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2003 > Pédiatrie > calcium  Telecharger le PDF

Apports calciques et minéralisation osseuse

J. Chouraqui

L'enfance et l'adolescence représentent une période globalisée au cours de laquelle interviennent trois circonstances fondamentales pour la constitution du capital osseux de l'adulte : la croissance du squelette, le modelage osseux au fur et à mesure de cette croissance, et la minéralisation de ces os.

La minéralisation osseuse

Le pic de masse osseuse

C'est le niveau maximum de masse osseuse obtenu au terme de la croissance, qui culmine entre 18 et 25 ans. La technique la plus utilisée actuellement pour sa mesure est l'absorptiométrie bi-photonique qui permet de déterminer la densité minérale osseuse (DMO). Plusieurs études indiquent que le pic de masse minérale osseuse (MMO) atteint à la fin de la croissance est un facteur déterminant du risque ultérieur de fracture par ostéoporose associé au taux de perte osseuse à la ménopause. Ce pic de MMO est atteint au début de l'âge adulte après la fin de la puberté, soit de façon décalée par rapport à l'accélération de la vitesse de croissance pubertaire. La MMO ainsi acquise va servir de « banque » pendant tout le reste de la vie. Une augmentation de 10% de la MMO réduirait, sur la base d'études épidémiologiques, le risque de fractures ostéoporotiques de 50 %. Ceci souligne l'intérêt d'une action sur les facteurs modifiables d'acquisition de la MMO.

Le pic de MMO est très fortement influencé par des facteurs génétiques, mais on considère de plus en plus que les facteurs environnementaux interviennent pour au moins 50 % dans l'acquisition de ce pic. La MMO génétiquement déterminée ne serait atteinte

que si les conditions nutritionnelles, d'activité physique et de fonctions endocriniennes sont optimales.

Minéralisation osseuse et croissance

ÿ L'accrétion minérale osseuse s'effectue parallèlement à la croissance avec un gain décalé par rapport aux accélérations de la vitesse de croissance. Il existe une corrélation étroite entre la teneur minérale osseuse et la taille jusqu'à 1,55 m (environ 13 ans) chez la fille et jusqu'à 1,60m (environ 13,5 ans) chez le garçon.

ÿ La vitesse de croissance est extrêmement variable selon l'âge : très rapide la première année de vie, elle diminue progressivement pour se stabiliser entre 4 et 10 ans pour s'accélérer de nouveau à la puberté, sachant que cette puberté se déclenche à un âge également extrêmement variable.

Tranche d'âge Gain statural annuel

1re année 25 cm

2e année 12 cm

3e année 8 cm

4-10 ans 5-6 cm

Pic pubertaire 8-10 cm

Évolution du contenu calcique osseux

Le squelette d'un nouveau-né à terme contient 30 g de calcium. L'accrétion calcique s'est essentiellement produite au cours du dernier trimestre de gestation à raison de 200 à 250 mg/jour. L'accrétion calcique maximale va demeurer à ce niveau pendant pratiquement toute la première enfance pour se situer aux alentours de 110 mg/jour avec les apports recommandés actuels en calcium, quand le statut en vitamine D est correct.

La puberté et l'adolescence correspondent à une période d'anabolisme intense et de croissance rapide au cours de laquelle s'acquièrent 15 % de la taille adulte, 50 % du poids définitif et 40 % de la masse osseuse. L'accrétion calcique osseuse maximale peut atteindre 400 mg/j.

La différence de masse osseuse entre les sexes se manifeste à partir de la puberté. Ceci est dû à une durée de croissance de la masse osseuse plus prolongée chez les garçons avec notamment un accroissement plus important de la taille des os et de l'épaisseur corticale. Pendant la puberté, les filles ont une densité minérale osseuse (DMO) lombaire supérieure à celle des garçons qui par contre auront une DMO supérieure au niveau fémoral à 17-18 ans. Chez la fille, la masse osseuse commence à augmenter au niveau du rachis lombaire dès 11 ans, et l'augmentation de DMO est très nette de 11 à 14 ans. Chez les garçons, cette période dure 4 ans, de 13 à 17 ans.

La vitesse d'augmentation de la DMO diminue à partir de 16 ans chez la fille, devenant faible deux ans après les premières règles, et 17 ans chez le garçon en restant cependant significative jusqu'à 20 ans. L'acquisition de la masse osseuse est étroitement liée aux stades pubertaires, surtout P3-P4 chez les filles et P4 chez les garçons. Une association négative entre l'âge des premières règles et la DMO est décrite. Des premières règles tardives sont de ce fait un facteur de risque de l'ostéoporose et plus les premières règles sont précoces, plus la DMO est élevée. Cependant une étude menée chez des femmes pré-ménopausées ne retrouve pas d'influence de l'âge des premières règles.

Le rôle des stéroïdes sexuels et de l'axe hormone de croissance-IGF-1 sont revus par C. SULTAN.

Apports calciques

Les enjeux

La nécessité d'un apport alimentaire en calcium pour permettre, d'autant plus que la vélocité de croissance est rapide, une minéralisation optimale du squelette est largement admise. Le but d'un apport calcique suffisant pendant l'enfance et l'adolescence vise à augmenter la densité minérale pour atteindre en fin de croissance un pic minéral de masse osseuse optimal dont le niveau exact reste à déterminer.

Les conséquences à moyen terme de régimes carencés en calcium sont parfaitement décrites, qu'il s'agisse de rachitisme ou de risques fracturaires accrus. L'importance du calcium alimentaire est soulignée du fait de résultats de nombreuses enquêtes alimentaires révélant que les apports sont souvent très insuffisants chez les adolescentes dans la plupart des pays. Cependant les données manquent actuellement concernant les apports et la minéralisation osseuse en période pré pubertaire.

Métabolisme du calcium

Contenu

99 % du calcium contenu dans le corps humain sont localisés dans l'os. Le contenu total est de 1 000 à 1 200 mg chez l'adulte. Ce calcium sous forme d'hydroxyapatite cristallisée et de phosphate calcique assure la rigidité et la solidité du squelette. Le rapport Ca/P osseux est constant, voisin de 2,1. L'os est un organe vivant en perpétuel renouvellement et sert de réservoir de calcium échangeable. Pendant toute l'enfance et l'adolescence la formation osseuse est plus importante que la résorption, alors que chez le sujet âgé c'est l'inverse, aboutissant à une perte de masse osseuse (ostéopénie).

La constance de la calcémie est assurée aux dépens des réserves osseuses, empêchant l'apparition de signes évidents de carence calcique à court terme, sauf si celle-ci est majeure et associée à une carence en vitamine D. A moyen ou long terme la carence calcique aboutit à une minéralisation insuffisante du tissu ostéoïde (rachitisme chez l'enfant et ostéomalacie chez l'adulte) ou à une perte excessive de substance osseuse (ostéoporose).

Absorption

L'absorption du calcium résulte d'une part d'un transport duodénal actif, saturable, et d'autre part d'une diffusion passive non saturable dans l'iléon. L'absorption colique éventuelle ne dépasserait pas 10 %. Le transport actif est régulé en fonction des apports et des besoins et est assuré par une protéine dépendante de la vitamine D, la calbindine-D (CaBP). La diffusion passive s'effectue en fonction d'un gradient électrochimique et des mouvements hydro-électrolytiques. Contrairement à ce qui se passe chez l'enfant, le calcium absorbé chez l'adulte n'est pratiquement pas retenu par l'os.

Pour être absorbable le calcium doit d'abord être soluble dans le liquide gastrique acide. Le lait et les produits laitiers servent de référence pour la biodisponibilité du calcium. La présence de lactose augmente l'absorption du calcium, cependant celle-ci n'est, chez l'adulte, que de 25 à 35 %, identique à celle de sels organiques (gluconate, lactate, citrate, citromalate) ou minéraux (carbonate, chlorure, sulfate). Le calcium des végétaux est en général moins disponible, insolubilisé par l'acide phytique, l'acide oxalique, et certaines pectines. Le coefficient d'absorption du calcium est considéré comme étant d'environ 45 % chez l'adolescent et 55 % chez la femme enceinte. Il ne semble par contre pas modifié en période de lactation. Il est abaissé à 30% chez les femmes après la ménopause.

Par ailleurs, de nombreux facteurs alimentaires augmentent la perte urinaire de calcium et notamment l'apport excessif de protéines, ainsi que les aliments ou eaux riches en sulfates et les apports excessifs en sodium.

Apports en fonction de l'âge

L'augmentation des apports calciques quel que soit l'âge est l'un des objectifs prioritaires du programme national nutrition santé (PNNS), décliné depuis 2002.

Chez le nourrisson

Au cours des trois premiers mois de vie, un nourrisson allaité au sein consomme en moyenne 750 ml de lait par jour dont la teneur en calcium est de 320 mg/l. Ceci assure des apports quotidiens de 240 mg/j, puis si l'allaitement se poursuit les trois mois suivants de 300 mg/j. Chez un nourrisson nourri avec un lait industriel (préparation pour nourrisson puis préparation de suite) comme le coefficient d'absorption du calcium est moins efficace, de 44 % environ

à condition d'un apport en vitamine D suffisant, les recommandations d'apport sont de 400 mg/j. De 6 à 12 mois et même jusqu'à trois ans les apports recommandés sont arbitrairement de 500 mg/j.

Chez l'enfant

Bien que la vitesse de croissance se soit ralentie, les besoins calciques ramenés au kg de poids sont 2 à 4 fois supérieurs à ceux de l'adulte. Les apports conseillés ont été récemment revus : 700mg/j à partir de 3 ans, puis 900 mg après 7 ans et 1 200 mg/j après 10 ans.

Chez l'adolescent

Il s'agit d'une période de croissance rapide et d'anabolisme intense au cours de laquelle l'accrétion calcique et l'absorption intestinale de calcium sont maximales. Les apports recommandés sont donc de 1 200 mg/j . Une pathologie carentielle se manifeste en dessous de 300 mg/j tandis que des adolescents recevant moins de 800 mg/j constituent un groupe à risques. Dans certaines enquêtes un quart des adolescentes seraient dans cette situation, tandis qu'également un quart des adolescents ont une carence en vitamine D pendant la saison froide. Or il est admis que l'amputation du capital osseux optimal en fin d'adolescence constitue un facteur de risque important d'ostéoporose précoce. L'essentiel des apports en calcium provient des produits laitiers dont il faut conseiller la consommation à raison d'un produit à chacun des repas. Or ces produits sont souvent refusés notamment par les jeunes filles qui craignent de grossir.

Pendant la grossesse

Tableau 1. Équivalents lactés pour 100 mg de calcium.

• 325 ml LM

• 165 ml prép nourrisson

• 115 ml prép suite

• 100 ml lait croissance

• 85 ml lait de vache

• 85 g yaourt nature (2/3)

• 100 g fromage blanc

• 137 g petit suisse (2,2)

• 60 g crème dessert

• 100 g flandise

• 20 g fromage fondu

• 10 g gruyère

• 17 g camembert

Le fœtus retient environ 20 g de calcium pendant le dernier trimestre soit environ 220 mg/j. Les apports conseillés sont de 1 000 mg/j.

Pendant la lactation

Le besoin moyen pour assurer environ 800 ml de lait par jour est de 250 mg/j. Les recommandations sont de 1 000mg/j, à poursuivre après l'allaitement pour restaurer les réserves osseuses.

Sources de calcium

Le lait et les produits laitiers constituent la principale source de l'apport calcique, quel que soit l'âge. Jusqu'à 3 ans, à condition que l'enfant reçoive une alimentation équilibrée en suivant les recommandations d'apport lacté usuelles, ceci ne semble pas poser trop de problèmes. Par contre la consommation moyenne de ces produits après l'âge de 3 ans semble inférieure à 250 g/j. Qui plus est grand nombre d'enfants et surtout d'adolescents ne consomment aucun produit laitier, et chez ceux qui en consomment, le lait ne représente que moins de 10 % des apports de produits laitiers.

ÿ Il est conseillé de faire consommer trois produits laitiers par jour. Le lait, les fromages frais, les yaourts permettent d'assurer des apports calciques en limitant les apports en graisses, lorsqu'ils sont choisis demi-écrémé et ceux en sucres lorsque non aromatisés. Le taux élevé en matières grasses des fromages, qui sont par ailleurs riches en calcium, conduit à en limiter la consommation en fonction de la croissance pondérale de l'adolescent. Les fromages à tartiner sont peu riches en calcium et par contre riches en graisses. La crème fraîche et le beurre, quoique d'origine laitière, sont riches en graisses et pauvre en calcium.

Autres sources de calcium

Tableau 2. Équivalents non lactés pour 100 mg de calcium.

• 47 g truite ou saumon

• 28 g sardines à l'huile

• 65 g d'œuf

• 40 g navet

• 53 g chou

• 42 g amandes

• 37 g farine de soja dégraissé

• 10 l Volvic

• 1 280 ml Evian

• 500 ml Vittel

• 450 ml Badoit

• 340 ml Salvetat

• 210 ml Contrex

• 170 ml Hépar

Légumes et fruits peuvent aider à compléter l'apport calcique. Certaines eaux minérales riches en calcium peuvent contribuer à augmenter les apports calciques. Mais il s'agit là de compléments qui ne doivent pas se substituer totalement aux apports lactés. Il faut éviter de consommer des eaux minérales riches en calcium mais également en sodium, magnésium ou en sulfates.

La vitamine D

La vitamine D joue un rôle essentiel dans l'absorption intestinale du calcium et la minéralisation du squelette. Son métabolite actif est le 1,25-dihydroxycalciférol dont l'origine est double : endogène (synthèse cutanée sous l'influence du rayonnement solaire ultraviolet) et exogène (apports alimentaires et médicamenteux). L'alimentation habituelle en France comporte très peu d'aliments riches en vitamine D et de ce fait ne contribue que très partiellement aux besoins de l'organisme (apports de l'ordre de 100 UI/j). Les apports recommandés sous forme de complémentation médicamenteuse sont de 400 à 800 UI/j jusqu'à 5 ans. Par la suite aucun consensus ne semble établi. Une étude française récente aboutit à un conseil de prescription trimestriel, d'octobre à mars de 100 000 UI de vitamine D. L'éditorial d'E. Mallet va dans le sens d'une supplémentation nécessaire à l'adolescence tout en reconnaissant l'absence de réel consensus, faute d'étude suffisante.

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