LES MICRO CALCIFICATIONS MAMMAIRES : BASES DU DIAGNOSTIC
RADIOLOGIQUE ET PROTOCOLE MULTICENTRIQUE D'ETUDES DES
CORRELATIONS RADIO-ANATOMIQUES
S.UZAN
Introduction
La mise en place de politiques de dépistage des cancers du sein a
abouti à la découverte de plus en plus fréquente de lésions purement radiologiques au
premier plan desquelles se trouvent les micro calcifications. Ces lésions peuvent
correspondre avec une fréquence variable selon leur aspect à soit une lésion à haut
risque de transformation cancéreuse, soit à une lésion déjà cancéreuse in situ ou
parfois même infiltrante. La décision, en présence de telles lésions, dépend
exclusivement de l'évaluation du risque d'anomalies" histologiques qui leur est
associée.
Les micro calcifications visibles uniquement à la mammographie isolées
ou en foyer sont un signal relativement fréquent ayant une bonne sensibilité mais une
mauvaise spécificité en matière de cancer du sein.
Leur excellente sensibilité explique que leur présence est à
l'origine de la découverte de près de 70 % des cancers occultes, leur mauvaise
spécificité explique que le pourcentage de biopsies aboutissant à la découverte de
lésions histologiquement bénignes varient selon les séries de 60 à 80 %.
C'est pourquoi théoriquement, la présence de micro calcifications ne
doit à priori constituer qu'un des symptômes permettant une sélection des patientes
chez qui l'on devra effectuer une biopsie.
Disons d'emblée qu'il n'existe pas à proprement parler de micro
calcifications typiquement bénignes ou malignes mais que certains aspects correspondent
à un risque plus ou moins élevé.
Une stratégie relativement "agressive" à l'égard des micro
calcifications se justifie par les éléments suivants :
- Même si l'on considère depuis une quinzaine d'années que le cancer
du sein doit être considéré plus comme une maladie systémique que comme une maladie
locale (les recherches de micro métastases au stade les plus initiaux des cancers
infiltrants vont dans ce sens).
- Il n'en reste pas moins que le stade de découverte et de traitement
de la tumeur reste un des éléments pronostics essentiels.
- En effet, la taille de la tumeur lors de sa découverte est en
relation non seulement avec un nombre de doublement différent (trois doublements pour
passer de un à deux centimètres) mais également correspond à des critères biologiques
d'agressivité différents ainsi qu'à un risque d'invasion ganglionnaire différent.
Cette notion d'agressivité explique que certains cancers N (+) de moins
de 15 mm ont la même survie que des cancers N (-) d'une taille supérieure.
Le gain de temps dans la découverte du cancer est donc un élément
pronostique essentiel : une anticipation d'un an sur le traitement abaisserait pour
certains auteurs le risque potentiel de micro métastases de 30 %, ce qui est à
rapprocher de la réduction de mortalité de 30 % produite par certaines campagnes de
dépistage de masse.
PHYSIOPATHOLOGIE ET RAPPELS ANATOMOPATHOLOGIQUES
- Le premier point à rappeler est que les micro calcifications
observées sur les mammographies ne correspondent pas aux micro calcifications que
retrouvent et décrivent les anatomopathologistes. Celles décrites par ces derniers sont
beaucoup plus petites et peuvent parfois être détruites par certaines préparations de
la pièce.
- Le second point qu'il faut rappeler est que toute macrocalcification a
été "micro" à un moment donné de son développement.
- La définition actuelle d'une micro calcification est celle d'un
dépôt calcaire dont la taille est inférieure à un millimètre mais en fait, certaines
calcifications de plus grandes tailles mais d'un aspect typique (tel que celle des
comédo-carcinomes) sont à rapprocher de cette définition.
La présence de micro calcifications peut être liée à un processus
inflammatoire, dégénératif, métabolique ou même traumatique.
- Les calcifications peuvent être soit un produit de sécrétion de la
cellule (lorsque le pôle sécrétoire de la cellule s'inverse, les calcifications
apparaissent alors entre cellules et membranes basales), mais elles peuvent également
correspondre à des cellules endommagées desquamant dans la lumière des galactophores et
se calcifiant secondairement. C'est le cas par exemple des comédo-carcinomes où les
calcifications correspondent à des zones de nécrose.
- En résumé, les calcifications peuvent se produire soit dans les
espaces glandulaires, soit dans le stroma environnant, soit dans les cellules tumorales
elles-mêmes.
On distingue théoriquement deux types de calcifications :
* Le premier type est fait de calcifications polyédriques plutôt
associées à des lésions bénignes. Ces cristaux se forment lentement à partir du
produit de sécrétion stagnant que l'on observe au cours de certaines mastopathies
chroniques.
* Le second type est fait plutôt de calcifications non cristallines à
surface irrégulière plutôt composées de phosphates de calcium et on les retrouve très
fréquemment dans les cancers mais également dans une grande partie des lésions
bénignes.
Des études de plus en plus fréquentes de corrélation
anatomoradiologique permettent d'approcher le mécanisme de formation de ces
calcifications qui sont généralement le moule de la partie à partir de laquelle elles
se constituent (canal, lobule, une partie de l'arbre galactophorique ou la structure
cellulaire elle-même).
Dans son travail d'études des corrélations anatomoradiologiques,
Madame CONTESSO observait qu'en cas de lésions malignes les micro calcifications étaient
plus fréquemment irrégulières et qu'elles siégeaient le plus souvent dans la lumière
des canaux ou des cavités. En fait, elle décrivait également de nombreuses formes avec
des micro calcifications retrouvées au sein des travées néoplasiques voire directement
implantées dans le stroma.
Le dernier point qu'il faut rappeler est fondamental : les micro
calcifications siègent souvent (20 à 30 % des cas) non pas dans le carcinome lui-même
mais dans des foyers mastosiques ou de parenchyme normal avoisinant. Ceci est fondamental
car cela conditionne à notre avis la taille de la biopsie qui doit être réalisée en
cas de micro calcifications. Des micro biopsies purement dirigées sur ces micro
calcifications ou même des biopsies chirurgicales de petite taille ont donc d'emblée 20
à 30 % de risques de passer "à côté" de la lésion.
- Enfin dans un certain nombre de cas, la micro calcification a été
pour nos patientes une circonstance de découverte purement accidentelle de lésions
néoplasiques situées au voisinage mais sans lien direct avec ces micro calcifications.
TECHNIQUES RADIOLOGIQUES
Il sort bien entendu du cadre de notre exposé, de décrire de façon
exhaustive les techniques de mammographie et nous ne ferons que rappeler quelques points
qui nous ont paru important.
- La mise en évidence de micro calcifications nécessite des clichés
d'excellente qualité avec au moins deux incidences (et plutôt trois : face-profil et
axillaire). Bien entendu, dans les campagnes de dépistage, ces trois incidences ne sont
pas possibles (d'un point de vue économique) et le cliché oblique est généralement
celui qui est retenu mais l'on sait d'emblée qu'il "ratera" environ un tiers
des cas de micro calcifications.
- La totalité de la glande doit être examinée en particulier la face
profonde par des clichés en traction sur le sein.
- En cas de doute, des clichés en agrandissement directs sur chaque
foyer (si possible avec deux incidences orthogonales) sont indispensables pour prendre une
décision.
- La qualité du matériel (radiologique et films) utilisé joue un
rôle déterminant dans l'obtention d'images permettant une interprétation précise.
- Les artefacts (en particulier cutanés) sont finalement assez rares et
sont relativement faciles à éliminer.
- Ces dernières années ont vu apparaître des techniques de
numérisation permettant "à priori" d'améliorer l'image. En fait, il faut
encore évaluer l'apport de ces techniques avant de porter un jugement définitif à leur
égard.
- En fait, la numérisation consiste à transformer une image découpée
en surfaces élémentaires qui deviennent alors des points (pixel). Chacun de ces pixels
sera affecté d'un coefficient proportionnel à l'intensité lumineuse de la surface
élémentaire lui correspondant. Ceci revient donc à quantifier l'image.
Cette transformation aboutit à la création d'une image numérique à
partir d'une image analogique.
Cette transformation peut se faire de plusieurs façons :
- La numérisation directe où le mammographe est lui-même numérique.
L'image du sein après le passage des rayons X est directement transmise à un ordinateur.
Dans ce système, le film mammographique actuel disparaît. Ces systèmes sont en fait en
cours d'élaboration et ne sont pas pour l'instant disponibles en pratique.
- La numérisation semi-directe où le mammographe est conventionnel
mais les cassettes de mammographie donnent après un traitement particulier (lecture par
un faisceau laser) une image numérisée. Là encore, la définition de l'image obtenue
est pour l'instant, à notre avis, inférieure à celle de l'image mammographique
conventionnelle. Par contre, sa résolution en contraste et dans certaines situations
(cicatrice, sein avec prothèse) semble donner d'excellents résultats.
- La numérisation indirecte enfin pour laquelle la mammographie
s'effectue de façon conventionnelle. La numérisation est effectuée que dans un second
temps à partir du film mammographique et sur une anomalie localisée détectée par le
médecin (en particulier un foyer de micro calcifications).
Dans cette technique, la résolution spatiale du film numérisé va
dépendre du film initial, du nombre de pixels à numériser (d'où l'intérêt de
numériser une zone sélectionnée) et de la performance du système de numérisation.
Le cliché mammographique ayant une résolution au contraste très
supérieure au seuil de perception de notre oeil, c'est pourquoi l'on peut détecter la
présence de micro calcifications dans un sein dense après traitement numérique de
l'image.
En pratique, on procède de la façon suivante :
* La découverte d'un signal anormal sur le cliché mammographique
entraîne des clichés localisés agrandis avec deux incidences orthogonales. Cette
première étape nous permet d'une part de confirmer la présence des micro calcifications
et d'autre part, de confirmer qu'elles restent regroupées sur les deux incidences ce qui
permet alors de parler de foyers. De plus, la modification de formes des micro
calcifications sur les deux incidences peut parfois orienter sur l'origine lobulaire de
ces micro calcifications.
* L'image mammographique est ensuite captée sur un moniteur haute
résolution, on obtient alors un agrandissement optique de 10 par la mise en place d'un
zoom. Un zoom numérique (multiplié par deux) permet encore d'élever le niveau
d'agrandissement. On peut ainsi détecter des signaux de l'ordre de 20 microns.
* L'image est ensuite traitée de façon à extraire les micro
calcifications du milieu environnant par une technique de "seuillage". Cette
technique permet en particulier d'améliorer la visualisation des micro calcifications
dans les plages denses de fibrose. L'utilisation de filtres permet d'optimaliser encore
l'image.
* Le temps suivant est une analyse morphométrique des micro
calcifications ainsi obtenues.
Schématiquement, un traitement du signal obtenu permet de quantifier
(ou plutôt de qualifier) la forme des micro calcifications en particulier par l'étude de
la compacité et de l'excentricité.
* Schématiquement, les calcifications rondes plutôt lobulaires sont
associées à une pathologie bénigne.
* A l'inverse, les calcifications allongées en bâtonnets irréguliers
plutôt canalaires seraient plutôt associées à une pathologie maligne.
Théoriquement, cette étude de compacité permet de mieux sélectionner
les patientes à opérer.
Le chiffre obtenu pour chaque calcification tend vers "1"
lorsque la calcification est parfaitement ronde et vers "0" lorsque celle-ci a
tendance à s'allonger.
* L'intérêt essentiel de cette étude morphométrique est selon nous
de pouvoir préciser au mieux le nombre, la forme, la disposition de ces calcifications
(en foyer ou le long d'un canal galactophorique). Cette analyse morphométrique permet
également de suivre au mieux l'évolution de ces calcifications. Cette analyse a enfin
une valeur didactique fondamentale. Par contre, en l'état actuel des choses, elle
n'intervient que "secondairement" dans la décision opératoire en la
renforçant éventuellement par la quantification ainsi obtenue.
* Théoriquement, l'analyse morphométrique permet d'améliorer les
résultats en matière de prédiction du cancer avec une sensibilité qui serait de 70 %
et une spécificité de 80 %. Surtout, la valeur prédictive positive serait de 82 % et
une valeur prédictive négative de 65 %. Quoiqu'il en soit, ces chiffres même s'ils sont
encourageants démontrent que quelque soit la technique morphométrique utilisée, aucune
image permet de récuser le diagnostic de cancer.
* En pratique, nous utilisons les micro calcifications dans les foyers
de type intermédiaire II, III et IV et dans les cas de surveillance de patientes soit
lorsque l'intervention a été récusée, soit même lorsque celle-ci a été pratiquée
et cette technique nous a permis d'affirmer la réapparition de calcifications strictement
similaires chez les patientes chez qui elles avaient disparu après l'intervention.
* Notons que cette technique est utilisable également de façon
rétrospective sur des clichés anciens et permet alors une étude comparative même à
posteriori.
* Au total, il s'agit pour nous d'un argument supplémentaire qui
viendra permettre de mieux sélectionner les patientes à opérer, de mieux surveiller les
foyers pour lesquels la surveillance régulière aura été préférée.
* Dans la surveillance des foyers de micro calcifications, à part le
cas des comédo- carcinomes, la surveillance à six mois ne modifie généralement pas le
pronostic.
CORRELATIONS ANATOMORADIOLOGIQUES ET CLASSIFICATIONS
La classification la plus classiquement utilisée est celle de LE GALL
(tableau 1).
Cette classification peut être intégrée à un score où seront pris
en compte l'âge, la forme du foyer, le nombre de foyers, le nombre de micro
calcifications. En fait, tous les scores quelqu'ils soient s'ils améliorent la
sensibilité ne permettent pas d'avoir une spécificité suffisante pour éventuellement
récusée une indication opératoire qui reste basée sur un ensemble d'arguments plutôt
que sur un score. Nous voudrions également insister sur quelques éléments :
- Les micro calcifications vermiculaires (moulant le galactophore) sont
aisées à reconnaître et très souvent associées à un carcinome in situ intracanalaire
souvent de type comédo- carcinome.
- Les micro calcifications dont l'aspect granuleux, irrégulier, parfois
punctiforme surtout si elles sont regroupées en amas ont également un risque élevé de
cancer. Les calcifications (même de forme régulière) mais orientées, regroupées selon
un cheminement pouvant évoquer un galactophore sont également très suspectes.
- Les micro calcifications associées à une image micro stellaire
(pouvant faire évoquer un centre prolifératif d'aschoff) sont souvent associées à de
petits carcinomes tubuleux.
- A l'inverse, les micro calcifications rondes évoquant une tasse de
thé ou un croissant sont le plus souvent bénignes.
- Les calcifications annulaires à centre clair doivent faire penser à
des calcifications de glandes sébacées.
- Les calcifications parasitaires sont rares et ont un aspect
caractéristique.
LA DECISION
Même si de nombreuses tentatives ont été faites voulant aboutir à
l'utilisation de scores où de systèmes experts associant les données de la radiologie,
de l'anamnèse, de l'interrogatoire et de l'examen clinique, la décision est en fait
très souvent "pragmatique".
A notre avis, le meilleur système est celui de la décision
individuelle confrontée à un avis collégial. En fait, chaque système a ses avantages
et ses inconvénients et l'analyse à posteriori vient souvent nous révéler les
imperfections de ceux-ci.
La décision repose sur plusieurs éléments :
- L'aspect des micro calcifications.
- Les antécédents personnels et familiaux.
A titre d'exemple, la survenue d'un foyer de micro calcifications chez
une patiente ayant déjà été opérée d'un cancer du sein fera plus
"facilement" l'objet d'une biopsie.
La décision elle-même est en fait relativement simple : surveiller ou
opérer.
- Si l'on décide de surveiller, c'est que l'on estime que le risque
d'être en présence d'une lésion carcinomateuse est insuffisamment élevé pour motiver
une intervention. Les modalités de cette surveillance sont généralement les suivantes :
réalisation d'un premier contrôle radiologique (quatre à six mois plus tard), mais si
lors de ce second contrôle la décision de ne pas opérer est maintenue, il faut qu'elle
corresponde à une décision de nouveaux contrôles à un an sinon il vaut mieux
considérer que la lésion est suffisamment ambiguë pour réaliser une exérèse.
- Lorsqu'on décide de pratiquer une intervention, elle sera réalisée
selon des modalités abordées dans un autre chapitre.
Nous voudrions aborder ici les alternatives à la biopsie chirurgicale.
Bien que l'on ait dit que le choix était binaire entre surveillance et biopsie, un
certain nombre d'auteurs ont proposé d'autres moyens d'exploration. Deux moyens semblent
connaître un regain d'intérêt : il s'agit d'une part de la ponction cytologique (mais
à notre avis ce regain d'intérêt n'est pas justifié en matière de micro
calcifications) et d'autre part, de la microbiopsie réalisée éventuellement avec des
dispositifs permettant d'effectuer un prélèvement précis et suffisamment significatif.
La plupart des publications concernant les prélèvements biopsiques font appel à une
technique combinant la stéréotaxie et les pistolets automatiques (type Biopty-Gun). Ces
pistolets automatiques présentent l'avantage de donner de bons échantillonnages de
carotte de 11 à 20 mm assez bien analysables en anatomopathologie.
Ces biopsies sont réalisées après anesthésie superficielle à
travers une aiguille de 18 G. Les prélèvements effectués au moyen de pistolets
automatiques permettent grâce à la vitesse d'exécution et à la forte puissance de
pénétration de l'aiguille d'avoir l'assurance de prélever du tissu mammaire dans des
conditions de confort acceptables.
La technique elle-même explique les limitations de ces résultats :
elle explore une petite zone de micro calcifications et comme nous avons vu plus haut que
la lésion carcinomateuse ne siègeait parfois que dans une des régions de micro
calcifications voire même à l'extérieur de la zone de micro calcifications, on comprend
aisément qu'une telle biopsie ait entre 30 et 50 % de chance de "rater" la
lésion carcinomateuse.
Le dernier point que nous voudrions évoquer au chapitre de la décision
est celui de la stratégie diagnostique et thérapeutique.
Il est en effet souvent difficile, impossible et même dangereux de
vouloir réaliser un examen extemporané de ces micro calcifications, c'est pourquoi la
plupart des auteurs préfèrent retirer la pièce, l'orienter soigneusement, en repérer
les bords et la confier à l'anatomopathologiste en même temps que la radiographie de la
pièce opératoire. En effet, seule une étude détaillée sur coupes en paraffine
(permettant de relire plusieurs fois les lames voire même de les faire circuler auprès
d'autres équipes) permettra d'aboutir à un diagnostic précis, détaillé permettant de
prendre une décision thérapeutique parfois lourde de conséquences.
Il arrive (dans environ 5 à 10 % des cas) qu'une "reprise"
soit nécessaire (lorsque les lésions carcinomateuses sont en bordure de la pièce),
avant de prendre une décision définitive.
LES RESULTATS D'UNE PREMIERE SERIE REALISEE A L'HOPITAL TENON
Sur une première série de 120 patientes opérées pour micro
calcifications, il nous a paru intéressant de présenter les différents pourcentages de
résultats observés. Ils sont indicatifs de la philosophie "générale" de
l'abord chirurgical de ces lésions.
- 35 % des lésions correspondent à une lésion carcinomateuse.
- 70 % de ces lésions carcinomateuses sont des cancers in situ et
correspondent parfaitement à l'objectif de dépister des cancers à un stade in situ et
donc aisément curables.
- A ces lésions carcinomateuses s'ajoutent 20 % de lésions
correspondant à des lésions bénignes mais à haut risque. Il s'agissait essentiellement
d'hyperplasie comportant des contingents plus ou moins importants d'atypie et faisant donc
rentrer ces lésions dans le cas des mastopathies à haut risque.
- La découverte de ces lésions est également importante soit pour
prendre certaines précautions thérapeutiques (interruption de traitements hormonaux
substitutifs pour certains), soit pour guider au mieux la fréquence de la surveillance.
- Dans certains cas à l'inverse, la découverte de lésions
parfaitement rassurantes permet de lever certains "interdits".
- C'est donc au total près de 50 % des prélèvements qui aboutissent
à la découverte de lésions soit malignes, soit à haut risque de dégénérescence.
LE PROTOCOLE PROSPECTIF
Pour ce protocole, quatre équipes ayant une expérience assez large de
la chirurgie des foyers de micro calcifications ont décidé de grouper leurs conceptions
stratégiques et surtout de les comparer. Cette comparaison avait pour but d'une part,
d'étudier les points communs les plus intéressants et d'autre part, de tenter de
dégager des critères correspondant à la découverte de lésions ayant le plus haut
risque.
Dans ce but, quatre équipes (Institut Curie, Hôpital de la
Salpétrière, Hôpital Rothschild, Hôpital Tenon) ont réalisé une étude
rétrospective de 200 cas de micro calcifications ayant fait l'objet d'une biopsie
chirurgicale.
- 50 cas provenaient de chacun de ces centres.
- Bien entendu, ces micro calcifications ayant toutes fait l'objet d'une
exploration chirurgicale correspondaient donc à un "seuil" minimum de risques
carcinomateux. Il a été toutefois jugé intéressant de voir si l'ensemble des
opérateurs considéraient que la totalité de ces lésions devaient être opérées. Nous
avons également essayé de dégager les facteurs décisionnels de chaque équipe. Enfin,
la lecture des 200 clichés a été effectuée en aveugle (sans connaître le résultat
anatomopathologique) par chacune des trois autres équipes. Le but étant après lecture
des clichés de répondre aux questions suivantes :
- Fallait-il opérer la patiente et si non, pourquoi ?
- Si l'indication opératoire existait, s'agissait-il plus probablement
d'une lésion bénigne, maligne ou douteuse ?
La comparaison des résultats d'une lecture en aveugle aux résultats
exacts permettant de dégager d'éventuelles corrélations anatomo radiologiques.
Lors de la rédaction de ce chapitre, les résultats n'étaient pas
encore disponibles et c'est pourquoi ils n'y figurent pas. Ils feront l'objet d'une
présentation lors du congrès lui-même.
CONCLUSION
Nous voudrions rappeler quelques points concernant la découverte de ces
lésions infra cliniques :
- Comme nous l'avons vu sur les chiffres que nous venons de citer, leur
découverte est fondamentale puisqu'elle va conduire dans près de la moitié des cas à
la découverte d'une lésion cancéreuse ou à haut risque de dégénérescence.
- La découverte de ces lésions repose sur la qualité des clichés de
mammographie.
- Il ne faut pas hésiter à recourir à des incidences supplémentaires
et à des clichés en agrandissement qui dans notre expérience nous ont permis d'étudier
encore mieux la morphologie et l'aspect de ces lésions infra cliniques.
- A ce jour, la numérisation si elle semble nous aider dans certains
cas, ne paraît pas avoir apporté des éléments décisifs quant à la décision
chirurgicale.
- La réalisation de clichés de mammographie soit dans les populations
à risque, soit lors de campagnes systématiques, soit chez les patientes devant recevoir
un traitement substitutif de la ménopause, semble aujourd'hui être en mesure d'atteindre
l'objectif qui lui avait été fixé, c'est-à-dire de découvrir des lésions infra
cliniques dont l'exérèse chirurgicale permet soit l'éradication de la lésion
cancéreuse, soit son traitement à un stade initial de très bon pronostic.
On peut également retenir que les micro calcifications sont le plus
souvent liées à une pathologie bénigne, que le rôle du radiologiste est de participer
au sein d'une équipe, associant le praticien, le gynécologue, le chirurgien et surtout
l'anatomopathologiste, à l'élaboration d'une stratégie adaptée à chaque cas.
L'instauration de contrôles de qualité avec des ratios de pourcentages
bénins-malins opérés, nous apparaît indispensable avec la possibilité de remettre en
question à chaque instant, nos méthodes d'analyses en ayant pour seul but de ne pas
méconnaître un cancer du sein.
Par contre, le dépistage de masse a remis en valeur la chirurgie
première des tumeurs du sein, compte tenu de la prédominance des traitements
conservateurs et du peu d'intérêt des traitements néo-adjuvants, pour les petits
cancers.
BIBLIOGRAPHIE
Des éléments détaillés pourront être trouvés dans les ouvrages
suivants :
1 - BLANC B., BOUBLI L. Gynécologie Editions Pradel, EDISEM, 1989
2 - BOHMERT H.H., LEIS H.P., Jr, JACKSON I.T. Breast Cancer Conservative
and Reconstructive Surgery Thieme, 1989
3 - DISAIA P.J., CREASMAN W.T. Clinical Gynecologic Oncology
Fourth Edition, Mosby Year Book, 1993
4 - Early Breast Cancer Trialists' Collaborative Group Treatment of
Early Breast Cancer Volume 1 Worldwide Evidence 1985-1990 Oxford Medical Publications,
1990
5 - PETIT J.Y. Cancer du sein Chirurgie diagnostique curative et
reconstructrice Préfaces de Umberto Veronesi et Madeleine Lejour Medsi/Mc Graw-Hill, 1991
6 - PIANA L., SERADOUR B., BONNIER P. Les lésions infracliniques du
sein. Du dépistage radiologiques des cancers, au traitement XIVèmes Journées Nationales
de la Société Française de Sénologie et de Pathologie Mammaire. Ed. Vigot, 1992
7 - ROCHET Y., LAGARDE C., BREMOND A. Cancers gynécologiques et
mammaires. Encyclopédie des Cancers dirigée par B. Hoerni, Flammarion Médecine
Sciences, 1986
S. UZAN HOPITAL TENON
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