Les XXIIe JTA
> Présentation
> Programme
> Comité scientifique
> Intervenants
> Contacter les JTA

En pratique
> S'inscrire
> Renseignements
> Hébergement
> Programme social
> Post-congrès

Les archives
> Andrologie
> Biologie
> Gynécologie
> Infertilité
> Médecine foetale
> Néonatologie
> Nutrition
> Obstétrique
> Pédiatrie
> Périnatalité
> Périnéologie
> Phlébologie
> Psychosomatique

Rechercher

Titre: Surpoids et obesite : les objectifs, etapes et moyens de prise en charge
Année: 2000
Auteurs: - Borys J.-M.
Spécialité: Gynécologie
Theme: Obésité

Surpoids et obésité : les objectifs, étapes et moyens de prise en charge

Dr Jean-Michel BORYS
Centre Kennedy - Armentières

La surcharge pondérale est une plainte fréquemment évoquée dans la consultation de gynécologie. Il peut s’agir d’une prise de poids ancienne ou récente liée ou non aux événements de la vie génitale.

Les hormones sont susceptibles de jouer un rôle non négligeable au moment des grossesses mais aussi et peut-être encore plus de la ménopause. Ce sont des périodes pour lesquelles une surveillance pondérale est indispensable. Les hormones exogènes peuvent influencer le poids comme par exemple dans le cadre de stimulation ovarienne.

Il existe actuellement une incidence croissante de la surcharge pondérale et de l’obésité. On parle même d’épidémie d’obésité ce que semblent confirmer les données épidémiologiques avec de grandes disparités régionales. Les pays les plus concernés sont les Etats-Unis, les pays d’Europe de l’Est. En France, le Nord et l’Est sont les régions les plus à risque.

I - POURQUOI GROSSIT-ON ?

w La génétique ne peut expliquer à elle seule le surpoids. S’il est exact que nous ne sommes pas tous égaux devant le poids et la prise de poids, les gènes n’ont pas évolué en vingt ans de temps alors que l’épidémie d’obésité a largement progressé. Schématiquement et caricaturalement, on estime qu’environ 30 % de la prise de poids est liée à des phénomènes génétiques et 70 % à l’environnement.

w Dans les conditions environnementales, l’alimentation a un rôle important mais pas exclusif. C’est essentiellement l’alimentation hyperlipidémique qui est en cause dans la prise de poids. Les sucres font peu ou moins grossir que les graisses, ce qui peut s’expliquer par différents mécanismes : les glucides apportent 4 kg/calories par gramme tandis que les lipides en apportent 9. Les glucides ont une thermogenèse post-prandiale plus importante que les lipides. Les glucides ont un effet satiétogène plus marqué.

L’apport calorique global a tendance à diminuer alors que l’incidence d’obésité augmente, ceci signifie que d’autres facteurs non alimentaires interviennent.

 

 

 

L’inactivité ou la sédentarité, ce serait l’un des phénomènes les plus importants pour expliquer l’épidémie actuelle d’obésité. La sédentarité ne signifie pas absence d’activité sportive mais plutôt réduction des dépenses énergétiques de la vie quotidienne.

w En dehors du rôle des hormones féminines, face à une prise de poids chez une femme surtout au moment de la ménopause, la recherche d’une hypothyroïdie doit être systématique. L’hypothyroïdie est parfois frustre et pauci symptomatique. Le dosage de TSH permet un diagnostic facile.

w L’une des autres circonstances de prise de poids est l’arrêt du tabagisme. C’est d’ailleurs l’un des freins moteurs à cet arrêt. Dans l’étude FLEURBAIX LAVENTIE VILLE SANTE, les femmes qui arrêtent de fumer grossissent en moyenne de 4 kg. Un accompagnement est donc là aussi indispensable pour éviter par exemple que la femme incrimine d’autres causes dans la prise de poids qu’elle risque d’avoir à l’arrêt du tabac.

w L’environnement psycho-social est un composant de la prise de poids où interviennent humeur, stress, habitudes sociales…

La prise de poids est donc très largement multi-factorielle, ce qui explique que la prise en compte d’un seul de ces facteurs ne peut s’accompagner d’un succès thérapeutique si les autres sont négligés.

 

II - A PARTIR DE QUEL MOMENT EST-ON EN SURCHARGE PONDERALE OU GROS ?

w Etre obèse, c’est avoir un excès de masse grasse. L’un des moyens de déterminer le pourcentage de masse grasse et de masse maigre est représenté par les balances à impédancemétrie dont chaque praticien peut disposer, au cabinet. Il s’agit d’un outil simple d’utilisation, peu coûteux et utile pour évaluer les compartiments corporels et surtout leur évolution dans le cache d’une prise en charge d’un excès de poids.

w L’index de masse de corpulence (ou BMI-Body Mass Index) est le moyen retenu au niveau international pour caractériser l’obésité. Cet index est égal au rapport du poids sur la taille que multiplie la taille. Par exemple : une femme qui pèse 76 kg pour une taille de 1m70 a un BMI de 76 : 1,70 x 1,70 = 26.29 kg/m2.

w La zone de poids considérée comme normale correspond à un BMI de 20 à 25. Une étude prospective récente (1 million d’Américains suivis 14 ans) confirme d’ailleurs que c’est dans cette zone pondérale qu’il y a le moins de risque de morbi-mortalité générale (N. Engl J. Med. 7 oct 1999). En-dessous de 20 kg/m2 on parle de maigreur, au-dessus de 25 et en dessous le 27 de surcharge pondérale légère, puis de surcharge pondérale franche de 27 à 30.

La valeur de 30 kg/m2 correspond à la définition médicale de l’obésité. Au-delà de 40 il s’agit d’une obésité morbide.

Obésité n’est pas synonyme de dysmorphie. On peut avoir un BMI normal et une surcharge adipeuse localisée gênante sur le plan esthétique.

 

III - QUELS SONT LES RISQUES LIES A L’OBESITE ?

Les risques dépendent de la localisation des graisses. Pour une localisation des graisses péri viscérale ou obésité dite androïde, les risques de maladies métaboliques, de diabète, de dyslipidémie et de maladies cardio-vasculaires ainsi que celui de cancer (sein, côlon…) sont augmentés. Pour l’obésité de type gynoïde, ce sont plus les complications mécaniques qui sont à redouter : ostéo-articulaires, veineuses, mais également les conséquences sur l’infertilité.

 

IV - LA PERTE DE POIDS EST UNE NECESSITE MEDICALE CHEZ L’OBESE

Il existe donc une légitimité très forte à proposer un amaigrissement chez les sujets obèses.

La limite de 30 kg/m2 pour l’index de masse de corpulence est rapidement atteinte puisque pour une femme mesurant 1m60, au-delà de 77 kg elle est considérée comme obèse, lorsqu’elle mesure 1m70, c’est au-delà de 87 kg.

 

V - LA PRISE EN CHARGE DE LA PERTE DE POIDS

1 - Les objectifs

w Les objectifs des patientes sont souvent démesurés par rapport à leur poids et leur taille. L’objectif majeur devrait être de perdre du poids progressivement et régulièrement pour que ceci soit durable.

w La perte progressive évite la fatigue, les restrictions caloriques importantes et est probablement un gage de meilleur succès à long terme.

w Le rythme de perte du poids souhaitable est de 1,5 à 2 kg par mois. Si ce rythme était maintenu sur une année, cela représenterait une perte d’une vingtaine de kilos.

w Le succès à long terme est l’élément essentiel qu’il faut rechercher. Pour cela mieux vaut éviter d’avoir des objectifs trop ambitieux qui ne pourront de toute manière être atteints et seront très rapidement suivis d’une reprise de poids, c’est le phénomène du yoyo qui est associé à une morbi-mortalité plus importante.

w Parmi les objectifs, l’un des points clés est de perdre essentiellement de la graisse et non du muscle, c’est pourquoi il est souhaitable d’associer une activité physique même modérée mais régulière et progressive afin de limiter au maximum la perte de muscle lors de l’amaigrissement.

w Maigrir et mincir ne sont pas synonymes. Maigrir signifie perdre des kilos, mincir perdre des centimètres de tour de taille, de hanches ou de cuisses.

Lorsqu’une activité physique régulière est associée à une alimentation équilibrée, on perd à la fois du poids et des centimètres. Une activité physique plus importante peut entraîner une stagnation pondérale car la personne se muscle tout en perdant parallèlement de la graisse, ce qui s’accompagne d’une diminution des centimètres mais d’une stagnation du poids. La balance à impédancemétrie permet alors de renseigner efficacement sur ces modifications corporelles.

w Parmi les objectifs de perte du poids, le maintien d’une vie sociale reste fondamental. Si on peut tenir deux ou trois mois en ayant un régime restrictif et une alimentation très particulière, ceci ne peut évidemment pas être un objectif à long terme. Le maintien de la vie sociale fait donc partie intégrante de la stratégie de prise en charge.

2 - Les étapes nécessaires 

w Il convient tout d’abord d’éliminer une cause médicale en particulier une hypothyroïdie surtout chez la femme de la cinquantaine.

w Savoir expliquer la cinétique de la perte de poids :

Bien souvent, les premiers mois il existe une lune de miel avec une perte rapide de poids suivie au bout de quelques semaines d’un palier. Durant ce palier, les patientes ont tendance à se décourager et à reprendre leurs habitudes de vie antérieures, ce qui se traduit par une reprise de poids le plus souvent au-delà de ce qu’elles avaient perdu. Elles entrent alors dans le système du yoyo.

Il est souhaitable d’expliquer à sa patiente que la perte de poids sera tout d’abord relativement rapide, puis moins rapide, suivie d’un palier puis d’une nouvelle perte et d’un nouveau palier, etc. Le différentiel de poids avant d’arriver au premier palier est plus important que celui qui précède le second palier, etc. Les paliers ont tendance à s’allonger avec le temps ce qui est logique puisqu’il y a de moins en moins de poids à perdre. Il s’agit d’une adaptation métabolique avec une diminution du métabolisme basal.

w Cette notion de palier est l’une des raisons soulignant l’intérêt d’une consultation régulièreet fréquente pour encourager la patiente et répondre à ses questions.

La perte pondérale est aussi liée à la fréquence des consultations médicales et/ou diététiques.

3 - La prise en charge diététique 

w Il est illusoire de vouloir changer totalement les habitudes alimentaires d’une personne. Elle ne vit pas seule mais dans un entourage familial et/ou professionnel. Il est indispensable d’en tenir compte.

w Parmi les trucs les plus simples, expliquer à sa patiente la manière de faire les courses avec les listes positives et négatives afin de n’acheter que ce dont elle a réellement besoin permet d’éviter bien des tentations.

w L’organisation du rythme de la journée en prévoyant les moments des repas et éventuellement des collations est un moyen d’éviter les fringales. Le meilleur moyen pour ne pas grossir est de ne pas avoir faim. Le meilleur moyen pour ne pas avoir faim est de manger de manière préventive.

Il est beaucoup plus facile de prendre une petite collation avec quelques tartines et une barre de chocolat par exemple lorsque l’on n’a pas trop faim, alors que l’on va craquer totalement sur le paquet de biscuits ou multiplier le nombre de tartines et de barres de chocolat lorsque l’on sera réellement affamé à 18 h en rentrant du travail… C’est une des manifestations du craving.

C’est pourquoi, la répartition de collations notamment dans l’après-midi avec le goûter est un élément important de prise en charge diététique des femmes ayant un surpoids ou souhaitant perdre du poids.

w Le rythme des repas a son importance. Ainsi l’absence de petit déjeuner s’accompagne généralement d’une prise calorique et surtout lipidique plus importante au cours du reste de la journée.

w La structuration des repas avec une entrée, un plat et un dessert permet d’éviter une consommation d’aliments trop riches en énergie et en lipides.

w La prise en charge diététique encourage aussi la consommation de légumes, fruits, féculents, sans ou avec peu de graisses d’accompagnement.

w Lorsque l’on regarde « le top 10 des aliments apportant le plus de graisses » chez la femme on trouve en tête, le beurre et les corps gras visibles, mais aussi les biscuits… (cf annexe 1). Plutôt que vouloir équilibrer parfaitement toute l’alimentation, ce qui est illusoire, mieux vaut se focaliser sur les aliments les plus riches en énergie.

w Au niveau des aliments, ceux à privilégier sont les glucides complexes et les aliments riches en fibres tandis que l’on évitera les graisses qu’elles soient sous forme visible : beurre, huile (y compris l’huile d’olive certes bonne pour les artères mais comparable aux autres pour les effets sur le poids) et les graisses cachées présentes dans de nombreux aliments au premier rang desquels les viandes, les fromages, les charcuteries, les produits laitiers entiers, les snacks, les biscuits, gâteaux, pâtisseries, glaces, barres chocolatées…

Ce sont ces aliments qui, malgré un faible volume, sont à l’origine de prise importante de poids. Un outil simple, le LIPIDOFOTO® ROCHE permet de sensibiliser les patientes aux aliments riches en graisses cachées.

w Chez les femmes qui souffrent de rétention hydrique, on insiste sur la nécessité d’une alimentation peu salée.

4 - L’activité physique

w L’activité physique au quotidien est un des éléments fondamentaux à la fois pour son rôle sur les dépenses énergétiques mais aussi la prise de muscle et un effet anti-stress.

Il ne s’agit pas obligatoirement de sport, une marche régulière quotidienne ou quelques quarts d’heure de natation chaque semaine permettent d’atteindre ces objectifs.

w Un obèse ne peut pratiquer du sport. Il doit apprendre progressivement à se dépenser plus dans la vie quotidienne.

5 - Les médicaments

Lorsque l’alimentation et l’activité physique ne suffisent pas surtout pour les personnes obèses ou celles ayant une surcharge pondérale (BMI > 28 kg/m2) accolpagné de facteurs de risque, une prise en charge pharmacologique peut être recommandée. Le médicament dont on dispose actuellement est l’ORLISTAT. Il s’agit d’un inhibiteur des lipases digestives. Grâce à ce médicament, 30 % des graisses d’origine alimentaire ne sont pas absorbées. Sa prescription est de trois gélules, une à chaque repas pendant au moins trois mois. Au terme de trois mois, si la perte de poids est supérieure ou égale à 5 % du poids initial, le résultat pouvant être espéré à un an est une perte totale de 16 % du poids, ce qui correspond parfaitement aux objectifs médicaux.

w La perte de 10 à 15 % de poids permet d’améliorer sensiblement l’ensemble des paramètres métaboliques et de réduire les risques qui y sont liés. Ce repère de 10 à 15 % est un bon moyen de retenir et de conseiller les patientes pour avoir une perte de poids durable.

6 - La chirurgie

w La gastroplastie permet une perte pondérale importante et rapide (six mois) au prix d’une vie sociale très limitée et d’effets secondaires (régurgitations, vomissements) importants. Les indications sont très spécialisées et mutidisciplinaires et réservées aux obésités morbides.

w La chirurgie localisée

Plus localement, la liposuccion pour les prises de poids extrêmement localisées et la chirurgie réparatrice telle la réduction mammaire ou celle du tablier abdominal peuvent être proposées surtout après perte importante de poids chez un obèse majeur.

 

VI - LES PIEGES A EVITER

w Prescrire des régimes trop stricts ou dissociés permet de perdre rapidement du poids mais malheureusement de le reprendre encore plus vite avec probablement quelques kilos en plus, c’est difficile à suivre, fatigant, déprimant… et inefficace.

w Etre trop pressé est l’un des obstacles majeurs à la perte de poids. La perte de poids doit être progressive et surtout à long terme. Il est souhaitable d’expliquer tout cela aux patients. Dans le même ordre d’idées, expliquer aux patients que 10 grammes de graisse en plus par jour (par exemple deux tartines beurrées) représentent à la fin de l’année une prise de 3,5 kg de graisse. Il est plus facile de réduire sa consommation de 10 g de graisses chaque jour plutôt que d’avoir un régime extrêmement restrictif pendant quelques semaines.

w L’un des moments les plus fragiles est le moment des paliers. Craquer à ce moment-là peut entraîner une reprise importante de poids d’où l’intérêt d’être informé et bien suivi.

w Parfois, les patientes ont tendance à vouloir faire trop bien et manger moins que ce que le médecin conseille ou sauter des repas. Ceci est une erreur car on se retrouve en situation de restriction.

w Avoir un objectif irréaliste conduit à l’échec. Le poids ne doit pas être trop bas. Perdre plus de 10 à 15 % de son poids initial expose le plus souvent à une reprise pondérale.

w L’absence d’activité physique limite considérablement les chances de perte de poids et augmente le risque d’en reprendre.

Bibliographie

Determinants and nature of dietary underreporting in a free-living population : the Fleurbaix Laventie Ville Santé (FLVS) study.

Int J Obes 1997 ; 21 : 567-73

Lafay L., Basdevant A, Charles M-A et al.

Food and nutritional data from a population in northern France : the Fleurbaix-Laventie Ville Santé (FLVS) Study

Rev Epidemiol Santé Publique 1998 ; 46 : 263-275

Lafay L, Vray M, Boute D, Basdevant A.

« Fleurbaix Laventie Ville Santé » : une nouvelle approche épidémiologique

Cah. Nutr. Diét., 1993, 28, 177-180

Borys JM, Boute D, Thomas F, Fontbronne A, Eschwege E, Fossati P

Familial approach of cardiovascular risk factors : the « Fleurbaix Laventie Ville Santé » study

Atherosclerosis X. 1995

M .A. Charles, F. Thomas, A. Fontbonne, J.M. Borys, D. Boute, D. Toursel, P. Fossati and E. Eschwège

Lipides alimentaires : Sources et besoins

Cah. Nutr. Diét., 31,4,1196, p. 248-256

D. Lairon, Nadia Mekki

Traité de l’alimentation et du corps - La modification du comportement alimentaire

La méthode du contrôle des stimulus - p. 734 - 736

Gérard Apfeldorfer

Fluctuations pondérales et régimes alimentaires

Cah. Nutr. Diét., XXIX, 2, 1994, p. 81 - 84

A. Golay, Y Morel, Tania Lehmann, Y Schutz

American Heart Association. Dietary Guidelines for Healthy American Adults : A Statement for Physicians and Health Professionals by the Nutrition Committee. Dallas, Tx : American Heart Association; 1992

Impact of dietary fat content and fat oxidation on energy intake in human

Am J Clin Nutr 1989;49:799-805

Tremblay A, Plourde G, Despres J-P, Bouchard C

Determinants of weight gain and owerweight in adult Finns

Eur J Clin Nutr 1991;45:419-430

Rissanen A, Heliovaara M, Knekt P, Reunanen A, Aroinaa A..