Les contraceptions difficiles
S. CHRISTIN-MAITRE
Cinq à dix pourcents des femmes ne peuvent
bénéficier des contraceptions estro-progestatives « classiques »,
la contraception estroprogestative représentant cependant le type de contraception
réversible le plus efficace et le mieux toléré. La prescription de
la contraception est donc difficile chez les femmes qui ne peuvent utiliser des
estrogènes. La deuxième difficulté se présente essentiellement
chez les femmes dont la compliance est difficile. La troisième difficulté
est le groupe des femmes après l'âge de 35 ans.
Quelles sont les femmes qui présentent
des contre-indications aux estro-progestatifs ? Que leur proposer ?
Les contre-indications relatives ou
absolues des estrogènes sont :
- les dyslipidémies,
- les diabétiques de type
1 et de type 2,
- l'adénome à prolactine,
- le tabac,
- l'hypertension artérielle,
- les troubles cardiovasculaires
à type de coronaropathie ou d'accident vasculaire cérébraux,
- les migraines,
- les troubles de la coagulation,
susceptibles d'induire des phlébites,
- le lupus,
- l'endométriose sévère,
- les cancers hormonodépendant.s
Dans les dyslipidémies, le taux
de triglycérides est le plus préoccupant pour prescrire un estroprogestatif.
En effet, un taux avant la mise sous traitement, supérieur à 3 g/l contre-indique
la prescription des estroprogestatifs. En cas d'hypercholestérolémie,
un estroprogestatif peut être administré si la dyslipidémie est traitée
avec un taux de LDL cholestérol inférieur à 2 g/l. Sous traitement,
si le taux de cholestérol est supérieur à 3 g/l, la contraception
estroprogestative doit être arrêtée.
En cas de diabète, la nécessité
d'une contraception très efficace est nécessaire car les grossesses doivent
être planifiées chez les femmes ayant un diabète. Avant de prescrire
une contraception chez les diabétiques, il est nécessaire d'évaluer
le risque cardiovasculaire. Ce risque pour les diabétiques de type 2 est souvent
élevé que pour les jeunes diabétiques de type 1, car les patientes
sont souvent obèses et hypertendues. La durée d'évolution du diabète
dans la prise de décision vis-à-vis du type de contraception, est à
prendre en considération. L'effet des estroprogestatifs sur le métabolisme
glucidique n'est pas majeur. Si certaines études ont montré une légère
augmentation de l'insulinorésistance sous estroprogestatifs, les modifications
de la glycémie restent faibles. Ainsi, la contre-indication absolue de la contraception
estroprogestative de la patiente diabétique persiste si la patiente est mal
équilibrée mais ne doit pas être retenue à l'heure actuelle
de manière systématique.
L'adénome à prolactine lorsqu'il
s'agit d'un microadénome (inférieur à 10 mm de diamètre) n'est
plus une contre-indication absolue à la contraception estroprogestative. En
effet, les estroprogestatifs peuvent être administrés sous réserve
d'une mesure du taux de prolactine à 1 mois et à 2 mois pour voir s'il
existe une augmentation du taux de prolactine sous estrogènes. Par contre,
en cas de macroadénome, une contraception estroprogestative est contreindiquée.
Le tabagisme constitue un facteur de
risque majeur d'accident coronarien ou d'accident vasculaire chez les femmes sous
estroprogestatifs. Des études épidémiologiques ont évalué
que chez les femmes qui fument plus de 25 cigarettes par jour, le risque d'infarctus
du myocarde est multiplié par 30. Ce risque est particulièrement élevé
après l'âge de 35 ans.
La coronaropathie ou l'hypertension
sévère est une contre-indication aux estro-progestatifs.
Il est nécessaire d'être
vigilant vis-à-vis du nombre de facteur de risque cardiovasculaire chez
une patiente chez qui une contraception doit être prescrite.
Que prescrire ?
En cas de contre-indication des estrogènes,
les pilules faiblement dosées en estrogènes ne doivent pas être préférées
aux pilules plus fortement dosées. En effet, les risques de phlébite sont
de 20/100 000 années femme sous EP de deuxième génération de
30/100 000 années femme sous EP de troisième génération. Le
risque d'IDM est comparable.
Dans les cas de contre-indication aux
estrogènes, la contraception progestative pure peut être prescrite. Il
est nécessaire de distinguer les microprogestatifs des macroprogestatifs. Ces
derniers même s'ils sont largement utilisés, n'ont pas d'AMM pour la contraception.
Leur retentissement au long cours reste encore mal évalué. Les microprogestatifs
nécessitent une prise régulière quotidienne. Leur inconvénient
essentiel est la survenue de spottings. La compréhension des mécanismes
de saignement devrait permettre des améliorations dans la tolérance de
ce type de traitement.
Une autre solution en cas de contraception
difficile réside dans la contraception mécanique, en particulier par le
stérilet contenant de la progestérone.
Il ne faut pas oublier en cas de rapports
peu fréquents, la contraception du lendemain à base de progestatif, sans
estrogènes.
En cas de problèmes de compliance,
il est souhaitable de proposer une contraception à longue durée d'action.
Si les injections intramusculaires doivent être réservées aux femmes
présentant des troubles psychiatriques, les stérilets ou les implants
doivent être proposés chez les femmes ne souhaitant prendre des comprimés
de manière quotidienne.
Au total, environ 10 % des femmes présentent
des contre-indications aux estroprogestatifs. Dans ces cas, les progestatifs purs
peuvent être utilisés. Dans les années qui viennent, l'utilisation
de modulateurs de la progestérone pourra être envisagée. Les premiers
essais semblent très prometteurs. 362 S.
CHRISTIN-MAITRE LES
CONTRACEPTIONS DIFFICILES 363 |