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2003 > Pédiatrie > Allergies  Telecharger le PDF

Dermatite atopique et allergie alimentaire en pratique

F. Rance

La dermatite atopique (DA) est l'une des manifestations principales de l'atopie. À ce titre, comme l'asthme et les rhinites allergiques, sa fréquence a considérablement progressé au cours des 10 dernières années (1). Les données internationales les plus récentes estiment la prévalence cumulée de la DA en France, aux âges de 13-14 ans, entre 21 et 25,1 % sur un effectif de 18 544 enfants (2). Une enquête épidémiologique effectuée en région Midi-Pyrénées chez 1020 enfants âgés de 3-4 ans à l'occasion du bilan de santé à l'entrée en maternelle révèle que 258 d'entre eux ont (ou ont eu) une DA soit une prévalence cumulée de 25,4 % (3). Toutefois, dans cette étude, pour toutes les manifestations suggérant l'intervention de facteurs allergiques, une exploration allergologique n'a été réalisée que chez 76 enfants (soit 7,6 % de l'effectif).

Le rôle des sensibilisations IgE dépendantes dans l'induction et/ou l'entretien de la DA a longtemps constitué un sujet idéal de controverses. À l'heure actuelle, à côté de nombreux autres facteurs (environnement, surinfection à Staphylococcus aureus ou à Pityrosporum ovale, Herpes simplex virus, allergènes de contact...), le rôle des allergènes alimentaires chez le jeune enfant comme facteur aggravant de la dermatite atopique est reconnu.

La dermatite atopique est un symptôme de l'allergie alimentaire

Chez l'enfant, la peau est l'organe le plus souvent atteint au cours des réactions adverses aux aliments. Les données enregistrées par le Cercle d'Investigations Cliniques et Biologiques en Allergologie Alimentaire (CICBAA) précisent, en France, les principales manifestations rencontrées au cours de l'allergie alimentaire

de l'enfant (4). Les observations répertoriées entre les services de médecine interne de Nancy et de Médecine infantile de Toulouse, sont validées par les critères standardisés du groupe européen d'étude des allergies alimentaires (5-7). Les symptômes sont décrits par ordre de fréquence sur la Figure 1, à partir de 544 observations pédiatriques d'allergie alimentaire. La DA est la manifestation principale de l'allergie alimentaire de l'enfant. Elle représente 50,5 % des tableaux cliniques de l'allergie alimentaire des enfants âgés de moins de 15 ans contre 3,7 % chez l'adulte.

Figure 1. Les signes de l'allergie alimentaire chez 544 enfants. D'après Rancé F. et al (4).

DA: dermatite atopique; U: urticaire; O: œdème; CA: choc anaphylactique; s. oral: syndrome oral; RC: rhino-conjonctivite.

Figure 2. Les signes de l'allergie alimentaire selon l'âge. D'après Rancé F. et al (4).

La DA, symptôme de l'allergie alimentaire, est d'autant plus fréquente que l'enfant est jeune (Figure 2). En effet, l'analyse des symptômes cliniques en fonction l'âge montre que la DA est impliquée dans 80 % des observations d'allergie alimentaire avant l'âge de 1 an (60 % à 1-3 ans, 35 % à 3-6 ans, et 15 % à 6-15 ans).

DA: dermatite atopique; U: urticaire; O: œdème; CA: choc anaphylactique; s. oral: syndrome oral; RC: rhino-conjonctivite.

L'allergie alimentaire est un facteur inducteur de la dermatite atopique

Le concept du rôle inducteur de l'allergie dans la DA est ancien. Il est mentionné dès 1890 par Besnier (in 8). En 1936, Engman (9) et Grulee (10) signalent le rôle aggravant de l'ingestion d'aliment dans la DA. Plus récemment, dans le cadre d'une enquête, Steinman et Potter (11) enregistrent par questionnaire une aggravation de la DA après ingestion d'aliments variés, chez 112 enfants atteint de DA.

Le rôle de l'allergie est argumenté par le fait que les deux tiers des enfants atteints de DA ont des antécédents familiaux d'atopie, développent dans 50 à 80 % des cas d'autres manifestations atopiques, ont une élévation des IgE sériques totales dans 80 % des cas et, pour la majorité, présentent une positivité des explorations allergologiques. Les protéines allergéniques alimentaires ingérées sont capables d'activer les mastocytes.

Une élévation de l'histamine plasmatique et une activation des éosinophiles sont enregistrées au cours des tests de provocation alimentaires. Les enfants atteints de dermatite atopique et allergiques au lait de vache ont des cellules T réactives au lait. Les cellules de Langerhans peuvent présenter les allergènes aux cellules T. Les données scientifiques des dix dernières années, établies sur la base des tests de provocation par voie orale en double aveugle, démontrent l'importance des sensibilisations et des allergies alimentaires au cours de la DA de l'enfant (12-15) : les explorations d'allergie alimentaire sont positives dans 35 à 63 % des cas.

La sévérité de la DA

Elle serait associée plus fréquemment à une allergie alimentaire. Guillet et al. (16) enregistrent chez 251 patients atteints de DA, une positivité des explorations allergologiques différentes selon la gravité de l'affection : sensibilisation aux aéro-allergènes chez 44 % des formes modérées (versus 66 % des formes sévères), sensibilisations alimentaires jamais relevées dans les dermatoses modérées, mais observées dans 91 % des formes sévères (16). Toutefois, cette étude n'a pas comporté de test de provocation par voie orale en double aveugle.

L'âge

Est certainement un facteur en prendre en considération. Dans notre expérience portant chez 137 enfants atteints de dermatite atopique, l'enquête allergologique est globalement positive chez 84 % des enfants (17). Une sensibilisation alimentaire est enregistrée chez près d'un enfant sur 2 (42,2 % des cas). Sur la base des tests de provocation par voie orale, une allergie alimentaire est confirmée dans un cas sur 3 (34,7 % des cas).

Elle est plus fréquente chez les enfants de moins de 2 ans (66,7 % versus 22,5 % après cet âge) ce qui représente une différence significative (p<0,001). Les aliments en cause sont l'œuf, l'arachide, la moutarde, le lait de vache, le poisson et des allergènes très divers (crevette, bœuf, noisette, blé, vanille, banane et pois). Plus récemment, nous avons évalué 284 enfants atteints de dermatite atopique, âgés en moyenne de 4,6 ans (18). L'exploration allergologique était réalisée dans le cadre d'une consultation multidisciplinaire effectuée conjointement par un dermatologue allergologue et un pédiatre allergologue.

Elle comprenait la recherche de manifestations d'hypersensibilité immédiate par la réalisation de prick-tests aux aéroallergènes et aux aliments et de manifestations d'hypersensibilité retardée par la mise en place de tests épicutanés lus à 48 et 72 heures selon les critères de l'ICDRG avec une recherche systématique de pertinence. Les enfants étaient revus à 6 semaines, 1 et 2 ans. Une nouvelle exploration allergologique était conduite de manière identique au suivi de 2 ans. À la visite initiale, 24,3 % des enfants étaient considérés asthmatiques et 8,6 % d'entre eux avaient une rhinite allergique.

Une allergie de contact était objectivée chez 53,8 % des enfants, alors que 32,3 % étaient sensibilisés aux allergènes et une allergie alimentaire prouvée par test de provocation par voie orale dans 28,4 % des cas. L'analyse statistique objective une association significative entre la sévérité de la DA et la positivité des tests allergologiques. L'allergie de contact est plus fréquente chez les grands enfants (âge moyen 4 ans, p < 0,05) alors que l'allergie alimentaire concernent des enfants jeunes (age moyen 2 ans, p < 0,0001). Les enfants évalués au suivi de 2 ans présentent un asthme dans 23,4 % des cas et une rhinite allergique pour 23,4 % de l'effectif. Une allergie de contact est enregistrée chez 40 % des enfants, une sensibilisation aux aéroallergènes dans 38,3 % des cas et une allergie alimentaire prouvée est relevée chez 4,2 % d'entre eux.

Il est intéressant de noter qu'une guérison de l'allergie alimentaire est observée chez 64,5 % des enfants testés par test de provocation. Les conclusions de cette étude sont que les suivantes : l'allergie en général concerne des enfants souffrant d'eczéma de forme modérée à sévère, l'allergie de contact est plus fréquente chez les enfants âgés de plus de 4 ans alors que l'allergie alimentaire est l'apanage des enfants jeunes, l'allergie alimentaire disparaît dans une grande majorité des cas et l'allergie respiratoire augmente avec l'âge. Il est donc essentiel de suivre les enfants atteints de DA.

Les études conduites en double aveugle

D'après Sampson (13), l'allergie alimentaire est authentifiée par de test de provocation par voie orale en double aveugle chez 63 % des enfants atteints de DA. L'étude est établie chez 320 enfants atteints de DA modérée à sévère. Une atopie familiale est enregistrée dans 95 % des cas (304 enfants). L'œuf (30 %), l'arachide (15 %) et le lait de vache (22 %) sont les principaux aliments en cause. Les symptômes observés au cours du test de provocation par voie orale en double aveugle sont cutanés dans 74 % des cas (573 tests positifs sur 1521 tests réalisés), digestifs dans 53 % des cas et respiratoires dans 46 %.

Businco et al. (19) observant une aggravation de l'eczéma au cours de 32 tests de provocation parmi les 186 tests effectués (40 % des cas). L'analyse concerne 122 enfants atteints de DA. Le test de provocation est positif dans 41 % des tests réalisés pour le lait de vache (46/111) et dans 39 % de ceux réalisés pour l'œuf de poule (24/62).

L'étude de Burks (20) enregistre chez 46 enfants atteints de DA une positivité du de test de provocation par voie orale en double aveugle 27 fois sur les 65 tests réalisés (42 %). L'œuf, l'arachide et le lait représentent 78 % des aliments impliqués. Les réactions sont cutanés dans 96 % des cas, respiratoires dans 52 % des cas et digestives pour 30 % de l'effectif. Ultérieurement, Burks et al. (11), chez 165 enfants atteints de DA notent une positivité des prick-tests alimentaires chez 98 d'entre eux (60 % des cas). Le test de provocation par voie orale en double aveugle confirme la responsabilité de l'aliment chez 64 enfants (38,7 % des observations). L'âge moyen est significativement inférieur chez les enfant atteints de DA et d'allergie alimentaire, en comparaison avec ceux sans allergie alimentaire (p = 0,003).

L'analyse prospective de Eigenmann et al. (14) est conduite chez 63 enfants atteints de DA, âgés en moyenne de 2 ans 8 mois. Les explorations allergologiques sont guidées par le résultat du dosage des IgE spécifiques en CAP system® pour 6 aliments : lait, œuf, blé, soja, arachide et poisson. Finalement, une allergie alimentaire est retenue chez 37 % des enfants (23/63).

Le travail de Niggenmann et al. (15) est établi chez 107 enfants présentant une DA. Les auteurs ont pratiqué 387 tests de provocation par voie orale en double aveugle (259 tests avec les aliments et 128 avec un placebo). La moitié (51 %) des tests pratiqués avec les aliments sont positifs. Les aliments incriminés sont l'œuf (70 %), le lait de vache (51 %), la farine de blé (44 %), le soja (16 %). Les réactions observées au cours du test de provocation touchent fréquemment la peau (64 %) : il s'agit pour les deux tiers des observations d'une DA d'apparition immédiate. Les signes sont digestifs dans 25 % des observations et respiratoires dans 11 % des cas. Cette étude, dont la méthodologie est irréprochable, montre que la prévalence de l'allergie alimentaire dans cette population d'enfants est de un sur deux.

L'allergie alimentaire concerne un sous-groupe d'enfants atteints de dermatite atopique :

• d'âge inférieur à 3 ans ;

• atteint d'une forme modérée à sévère ;

• récidivant sous traitement conventionnel ;

• associant des signes évocateurs d'allergie alimentaire.

La démarche diagnostique d'une allergie alimentaire dans la dermatite atopique

La démarche diagnostique générale

L'exploration allergologique débute toujours par la pratique des pricks-tests cutanés. La valeur prédictive positive des pricks-tests est excellente, de sorte que leur négativité est suffisante pour éliminer une allergie alimentaire. Le dosage des IgE spécifiques apporte une confirmation de la sensibilisation IgE-médiée dépistée par les tests cutanés. Il est effectué en première intention lorsque les tests cutanés ne sont pas réalisables. L'enquête diagnostique est poursuivie par un régime d'exclusion, et dans la majorité des cas l'allergie alimentaire est authentifiée par les tests de provocation. Le test de provocation se définit comme un test d'ingestion de l'aliment dans le but de reproduire l'histoire clinique en respectant le temps, la quantité des aliments et les symptômes. Il permet de départager ce qui est une simple sensibilisation, de ce qui est une authentique allergie alimentaire. Ce test représente un élément diagnostique fiable et permet de mettre en place des évictions alimentaires limitées.

Les données récentes

La valeur des IgE spécifiques

On accorde actuellement beaucoup d'importance à la valeur quantitative du taux d'IgE spécifiques, mesurée avec la technique CAP system® FEIA (Pharmacia), pour 4 aliments. Sampson a établi pour le blanc d'œuf, l'arachide, le poisson, le lait de vache, le blé et le soja, des valeurs seuils qui permettent de guider les mesures d'éviction et réduisent les indications des tests de provocation (21) (tableau 1). La valeur seuil pour la moutarde est de 18 kUA/L (22). Pour les autres aliments dont les valeurs prédictives positives et négatives n'ont pas été précisées, des investigations complémentaires sont nécessaires.

* Chez les patients avec histoire clinique d'allergie IgE-médiée, le test de provocation (TPO) doit être réalisé sous surveillance médicale, en fonction des valeurs d'IgE.

** Si la valeur des IgE est inférieure à 0,35 kUA/L et les prick tests négatifs, le TPO peut être réalisé à domicile, sauf s'il existe une histoire de réaction.Les patch-tests ou tests épicutanés

Les tests d'allergie immédiate ne permettent pas de relier avec certitude la dermatite atopique et l'allergie alimentaire. Les tests épicutanés aux aliments, reproduisant le mécanisme expérimental de l'eczéma, apparaissent donc comme une technique séduisante d'avenir de la dermatite atopique. Ils sont réalisés avec les aliments naturels (par exemple le lait de vache, l'œuf, la farine de blé

Tableau 1. Interprétation recommandée des concentrations d'IgE spécifiques (exprimées en kUA/L avec la technique CAP system FEIA) pour le diagnostic d'allergie alimentaire (21).

ÿValeurs

ÿŒuf

ÿLait

ÿArachide

ÿPoisson

ÿSoja

ÿBlé

ÿRéalisation

ÿ

ÿ

ÿ

ÿ

ÿ

ÿ

ÿ

ÿ

ÿd'un TPO

ÿ

ÿ> à

ÿ7

ÿ15

ÿ14

ÿ20

ÿ65

ÿ80

ÿNon nécessaire

ÿ

ÿ< à

ÿ7

ÿ15

ÿ14

ÿ20

ÿ30

ÿ26

ÿNécessaire*

ÿ

ÿ< à

ÿ0,35

ÿA domicile**

et le soja pour une dermatite atopique du nourrisson). Les tests allergologiques immédiats donnent des réponses plus faibles chez l'enfant jeune et sont aussi parfois faussement négatifs, en particulier dans l'allergie aux protéines du lait de vache (23-27). Ces données sont confortées par les travaux de Rasanen et al. au cours de l'allergie/intolérance au lait de vache (23). Les patch-tests et la prolifération lymphocytaire sont positifs dans les formes retardées, alors que les prick-tests et l'histaminolibération sont représentatifs des formes immédiates.

Ces travaux ont été suivis de ceux de Isaulori et al. démontrant l'utilité des patch-tests alimentaires dans les observations d'allergie aux protéines du lait de vache avec prick-tests négatifs et manifestations retardées (24). Chez 183 enfants âgés de deux à 36 mois atteints de dermatite atopique dont l'allergie alimentaire est prouvée par test de provocation par voie orale en double insu, les prick-tests sont positifs dans 48 % des cas et les patch-tests dans 61 % des cas. La sensibilité des patch-tests est de 61 % et la spécificité de 81 %.

Les patch-tests améliorent donc le diagnostic d'allergie alimentaire pour les enfants aux réactions retardées. Des résultats identiques sont obtenus par Majamaa et al. pour le lait de vache (26) et la farine de blé (27).

Récemment, Niggemann et al. ont confirmé la supériorité des tests épicutanés pour le diagnostic d'une allergie aux protéines du lait de vache dans les formes à manifestations retardées (28). La valeur diagnostique des tests allergologiques au lait de vache est analysée chez 75 enfants âgés en moyenne de deux ans ; 21 d'entre eux présentent une symptomatologie retardée. La sensibilité des patch-test est de 76 % (58 % en prick-test), la spécificité de 95 % (70 % en prick-test), la valeur prédictive positive de 81 % (41 % en prick-test) et la valeur prédictive négative de 93 % (81 % en prick-test).

Notre expérience (non publiée) semble montrer la possibilité de réaction irritative avec certains allergènes comme l'arachide ou la moutarde. Les extraits alimentaires frais donneraient de meilleurs résultats. L'interprétation doit tenir compte d'éventuelles urticaires au contact de la zone d'application des tests, surtout décrites pour l'œuf, et qui n'ont aucune valeur diagnostique. Une étude européenne est en cours pour préciser la concentration, le véhicule et la durée d'occlusion des patch-tests alimentaires.

Récemment, Roehr et al. suggèrent de réduire les indications des tests de provocation par voie orale en combinant patch tests aux aliments et dosage des IgE spécifiques chez les enfants souffrant de dermatite atopique et suspects d'allergie alimentaire (29). Les

auteurs ont déterminé une valeur seuil des IgE supérieure à 0,35 kU/L pour le lait de vache et supérieure à 17,5 kU/L pour l'œuf de poule qui associée à une positivité des patch-tests pour ces aliments fournies une probabilité de 100 % d'être allergique (29).

Les régimes d'éviction appropriés améliorent la dermatite atopique

L'éviction d'un aliment incriminé par des preuves suffisantes améliore la DA. Le régime d'éviction est limité à l'aliment identifié par une exploration allergologique rigoureuse, basée, en dehors de l'anaphylaxie, sur le test de provocation par voie orale. L'éviction concerne un seul aliment pour 60 % des enfants atteints d'une allergie alimentaire (4). Les polyallergies alimentaires sont rares chez les enfants : 24,6 % sont atteints de 2 allergies alimentaires, 7 % de 3 allergies alimentaires, 2,9 % de 4 allergies alimentaires et 1,8 % ont 5 allergies alimentaires.

L'amélioration des symptômes sous éviction de l'aliment permet d'évoquer son rôle dans le déclenchement des manifestations. De même, la réapparition des symptômes à la ré-introduction de l'aliment est un argument en faveur de l'allergie. Toutefois, les effets de l'éviction de l'allergène alimentaire, identifiés par les tests allergologiques, ne sont pas rapide au cours de la DA. L'amélioration après éviction appropriée est observée chez 69 % des enfants atteints de DA après 2 mois de régime d'éviction, dans 80 % des cas après 6 mois d'éviction et 91 % à 1 an (30). L'aide d'une diététicienne permet d'éviter l'ingestion d'allergènes masqués, d'éviter les carences nutritionnelles, d'obtenir un équilibre dans les apports alimentaires et de proposer des remplacements d'aliments.

Les régimes oligo-antigéniques ou « monotones » n'ont pas leur place chez l'enfant. Ils peuvent être responsable de déséquilibre nutritionnel et de trouble du comportement alimentaire. Ils ont été à l'origine de réactions généralisées, voire de choc anaphylactique lors de réintroduction, accidentelle ou intentionnelle, des aliments (31).

Les autres évictions alimentaires sont plus des mesures générales de prévention retardant l'introduction des aliments à risque (32, 33). Les aliments à risque correspondent aux aliments très fréquemment impliqués dans l'allergie alimentaire de l'enfant. Le suivi indispensable des enfants atteints de dermatite atopique

La DA, premier signe de l'atopie, est de plus en plus fréquente. Les rapports étroits entre DA, rhinite et asthme nécessitent un suivi précis de ces patients et une information sur les risques encourus. Si la DA guérit dans plus de 70 % des cas, la survenue d'un asthme est fréquente (20 à 85 % des cas), d'autant que le début de la DA est précoce, avant l'âge de 2 ans, et sévère (34, 35). Une hyper-réactivité bronchique non spécifique, enregistrée dans 58 à 72 % des DA isolées, est quasi-constante (92 %) si asthme et DA sont associées (36, 37).

Conclusion

Les indications de l'enquête et des investigations allergologiques alimentaires sont limitées à la dermatite atopique (i) modérée à sévère, (ii) de l'enfant âgé de moins de trois ans, (iii) qui ne s'améliore pas sous traitement dermatologique conventionnel. Sauf situation particulière détectée par l'interrogatoire, il est inutile de réaliser un bilan allergologique pour toutes les DA car « explorer » toutes les DA reviendrait à demander une consultation (et/ou des examens) spécialisés pour un enfant sur quatre de la naissance à 3 ans. En définitive, l'allergie alimentaire est présente chez moins d'un enfant sur deux atteint de dermatite atopique. Les investigations allergologiques chez l'enfant atopique sont limitées à des indications bien ciblées. Enfin, il est impensable d'envisager des recherches allergologiques sans avoir au préalable déterminée la prise en charge générale et locale adaptée à l'enfant atopique.

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