Quels traitements préventifs de
l'ostéoporose en dehors du THS ?
M. BUHLER
Le THS a fait la preuve de son efficacité
à agir dans la prévention de l'ostéoporose post ménopausique
et dans la diminution du nombre de fracture.
Pour des raisons diverses, certaines
femmes ne prendront pas ce traitement, ou l'arrêteront rapidement.
Or l'efficacité du traitement
hormonal sur la prévention de la perte osseuse dépend de sa durée,
de la période pendant laquelle il est commencé et arrêté.
La prévention de la survenue de
l'ostéoporose commence dès le jeune âge.
Les aspects nutritionnels sont essentiels
et la formation osseuse est constante tout au long de la vie, 3 périodes précises
néanmoins sont à considérer :
• La période de croissance
de l'individu qui commence in utéro ;
• La période pubertaire
;
• Et la période post ménopausique.
Entre 20 et 50 ans environ, la masse
osseuse est stable, puis une période de perte osseuse rapide provoquera ,si
la masse osseuse de départ est faible, une ostéoporose survenant plus
ou moins tôt.
La prévention se situe donc au
moment de l'acquisition de cette masse osseuse, ensuite il convient d'essayer de
la perdre le moins possible.
Les facteurs communs à tous les
traitements de l'ostéoporose sont :
I - Règles diététiques
- Des apports suffisants en calcium
; vitamine D et protéines.
- Une évaluation de la consommation
d'alcool et de tabac.
II - Une activité physique
régulière, la prévention des chutes
Et si besoin :
III - Les traitements non hormonauxI
- Règles diététiques (1)
Apport en calcium (2)
Les aliments à base de lait (lait, fromages,
yaourts) sont la base indispensable du régime. Les besoins en calcium en 24
heures s'échelonnent entre 1 g et 1,50 g/jour. Un régime carencé
en laitages (par habitude, goût, peur de grossir, régime hypolipidique)
correspond à une dose journalière d'à peine 400 à 500 mg de
calcium/24 heures : 2 yaourts par jour correspondent à moins de 300 mg de calcium.
Les laitages écrémés
ou à 0 % de matière grasse contiennent autant de calcium que les produits
laitiers entiers ou demi-écrémés.
Le nombre de femmes carencées
en calcium avec une dose quotidienne inférieure à 500 mg/24 heures est
fréquent en particulier en milieu urbain.
Après la ménopause et plus
on avance en âge, il y a diminution de l'absorption intestinale du calcium,
altération de la fonction rénale.
Apport en vitamine D (3)
Les apports se font grâce à la peau
(action des rayons ultra-violets) et certains aliments (huile de poisson !, poisson,
jaune d'œuf ...). En région parisienne, la carence d'ensoleillement entraine
chez les femmes des déficits vitaminiques importants : les dosages du 25-OH
vitamine D3 montrent à la fin de l'hiver des chiffres inférieurs à
6 ng/ml (la normale étant entre 10 et 40).
L'utilisation de crème solaire
hyper protectrice, si elles protègent des effets nocifs du soleil sur la peau,
empêchent de même le soleil de jouer son rôle sur la production de
la vitamine D, non compensé par des apports supplémentaires.
Une vitamine D basse par diminution
de sa production ou de l'absorption intestinale va stimuler la sécrétion
de PTH, donc provoquer une augmentation du remodelage osseux et de la perte osseuse.
Dans certains pays, cette carence est
prévenue par un lait de consommation courante enrichie en vitamine D, ce qui
n'est pas le cas en France.
Apport en protéines
L'insuffisance d'apport protéique joue un
rôle délétère sur le métabolisme osseux.
Elles agissent sur un facteur de croissance,
IGF 1 qui lui-même a un rôle dans la formation osseuse. Certains acides
aminés vont stimuler la production de l'IGF 1.
Au niveau rénal, l'IGF1 stimule
la production du métabolite actif de la vitamine D et la résorption tubulaire
du phosphate. C'est l'équilibre phospho - calciquedu liquide extra cellulaire
qui contribue à la minéralisation osseuse.
Diminution de consommation d'alcool (4)
Il est délétère pour l'os par atteinte
hépatique qui empêche la première hydroxylation de la vitamine D.
L'alcoolisme entraine des déséquilibres
diététiques, une perte musculaire et augmente le risque de chutes. Souvent,
il est associé à une intoxication tabagique. Il est prouvé depuis
longtemps que le risque de fractures est multiplié par 4 ou 5 au cours des
intoxications oenoliques.
Rôle du tabac (5)
Le tabagisme est relativement fréquent chez
les sujets atteints d'ostéoporose. Des études transversales ont montré
que la densité osseuse des fumeurs était inférieure aux témoins
non fumeur. Le tabac accélère la perte osseuse post-ménopausique
et multiplie le risque de fracture vertébrale par 3.
Il provoque une hypoestrogènie
et avance de 18 mois à 2 ans l'âge de la survenue de la ménopause.
Lorsqu'il entraine une bronchopathie
chronique, il gêne l'activité physique (marche, sorties à l'extérieur)
et entraine une diminution de poids qui sont des facteurs négatifs de la prévention
de l'ostéoporose.
II - Une activité physique régulière
Elle est souvent mal évaluée par le
médecin et aussi par la patiente.
Il faut différencier l'activité
en charge (marche) et l'activité musculaire (6). L'excès d'activité
physique est nocif pour la minéralisation des os (exemple classique de l'ostéopénie
des marathoniennes). Ce sont les exercices en charge qui sont les plus favorables.
Dans l'enfance et l'adolescence, l'activité physique a un rôle prépondérant
dans la constitution du pic de masse osseuse. Une diminution permanente de la mobilité
ou une immobilisation prolongée multiplie par 4 ou 5, l'incidence des fractures
du col du fémur.
La marche rapide ou semi-rapide est
préférable à la marche lente ou au piétinement : elle doit s'effectuer
chez les personnes âgées en terrain plat ou du moins non accidenté
pour éviter les chutes. Le jogging n'est autorisé que chez les sujets
avant 50 ans, dans les limites du raisonnable en ce qui concerne la durée (1
heure environ) et les dénivellations.
Les exercices d'assouplissement (gymnastique
dite « suédoise ») en particulier les flexions en cyphose
dorsale (toucher ses pieds avec ses mains, les membres inférieurs en extension)
sont inutiles voire même dangereux, favorisant les tassements dorsaux.
La natation, indiquée pour les
lombalgies d'origine discale n'est pas utile dans les déminéralisations.
La bicyclette ne semble pas efficace.
Les exercices violents : aérobic,
gymnastique collective non adaptée sont contre-indiqués.
Les exercices musculaires mettant en
tension les muscles s'insérant sur les zones de prédilection des fractures
(rachis dorsal et lombaire (7), épaules, extrémité supérieure
du fémur, poignets) ont un rôle de prévention. Les exercices d'équilibre
tels qu'ils sont pratiqués parfois au cours de séances de yoga sont utiles
pour la prévention des chutes.
Le port d'objets lourds, les efforts
de soulèvement sont contre-indiqués.
Sur un plan pratique, les exercices
conseillés sont :
- la marche : 1 heure environ
2 ou 3 fois/semaine
- et certains exercices quotidiens
adaptés à chaque patient.
L'important est la régularité
de ces exercices dans l'année : 9 à 10 mois sur 12 ont un effet réel
de protection ; dans la plupart des séries et en pratique médicale courante,
les malades interrompent leurs activités au bout de 2 ou 3 mois.
Il existe peu d'étude longitudinale
évaluant les faits de ses exercices physiques pendant plusieurs années
!
L'activité physique doit être
modulée en fonction de l'âge et des autres localisations d'affection ostéo-articulaire
(arthrose lombaire, gonarthrose et coxarthrose). Au delà de 50 à 55 ans,
4 à 6 heures d'exercices hebdomadaires sont le maximum à ne pas dépasser.(7)
Enfin, il faut savoir que les femmes
minces, menues à masse musculaire faible sont un terrain de prédilection
des fractures vertébrales et des os périphériques : on évitera
ainsi les pertes de poids excessives.
La prévention des chutes
La grande majorité des fractures ostéoporotiques
sont liées à une chute. La prévention de ces chutes est donc un élément
important de l'hygiène de vie en particulier chez les sujets âgés.
Les traitements hypotenseurs doivent
être évalués et surveillés.
Les traitements sédatifs, tranquillisants,
les hypnotiques doivent être employés avec mesure.
Il faut dépister et prévenir
les phénomènes d'hypotension orthostatique.
Ces consignes concernent essentiellement
les personnes du 4e âge, âge de la fracture du col du fémur.
En post ménopause l'augmentation
de la force musculaire est la première des préventions des chutes,
Au total, ces règles simples,
pour la plupart évidentes, logiques et de bon sens, sont la base incontournable
de tous les traitements de l'ostéoporose.
III - Les traitements non hormonaux
Lorsques ces mesures semblent insuffisantes ,des
thérapeutiques relativement récentes vont pouvoir non seulement stopper
la progression de l'ostéoporose mais de plus augmenter la masse osseuse et
diminuer le nombre de fractures.
Enfin les biphosphonates auront toute
leur utilité pour éviter la perte osseuse de l'os cortical et en particulier
au niveau du col du fémur.
Les SERM
les résultats des études sur le Raloxifène
sont très positives sur le gain de DMO et la diminution du nombre de fractures
rachidiennes ,y compris chez les femmes en ayant déjà eu.
Il ralentit le remodelage osseux,diminue
les marqueurs de la résorption,
Il n'a pas d'effets secondaires sur
le plan digestif et peut être pris à tout moment de la journée.
Il a les même contre indications
que les estrogènes sur le plan thrombo-embolique.
Il n'est pas contre indiqué chez
les femmes ayant eu un cancer du sein et dans l'étude MORE il a montré
une diminution du nombre de cancer du sein récepteurs hormonaux positifs
Les biphosphonates
Les biphosphonates sont des composés de haute
affinité pour les cristaux d'apatite. Ils se concentrent dans le squelette
et inhibent la résorption osseuse.
Ils traversent mal la barrière
digestive, surtout en présence d'aliments et doivent donc être absorbés
à jeun avec un grand verre d'eau et ne pas se mettre en position allongée
pendant la demie heure suivante.
L'Alendronate et le Risédronate
viennent d'être commercialisés en France en dose hebdomadaire ce qui va
faciliter grandement leur prescription.
Ils ont démontrés une efficacité
sur tous les sites osseux et en particulier au niveau du col fémoral.
Conclusions
La prévention de l'ostéoporose est donc
multiple.
Elle commence au début de la vie
par une alimentation riche en calcium et une activité physique régulière.
La masse osseuse obtenue à la
fin de la croissance déterminera pour beaucoup le risque d'avoir ou pas de
l'ostéoporose.
A la période de ménopause
un bilan pour évaluer cette masse osseuse donnera des indications sur la nécessité
d'un traitement ou sur la simple surveillance de l'alimentation et de l'évaluation
de la quantité de calcium ingéré par jour.
Il est indispensable ,que l'on traite
ou pas les femmes et quelque soit le traitement prescrit ,de s'assurer en effet
que calcium et vitamine D sont pris à dose suffisante et que l'alimentation
contient suffisamment de protéines.
Les différents traitements pourront
s'échelonner dans la vie en fonction des résultats recherchés.
On ne traitera pas de même manière
une femme de 50 /55 ans en post ménopause immédiate avec symptômes
climatériques et une femme de 70 ans chez qui la prévention de la fracture
du col du fémur sera de première importance.
Ces traitements pourront être
pris les uns après les autres, car ils ont des indications différentes
et les études actuelles ne donnent pas de résultats exploitables pour
des durées supérieures à 5 ans.
Dans l'absolu ,on pourrait imaginer
de faire prendre sauf contre indication, un THS pendant les 5 premières années
de la ménopause, puis à distance des symptômes climatériques
utiliser les SERM qui ont une action essentiellement sur la perte osseuse rachidienne.
Enfin , les biphophonates auront toute
leur utilité dans la prévention des fractures du col du fémur.Bibliographie
[1] F.SIMON "Les traitements
non hormonaux" in les XIIIème Journées des techniques avancées. 1998
[2] NORDIN BEC, HORSMAN
A, CRILLY RG et al, "Treatment of spinal osteoporosis in postmenopausal women".
Br Med J, 1980, 280 : 451-454.
[3] CHAPUY MC, ARLOT
ME, DELMAS PD, MEUNIER PJ, "Effect of calcium and cholecalciferol treatment for
three years on hip fractures in elderly women". Br Med J, 1994, 308 : 1081-1082.
[4] SEEMAN E, MELTON
L.J, O'FALLON WN, RIGGS B.L, "Risk factors for spinal osteoporosis". Am J Med, 1983,
79 : 977-983.
[5] JENSEN G.F, "Osteoporosis
of the slender smolker revisted by epidemiologic approch".Eur. J. Clin - Imos, 1986,
16 : 239-242.
[6] CONSENSUS DEVELOPMENT
CONFERENCE, "Diagnosis, prophylaxis, and treatment of osteoporosis". Am J Med, 1993,
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[7] REVEL M, MAYOUX-BENHAMOU
MA, RABOURDIN JP et al. "One-year psoas training can prevent lumbar bone loss in
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