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cardiopathies
congénitales :
du DG ante-natal à l’enfant cardiaque
la cardiologie
prénatale :pratique et difficultés en 1995L. Fermont*
* Institut
de puériculture, 26, bd Brune, 75014 Paris.
La cardiologie
ftale est l’un des tout premiers exemples de l’implication systématique
de médecins et de chirurgiens spécialisés dans un domaine
particulier de la pédiatrie - la cardiologie pédiatrique
- aux côtés d’obstétriciens et d’ échographistes
confrontés à la possibilité d’un diagnostic anténatal
de cardiopathie congénitale.Le point de départ de cette collaboration
provient :
– de l’amélioration technologique des moyens ultrasonores qui ont mené
à la visualisation anatomique et dynamique du cur ftal, par échocardiographie
couplée aux différentes techniques doppler : pulsé, continu
et codage couleur ;
– de l’incorporation par les échographistes de l’examen du cur ftal
aux études morphologiques réalisées à titre systématique
vers les âges gestationnels de vingt-deux et trente-deux semaines d’aménorrhée
avec une connaissance de plus en plus large des signes d’appel qui orientent
vers le diagnostic d’une cardiopathie congénitale ;
– de la présence effective, au moins un dans chaque ville de faculté
en France, de cardiopédiatres échocardiographistes capables de
réaliser rapidement des examens de contrôle confirmant ou infirmant
les données de l’échographie générale, excluant
ainsi des incertitudes prolongées ou des doutes angoissants et préjudiciables
;
– de la disponibilité de l’ensemble des cardiopédiatres, médecins
et chirurgiens, pour participer à l’enseignement des échograhistes
et des obstétriciens qui sont de fait les premiers responsables du dépistage
afin de les seconder dans la conduite pratique du dossier dont ils conservent
la pleine responsabilité. Ils se sont également montrés
constamment disponibles pour aider les parents qui souhaitent les consulter
afin de disposer du maximum les menant à une décision personnelle
et établie d’après des données certaines et concordantes
;
– avant tout de la volonté des parents d’être rassurés en
cas d’antécédent familial, de ne pas vivre ou revivre la naissance
d’un enfant atteint d’une cardiopathie complexe comme une fatalité, une
injustice ou une agression, de pouvoir décider par eux-mêmes de
la poursuite de la grossesse, de pouvoir être assurés de l’absence
de malformations associées, de mettre autant que faire se peut, leur
enfant à l’abri des menaces néonatales grâce à une
meilleure prise en charge périnatale. Le diagnostic anténatal
des cardiopathies congénitalesEn théorie toute malformation qui
modifierait l’architecture du cur est accessible à un diagnostic prénatal.
Une large détection prospective des malformations cardiaques au sein
de la population provient par conséquent de la présence d’une
anomalie échographique servant de « signe d’appel » et d’ échographistes
capables de les détecter. Ce sont en effet ces médecins qui ont
la responsabilité du dépistage d'une « malformation cardiaque
», même en l'absence de ce qu'il est convenu d'appeler un « facteur de
risque cardiologique», ce qui représente plus de 75 % des cardiopathies
diagnostiquées in utero. Les signes d'appel échographiques découlent
de la recherche systématique de « quatre cavités » et des concordances
atrioventriculaires et ventriculoartérielles :
– un anneau valvulaire auriculoventriculaire manque ou est très hypoplasique
équipé de valves peu mobiles, le ventricule concordant étant
absent ou très petit, musclé, et dénué de fonction
systolodiastolique. On s’oriente vers différentes cardiopathies selon
que l’a est droite ou gauche : une atrésie mitrale ou tricuspide, une
hypoplasie ventriculaire gauche complète ou partielle, une atrésie
pulmonaire à septum interventriculaire intact ;
– un anneau auriculoventriculaire commun est identifié passant « en pont
» au travers d’un septum interventriculaire et d’un septum interauriculaire
plus ou moins constitué, orientant vers diverses formes de défauts
septaux atrioventriculaires ou de curs biloculaires ;
– un anneau sigmoïdien manque et l’artère correspondante est de
calibre variable, le plus souvent très hypoplasique. On s’oriente vers
les diverses formes d’atrésies pulmonaires ou aortiques à septum
interventriculaire ouvert ou fermé
;– les parois cardiaques sont anormales, les ventricules sont hypertrophiés
ou dilatés ou comblés : on s’oriente vers les différentes
formes de cardiomyopathie ou de tumeurs ;– une oreillette est significativement
dilatée : l’oreillette droite, ce qui oriente vers les différentes
formes d’anomalies d’Ebstein de la valve tricuspide ou de dysplasies valvulaires
tricuspides ; l’oreillette gauche et on envisage alors les différentes
formes d’anomalies mitrales.
– les connexions ventriculo-artérielles sont inhabituelles :
indiquant la possibilité d’une malformation conotroncale.Les deux vaisseaux
sont identifiés mais en disposition parallèle ; le vaisseau postérieur
est globuleux à sa partie proximale, se bifurque tandis que le vaisseau
antérieur dessine une crosse dont sont issues des artères collatérales
: on s’oriente vers les différents types de malpositions artérielles,
dont la transposition simple des gros vaisseaux. Un seul vaisseau est identifié,
dilaté, au-dessus d’une communication interventriculaire ou les deux
vaisseaux sont visualisés avec asymétrie de leurs diamètres
: la continuité ventriculo-aortique est normale : il s’agit des différentes
formes de « tétralogie de Fallot ». En cas de discordance ventriculo-artérielle,
le diagnostic s’oriente plutôt vers les malpositions artérielles
avec communications interventriculaires avec/sans obstacle de la crosse aortique
:
– une asymétrie avec prépondérance des dimensions artérielles
et des cavités cardiaques : on s’oriente vers des obstacles en aval,
notamment vers des obstacles situés au niveau de la crosse de l’aorte.
Ce diagnostic est d’autant plus probable que le rapport est ³ à un rapport
de un pour deux.
– une anomalie de fonction du cur : des ventricules hypertrophiés ou
dilatés, hypocinétiques ou hypercinétiques, des oreilles
dilatées, des arythmies à type de bradycardies ou de tachycardies
ou même d’extrasystoles orientent plus spécifiquement vers certaines
pathologies cardiaques ;
– une anomalie de position du cur dans le thorax ou une anomalie de situs viscéro-atrial
: orientant vers des cardiopathies ou des syndromes complexes.
– une anomalie de l’examen doppler : le couplage continu /couleur et le doppler
pulsé ont un intérêt physiologique essentiel pour dépister
et analyser la perméabilité des structures (valves auriculoventriculaires
et sigmoïdes, foramen ovale, canal artériel, vaisseaux), la direction
des flux, les gradients de pressions ventriculo-artériels auriculoventriculaires
(d'après l'application de la loi de Bernouilli simplifiée), ce
qui évalue la sévérité d'un obstacle en une quelconque
localisation anatomique. Il améliore en outre les conditions techniques
du diagnostic d’anomalies atteignant des structures parfois difficiles à
visualiser par échocardiographie bidimensionnelle (la crosse de l’aorte,
les retours veineux, les anomalies vasculaires extracardiaques) ou de cardiopathies
dénuées d’altération de l’architecture du cur (les communications
interventriculaires, les coarctations de l’aorte, les anomalies des retours
veineux pulmonaires).La plupart des malformations cardiaques importantes sont
ainsi, au moins pour leur diagnostic « de groupe », accessibles à un
diagnostic anténatal par échocardiographie bidimensionnelle, pour
peu que l’échographe utilisé soit de bonne définition et
que l’échographiste soit au fait des éléments anatomiques
à contrôler.Le point de départ de la cardiologie ftale
est ainsi l’implication de celui qui est à la source : l’échographiste
et dont l’une des responsabilités est de tirer la « sonnette d’alarme
» et d’adresser cette famille vers le cardiopédiatre « prénataliste
» local consultant en cas d’image anormale avérée ou de doute
diagnostique.La gravité des cardiopathies congénitalesCe sont
des éléments anatomiques et fonctionnels précis qui permettront
une évaluation pronostique de la cardiopathie diagnostiquée. Une
cardiopathie congénitale peut être considérée comme
grave pour de multiples raisons :
– l’importance de l’atteinte anatomique : nous avons vu les éléments
anatomiques qui servent de « signes d’appel » et orientent l’échographiste
vers l’hypothèse d’une malformation cardiaque. Une cardiopathie est certes
grave lorsque des structures anatomiques manquent ou sont très anormales.
Il faut cependant se rappeler qu’un cur assure sa fonction s'il a la capacité
de maintenir un débit cardiaque en éjectant un volume systolique
adéquat sous une pression suffisante afin de maintenir l'équilibre
circulatoire en termes de rapports de pressions, de débits et d’apports
en oxygène.Une cardiopathie complexe est à même d’être
parfaitement tolérée si ces conditions circulatoires sont respectées
:
– ce qui implique la présence d'au moins un ventricule fonctionnel ;
– ce qui implique au moins un appareil auriculoventriculaire fonctionnel sans
sténose ni fuite majeure ;
– ce qui implique une éjection systolique vers un pédicule artériel
en respectant un équilibre adéquat entre les débits et
les pressions systémiques/pulmonaires. Une malformation grave ou une
désaturation importante ne sont pas compatibles avec la vie si ces équilibres
sont assurés, même s'il n'y a qu'un seul vaisseau qui soit issu
du cur, à partir du moment où l’hémodynamique est assurée
à contre-courant par une vascularisation d'origine systémique
ou le canal artériel.Un échographiste qui constate une malformation
anatomiquement complexe doit par conséquent s’abstenir de parler en termes
de vie ou de mort avant que les explications complètes sur les possibilités
et les conditions de la survie aient pu être fournies aux parents.
– la gravité du déséquilibe hémodynamique : Rares
sont les malformations cardiaques qui soient létales avant la naissance
à l’âge encore tardif des détections actuelles. Des conditions
fonctionnelles spécifiques telles qu’une fuite auriculoventriculaire
massive, une dysfonction ventriculaire prolongée, un bloc auriculoventriculaire
de haut degré surtout s’il est associé à une malformation
cardiaque, une tachycardie hétérotope très précoce,
en arythmie.Des malformations complexes sont ainsi susceptibles d’être
parfaitement tolérées après la naissance, parfois spontanément
et pendant un temps indéterminé, des mois ou des années
avant que ne soient proposées des techniques palliatives en constante
évolution. On ne peut dire qu’une atrésie tricuspide, un ventricule
unique ou un canal atrioventriculaire complexe sont des malformations létales
et inaccessibles à tout traitement. Notre rôle avant la naissance
est par conséquent, au-delà du diagnostic, de tenter de déterminer
les formes anatomiques qui conduiront à un résultat clniquement
plus ou moins satisfaisant et plus ou moins prolongé, des interventions
envisagées.En revanche, des malformations apparemment simples, au point
d’être méconnues lors des échographies prénatales,
peuvent être responsables d’insuffisance cardiaque ou de collapsus aigu,
dont le début est décalé par rapport à la naissance,
de diagnostic parfois retardé et incertain, ce qui suscite nombre d’interrogations
au sein du milieu familial : anomalies du retour veineux pulmonaire, coarctations
de l’aorte, obstacles valvulaires aortiques ou pulmonaires sont parfois responsables
de déséquilibres hémodynamiques critiques néonataux,
traités pour certains par des techniques non chirurgicales de valvuloplasties.
Dans d’autres cas, la malformation est anatomiquement plus grave mais la menace
vitale proviendra d’une modification anatomique et fonctionnelle précise
et néonatale telle que la fermeture parfois brutale d’un canal artériel
dans le cadre d’une atrésie pulmonaire, d’une interruption de l’arc aortique
ou d’un syndrome de coarctation de l’aorte, telle que la fermeture simultanée
précoce d’une canal artériel et d’un foramen ovale au cours de
l’évolution néonatale d’une transposition simple des gros vaisseaux.Rares
sont les situations qui soient certainement au-dessus de toute possibilité
chirurgicale. Mais cette correction chirurgicale pourra être :– « anatomique
» : anatomie et hémodynamique sont normales ou proches de la normale.
On obtient un cur ayant deux oreillettes et deux ventricules, équipé
de deux appareils auriculoventriculaires et dont les concordances auriculo-ventriculaires
et ventriculoartérielles sont retrouvées ;
– « physiologique » : la fonction hémodynamique générale
est retrouvée mais l'anatomie cardiaque reste très perturbée.
On obtient :
a– un cur univentriculaire équipé d'un seul anneau mitral ou
tricuspidien fonctionnel comportant une dérivation cavo-pulmonaire.
b – un cur biventriculaire avec des discordances auriculo-ventriculaires et
ventriculoartérielles ou un remodelage des connexions vasculaires.
c – « palliative définitive » : l'anatomie « native » ne peut être
efficacement utilisée.La problématique de la cardiologie ftale
ne se pose ainsi plus en termes de vie ou de mort mais en termes de qualité
et d’espérance de vie. La difficulté du travail prénatal
sera de tenter de répondre, à partir des images prénatales,
et d’un cur en situation fonctionnelle différente de celle qui sera
le sien après la naissance ou une intervention, aux interrogations des
parents en tentant de faire la part entre un désir de poursuivre la grossesse
« coûte que coûte », de préserver leur enfant de souffrances
et d’une infirmité, de sauvegarder leur couple, leur famille, leur qualité
de vie. Ces difficultés quasi existentielles du cardiopédiatre
sont encore accentuées par nombre de difficultés fondamentales
de la cardiologie prénatale.
– Les difficultés techniquesLes nombreuses difficultés techniques
qui se rencontrent lors de ces examens échographiques diminuent la fiabilité
de l'examen échocardiographique. Une transonicité pariétale
défavorable, une obésité maternelle, une modification de
l'abondance du liquide amniotique, une grossesse multiple, une position ftale
inadéquate sont autant d'obstacles à la précision de l'échocardiographie
ftale, parfois tels qu'on peut même hésiter sur un diagnostic
de ventricule unique ou d'atrésie valvulaire. De multiples contrôles
sont alors indispensables.De nombreuses malformations, telles les malformations
conotroncales risquent de passer inaperçues lors des échographies
systématiques si on se cantonne à l'étude des quatre cavités.
Des urgences néonatales comme les transpositions des gros vaisseaux ou
des cardiopathies complexes comme les troncs artériels communs peuvent
être méconnues.L'échographie procure des images. Des images
presque identiques appartiennent parfois à des cardiopathies différentes,
dont les évolutions et pronostics sont différents.
– La cardiopathie peut évoluer avant la naissanceDes potentiels évolutifs
particuliers ont été décrits. On ne peut exclure l'aggravation
anatomique à partir d'une anomalie anatomique a priori considérée
comme mineure. Nous avons vu « disparaitre » une cavité ventriculaire
gauche lors d'une surveillance d'un ftus chez lequel avait été
porté le diagnostic de coarctation de l'aorte avec sténose aortique
modérée et anomalie mitrale. L'extraction par césarienne
au terme de 37 semaines a été décidée dans le but
théorique d'éviter l'organisation « fibreuse » de ce petit ventriculaire
gauche. Le diagnostic néonatal a confirmé la coarctation et déterminé
que l'anomalie mitrale était en fait secondaire non pas à une
hypoplasie annulaire mais à un anneau supramitral. La résection
de ces anomalies a conduit à la récupération d'une cavité
ventriculaire gauche normale.Il ne faut donc pas confondre un petit ventricule
gauche, restreint parce que non rempli et qui est une anomalie potentiellement
curable avec une réelle hypoplasie du cur gauche.La fiabilité
de l'appréciation pronostique est améliorée si on dispose
de documents résultant d'examens itératifs. Dans le cas que nous
rapportons, l'examen au terme de 32 semaines aurait pu conduire au diagnostic
erroné d'hypoplasie du cur gauche avec toutes les conséquences
induites par ce diagnostic.L'interruption de grossesse d'une forme « incomplète
» d'hypoplasie du cur gauche ne doit ainsi être envisagée qu'avec
prudence, après analyse de données évolutives, surtout
si le diagnostic intervient dans le troisième trimestre de la grossesse
: il peut s'agir en effet du retentissement hémodynamique prénatal
d'une coarctation de l'aorte, conservant un espoir de récupération
fonctionnelle après la chirurgie néonatale.
– La cardiopathie peut évoluer après ou autour de la naissanceC’est
le cas de cardiomyopathies, dont l’effet fonctionnel échocardiographique
ne se manifestera que par récurrence d’une cytopathie mitochondriale
alors que nous savons que des aspects échocardiographiques très
voisins de la normale peuvent être constatés au-delà de
trente-deux semaines sans exclure la survenue d’une myocardiopathie néonatale.
Que dire aux parents justement inquiets et angoissés ? C'est encore le
cas des coarctations de l'aorte, qui peuvent d'ailleurs ne se constituer qu'après
la naissance.Une sténose sous aortique, en tunnel en cas de septum interventriculaire
fermé, ou par malignement en cas de syndrome de coarctation sont de très
graves lésions, elles-mêmes sources de grandes difficultés
thérapeutiques qui ne s'extérioriseront en fait que plusieurs
mois après la naissance et de façon imprévisible. En définitive,
que ce soit pour une anomalie du cur droit ou une cardiopathie affectant le
cur gauche, il est bien difficile d'affirmer qu'une structure, qu'elle soit
ventriculaire ou vasculaire, est de petite dimension parce qu’elle est malformée
ou parce qu’elle est peu fonctionnelle. Dans ce dernier cas, on assisterait,
après la correction du défaut anatomique responsable, au retour
d’un développement du ventricule ou du vaisseau soit-disant « hypoplasique
».
– Le pronostic est compliqué par une malformation associéeUne
malformation cérébrale, squelettique, rénale, hépatique
peut aggraver le pronostic et reléguer la cardiopathie à l'arrière-plan
des préoccupations ou modifier le pronostic attendu lorsque chaque anomalie
est constatée isolément.La cardiopathie est en fait parfois un
signe d'appel d’une affection dans laquelle le pronostic sera principalement
dominé par le pronostic, souvent de développement neurologique
et intellectuel de la maladie générale. C'est le cas par exemple
de certaines sténoses pulmonaires du syndrome de Noonan, des malformations
conotroncales des syndromes de Di George, des rhabdomyomes des scléreuses
tubéreuses, ou de certaines cardiomyopathies.état actuel de la
cardiologie prénataleLes examens réalisés en cardiologie
pédiatrique le sont à partir d’indications très variées
: antécédents familiaux, arythmie, malformation ou anomalie extracardiaque
ftale, anomalie fonctionnelle ou de liquide amniotique, indication maternelle
– cardiopathie maternelle, infection, maladie de système, prise de médicaments
- anticonvulsivants, lithium - ou de toxique -alcool- âge maternel « limite
» pour indiquer une étude systématique du caryotype. Dans notre
expérience, les examens d’échocardiographie ftale n’ont pas conduit,
contrairement à la crainte des pédiatres au début de la
cardiologie ftale, vers un programme d’eugénisme où toute détermination
de cardiopathie aurait conduit à une interruption plus ou moins licite
de la grossesse. Le projet des cardiopédiatres, médecins ou chirurgiens,
a rejoint celui des obstétriciens :
– faire en sorte que la maladie ne soit plus une fatalité et que son
éventualité ait pu être discutée avec les familles
;
– donner à une mère un enfant vivant et bien portant ;
– assurer le diagnostic d’une maladie bien déterminée ;
– constater les éléments anatomiques qui orienteront vers un pronostic
plus ou moins favorable, plus ou moins aléatoire, plus ou moins prévisible
;
– expliquer aux parents de façon concrète, vécue, au-delà
de l’image échographique et de la vie prénatale, ce que pourrait
être la vie de leur enfant et quel peut être le résultat
à moyen et long terme des interventions médico-chirurgicales aujourd’hui
à notre disposition, accepter le choix des parents confrontés
à une décision difficile en cas de maladie complexe, mais conserver
le projet thérapeutique si les progrès chirurgicaux ont été
suffisamment nets pour raisonnablement argumenter et s’opposer à une
demande d’interruption de grossesse en cas de malformation réparable.
La réussite de ce programme se situe au-delà de la technique elle-même
et ne peut qu’être le résultat de l’effort cohérent et homogène
de tous les cardiopédiatres, qu’ils pratiquent ou non par eux-mêmes
la technique de l’échocardiographie ftale en plein accord et en collaboration
avec les obstétriciens qui ont le dossier en charge. Il y a effectivement
une modification du « profil » de la cardiologie ftale :
– une tendance à la diminution du taux annuel des interruptions de grossesse
demandées et effectuées pour une cardiopathie congénitale
: 65 % en 1985 et 40 % en 1994. Plusieurs facteurs y concourent : la meilleure
connaissance des échographistes et la meilleure qualité de leur
matériel, la plus grande diversité des cardiopathies dépistées
par l’élargissement des vues anatomiques proposées, ce qui conduit
à une augmentation du taux de cardiopathies réparables, une meilleure
évaluation pronostique de la part des cardiopédiatres et une modification
des techniques proposées par les chirurgiens aboutissant pour certaines
cardiopathies à une amélioration des résultats ;
– taux croissant d’examens positifs dans le groupe de patientes indemnes de
facteurs de risques particuliers : une malformation suspectée est confirmée
pour un tiers des patientes adressées pour « doute lors de l’échographie
générale », ce chiffre étant encore plus élevé
si on prend en compte des aspects non pathologiques tels que certaines disproportions
de cavités, aspects hyperéchogènes intraventriculaires,
épanchements péricardiques mineurs, anévrismes de la valve
du foramen oval) ;
– diminution des anomalies chromosomiques systématiquement recherchées
en cas de cardiopathie ftale : le taux a évolué au cours des
années de 19 % au cours des années 80 à 11 % en 1994, ce
qui confirme encore la plus grande acuité des échographistes qui
diagnostiquent de plus en plus des cardiopathies isolées ;
– diminution de l’âge gestationnel moyen lors du diagnostic des cardiopathies
congénitales. Largement supérieur à trente semaines jusqu’à
1986, il est actuellement de 25 semaines environ (24 semaines en 1994), ce qui
est un résultat satisfaisant compte tenu de la tendance des obstétriciens
français à effectuer les examens systématiques de morphologie
générale autour de la vingt-deuxième semaine.Cette diminution
des âges gestationnels des détections est susceptible de s’accélérer
par suite des améliorations techniques et de l’extension des échographies
endovaginales habituant les échographistes à des examens de morphologie
de plus en plus précoces. On peut ainsi envisager un diagnostic anténatal
des malformations cardiaques avant la quinzième semaine d’aménorrhée,
ce qui est très certainement utile lorsqu’il s’agit d’exclure une récidive
en cas d’antécédent de cardiopathie complexe, notamment d’hypoplasie
du cur gauche, ou de parvenir le plus tôt possible à un diagnostic
de maladie susceptible de conduire vers une décision d’interruption médicale
de la grossesse ou vers une détermination du caryotype. Ce diagnostic
précoce des cardiopathies congénitales mérite cependant
d’être bien évalué avant d’entrer dans une pratique plus
courante. On peut en effet craindre une multiplication d’erreurs et d’incertitudes
qui auraient pour effet de conduire à des interruptions médicales
de grossesses à partir de données incomplètement établies,
mal ou non vérifiées, sans données évolutives excluant
ainsi les implications hémodynamiques du développement. A côté
de ces « faux positifs », un tel programme risque d’aboutir à une multiplication
d’interruptions de grossesse qui seraient acceptées compte tenu de la
précocité du diagnostic pour des malformations aujourd’hui considérées
comme réparables telles que les transpositions simples des gros vaisseaux
ou les formes anatomiques satisfaisantes de tétralogie de Fallot dont
on connaît les difficultés - voire les possibilités - d’établir
un pronostic précoce. Le bénéfice d’une détection
avancée de cinq ou six semaines est-il compensé par ces risques
de détérioration de la qualité du service rendu ?On considère
que, pour mille naissances, huit nouveau-nés sont atteints d’une cardiopathie
congénitale. Une atteinte anatomique suffisamment significative pour
être dépistée lors d’une échographie générale
non spécialisée n’est présente que chez la moitié
d’entre eux. Ces cardiopathies sont complexes et/ou critiques chez un quart
de ces enfants. Ce qui revient à dire que le potentiel de détections
anténatales utiles annuelles en France concerne trois mille enfants environ.Nous
sommes apparemment loin du compte. A partir de l’observation des nouveau-nés
cardiaques, nés en métropole, hospitalisés à l’hôpital
Necker, à l’hôpital Robert-Debré, au centre médicochirurgical
Marie-Lannelongue et à l’Institut de Puériculture, centres qui
reçoivent la majorité des nouveau-nés cardiaques traités
en Ile-de-France, on peut estimer que :
– un quart des malformations détectables sont diagnostiquées ;
– la moitié des malformations qui altèrent significativement sont
effectivement dépistées, avec un taux de détection de plus
de 70 % de la forme complète d’hypoplasie du cur gauche ;
– les malformations conotroncales sont responsables du déficit de ce
dépistage prénatal puisque 20 % de l’ensemble des tétralogies
de Fallot, des troncs artériels communs ou des malpositions artérielles,
toutes formes anatomiques confondues, sont diagnostiquées. Notre travail
est actuellement d’étendre ces possibilités puiqu’il s’agit ici
de futures indications opératoires parfois urgentes et que ces malformations
représentent un excellent signe d’appel vers la recherche « traditionnelle
» d’anomalies chromosomiques comme les trisomies 21 ou 18 ou plus particulières
telles les microdélétions du chromosome 22 par des techniques
spéciales d’hybridation in situ qui ne sont pas réalisées
systématiquement et à demander par conséquent dès
qu’une malformation conotroncale est affirmée.
– 16 à 20 % des nouveau-nés opérés d’une correction
anatomique de transposition simple des gros vaisseaux (ou associée à
un défaut septal isolé) ont eu leur malformation diagnostiquée
avant la naissance. Cette malformation représente un outil analytique
précieux : elle est le plus souvent pure, isolée, sans malformations
extracardiaques ou anomalies chromosomiques associées. Sa détermination
ne conduit le plus souvent pas à une interruption de grossesse et si
tel est le cas le motif n’en est pas cardiologique. Elle ne peut être
dépistée d’après la réalisation simple et unique
de la coupe échographique « des quatre cavités ». Leur diagnostic
impose par conséquent une étude soigneuse du pédicule artériel.
Son diagnostic représente un exemple d’urgence cardiologique néonatale
potentielle et conduit à une modification de l’attitude périnatale
: le lieu d’accouchement doit être prévu dans un centre disposant
au moins, à défaut d’un centre cardiopédiatrique, d’une
unité permanente de néonatalogie, et les durées des transferts
doivent être réduites au maximum et réalisées par
des pédiatres spécialisés. Ce chiffre apparemment déficitaire
est en fait satisfaisant puisqu’il implique un examen bien conduit par des médecins
non spécialistes menant à une situation d’urgence comportant des
possibilités de sauvetage et de guérison. Il est d’autant plus
satisfaisant si on considère la courbe régulièrement ascendante
de nos dépistages de cette malformation et si on la compare avec la situation
d’autres pays européens (taux inférieurs à 5 % en Grande-Bretagne,
Italie, Belgique, Allemagne).Le diagnostic anténatal de la transposition
simple des gros vaisseaux est un exemple de l’implication des échographistes
en matière de cardiologie prénatale, un exemple de la collaboration
obstétricopédiatrique fructueuse qui s’est harmonieusement développée
autour de nous au cours des années, l’exemple d’un outil d’évaluation
de la qualité globale des échographies réalisées
puisqu’on peut supposer que la détection d’une telle maladie n’intervient
qu’après que les affections plus évidentes aient été
diagnostiquées lors des études échographiques générales
prospectives.
– certaines cardiopathies ont encore un déficit de détection,
avant tout celles où l’architecture générale du cur est
conservée. Les communications interventriculaires ne sont réellement
diagnostiquées que si elles sont complexes, associées à
d’autres anomalies cardiaques ou extracardiaques. On peut considérer
que 7 à 10 % de l’ensemble des enfants atteints de communications interventriculaires
qui nécessiteront des mesures de surveillance ou de traitement ont eu
leur affection détectée avant la naissance. Ce taux s’élève
à 20 % environ en cas de canal atrioventriculaire, et est inférieur
à 5 % en cas de localisation périmembraneuse isolée. Ce
point est préoccupant si on garde en mémoire que les défauts
septaux périmembraneux et atrioventriculaires constituent un signe d’appel
efficace des anomalies chromosomiques mais est en grande partie secondaire à
leurs variations anatomiques de sévérités en faisant des
cardiopathies réparables mais parfois peu remaniées d’après
la coupe de référence « des quatre cavités ».Nous avons
l’occasion de diagnostiquer de plus en plus fréquemment des coarctations
de l’aorte à partir de disproportions des dimensions des cavités
ventriculaires mais surtout des artères pulmonaire et aorte. Une disproportion
supérieure à 200 % est très suggestive d’un développement
de coarctation de l’aorte. Supérieure à 150 %, elle invite à
orienter le nouveau-né vers une vérification néonatale
du maintien de la perméabilité de la crosse de l’aorte lors de
la fermeture du canal artériel au risque de diminuer la spécificité
de l’examen échocardiographique, ce qui doit être expliqué
calmement aux parents en insistant sur la particularité de cet organe
ftal et évolutif qu’est l’isthme aortique. Néammoins, les coarctations
de l’aorte ne sont aisémment détectables que si elles s’insèrent
au sein de malformations plus complexes telles les formes incomplètes
d’hypoplasie du cur gauche ou les syndromes de coarctations où la découverte
d’une communication interventriculaire particulière (malalignement) ou
d’une large communication interventriculaire oriente à titre systématique
vers la vérification de la perméabilité de la crosse de
l’aorte avant et après la naissance.A l’heure actuelle, moins de 5 %
des coarctations isolées de l’aorte sont actuellement dépistées
avant la naissance.
En conclusion,
malgré quinze années d’évolution, la cardiologie prénatale
reste une spécialisation difficile. Etablir un diagnostic, approcher
un pronostic sont des approches souvent aléatoires et parfois conflictuelles.
On doit se rappeler que :– les parents souhaitent être informés
: le déficit diagnostique est reproché parfois agressivement en
cas de naissance d’un enfant atteint de malformation incurable ou d’une « perte
de chance ». Méconnaître en 1995 une cardiopathie intracardiaque
grave, altérant l’architecture du cur au point de ne pas être
curable, et ce malgré deux ou trois échographies, mène
de plus ou plus à une confrontation potentielle entre les parents et
leurs obstétriciens et échographistes.Une échographie bidimensionnelle
effectuée à un terme approprié, ni trop précoce
ni trop tardif, mène dans la plupart des cas à ces dépistages
pourvu que l’étude attentive des quatre cavités et des artères
soit incluse à l’examen de morphologie générale ftale,
de façon systématique :
– les résultats de la détection prénatale des cardiopathies
congénitales sont en voie d’amélioration mais restent globalements
imparfaits ;
– établir un pronostic et déterminer la meilleure attitude réclament
du temps, de la patience, et une parfaite collaboration entre tous les intervenants
: ceux qui détectent, ceux qui confirment, ceux qui connaissent les malformations
après la naissance et ceux qui les traitent. Il ne faut donc pas hésiter
à multiplier les contrôles et les confirmations : deux précautions
valent mieux qu’une : cette attitude est toujours comprise et approuvée
par les parents.
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