Chapitre VIII
TRAITEMENT DES TROUBLES DE LA PERIODE PERIMENOPAUSIQUE ET DE LA
MENOPAUSE DEPUIS LONGTEMPS CONFIRMEE
J. BELAISCH
Introduction
Ces deux périodes de la vie de la femme posent des problèmes
différents par leur nature au médecin gynécologue. Mais dans les deux cas, les
problèmes sont difficiles : en période périménopausique, en raison de l'instabilité
du statut hormonal de la femme et en période tardive du fait de la mauvaise tolérance
fréquente aux estrogènes résultant de la très longue durée de la carence hormonale.
Médecin et patiente doivent dans les deux situations faire preuve de patience et accepter
que persiste un minimum de troubles malgré l'application d'un traitement aussi bien
pensé que possible.
LA PERIMENOPAUSE
Au risque de choquer et les spécialistes confirmés de la ménopause
et... les auteurs anglo-saxons, il faut bien admettre que ce terme est très ambigu alors
que le vocable <<préménopause>> que le profane utilise volontiers, exprime
parfaitement ce qu'il veut dire. Aussi, à la condition de bien expliquer à la patiente
que préménopause est un terme dont la sens est purement chronologique, que la femme peut
être très proche de sa ménopause et ne présenter aucune anomalie ni fonctionnelle ni
organique ou au contraire en être encore très éloignée ( plus de 5 ans et même
davantage parfois ) et souffrir déjà des désordres multiples, on peut continuer à
utiliser le mot de préménopause ... au moins lors des entretiens avec la patiente. Mais
on ne manquera pas de rappeler que les anglo-saxons qualifient de
<<premenopausal>> toutes les femmes qui ont achevé leur puberté et n'ont pas
encore atteint l'age des dernières règles spontanées !
Ainsi, cette période de troubles périménopausiques peut elle être
longue ou courte, pénible ou asymptomatique et de ce fait justifier ou non
l'administration d'un traitement comme nous allons le voir.
On peut envisager 4 grands chapitres dans l'exposé des troubles de la
période périménopausique qui justifieront chacun une forme de traitement spécifique :
- les troubles fonctionnels,
- la situation psychologique de la femme ( aspects sexologiques exclus
),
- les effets sur le couple des transformations des aptitudes sexuelles
des deux partenaires,
- les pathologies inapparentes : risque d'ostéoporose, de cancers et
leur physio-pathologie.
LES TROUBLES FONCTIONNELS MENSTRUELS
Ils sont en effet, dominés par les troubles des règles dont la nature
peut être très variable
1°) Le trouble le plus fréquent est le raccourcissement des cycles. Il
a été observé à de multiples reprises, et confirmé par MJ MAYAUX et J BELAISCH (5)
chez les femmes consultant pour IAD le Cecos de Bicêtre. Les cycles se raccourcissent à
partir de 4O/41 ans. SHERMAN et KORENMAN (12) ont montré que, contrairement à ce qui
avait longtemps été écrit, c'est la phase folliculinique et non la phase lutéale qui
est abrégée (du fait, vraisemblablement de l'élévation de la FSH qui conduit à une
maturation accélérée des follicules). Le pourcentage de cycles avec phase lutéale
courte de moins de 11 jours est pour LENTON (3), de 5,6 % entre 4O et 44 ans, et de 14,2 %
entre 45 et 5O ans.
2°) Le deuxième trouble est la survenue de véritables irrégularités
du cycle qui, pour TRELOAR (17) commencerait à 45,5 ans en moyenne. Apparemment 5O % de
ces troubles commenceraient entre 42,8 et 47,8 ans.
3°) Les règles deviennent parfois ménorragiques, il parait alors
raisonnable d'évoquer une cause non endocrinienne et d'entreprendre la recherche d'une
étiologie organique qui peut se limiter à la présence d'une hyperplasie endométriale
équilibrée.
4°) La survenue d'un syndrome prémenstruel ou l'aggravation en
période lutéale de troubles préexistants est la troisième complication de grande
fréquence, une fréquence qui s'accroît avec l'âge. Il peut être à prédominance
psychique ou mammaire mais les ballonnements abdominaux sont aussi une plainte souvent
exprimée.
Si les syndromes psychiques se rencontrent habituellement chez les
femmes vivant dans des conditions objectives de détresse ( isolement, absence d'enfant,
ou ruptures ) ils existent aussi chez les femmes ayant apparemment réussi leur vie et ne
sont nullement apaisés par des appels à la raison que ne manquent pas de leur adresser
leur médecin de famille ou leur spécialiste.
Enfin, les signes de carence estrogénique sont aussi souvent présents,
révélés par leur 3 grands témoins: les bouffées vasomotrices, la dyspareunie ( la
sécheresse vaginale) et l'insomnie qui peuvent exiger un traitement spécifique
complétant l'hormonothérapie.
L'examen à cette période montre l'extrême variabilité des stigmates
de la fonction ovarienne. On peut en effet observer des signes vulvo-vaginaux de carence
estrogénique ou, à l'inverse, une sécrétion cervicale abondante de glaire, alors que
la femme est en aménorrhée depuis quelques semaines, associée à une cytologie vaginale
démontrant l'absence de toute cellule basale.
Le principal caractère de la fonction ovarienne est en effet d'être
très instable.
Les dosages d'estradiol qui peuvent être très élevés ou très bas offrent le reflet
biologique de cette instabilité. Dans un travail non publié, présenté à Bordeaux, P.
FRANCHIMONT avait montré la rareté de la baisse de la progestérone chez les patientes
réglées examinées entre 45 et 55 ans, et chez lesquelles le prélèvement de sang avait
été effectué en période présumée post ovulatoire. En revanche, il existait une très
grande variabilité de taux d'estrogènes, qu'avait également observée Raymond TREVOUX.
Quant à la FSH, elle s'élève dès la quarantaine, mais non chez
toutes les femmes (REYES (9) ). Elle n'est donc pas très informative.
En somme, les dosages de base sont de peu d'utilité. En revanche, il
semble que l'on puisse apprécier l'état de la " réserve ovarienne " quand les
femmes de cet âge souhaitent une maternité.
En effet, un des paradoxes de cette période est la crainte de certaines
femmes lorsque s'installe une aménorrhée que celle-ci soit dûe à une grossesse alors
que d'autres n'ont qu'un seul désir : qu'elle soit en effet d'origine gravidique. Il est
probable, par contre, que pour toutes la perte du pouvoir reproducteur qui se profile à
l'horizon soit très mal ressentie.
Pour étudier cette réserve, le dosage de E2 et de FSH au 2ème et 1O-11ème jours du cycle, avec administration de 100mg de
clomiphène du 5ème au 9ème jour, tel que proposé par Navot, a montré qu'une
élévation franche de FSH avec réponse faible d'estradiol annonçait la perte ou une
très profonde réduction de la fertilité .
LA SITUATION PSYCHOLOGIQUE
est marquée par des facteurs personnels: prise de conscience de
l'approche de la sénescence, peur de la perte des aptitudes de la reproduction, peur
d'une grossesse non désirée ( provoquée par l'irrégularités des règles), facteurs
socio- professionnels, et retentissement des perturbations du partenaire. Celui-ci peut en
effet être surchargé des responsabilités et trop souvent hors du domicile familial ou
au contraire déjà en préretraite , déprimé, pesant en permanence de poids de sa
personne sur la vie de son épouse elle même soit habituée à une certaine autonomie,
soit encore active ce qui est source de conflits multiples. La situation des enfants
adolescents ou adultes jeunes peut également être préoccupante.
L'ensemble conduit à un état de mal être, un cercle vicieux se
constituant entre les troubles de cycle et l'état psychique, chacun renforçant l'autre !
LES EFFETS SUR LE COUPLE
Les facteurs socio-professionnels source d'un plus ou moins profond
déséquilibre et les altérations de l'humeur tant de la femme que de l'homme ont déjà
été décrits à de multiples reprises en tant que cause de <<mésententes
sexuelles>>. Mais il est des perturbations sexuelles qui paraissent plus liées à
l'âge qu'à la société. Le désir masculin s'apaise et il est alors grandement utile
que la femme prenne l'initiative. Mais elle même, freinée par l'insécurité causée par
les troubles menstruels, craignant parfois de trop montrer son désir ou à l'inverse sous
le coup de la carence estrogénique, n'y parvient pas toujours. Elle ne comprend pas
facilement les transformations de la sexualité de son mari, qui pourtant affectent la
majorité des hommes et elle les attribue à une désaffection ou une lassitude. Une
incompréhension peut alors s'installer entre les deux époux.
Le rôle du médecin est tout tracé. Il est essentiellement celui
d'expliquer aux deux partenaires les réactions de l'autre et leur universelle nature. Ce
qui malheureusement ne suffit pas toujours à rétablir une communication normale.
Cependant, les confidences de la patiente ne sont pas automatiques au cours de
l'interrogatoire et exigent une mise en confiance par le praticien, de l'intéressée ou
des deux membres du couple. Ainsi à cette période de la vie le médecin doit-il
considérer que même vis à vis de la femme qui paraît la mieux équilibrée du monde
une attitude d'écoute et de compréhension est toujours utile et parfois "absolument
nécessaire".
LES MALADIES ESTROGENODEPENDANTES
subissent une aggravation lors de la 5° décennie. Il s'agit
quelquefois d'endométriose externe, mais surtout des fibromes et de l'adénomyose.
Cette dernière affection a vu sa sémiologie s'affirmer avec
l'hystéroscopie ( larges orifices glandulaires, tâches bleutées bombant vers la
cavité, dilatations vasculaires périorificielles). La résection endométriale a montré
sa fréquence plus grande qu'on ne l'avait estimé jusqu'ici.
L'administration de progestatifs est souvent, mais non constamment,
efficace. Généralement, ce sont les durées prolongées d'administration de 14 jours ou
plus, commencée tôt dans le cycle, pour empêcher le pic d'activité ovulatoire
estrogénique qui sont alors proposées.
Une séquence de 3 mois d'agonistes de la LHRH peut s'avérer
nécessaire , dont les résultats sont aléatoires, mais souvent favorables permettant
alors quelquefois d'éviter un acte chirurgical.
LES TROUBLES INAPPARENTS
L'OSTEOPOROSE
La possibilité d'une perte de la densité osseuse est un des plus
importants. Celle-ci est considérée comme un risque fréquent par certains spécialistes
et comme surévaluée par d'autres.
En fait, les travaux anciens de ORIMO et SHIRAKI (7) avaient montré que
la perte osseuse ne commence à devenir perceptible qu'après 5O ans. Des travaux plus
récents rapportés en Congrès à Jérusalem, utilisant cette fois l'absorptiométrie
biphotonique a montré à DE ALOISIO, que l'âge chronologique était sans importance. Les
femmes entre 4O et 5O ans à cycles réguliers n'avaient pas de chute de la densité
osseuse tandis que celles surtout entre 45 et 47 ans, dont les cycles étaient devenus
anarchiques, présentaient une réduction de leur masse osseuse. Cette constatation peut
être rapprochée selon des considérations théoriques différentes soit à la baisse de
la production d'estrogènes soit à celle de la progestérone PRIOR ( 8)
Au total le rôle des progestatifs dans le maintien de la densité
osseuse gagnerait à être mieux connu, car s'il est vrai qu'il peut être très
satisfaisant comme tend à le montrer l'étude de RIBOT, TREMOLLIERES et al. ( 18
l'administration de ces molécules trouverait une deuxième justification.
L'ENDOMETRE ET LES RISQUES DU CANCER
Les risques de cancer de l'endomètre sont évidemment liés à la
possibilité chez les femmes en anovulation d'un effet néfaste d'une secrétion
estrogénique continue. Et il est bien connu que les femmes qui sont le plus souvent
atteintes de cancer de l'endomètre avant la ménopause, sont les femmes souffrant
d'anovulation, telle qu'on le rencontre dans le cas du syndrome de Stein Leventhal
Mais peut on considérer que des simples irrégularités menstruelles de
cette période préménopausique, sont susceptibles de favoriser soit avant la ménopause
soit après celle-ci, la survenue de cancer de l'endomètre? Il faut bien reconnaitre que
les preuves ne sont pas évidentes d'autant que les cancers liés à la pilule
séquentielle sont essentiellement survenus dans les cas de pilule tout à fait
déséquilibrées avec une forte composante estrogénique et un progestatif faible ( la
dimethisterone ) et donné seulement pendant 6 jours.
Néanmoins cette suspicion peut être considérée comme vraisemblable.
Un travail relativement récent ( SHAPIRA ( 11) ) a montré que le cancer était beaucoup
plus fréquent chez les femmes atteintes d'obésité androïde que gynoïde. Le syndrome
de Stein-Leventhal entre dans ce cadre des obésités avec androgénie. Peut être dans
les autres situations, le rôle de l'anovulation a-t-il été surévalué ?
Le traitement
On sait que cette période est consacrée à la thérapeutique
progestative (voir Rozenbaum (10)).
L'administration de progestatifs est en effet sûrement justifiée chez
les femmes souffrant de maladies estrogénodépendantes. Elle l'est également chez celles
qui présentent une aménorrhée avec signes de sécrétion estrogénique persistante,
démontrée par l'examen gynécologique. On peut aussi en obtenir un effet favorable
lorsqu'existe un syndrome prémenstruel perturbant qu'il soit à prédominance psychique
ou physique. Il sera cependant, parfois nécessaire de changer de type de progestatif ou
de durée de l'administration ( plus le début dans le cycle est précoce et la durée du
progestatif prolongée et plus l'effet antiestrogénique sera puissant) pour obtenir
l'effet désiré qui parfois ne sera pas atteint malgré toute l'attention du praticien.
La dernière indication est la simple irrégularité menstruelle quand
elle perturbe la femme, la prescription de 12 jours de progestatif à partir du 14° jour
du cycle, pendant 3 mois, au moins, est parfois suivie d'une longue période de règles
régulières, mais elle peut aussi être inefficace et il n'est pas rare que des troubles
vasomoteurs n'apparaissent alors, révélateurs de l'effet antiestrogénique du
progestatif.
En revanche, l'administration systématique de progestatifs telle
qu'elle est souvent conseillée, plus ou moins clairement en France, nous parait
totalement injustifiée et nous attendons la démonstration de son utilité.
La question la plus difficile est posée par ces femmes qui souffrent
par intermittence de troubles provoquées par la carence estrogénique. Car de faibles
doses d'estrogènes suffisent parfois à provoquer des manifestations de surdosage en
particulier mammaire, mais parfois aussi un ballonnement abdominal. Dans d'autres cas,
elles ne permettent pas d'effacer les troubles et donnent à la patiente le sentiment
d'une impuissance de la médecine. Mais plus souvent encore, ce sont les saignements
irréguliers et incontrôlables qui perturbent la patiente et cela qu'elle prenne le
traitement hormonal conseillé ou qu'elle s'en abstienne!.
Pour surmonter cette inefficacité, deux formes de traitements insolites
ont été proposés.
Soit comme l'évoque Albert SINGER (14) l'administration d'une dose
forte d'estrogènes par exemple, les patchs d'estradiol à 1OO mcg, continus, associés à
une dose de progestatif séquentielle suffisamment forte pour compenser l'activité
estrogénique.
Dans ce cas, il n'y a plus à craindre de fluctuations estrogéniques car la forte dose
les efface.
Soit même, en suivant la voie tracée par les auteurs canadiens,
l'administration d'un analogue de la LHRH pour annuler les sécrétions endogènes avec
addition de doses habituelles ou réduites du traitement séquentiel estroprogestatif.
Le coût de ces propositions est tel qu'on ne devrait les proposer qu'à
des cas d'une extrême gravité ( et d'une réelle rareté)
Quant aux médicaments de confort, en particulier ceux qui réduisent la
fréquence et la sévérité de troubles vasomoteurs et facilitent les relations
sexuelles, ils doivent être largement proposés. De même que les estrogènes à action
locale, le promestriène ayant l'avantage de sa neutralité systémique et pouvant servir
sous forme de crème à faciliter les rapports sans risque d'estrogéniser le partenaire
masculin.
LA DEMANDE DE CONTRACEPTION
La contraception progestative trouve ici son indication la plus
satisfaisante, non plus au moyen des dérivés de la 19 nortestostérone, mais à l'aide
de dérivés prégnanes ( chlormadinone) et 19 norprégnane ( acétate de Nomegestrol,
Promegestone ). L'administration pendant 18 jours sur 28 ( ou selon les préférences des
femmes à partir du 8° jour du cycle, pendant 18 jours si elles sont bien réglées ) a
le double avantage d'offrir une protection contre les maladies qu'aggrave
l'hyperestrogénie et d'éviter l'ingestion d'éthinyl estradiol dont les inconvénients
vasculaires s'accroissent avec l'âge. Néanmoins, certaines femmes souffrent alors de
saignements que l'on a attribués sans grande consistance à l'hypoestrogénie. On peut
ajouter au progestatif un estrogène faible ( ou une faible dose d'estradiol ) soit
pendant les 1O derniers jours, soit pendant la totalité de la séquence progestative.
Il arrive parfois que cette forme de contraception soit mal tolérée.
Il est aussi sage de rappeler à la patiente que la méthode n'est pas encore totalement
évaluée et qu'elle n'est pas légalement reconnue en tant que méthode contraceptive.
La prise de pilule combinée est parfois évidemment souhaitée par la
patiente qui ne se voit pas vieillir. Si les antécédents familiaux ne révèlent pas
d'accidents vasculaires précoces et si le bilan biologique est satisfaisant, la poursuite
de cette pilule, à la condition de lui en faire partager la responsabilité, n'est pas
réellement interdite. Il se posera alors, à un moment ou à un autre, la question de la
mise en évidence de l'interruption de la fonction ovarienne, déficience dont les
manifestations sont voilées par la contraception combinée. Son arrêt durant 1 mois est
éventuellement à proposer, ou peut être un dosage de FSH en fin de la phase
d'interruption de la pilule.
Le stérilet reste cependant chez la majorité des femmes qui ne
souffrent ni de dysménorrhée, ni d'hémorragies, la meilleure contraception. C'est
également à cette période que la stérilisation trouve son indication préférentielle.
Le problème posé tient dans la crainte que n'apparaissent alors les troubles liés au
vieillissement utérin ( adénomyose, troubles du cycle ) que la patiente peut attribuer
à la pose des ligatures tubaires.
Cet aspect évolutif mérite donc toujours d'être envisagé avec la patiente avant
l'intervention.
Le choix de la date du début du traitement est très délicat. Comme y
insiste Alain TAMBORINI ( 16), un début très précoce conduit aux saignements, aux
irrégularités menstruelles et au rejet de l'HSM. Un début trop tardif donne à la
patiente le sentiment d'une forme d'abandon.
C'est là encore, une des grandes difficultés de l'abord thérapeutique
de la période périménopausique pour le médecin.
LA MENOPAUSE TARDIVE
Le traitement estrogénique de la période ménopausique tardive ne se
justifie habituellement de " première intention " qu'en raison de la
découverte d'une ostéoporose. Certes, il arrive mais cela est rare que le traitement
substitutif, déjà institué depuis des années, doive être modifié, en particulier
parce que les bouffées de chaleur reparaissent ou subissent une aggravation inexpliquée.
Ces cas sont cependant banaux. En fait, le plus souvent dans cette éventualité, il
s'agit de patientes dont les bouffées vasomotrices ont toujours été difficiles à
apaiser et qui habituellement en raison d'agressions psychologiques récentes, subissent
une poussée. Les causes de stress étant généralement hors de pouvoir des médecins, il
est sage d'éviter l'escalade des doses d'estrogènes qui, de manière générale, n'a pas
d'effet favorable durable sur cette forme de troubles.
Dans la situation plus délicate de la mise en route d'un traitement de
la carence estrogénique établie depuis longtemps, le médecin doit faire preuve de
beaucoup de prudence. La tolérance est habituellement médiocre car une tension mammaire
et/ou pelvienne survient plus ou moins rapidement, que la patiente tolère mal.
Une autre forme non rare de complication à cet âge, est le
développement d'une hématométrie. La sténose cervicale probablement par synéchie des
parois du barillet endocervical est l'élément favorisant de la rétention intra-utérine
qui découle probablement d'une réponse endométriale relativement rapide. L'existence de
lésions endoutérines en particulier de fibrome ( qui ont pu être la cause de la non
prescription de l'estrogénothérapie lors du début de la ménopause ) contribue à
l'apparition rapide de l'hématométrie.
Bien que cet accident ne soit pas une contre-indication de la poursuite
du traitement hormonal et qu'une dilatation cervicale associée à un curetage après
vérification éventuelle de la cavité par hystéroscopie, puisse corriger
l'hématométrie et permettre la prolongation de l'administration estroprogestative, il
détermine dans la majorité des cas, le refus de la patiente de le poursuivre.
Il est donc souhaitable de ne commencer cette forme de traitement que
par des doses minimes et de recourir à la modalité dite continue sans règles, telles
que STALAND (15) et MATTSON ( 4) l'ont imaginé. Le progestatif est donc associé
d'emblée à l'estradiol empêchant la genèse des récepteurs à l'estrogène et à la
progestérone. CHRISTIANSEN (1,2) d'une part, et MUNK JENSEN (6) de l'autre, ont montré
la plus grande efficacité de cette modalité thérapeutique sur l'os par rapport à la
méthode séquentielle qui apporterait un meilleur avantage dans le domaine de la
protection vasculaire. Néanmoins d'après CHRISTIANSEN et RIIS (2) les effets sur les
paramètres lipidiques de l'association quotidienne 2mg d'estradiol micronisés et 1mg
d'acétate de norethistérone + 500mg de calcium ont été bénéfiques: baisse de 12% des
triglycérides, du cholestérol total et du LDL cholestérol et baisse de 8% environ du
HDL cholestérol. En ce qui concerne la tolérance clinique elle a été correcte: aucun
effet secondaire majeur, seule quelques femmes ont présenté des saignements de peu
d'abondance.
Les faibles doses administrées ne doivent pas dépasser au départ 1/4
de la dose habituelle. Ainsi, un quart de dragée d'estrogènes conjugués équins, ou un
quart de comprimé d'estradiol , ou un quart de dose de gel d'estradiol ou le patch à 25
mcg associés à un comprimé de progestérone micronisé ou une demi-dose de progestatif
de synthèse pourraient être proposés à la patiente pendant au moins trois mois, quitte
même à réduire ces doses, si elles sont mal supportées et à les accroître en
l'absence de toute réaction.
Il semble souhaitable avant le début de traitement, au même titre que
la mammographie, d'exiger une échographie utérine et endométriale. En revanche, une
biopsie systématique parait injustifiée si la femme n'avait présenté aucun trouble,
sauf si l'échographie met en évidence un épaississement endométrial.
La poursuite du traitement ne sera à vrai dire possible de façon
prolongée que dans une proportion modérée des cas et le gynécologue devra souvent
confier sa patiente à un rhumatologue qui mettra alors en oeuvre un traitement non
stéroïdien de l'ostéoporose.
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