HPV et grossesse
interactions MST et infections à HPVJ.
M. BOHBOT
L'histoire naturelle de l'infection HPV est complexe. Le rôle
de cofacteurs favorisant tant l'acquisition de l'infection que
son évolution vers des états dysplasiques plus ou
moins sévères est indiscutable. Parmi ces co-facteurs,
d'autres agents responsables de MST sont impliqués et plus
particulièrement le HIV.
Rapport entre HIV ET HPV
La fréquence accrue des infections HPV chez les sujets
HIV+ est bien connue.
Quelques études récentes confirment cette constatation
: A Amsterdam [1], 212 prostituées toxicomanes ont été
suivies entre 1986 et 1992. Parmi elles, 59 étaient HIV+
et 153 HIV-. La comparaison de l'incidence des principales MST
dans les deux groupes a donné les résultats suivants
:- les sujets HIV+ avaient un risque élevé pour
l'herpès génital primaire (RR= 7,64) ;- l'herpès
récurrent (RR=8,33) et surtout les condylomes ano-génitaux
(RR=15,93).Par ailleurs le risque d'herpès génital
et de condylomes croissait avec la chute des CD4.Au Danemark [2],
entre 1990 et 1993, 27 120 hommes et 17 828 femmes consultant
une clinique MST ont été examinés. Les diagnostics
les plus fréquents étaient :
- condylomes ano-génitaux : 17 %, Chlamydia trachomatis
: 12 % chez les hommes ;
- candidose : 15 %, condylomes ano-génitaux : 13 %, Chlamydia
trachomatis : 12 %, Gardnerella vaginalis : 11 % chez les femmes.
Dans un second temps, un test de dépistage a été
pratiqué chez 73 % des hommes et 77 % des femmes. 1,2 %
des hommes et 0,5 % des femmes étaient HIV+. Parmi les
hommes HIV+ les infections sexuelles les plus fréquemment
retrouvées étaient :
- Condylomes ano-génitaux (34 %), gonococcies (21 %), herpès
génital (7 %), Chlamydia (6 %).
Parmi les femmes HIV+, les étiologies les plus fréquemment
retrouvées étaient :
- Gardnerella (17 %), Condylomes (14 %), Chlamydia (11 %) et candidoses
(11 %).
Une autre étude danoise [3] comparant deux séries
de femmes, l'une HIV + (81 femmes) et líautre HIV - (70
femmes) montre que l'incidence des HPV (détectés
par PCR) est plus importante au niveau anal qu'au niveau cervical
(dans les deux groupes) et plus élevée dans les
deux sites chez les femmes HIV+ que chez les femmes HIV- (en cas
de détection par hybridation moléculaire). Par hybridation
moléculaire, le risque relatif de présence de HPV
au niveau du col entre le groupe HIV+ et le groupe HIV- est de
3,7 et de 10,8 au niveau anal. L'autre constatation rejoint les
résultats de l'étude précédente, c'est-à-dire
que l'incidence de l'infection par HPV croît avec la décroissance
du taux de CD4 circulant quelle que soit la méthode de
détection utilisée (PCR ou hybridation moléculaire).Enfin,
la fréquence des CIN est très élevée
dans la population HIV+, puisque, Schafer [4] dénombre
40 % de CIN dans une population berlinoise de femmes HIV+ avec
une incidence inversement proportionnelle au taux de CD4.
Rapport MST-infections HPV
Il faut distinguer 2 situations : d'une part l'influence des MST
sur la réceptivité des tissus génitaux aux
HPV et, d'autre part, la responsabilité des MST vis-à-vis
de la progression des lésions virales vers les états
dysplasiques. En fait, l'existence d'une MST traduit un comportement
sexuel à risque, facteur favorisant évidemment le
contage par des HPV. Mais, certaines MST, par leur action inflammatoire
au niveau du col, leur retentissement sur l'immunité locale
ou leur potentialisation de l'action oncogène de certains
HPV, fragilisent les muqueuses génitales, les rendant ainsi
plus perméables aux HPV et favorisant le développement
de lésions dysplasiques.
Plusieurs travaux ont permis de faire le point sur le rôle
direct de germes responsables de MST, autres que les HPV, dans
le déclenchement de cancers du col. Ce rôle est extrêmement
limité.
Par exemple, Paavonen [5] trouve sur un suivi de plus de 500 000
femmes nordiques pendant plus de 20 ans, une relation nette entre
antécédents de HPV16 et cancer du col (OR=2,8) mais
faible entre antécédents d'infection génitale
à Chlamydia trachomatis et cancer du col (OR=1,7).En Ouganda,
une Ètude contrôlée concernant 34 cas de cancers
cervicaux a révélé une présence de
DNA HPV 16 ou 18 dans 50 % des tumeurs et une association significative
avec la présence díanticorps anti-Herpes Simplex
Virus (HSV), anti-Cytomégalovirus (CMV), anti-Epstein Barr
virus (EBV) et anti-Chlamydia trachomatis.
En 1988, Kjaer et al [6] intrigués par une incidence du
cancer du col 5,7 fois plus importante au Groenland qu'au Danemark
trouve une séroprévalence HSV2 2,4 fois plus importante
au Groenland qu'au Danemark suggérant une action favorisante
de l'infection herpétique dans le déclenchement
du cancer cervical.
En 1992, Hildesheim et al [7] a montré dans une population
sud-américaine que le risque de développer un cancer
du col était de 1,2 pour les femmes seulement porteuse
d'anticorps anti-HSV2, de 4,3 pour les femmes seulement porteuses
d'anticorps anti-HPV 16/18 et de 8,8 pour les femmes porteuses
d'anticorps anti-HSV2 et anti-HPV 16/18. Ces résultats
sont en faveur díun effet synergique des virus HSV2 et
HPV dans le déclenchement des cancers cervicaux.
Ainsi, certains agents responsables de MST, comme HSV2 et dans
une moindre mesure Chlamydia trachomatis pourraient avoir une
action favorisant l'oncogénicité des HPV à
haut pouvoir transformant. En ce qui concerne le HIV, la fréquence
des infections associées à HPV et des lésions
dysplasiques incite à préconiser une surveillance
régulière clinique et cytologique 2 fois par an
des sujets HIV+.
En revanche, aucun agent responsable, autre que HPV n'a pu être
directement incriminé dans la genèse de cancers
cervicaux.
BIBLIOGRAPHIE
[1] FENNEMA JSA et al : Hiv, sexually transmitted diseases and
gynaecologic disorders in women : strongly increased risk for
genital herpes and warts among HIV-infected prostitutes in Amsteram.
In Proceedings of 11th meeting of the International Society for
STD research, 1995.
[2] Smith E. et al : Patterns of sexuality transmetted diseases
in relation to HIV infectoin and behaviour among STD clinic attenders
in Denmark.In Proceedings of 11th meeting of the International
Society for STD research, 1995.
[3] Smith E. et al : High prevalence of HPV infection in cervix
and anus among HIV-infected and uninfected women in Denmark. In
Proceedings of 11th meeting of the International Society for STD
research, 1995.
[4] Lacey C. : Assessment of exposure to sexuality transmitted
agents other than human papilloma virus. In The Epidemiology of
Cervical Cancer and Human Papilloma Virus. Ed Munoz N, Bosch FX,
Shah KV and Meheus A. Lyon, Intern. Agency for Research on Cancer.
IARC, pp 93-104, 1992.
[5] Paavonen J. and al. : Serological diagnosis of infection swith
HPV & other STD agents and the risk of cervical cancer - 20
years after. In Proceedings of 11th meeting of the International
Society for STD research, 1995.
[6] Kjaër SK. and al. : Human papilloma virus, herpes simplex
virus and cervical cancer incidence in Greenland and Denmark.
A population based cross-sectional study. Int J Cancer, 41, 518-24,
1988.
[7] Hildesheim A. : Herpes simplex virus type 2 : a possible interaction
with human pipilloma virus types 16/18 in the development of invasive
cervical cancer. Int J Cancer, 1992.
M. BOHBOT Institut Alfred Fournier, 25, bd Saint-Jacques, 75680
Paris Cedex 14.
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