'invasion sur les frottis et la biopsie doit conduire à une exérèse. Les complications hémorragiques de la conisation (12 %) et les risques fœtaux (supérieurs à 20 %) en limitent les indications qui doivent rester exceptionnelles uniquement réservées aux lésions à forte probabilité d'invasion.

Si grand soit l'intérêt de la colposcopie dans le diagnostic des lésions au cours de la grossesse, elle n'a qu'une valeur d'orientation et peut même être trompeuse comportant un risque de surestimation nécessitant parfois des biopsies inutiles mais justifiées.

Les pièges de la colposcopie

ï la transformation normale d'un ectropion peut au cours de la grossesse voir sa réépithélialisation modifiée au point de prendre l'aspect d'un tableau colposcopique suspect.

Les kystes glandulaires situés en périphérie s'ulcèrent et du fait de leur activité accrue, ils entraînent une forte macération et l'érosion des plages malpighiennes de réparation.

L'infiltration déciduale fréquente fera apparaître des zones acidophiles nettes aux contours mal définis. L'association de zones congestives et ulcérées et/ou de plages acidophiles avec orifices glandulaires cernés réalisera une lésion colposcopiquement suspecte à explorer. la colposcopie peut également modifier le grade I de transformation atypique

En faisant apparaître des zones congestives érosives ou ulcérées, en intensifiant la réaction acidophile des plages métaplasiques liée à l'hyperactivité basale, en ouvrant des kystes glandulaires et en modifiant les contours périphériques qui perdent leur netteté, la grossesse simulera une lésion de transformation atypique de grade II à biopsier.

Rappelons cependant que la colposcopie n'est qu'un élément d'orientation diagnostique et qu'elle doit être confrontée à la cytologie et à l'histologie qui permettront de redresser le diagnostic.

malgré ses pièges, la colposcopie est un examen indispensable au diagnostic des lÈsions et elle représente avec la cytologie la méthode de choix pour réaliser leur surveillance au cours de la grossesse.

La colposcopie dans la surveillance des lésions

L'évolution des lésions virales à HPV et des dysplasies, bien que différente permet d'autoriser une simple surveillance, à l'exception des lésions exophytiques qui doivent justifier un traitement local. les lésions de bas grade (condylomes plans et CIN I) régressent très fréquemment au cours et au décours de la grossesse c'est-à-dire dans les trois mois qui suivent l'accouchement avec des taux variant selon les auteurs entre 72 et 83 %.

A l'origine de ces régressions on peut évoquer le retour à l'état hormonal et immunologique antérieur qui ne favorise plus l'expression du virus, plus aléatoirement, la disparition des lésions liées à la métaplasie active de la grossesse ou enfin l'élimination possible de certaines d'entre elles lors du traumatisme obstétrical ?* les lésions de haut grade ont une évolution toute différente, comparable à celle de la population générale. Leur taux de régression faible, voire très faible en font des lésions vraisemblablement dépendantes du mécanisme de régulation cellulaire. La grossesse ne semble pas influencer leur évolutivité ni même l'aggravation des lésions de CIN3.

C'est dire en l'absence de toute thérapeutique agressive de ces lésions au cours de la grossesse, la nécessité d'une surveillance rigoureuse au moins tous les trois mois grâce à la colposcopie et la cytologie.

La colposcopie aura l'avantage très souvent de visualiser la totalité d'une lésion dont la jonction n'était pas accessible au premier examen, grâce à l'éversion endocervicale qui tend à s'accroître avec l'évolution gravidique.

Elle permettra d'orienter le frottis sur la zone la plus suspecte, réservant la mini- biopsie au moindre doute des lésions aggravées.

Certains auteurs comme Benedett et Ferenczy ne préconisent la biopsie que si la colposcopie suspecte une lésion micro-invasive. D'autres comme Hellberg, rapportant un nombre important de faux négatifs du frottis dans la surveillance des CIN 3 insiste sur la nécessité de pratiquer des colposcopies et des biopsies répétées.

Cette surveillance cyto-colposcopique avec biopsies éventuelles devra être poursuivie deux à trois mois après l'accouchement où une nouvelle évacuation diagnostique permettra le traitement des lésions persistantes.

CONCLUSION

La colposcopie est d'un grand intérêt dans le diagnostic des lésions bénignes qu'il s'agisse de lésions exubérantes parfois inquiétantes à l'œil nu ou de lésions plus spécifiques comme la déciduose.

La fréquence plus grande des infections à HPV dont 50 % sont associées à des néoplasies intraépithéliales, l'égale fréquence des CIN III en dehors et pendant la grossesse impliquent un dépistage systématique de ces lésions par la cytologie. La découverte d'une anomalie imposera dès lors un bilan lésionnel obtenu par la colposcopie et la biopsie dirigée, suivi d'une surveillance rigoureuse cyto-colposcopique tous les trois mois.

Lévolution favorable des lésions condylomateuses planes et des dysplasies de bas grade permet d'autoriser une simple surveillance au cours de la grossesse avec un traitement qui aura lieu dans la période du post partum au moins trois mois après l'accouchement. Les seules thérapeutiques agressives seront appliquées sur les lésions condylomateuses exophytiques très riches en virus, source d'une contamination materno-fœtale dont les conséquences peuvent être sévères.

La colposcopie aura l'avantage au cours de la grossesse de visualiser bien souvent la totalité de la lésion dont la jonction est extériorisée permettant d'orienter le frottis et la biopsie sur la zone la plus suspecte et d'éliminer une lésion invasive.

J.-L. Mergui* et B. Lemaire **

* Service de gynécologie-obstétrique du Pr Salat-Baroux, Hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75020 Paris.

** Clinique de gynécologie-obstétrique et de pathologie de la reproduction, MaternitÈ H. Salengro, Pr J.L. Leroy, Pr F. Puech, Pr X. Codaccioni.

 : JOURNÉES DE TECHNIQUES AVANCÉES EN GYNÉCOLOGIE OBSTÉTRIQUE ET PÉRINATALOGIE PMA, Fort de France 11 - 18 janvier 1996