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Hellp
et corticosteroides
J.F. Brichant
Service Universitaire
d'Anesthésie-Réanimation, CHR de la Citadelle,
CHU de Liège, 4000 Liège, Belgique
Si les
anomalies biologiques caractérisant le HELLP syndrome ont été décrites chez
une femme enceinte il y a près d'un demi siècle, c'est en 1982 que Weinstein
utilisait pour la première fois l'acronyme HELLP syndrome [1]. Ce syndrome associe
chez une femme enceinte hémolyse, élévation des enzymes hépatiques et thrombopénie.
Bien que décrit initialement comme une complication de la prééclampsie, ce syndrome
a également été rapporté en l'absence de signes de prééclampsie : hypertension,
protéinurie et ou oedèmes [2]. Il survient au cours de la deuxième moitié du
postpartum ou, moins fréquemment (30 % des cas), en postpartum. L'incidence
de ce syndrome serait de 0,11 % des naissances vivantes. Il surviendrait chez
20 % des femmes souffrant d'une prééclampsie sévère et chez 10 % des éclamptiques
[3]. La mortalité maternelle serait de 0 à 4 % tandis que la mortalité périnatale
dépend de l'âge gestationnel à la naissance et varie entre 5 et 20 % [2-7].
En raison de ce risque maternel et néonatal, plusieurs auteurs recommandent
une interruption rapide de la grossesse [1, 4, 8]. Ceci n'interdit cependant
pas d'envisager un accouchement par voie basse si le col est suffisamment mûr
pour permettre une induction. D'autres proposent qu'en présence d'une immaturité
ftale, et en l'absence de danger imminent pour la maman, l'accouchement soit
retardé de 24 à 48 heures afin d'administrer des corticoïdes fluorés favorisant
la maturation pulmonaire ftale [8]. Ceci ne peut cependant être entrepris que
sous une surveillance continue de la mère et du ftus. Dans un certain nombre
de cas où la grossesse est poursuivie (30 %), les anomalies biologiques caractéristiques
du HELLP syndrome s'amendent, voire se normalisent [7]. Il faut cependant reconnaître
que lorsque ce traitement conservateur est choisi, la grossesse n'est généralement
que faiblement prolongée (en moyenne 3 jours) et la mortalité périnatale est
de 20 % [7].
D'autres études confirment qu'il n'est pas indispensable d'interrompre immédiatement
toute grossesse associée à un HELLP syndrome [5]. De nombreux rapports de cas
et plusieurs études rétro- ou prospectives suggèrent l'administration de corticoïdes
pour accélérer la maturation ftale chez des femmes présentant un HELLP syndrome,
est associée à une amélioration significative de cette maladie. Dès 1976, Goodlin
rapportait qu'il était possible de corriger la thrombopénie des femmes prééclamptiques
présentant une hypoplaquettose [9]. Depuis, plusieurs auteurs ont rapporté une
amélioration du HELLP syndrome lors de l'administration de corticoïdes pour
améliorer le pronostic néonatal. Ces observations sont confirmées par plusieurs
études rétro- ou prospectives. La première étude, rétrospective, montre que
l'administration de corticoïdes à une femme présentant un HELPP syndrome s'accompagne
d'une correction, voire d'une normalisation de la numération plaquettaire, et
d'une stabilisation ou d'une diminution des taux sériques de LDH, TGO et TGP
[10]. Ces résultats sont confirmés par des études prospectives qui démontrent
que de hautes doses de corticostéroïdes permettent de stabiliser la maladie
et d'améliorer significativement les paramètres cliniques et biologiques caractérisant
le HELLP syndrome [11, 12, 13]. L'administration postportale de corticostéroïdes
s'accompagne elle aussi d'une correction plus rapide du HELLP syndrome [14,
15]. L'administration de dexaméthasone à des accouchées présentant un HELLP
syndrome, non seulement accélère la correction des signes biologiques du HELLP
syndrome, mais aussi raccourcit la maladie, accélère la guérison et diminue
la morbidité [16].
Au cours de ces études, les corticoïdes utilisés ont été soit de la bétaméthasone,
soit de la dexaméthasone. Le traitement le plus efficace serait l'administration
intramusculaire de deux doses de 12 mg de bétaméthasone injectées à 12 h d'intervalle
[12]. Une étude récente suggère que l'administration quotidienne de 40 mg de
méthylprednisolone serait elle aussi efficace dans la stabilisation et/ou le
traitement du HELLP syndrome [13].
Les mécanismes de l'amélioration ou de la correction du HELLP syndrome par les
corticoïdes n'ont pas été déterminées jusqu'à présent. Plusieurs hypothèses
ont été avancées. Celles-ci comprennent la modification de mécanismes immunitaires,
un mécanisme endothélial, une modification de l'activation ou de l'adhésivité
plaquettaire, des modifications rhéologiques.
En résumé, l'administration de corticoïdes à des femmes présentant un HELLP
syndrome est bénéfique. Non seulement, ils améliorent le pronostic néonatal
mais aussi stabilisent ou corrigent, au moins transitoirement, le HELLP syndrome.
La prolongation de la grossesse et l'administration de corticoïdes ne seront
cependant pas envisagées si le pronostic néonatal est bon en interrompant immédiatement
la grossesse. Toute prolongation de la grossesse chez des femmes atteintes d'un
HELLP syndrome doit se faire sous une surveillance stricte tant de la femme
que du ftus dans des unités spécialisées.
Références
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of hemolysis, elevated liver enzymes, and low platelet count : a severe consequence
of hypertension in pregnancy". Am J Obstet Gynecol 1982, 142 : 159-167
- Aarnoudse JG, Houthoff
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study". Br J Obstet Gynaecol 1986, 93 : 145-155
- Sibai BM, Ramadan
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and perinatal outcome after expectant management of the HELLP syndrome compared
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- Sibai BM. "The
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- Goodlin RC. "Severe
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