CHOIX
RAISONNE DES EXAMENS BIOLOGIQUES
EN PATHOLOGIE AUTO IMMUNE CHEZ LA FEMME
Olivier
BLETRY*, Virginia MOLINA**
*
Service de Médecine Interne - Hôpital Foch - 40 rue Worth - BP
36 -
92151 SURESNES CEDEX
**
Service de Médecine Interne et Néphrologie - Hôpital Ambroise
Paré
9 av Charles de Gaulle - 92104 BOULOGNE BILLANCOURT
Nous
nous proposons de circonscrire ce très vaste sujet en nous intéressant
essentiellement à des connectivites relativement fréquentes (la
prévalence pouvant atteindre 2 % de la population pour certaines d'entre
elles), plus fréquentes chez la femme que chez l'homme, et pouvant poser
des problèmes particuliers au cours de la grossesse : le lupus érythémateux
systémique (LES), le syndrome des antiphospholipides (SAPL), le syndrome
de Gougerot Sjögren (GS), la polyarthrite rhumatoïde (PR). Nous y
ajouterons les thyroïdites auto-immunes qui peuvent également poser
des problèmes pendant la grossesse.
Par ailleurs, nous aborderons rapidement les colites inflammatoires, en raison
de la découverte de marqueurs immunologiques de la rectocolite hémorragique
et de la maladie de Crohn.
I
- Quels sont les examens biologiques nécessaires et suffisants pour diagnostiquer
et suivre un LES (et un SAPL), un GS, une PR ?
I.1.-
Lupus érythémateux systémique et SAPL.
1.
Eruption malaire en aile de papillon (vespertilio)
2. Lupus discoïde
3. Photosensibilité
4. Ulcérations buccales ou nasopharyngées
5. Polyarthrite non érosive
6. Pleurésie et/ou péricardite
7. Protéinurie (> 0,50 g/24 heures) et/ou cylindrurie
8. Convulsions et/ou psychose
9. Anémie hémolytique et/ou leucopénie et/ou lymphopénie
(< 1 500/mm3) et/ou thrombopénie (< 100 000/mm3)
10. Anticoagulant circulant et/ou anticorps anticardiolipine et/ou anticorps
anti ADN natif et/ou anticorps anti-Sm et/ou sérologie dissociée
du tréponème (VDRL + et TPHA -)
11. Titre élevé de facteurs antinucléaires.
|
Tableau
1 - Critères diagnostiques du LES
La modification récente des critères de l'American College of
Rheumatology pour le diagnostic de LES porte exclusivement sur des critères
biologiques immunologiques (critère 10 du tableau I). Ce critère
n° 10 a été modifié en raison de l'individualisation
en 1987 du syndrome des antiphospholipides (4). En effet, depuis de nombreuses
années on connaissait la possibilité de fausses sérologies
syphilitiques (Bordet Wassermann et autres réactions du complément
- utilisant des Ag lipidiques - positives, TPHA négatif) particulièrement
chez des jeunes femmes, et particulièrement chez des lupiques. On a ensuite
découvert dans les années 50 un anticoagulant circulant (allongement
du temps de céphaline activée non corrigé par d'adjonction
de plasma témoin) dit de type lupique car retrouvé dans la moitié
des cas au cours du LES. On s'est aperçu qu'il s'agissait d'un anticorps
(Ac) ayant une action anticoagulante in vitro, mais entraînant chez les
patientes un risque de thrombose. Cet anticoagulant circulant lupique s'observait
également chez des femmes faisant des gausses couches à répétition,
comme l'ont montré Mr SOULIER et Marie-Claire BOFFA en 1980. En 1983
Nigel HARRIS montrait que la fausse sérologie du tréponème
était liée à la présence d'un Ac dirigé contre
un phospholipide anionique, la cardiolipine.
Une
manifestation clinique parmi :
-
> ou = 1 thrombose vasculaire : artérielle, veineuse profonde,
capillaire confirmée par imagerie ou histologie
- complication(s) de la grossesse :
> ou = 3 avortements spontanés consécutifs inexpliqués
> ou = 1 mort ftale in utero après la 10e semaine de
gestation, inexpliquée, avec ftus de morphologie normale
> ou = 1 accouchement prématuré (avant la 34e semaine
de gestation) avec ftus de morphologie normale, par pré-éclampsie
sévère, éclampsie ou insuffisance placentaire
et
une anomalie biologiques à deux déterminations séparées
d'au moins 6 semaines parmi :
- anticoagulant circulant de type lupique
- anticorps anticardiolipine IgG ou IgM
|
Tableau
II : définition du SAPL
Cette découverte
permettait d'individualiser le SAPL quatre ans plus tard (tableau II) et du
même coup réglait le problème des LES avec Ac antinucléaires
(AAN) négatifs (3) qui représentaient environ 10 à 15 %
de nos LES. En effet, le SAPL est dit primaire dans la moitié des cas
et lorsqu'il est secondaire, il est le plus souvent associé à
un LES. Ces fameux LES avec AAN négatifs étaient en fait des SAPL
primaires (12).
On peut admettre actuellement qu'il n'y a pas de lupus sans AAN et qu'il est
inutile de rechercher des Ac plus spécifiques du lupus chez les patientes
dépourvues d'AAN. Ces Ac spécifiques sont d'une part l'Ac anti
Sm qui est un sous type d'Ac dirigés contre des antigènes (Ag)
nucléaires solubles, encore appelés anti ENA ou anti ECT, d'autre
part l'Ac anti ADN natif. Les deux méthodes fiables de recherche de cet
Ac sont l'immunofluorescence indirecte sur chritidia luciliae (parasite flagellé
dont le kinétoplasme est très riche en ADN) et le test radio-immunologique
de Farr qui a l'avantage de quantifier le taux d'Ac anti ADN circulants. La
sensibilité du test de Farr est de 60 à 80 % selon les études,
et il existe une assez bonne corrélation entre l'élévation
de cet Ac ADN natif et l'activité de la maladie mesurée par les
scores SLAM ou SLEDAI.
Plus récemment on a mis au point une méthode de détection
des Ac antinucléosome. Le nucléosome est constitué d'un
corps protéique formé par l'association de 4 paires d'histones
(H2A, H2B, H3, H4), autour duquel s'enroule un ADN double brin, cet ensemble
étant stabilisé par l'histone H1. Au sein de la chromatine, les
nucléosomes sont reliés entre eux par des fragments d'ADN de liaison.
Des nucléosomes libres ont pu être obtenus en faisant agir des
endonucléases sur des noyaux isolés, ce qui a permis la mise en
évidence d'Ac antinucléosome par test Elisa, le résultat
du test étant exprimé en unités arbitraires (seuil de positivité
: 10 unités). A un stade précoce du LES, on peut mettre en évidence
des Ac spécifiques antinucléosome qui ne reconnaissent pas l'ADN
ou les histones pris isolément. Ce test est donc plus précoce
et plus sensible que la recherche d'Ac anti ADN. Les Ac antinucléosome
sont retrouvés chez 80 à 90 % des lupiques, ils sont corrélés
à l'activité de la maladie mesurée par le SLEDAI et à
la présence d'une glomérulonéphrite lupique (2).
Le tableau III résume les recherches d'Ac nécessaires pour le
diagnostic du LES et/ou de SAPL
Tableau
III : Anticorps permettant le diagnostic de LES et de SAPL
D'autres auto-anticorps peuvent être recherchés au cours du LES.
Ce sont d'une part des Ac anti-érythrocytaires (test de coombs) permettant
d'affirmer la nature auto-immune d'une anémie hémolytique, d'autre
part une variété d'Ac anti ECT, les Ac anti SSA (SS pour Sicca
Syndrome). Les Ac anti SSA ne sont pas spécifiques du LES, on les retrouve
au cours d'autres connectivites, et en particulier au cours du GS.
Au cours du SAPL, lorsque la suspicion diagnostique est forte, alors que la
recherche d'Ac anticardiolipine et d'anticoagulant circulant lupique est négative,
on peut rechercher des Ac anti b2 glycoprotéine I ou apoprotéine
H (cofacteur des Ac dirigés contre les phospholipides anioniques) et
aussi des Ac dirigés contre des phospholipides neutres comme la phosphatidyl
éthanolamine.
La surveillance biologique d'un LES nécessite des examens sanguins et
urinaires résumés dans le tableau IV.
Dans
le sang
Hémogramme,
plaquettes
Créatininémie (+ glycémie sous corticoïdes)
VS, CRP, fibrine
Ac anti ADN
Complément total, C3, C4
Dans
les urines
ECBU
Protéinurie des 24 heures
|
Tableau
IV : surveillance biologique du LES
En cas d'anémie ou de syndrome inflammatoire, il faut doser d'autres
protéines de l'inflammation : l'haptoglobine et l'orosomucoïde.
Si les deux sont élevées, c'est en faveur d'une activité
du LES. Si l'haptoglobine est basse et l'orosomucoïde normal ou élevé,
une hémolyse est probable. Si l'orosomucoïde est abaissé
alors que l'haptoglobine est normale ou élevée, un syndrome néphrotique
est probable. La diminution du C4 est évocatrice d'une activité
de la maladie lupique, mais certains patients ont un C4 en permanence abaissé
en raison d'un déficit constitutionnel en C4, ce que montrera l'enquête
familiale.
Si la protéinurie est supérieure à 0,50 g/24 heures il
faut faire une électrophorèse des protides à la recherche
d'un syndrome néphrotique et il faut envisager une biopsie rénale.
I.
2 - Quels sont les examens biologiques à prévoir chez une femme
enceinte suivie pour LES et pour SAPL.
En
ce qui concerne la mère, il faut toujours craindre un risque de poussée
lupique, principalement au cours du dernier trimestre et des premiers mois post
partum. Il paraît prudent de réaliser toutes les 6 à 8 semaines
pendant le cours de la grossesse les examens résumés dans le tableau
V.
1) En début de grossesse
Ac anti SS-A, Ac anti SS-B
Ac anticardiolipine, anticoagulant circulant
Lupique
2)
Toutes les 6 à 8 semaines
hémogramme
+ plaquettes
Créatininémie + uricémie
glycémie
haptoglobine
LDH
transaminases
|
protéinurie
ECBU
|
Tableau
V : Examens biologiques utiles pour la surveillance de la grossesse
chez une lupique
L'haptoglobine est pratiquement la seule protéine de l'inflammation mesurable
pendant la grossesse (les autres sont physiologiquement élevées).
L'augmentation des transaminases doit faire craindre un HELPP syndrome, complication
possible du LES et du SAPL.
En ce qui concerne le ftus, il faut mesurer en tout début de grossesse
chez la mère les Ac anticardiolipine et le temps de céphaline
activé d'une part, les Ac anti ECT d'autre part.
S'il existe des Ac antiphospholipides et s'il s'agit d'une première grossesse,
la mère a une chance sur deux de mener spontanément cette grossesse
à terme (par prudence nous donnons 100 mg d'aspirine par jour, son innocuité
pour le ftus ayant été prouvée).
Si la mère a déjà eu une perte foetale (précoce,
ou surtout tardive) elle a moins de 5 % de chance de mener spontanément
cette nouvelle grossesse à terme (3). Sous aspirine en monothérapie
(75 à 150 mg par jour) elle a 40 % de chances de mener cette nouvelle
grossesse à terme (beaucoup plus pour certaines équipes comme
celle de Silver). Sous Aspirine + Héparine sous cutanée les chances
avoisinent 80 % (6). En cas d'échec de cette association on peut faire
appel aux corticoïdes, et/ou aux immunoglobulines intraveineuses.
Si la recherche d'Ac anti ECT est positive, il faut les typer et rechercher
en particulier des Ac anti SS-A et anti SS-B, car la présence de ces
Ac expose à la survenue d'un bloc auriculo-ventriculaire (BAV) congénital
et/ou d'un lupus néonatal. En fait les lupiques ne représentent
qu'un faible pourcentage (3 à 26 % selon les études) des mères
d'enfants ayant un BAV congénital (voir chapitre II).
I.
3 - Syndrome de Gougerot-Sjogren.
Les
critères du GS comportent la sécheresse oculaire, la sécheresse
buccale, la présence d'infiltrations lymphocytaires en biopsie labiale
(score de Chisholm 3 ou 4) et des anomalies biologiques immunologiques. Celles-ci
comportent la présence d'AAN et souvent des Ac anti ECT : l'anti SSA
et l'anti SSB. Si ces Ac sont absents alors qu'il existe un syndrome sec et
des infiltrats lymphocytaires en biopsie labiale , il est légitime de
chercher une étiologie virale au syndrome sec : VIH, HTLV1, et surtout
HCV. La sérologie HCV est positive dans 10 à 15 % des cas de syndrome
sec ; on peut dans ce cas trouver des Ac anticentromères, mais pas d'Ac
anti ECT.
La surveillance biologique est justifiée par la crainte de la survenue
d'un lymphome non hodgkinien (plus de 40 fois plus fréquent au cours
du GS que dans la population générale).
Les examens recommandés sont indiqués dans le tableau VI. Il est
raisonnable de les effectuer une à deux fois par an en cas de GS certain
(avec biologie caractéristique et biopsie labiale positive).
Hémogramme
+ plaquettes
CRP + fibrine
LDH + b2 microglobuline
Electrophorèse des protides
Dosage pondéral des immunoglobulines
Facteur rhumatoïde
CH50 + C3 + C4
|
Tableau
VI : surveillance biologique d'un GS
I.
4 - Polyarthrite rhumatoïde (PR)
Il
est facile de porter avec certitude le diagnostic de PR après quelques
années d'évolution sur la conjonction d'anomalies radiologiques
caractéristiques des mains ou des pieds et sur la présence du
facteur rhumatoïde. En revanche au cours de la première année
il est souvent bien difficile d'affirmer le diagnostic lorsque les radiographies
sont encore normales et la recherche de facteur rhumatoïde encore négative.
Il est alors pertinent de pratiquer la sérologie de l'hépatite
B et surtout du parvovirus B19, pour vérifier que cette polyarthrite
d'apparition récente n'est pas d'origine virale. Si ces sérologies
sont négatives, il faut rechercher des marqueurs précoces de la
PR dont les méthodes de détection et les dénominations
on beaucoup varié depuis 5 ans.
On a mis en évidence depuis plus de 20 ans au cours des PR avérées
des Ac antipérinucléaires, puis des Ac antikératine, puis
des AC anti Sa. La sensibilité de ces Ac pour le diagnostic de PR varie
entre 43 % et 72 %, leur spécificité est supérieure à
90 % et peut avoisiner 100 % (tableau III).
On sait maintenant que ces Ac font partie d'une même famille d'Ac spécifiques
de la PR, dits Ac anti filaggrine, et qu'ils réagissent avec des protéines
déiminées, en particulier la fibrine déposée dans
la synoviale des PR (9). On a également montré que la citrulline
est un constituant essentiel des déterminants antigéniques reconnus
par ces auto Ac (8).
|
Sensibilité
|
Spécificité
|
Ac
antipérinucléaires |
72
%
|
92
%
|
Ac
anti kératine |
43
%
|
99
%
|
Ac
anti Sa |
43
%
|
99
%
|
Tableau
VII : valeur diagnostique des auto-Ac recherchés aux stades précoces
de la PR (avec facteur rhumatoïde négatif) (d'après Serre).
En pratique, on demande actuellement pour étayer le diagnostic de PR
à un stade précoce la recherche d'Ac anti kératine, mais
peut-être cette recherche sera-t-elle remplacée à court
terme par la recherche d'Ac anti filaggrine déiminée ou d'Ac anti
citrulline.
II - Ac anti SSA et risque foetal (11)
Il
y a une vingtaine d'années on s'est aperçu que la plupart des
mères de nouveaux-nés ayant un BAV congénital étaient
porteuses d'Ac anti SSA, encore appelés Ac anti Ro. La somme considérable
de travaux publiée depuis a permis de préciser le statut de ces
mères et le risque pour le foetus ou le nouveau-né.
En ce qui concerne les mères, trois grandes études publiées
entre 1994 et 2001 ont montré qu'une minorité avait un LES (3
à 26 %) ou un GS (2 % à 14 %). Environ 20 % avaient une connectivite
inclassée. En fait, la majorité de ces mères (un tiers
à deux tiers des cas selon l'étude) étaient asymptomatiques
et le portage de l'Ac anti SS-A était découvert a posteriori,
une fois fait le diagnostic de BAV chez le nouveau-né. Beaucoup de ces
mères sont également porteuses d'un Ac anti SS-B (encore appelé
anti la) surtout si elles ont un GS avéré, mais il est exceptionnel
qu'on trouve un Ac anti SS-B isolé chez les mères de BAV congénitaux.
En ce qui concerne le BAV congénital, il faut distinguer les BAV sévères
constatés dès la naissance et nécessitant le plus souvent
la mise en place rapide d'un cardiostimulateur, et le BAV des petits enfants,
constatés après le 3ème mois de vie. Dans le premier cas
on trouve presque toujours des Ac anti SS-A chez la mère. Dans le second
cas la recherche est presque toujours négative. On sait que le tissu
de conduction foetal est formé dès la 8e semaine de grossesse
et que les Ac anti SS-A d'isotype IgG passent la barrière placentaire
à partir de la 16e semaine de grossesse. Le BAV foetal apparaît
donc habituellement entre la 17e et la 23e semaine de grossesse. On n'explique
pas pourquoi le BAV congénital apparaît chez moins de 3 % des mères
porteuses d'Ac anti SS-A et pourquoi la même mère peut avoir, lors
de deux grossesses successives, un enfant porteur d'un BAV congénital
et un enfant sain. Plus encore, on a décrit le cas de deux jumeaux hétérozygotes,
ayant le même groupe HLA et le même génotype du C4, dont
l'un avait un cur sain et l'autre un BAV congénital nécessitant
un cardiostimulateur. On a dit qu'il était utile de préciser la
cible antigénique des Ac anti SS-A (dirigés contre un Ag de 52
kd ou un Ag de 48 kd) et que les mères les plus à risques étaient
celles porteuses d'un Ac dirigé contre l'Ag de 52 kd ; cette distinction
paraît maintenant inutile. Il semble qu'une corticothérapie préventive
par la prednisone ou la prednisolone (qui ne passent pas la barrière
placentaire) diminue effectivement le risque de BAV congénital. En revanche,
le traitement curatif, une fois le BAV installé, même en utilisant
la betaméthasone, est le plus souvent un échec (10)
En dehors du BAV congénital on peut observer au cours des premiers mois
de vie chez ces enfants dont la mère est porteuse d'un anti SS-A, un
lupus néonatal avec une éruption cutanée et parfois une
atteinte biologique hépatique. Ces anomalies régressent habituellement
en 6 ou 8 mois, lorsque l'enfant a perdu les Ac anti SS-A transmis passivement
par sa mère.
III
- Thyroïdites auto-immunes et grossesse (1)
Il
est fréquent d'observer une dysfonction thyroïdienne pendant la
grossesse (surtout le premier trimestre) et surtout au décours de l'accouchement.
La prévalence des dysfonctions thyroïdiennes post-partum est d'environ
5 % ; elles sont particulièrement fréquentes chez les diabétiques
de type I.
III.
1 - Au cours de la grossesse
La
situation la plus fréquente est celle d'une hyperthyroïdie du début
de grossesse qui peut être en rapport avec une poussée de maladie
de Basedow ou bien avec une thyrotoxicose gestationnelle (liée à
une action TSH-like de la b HCG, à la suite d'un clivage d'une partie
de la molécule). La recherche d'Ac antithyroïdiens (anti thyropéroxydase
surtout) et d'Ac anti récepteur de la TSH est positive en cas de Basedow,
négative en cas de thyrotoxicose gestationnelle. Il est important de
faire la distinction car il existe un risque accru de malformations congénitales,
d'hypotrophie ftale et de mortalité néo-natale dans le cas
du Basedow ; de plus, cette pathologie auto-immune nécessite un traitement
par antithyroïdiens de synthèse, de préférence le
propylthiouracile qui passe moins la barrière placentaire que les autres,
en laissant la patiente en légère hyperthyroïdie.
Quant aux patientes ayant une thyroïdite de Hashimoto, elles ont des difficultés
à être enceintes en cas d'hypothyroïdie non traitée
; mais si la grossesse débute il n'est habituellement pas utile de renforcer
l'hormonothérapie substitutive par le Levothyrox et la fonction thyroïdienne
des Hashimoto peut même se normaliser en fin de grossesse. Il faut cependant
se méfier d'une diminution de la conversion périphérique
de T4 et T3 pendant la grossesse, et surtout d'une exacerbation du Hashimoto
en post partum.
II.
2 - Thyroïdites auto-immunes du post partum.
Au
décours de l'accouchement on peut donc observer une poussée de
Basedow ou de Hashimoto (dû à un rebond immunitaire avec exacerbation
des anomalies de l'immunité cellulaire et de la synthèse d'auto
Ac qui s'étaient plus ou moins corrigés pendant la grossesse).
On peut aussi découvrir à cette occasion un Basedow ou un Hashimoto,
chez des patientes qui avaient une thyroïdite auto-immune infraclinique
pendant la grossesse. Il paraît donc utile de rechercher des Ac antithyroïdiens
(en particulier anti TPO) en début de grossesse. S'ils sont positifs,
il faudra se méfier d'une dysfonction thyroïdienne post partum (qui
survient chez 60 à 70 % des femmes ayant des Ac antithyroïdiens
en début de grossesse). S'ils sont très élevés il
faudra rechercher des Ac anti récepteur de la TSH et s'ils existent on
a deux chances sur trois de voir apparaître un Basedow en post-partum.
Après l'accouchement, et si la patiente n'allaite pas on peut préciser
le fonctionnement de la thyroïde en appréciant la captation de l'iode
131 lors d'une scintigraphie thyroïdienne.
En résumé, le tableau VIII indique les examens à faire
pendant la grossesse, selon que la thyroïdite auto immune est connue ou
méconnue, et après la grossesse en cas de découverte d'une
dysfonction thyroïdienne.
Tableau VIII : examens utiles à l'exploration des dysfonctions
thyroïdiennes per et post partum
IV
- Progrès biologiques dans le diagnostic des colites inflammatoires.
La rectocolite ulcéro-hémorragique (RCH) et la maladie de Crohn
sont en principe deux entités clairement séparées. Mais
lorsque les lésions sont limitées au colon, qu'il n'y a pas de
rectorragies, et qu'il n'y a pas de manifestations extradigestives, la distinction
entre les deux affections peut être difficile à faire et pour 10
à 15 % des patients la clinique, la coloscopie, les biopsies et même
l'examen d'une pièce de colectomie ne permettent pas de trancher. Dans
ces cas difficiles la biologie peut être une aide précieuse.
On sait depuis une vingtaine d'années que des Ac anticytoplasme des polynucléaires
s'observent dans 60 à 80 % des cas de RCH, avec un aspect périnucléaire
de la fluorescence (p ANCA) . Le tableau VIII rappelle les principales maladies
systémiques au cours desquelles on peut trouver des ANCA.
I
- Prévalence > ou = 80 %
|
Glomérulonéphrite
rapidement progressive (anti PR3 ou anti MPO)
Maladie de Wegener (anti PR3)
Polyangéite microscopique (plutôt anti MPO)
|
II
- Prévalence entre 20 et 70 % des cas |
Angéite
de Churg et Strauss (anti PR3)
Polyarthrite rhumatoïde
Rectocolite ulcéro-hémorragique
Cholangite sclérosante
Hépatites auto-immunes, cirrhose biliaire primitive |
III
- Prévalence < 20 % |
Médicaments
(antithyroïdiens, D pénicillamine,…)
Endocardite d'Osler, périartérite noueuse |
PR3
= sérine protéase 3 ; MPO = myélopéroxydase
Tableau IX : Pathologies s'accompagnant d'ANCA dans plus de 10 % des cas
Depuis un peu plus de 10 ans, on a décrit la présence d'Ac anti
Saccharomyces cerevisiae (ASCA) au cours de la maladie de Crohn. La sensibilité
de cette technique pour le diagnostic de Crohn varie entre 40 et 75 % selon
les techniques utilisées. On les trouve essentiellement dans les formes
de la maladie intéressant le grêle. Depuis trois ans, on a montré
à la fois chez l'enfant (7) et chez l'adulte (5) que le couplage de la
recherche d'ANCA et d'ASCA permettait de distinguer RCH et Crohn avec une très
bonne spécificité (tableau X).
Rappelons que cette distinction peut être particulièrement utile
pendant la grossesse, car on sait que les poussées de RCH sont fréquentes
au cours ou au décours de la grossesse et peuvent conduire à envisager
une colectomie totale.
Malheureusement les ASCA s'observent essentiellement dans les Crohn avec atteinte
prédominante du grêle alors que ce sont les Crohn coliques qui
posent un problème de diagnostic différentiel avec la RCH.
Test
|
RCH
n = 101
|
Crohn
n = 100
|
Sensibilité
|
Spécificité
|
pANCA
+ et ASCA - |
58
|
3
|
57
|
97
|
pANCA
- et ASCA + |
3
|
49
|
49
|
97
|
Tableau
X :
Sensibilité et spécificité des recherches couplées
de p ANCA et d'ASCA pour le diagnostic de RCH et de Crohn d'après Quinton
(5).
Mots
clés : auto-immunité - grossesse - anticorps antinucléaires
- antiphospholipides - thyroïdites auto-immunes - polyarthrite rhumatoïde
- colites inflammatoires.
BIBLIOGRAPHIE
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