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1994 > Pédiatrie > Le reflux gastro-œsophgagien de l'enfant  Telecharger le PDF

Le reflux gastro-oesophagien de l'enfant

C. Dupont

Le reflux gastro-œsophagien est extrêmement fréquent en pédiatrie comme en médecine d'adultes. Mais si Shakespeare parlait déjà de "babies puking at their mother's breast", la fréquence du RGO est probablement la raison même du retard avec lequel ont été découvertes toutes ses manifestations cliniques et ses complications. Celle-ci sont variées, digestives, respiratoires ou ORL ou générales comme certains malaises du nourrisson et justifient la profusion de publications qui depuis le milieu des années 70 a rempli la littérature internationale.

Le reflux gastro-œsophagien atteint de nombreux adultes (Bruley des Varannes, 1988). Sa fréquence et son importance exagérées le rendent cliniquement significatif chez presqu'un enfant sur 5 (Chouhou et al, 1992), quoique ses complications soient nettement moins fréquentes. Si le catalogue de celles-ci commence à être mieux cerné, notre compréhension des mécanismes physiopathologiques qui en sont la cause restent insuffisamment compris. Comme le souligne joliment Judith Sondheimer (1989), l'explication habituellement proférée aux parents selon laquelle, le "petit muscle du bas de l'œsophage est insuffisamment développé" est au mieux incomplète et au pire erronée.

Un certain nombre de confusions domine le domaine pathologique du RGO actuellement, notamment le recours à ce diagnostic dans des situations cliniques au cours desquelles la cause des vomissements n'est pas recherchée tandis que les vomissements sont inutilement documentés par une pH-métrie. De plus, la sophistication progressive des moyens diagnostiques permet de prévoir que ceux qui seront utilisés en routine dans quelques années ne sont pas ceux qui sont actuellement de prescription courante. Enfin l'imaginaire collectif sur la pénibilité des examens du RGO est le plus souvent faux, pouvant conduire à des choix aberrants. A titre d'exemple, si la sonde de pH-métrie est plus fine que l'appareil d'endoscopie, le passage trans-nasal de cette sonde, qui sera laissée en place 24 h, est-il vraiment moins pénible pour le petit nourrisson que les deux minutes que dure chez le petit nourrisson un examen fibroscopique bien conduit?

Ainsi s'il est exact que de réels progrès ont été réalisés dans le diagnostic de l'affection, il est essentiel que le praticien connaisse les qualités et les limites de examens qu'il prescrit et plus encore qu'il apprécie à leur juste valeur la pénibilité des examens demandés.

Le traitement a largement bénéficié des progrès dans la définition de la posture idéale et et dans la découverte de modificateurs du comportement digestifs efficaces, les drogues prokinétiques.

L'évolution du reflux gastro-œsophagien est, en pédiatrie, très dépendante de l'âge de l'enfant. Très fréquent chez le petit nourrisson , le reflux disparaît dans la plupart des cas avant l'âge de 2 ans. Sa persistance au delà est volontiers associée à des complications respiratoires basses chroniques qui justifient certainement un suivi clinique beaucoup plus long et plus attentif qu'il n'est habituel de le réaliser. Si la chronicité du reflux désarçonne par son caractère contradictoire avec l'évolution spontanément favorable des affections pédiatriques, il semble toutefois que la prise en charge efficace du reflux puisse améliorer ses chances de guérison spontanée.

Symptomatologie du RGO

Le reflux intermittent de liquide gastrique existe chez l'enfant normal, comme chez l'adulte. Sa signification pathologique dépend de son caractère excessif ou de la survenue de complications.

Les symptomes digestifs du RGO

Régurgitations à répétitions et vomissements sont les manifestations les plus fréquentes du RGO. La diminution de l'apport alimentaire peut, du fait des rejets et du refus de la nourriture aboutir à un retard de croissance pondéral. Les vomissements et la perte de poids sont beaucoup plus fréquents chez l'enfant que chez l'adulte. La différence, pour Herbst (1989), pourrait être liée à la différence de capacité réservoir de l'estomac et de l'oesphage. Pour être évacué, le contenu gastrique doit remonter tout l'oesophage, qui mesure 30 cm chez l'adulte et peut contenir environ 180 ml, tandis que chez l'enfant de 5 kg, il ne mesure que 9 cm, et ne peut contenir plus de 6 ml. La capacité de l'oesophage de retenir le reflux gastrique est donc probablement beaucoup plus importante chez l'adulte, qui, de plus, n'ingère que 40 à 50 ml/kg/jour que chez le nourrisson qui ingère volontiers plus de 120 ml/kg/jour.

L'oesophagite peptique

La présence en quantité anormale ou anormalement prolongée de liquide gastrique dans l'oesophage peut engendrer une oesophagite, dont la mise en évidence n'est qu'endoscopique, mais dont les symptômes, variables, peuvent être des hématémèses, et chez le nourrisson, une dysphagie ou une anorexie, des pleurs ou une agitation pendant les biberons ou pendant le sommeil (Vandenplas et al, 1989), qui ont la valeur sémeiologique des brûlures rétrosternales que peut, rarement, décrire l'enfant plus grand. La perte de sang chronique peut entrainer une anémie hypochrome microcytaire. La sténose peptique de l'oesophage est l'expression d'un reflux sévère méconnu, également peu fréquent dans notre pays.

L'évolution à long terme

La guérison spontanée du RGO peut indubitablement être espérée chez l'enfant de moins de deux ans. Pour Carré, environ 60 % des enfants sont débarrassés de leur symptomes à l'age de 18 mois, l'amélioration la plus spectaculaire survenant entre 8 et 10 mois (Carré, 1959). Les symptômes persisteraient jusqu'à l'age de 4 ans chez 30 % des enfants, des complications se développant en l'absence de traitement chez 10 % d'entre eux. Selon le même auteur (Carré, 1985), le traitement médical du reflux à cet âge de la vie améliore considérablement la maturation physiologique: plus de 90% des patients traités avant l'age de trois mois seraient asymptomatiques à l'âge de un an, contre 35% en l'absence de traitement.

Le devenir ultérieur du RGO est peu documenté. Le suivi sur 20 ans d'une centaine de sujets ayant présenté une hernie hiatale et des vomissements dans l'enfance (Carré et al, 1976), excluant ceux qui avaient été opérés, a montré que 90 % d'entre n'avaient plus de symptomes, même si la moitié presentaient toujours une hernie hiatale et 20 % une incontinence cardiale. Il est probble que la majorité des adultes symptomatiques se recrutent parmi les enfants ayant présenté ddes symptomes au delà de l'âge de 2 ans. Il est toutefois également probable, puisqu'un adulte sur trois semble souffrir de RGO, que la majorité des RGO de l'adulte se développent après l'enfance.

Les manifestations respiratoires du RGO

Les manifestations respiratoires basses s'observent aussi bien chez les enfants âgés de 3 à 15 mois, période de la vie pendant laquelle les manifestations digestives du RGO sont prédominantes, que chez les enfants plus âgés, de 2 à 15 ans, ou les manifestations digestives patentes cèdent souvent le pas à une responsabilité volontiers occulte, et souvent partielle du RGO dans des manifestations cliniques non digestives (Danus et al, 1976, Christie, 1979, Le Luyer et al, 1986, Vandenplas et al, 1989, Dupont et De Blic, 1990).

Il s'agit le plus souvent

- d'une toux spasmodique

- d'une bronchite obstructive dont la traduction est le wheezing

- d'une atteinte récidivante d'un même territoire pulmonaire, en particulier du lobe moyen, avec dans certains cas des d'infiltrats interstitiels visibles à la radio

Le cas particulier de l'asthme

L'asthme est une affection dans laquelle de très nombreuses études s'accordent à reconnaître la remarquable fréquence du RGO (Martin et al, 1982). Les statistiques publiées chiffrent cette fréquence entre 47 % et 63 %, soit nettement plus que ce qui est observé dans la population normal.

La responsabilité du RGO dans certains asthmes non allergiques est toutefois beaucoup plus limitée: seuls certains asthmes non allergiques peuvent être totalement guéris par la mise en route du traitement antireflux (Scheinmann et al, 1987).

En réalité il semble que dans la majorité des cas, ce soit la maladie asthmatique qui induise un RGO: une étude de Scheinmann en 1987 portant sur 59 enfants asthmatiques tous atopiques a ontré un RGO radiologique dans 93% des cas. La possibilité que le RGO facilite la perennisation de l'hyper-réactivité bronchique et l'entretien de l'asthme, pourrait justifier la recherche et le traitement systématique du RGO chez tout enfant asthmatique. En pratique toutefois, la mise en oeuvre systématique d'un traitement anti-reflux chez un enfant sans manifestations d'appel digestives ou respiratoires n'influence pas une maladie asthmatique mineure.

Les symptomes ORL du RGO

Les symptômes cliniques respiratoires probablement les plus fréquemment liés au RGO chez le nourrisson et le jeune enfant, mais dont la relation avec le RGO reste le plus souvent méconnue sont la toux trachéale nocturne, les rhino-bronchites récidivantes avec sinusites, l'otite récidivante aigue ou séreuse (Bernard et al, 1990).

Les manifestations d'appel du RGO

Les manifestations d'appel respiratoires sont essentiellement la prédominance nocturne des symptômes et l'association à une toux. La présence de reflux acides nocturnes, dont témoignent ces symptômes, évoquent une exposition acide prolongée de l'oesophage, liée au décubitus et à la diminution de la salivation et des mouvements de déglutition dont résulterait une plus grande fréquence d'oesophagite.

Il est permis de supposer qu'un traitement à la fois bronchodilatateur et anti-reflux qui se révèle efficace a probablement réduit les reflux transitoires induits par les épisodes de bronchospasmes et rompu un cercle vicieux d'aggravation entre l'asthme et le RGO.

malaises graves du nourrisson et RGO

Les apnées et les accidents de suffocation avec perte de connaissance du petit nourrisson nécessitant des manoeuvres de ressuscitation entrant dans le cadre du syndrome de mort subite manquée ont avec le R.G.O. des relations qui sont largement étudiées actuellement.

Les liens de causalité

Les liens de causalité entre le RGO et les malaises graves du nourrisson ont été établis sur un certain nombre de données. L'un des premiers traits frappants est le pic de fréquence commun de ces affections entre 1 et 6 mois, de même que la survenue essentiellement nocturne des accidents ou lors du primo-décubitus en période post-prandiale précoce, la présence fréquente d'une affection des voies respiratoires supérieures pouvant découler du reflux ou en majorer les conséquences respiratoires.

La relation temporelle entre épisodes de reflux et apnée a été établie par certaines équipes (Foucaud et al, 1985, Herbst et al, 1978). La difficulté de telles études, liée à la nécessité d'enregistrements prolongés pH-métriques et polygraphiques simultanés et à la fréquence parfois faible des apnées rend compte des résultats variables d'une étude à l'autre. Cette corrélation est retrouvée dans 30 à 90 % des cas selon les études. Ces études ont eu également le mérite d'établir clairement que les épisodes de R.G.O. chez les nourrissons "near miss" surviennent non seulement en période d'éveil mais aussi pendant le sommeil calme ou agité. En revanche, certaines études s'inscrivent contre l'existence d'une corrélation entre les épisodes apnéiques et le reflux.

Le mécanisme des malaises du RGO

Plusieurs études démontrent le rôle des chémo-récepteurs pharyngo-laryngés et oesophagiens, dont la stimulation acide reproduit des apnées avec bradycardie par mise en jeu d'un réflexe vago-vagal, aussi bien chez l'animal que chez l'homme, ces accidents ne survenant ni avec de l'eau ni avec une solution diluée. Cette réactivité à la présence d'acide dans les voies respiratoires n'est pas en soi pathologique. Elle est l'expression du fonctionnement satisfaisant des mécanismes de protection des voies respiratoires supérieures contre le reflux. L'arrêt de tout mouvement respiratoire dès l'issue d'acide dans le pharynx permet d'éviter une inhalation et ses conséquences dramatiques. C'est du moins le rôle probable d'une apnée déclenchée par le reflux.

Les apnées du RGO

La réactivité au RGO acide peut en fait se manifester de façon polymorphe. A coté des apnées périphériques du RGO, probablement liées en partie à un laryngospasme réflexe et auxquelles on peut reconnaitre une valeur salvatrice, du moins lorsqu'elle ne sont pas trop prolongées, il existe des apnées centrales, qui participent probablement du même processus mais aussi des bradycardies réflexes dont la finalité est plus obscure. Cette diversité de réactivité représente à la fois une difficulté de compréhension des malaises du nourrisson et une porte ouverte sur la complexité des mécanismes probablement responsables de ces malaises.

Si le reflux gastro-oesophagien doit être considéré comme un des facteurs pathogéniques indiscutables des accidents apnéiques graves, voire du syndrome de la mort subite inexpliquée du petit nourrisson, il n'est pas le seul facteur. A cet âge s'intriquent la sensibilité particulière à toute stimulation nociceptive œsophagienne ou pharyngo-laryngienne par mise en jeu d'un réflexe vagal, la susceptibilité cardiaque et même cérébrale, tous éléments dont la prise en compte permet une approche thérapeutique la plus rigoureuse possible.

La forme clinique des malaises du RGO

Les accidents concernent les 6 premiers mois de vie, sont paroxystiques et parfois dramatiques. Il peut s'agir d'accès de cyanose brutale, d'hypotonie parfois avec convulsion, de suffocation avec détresse respiratoire ou d'apnée avec perte de connaissance.

La fréquence de ces accidents est très variable d'une étude à l'autre selon la population d'enfants sélectionnés et les critères diagnostiques retenus. Elle semble faible chez le nouveau-né reconnu comme porteur de R.G.O. pathologique, 5,7% dans l'étude multicentrique de Ghisolfi (1981). En revanche, la découverte d'un R.G.O. pathologique dans une population de nourrissons explorés pour malaises graves, est indiscutablement plus fréquente, pouvant atteindre 4O % des cas.

Les éléments de suspicion du RGO

Les éléments suggestifs de RGO sont la survenue des troubles en période post-prandiale précoce lors des changements de position, la plus grande fréquence des apnées pendant l'éveil ou lors du sommeil agité et l'existence antérieure quoique inconstante de vomissements, de régurgitations ou de toux lors des biberons.

C'est en définitive l'efficacité du traitement anti-reflux, éventuellement chirurgical, qui peut être considérée comme la plus démonstrative de la responsabilité du R.G.O. Dans une grande série portant sur 123 enfants ayant présenté des malaises graves et porteurs de R.G.O. Leape (Leape et al, 1977) constate que seulement 4 % des enfants opérés ont présenté à nouveau des épisodes d'apnée, contre 40 % chez les enfants traités médicalement à domicile.

Les examens complementaires du RGO

Le diagnostic de RGO souffre actuellement d'une certaine confusion. De plus, la sophistication progressive des moyens diagnostiques permet de prévoir que ceux qui seront utilisés en routine dans quelques années ne sont pas ceux qui sont actuellement de prescription courante. Il est raisonnable que le prescripteur fonde largement son choix sur les compétences et les disponibilités locales du moment. Il est toutefois essentiel qu'il apprécie les qualités et les limites de examens qu'il prescrit et plus encore qu'il apprécie à leur juste valeur la pénibilité des examens demandés.

La fibroscopie oeso-gastro-duodénale

La fibroscopie analyse la morphologie oesophago-gastrique, met en évidence une éventuelle hernie hiatale, apprécie parfaitement la souffrance de la muqueuse et met en évidence une éventuelle oesophagite, qu'il faut coter selon des critères pédiatriques. Elle permet également une étude dynamique de la motricité du cardia, appréciant son ouverture et sa fermeture.

La fibroscopie est un examen ambulatoire, court, qui ne nécessite pas de prémédication, sauf dans en cas d'endoscopies itératives chez le grand enfant. Cet examen, réputé pénible, l'est certainement plus que le T.O.G.D après l'âge de 1 à 2 ans mais certainement beaucoup moins chez le petit nourrisson. La fibroscopie ne peut toutefois être réalisée que par des opérateurs expérimentés qui ont l'habitude des enfants et qui disposent d'un matériel adapté.

Le transit oeso-gastro-duodenal

Le transit oeso-gastro-duodénal (T.O.G.D) analyse la morphologie de l'oesophage et de l'estomac et montre une éventuelle hernie hiatale. Il permet également, s'il met en évidence un reflux, ce qui n'est pas toujours le cas, d'en préciser la dynamique mais ne permet pas d'apprécier de façon précise la souffrance de la muqueuse oesophagienne. Le TOGD peut être pénible chez le petit nourrisson, qui reste attaché et manipulé dans différentes positions pendant une vingtaine de minutes. Il est actuellement réalisable partout en France: c'est un avantage essentiel, qui explique son utilisation encore étendue dans cette indication.

La pH-métrie oesophagienne

La mesure des variations du pH de l'extrêmité distale de l'oesophage au moyen d'une electrode positionnée entre 3 et 5 cm en amont du SIO est la méthode qui a fourni le plus d'informations sur le reflux du liquide gastrique acide dans l'oesophage.

De plus, le développement des boîtiers portables ("Holter") permet une vision naturelle du reflux et l'inscription directe sur les traçé des évènements qui ont marqué l'enregistrement comme les changements de position, les repas, les douleurs. L'interprétation des données des enregistreurs portables est partiellement automatisée selon des normes dérivées de celles établies chez l'adulte, concernant notamment le temps passé à pH inférieur à 4.

Toutefois, une synthèse récente de 285 pH-métries de 24 heures réalisées chez des enfants asymptomatiques de moind de 15 mois par Vandenplas et Sacré-Smits (1987) a montré que les paramètres analysés étaient clairement liés à l'âge, les modifications les plus importants se situant aux environs du 4 ème mois. L'interprétaion doit donc tenir largement compte des données qualitatives que fournit l'étude des traçés.

Malgré son caractère actuellement irremplaçable dans le diagnostic du RGO, la pH-métrie est un examen qui doit être considéré comme relativement pénible puisque la sonde doit être maintenue 20 heures en place dans le nez, permettant la mise en évidence des reflux nocturnes dont on connait la fréquence association avec la pathologie respiratoire.

Les autres techniques d'exploration du RGO

La scintigraphie gastro-oesophagienne

présente sur la radiologie et sur la pH-métrie certaines supériorités. La technique, variable selon les équipes, consiste à administrer un repas liquide ou mixte marqué avec un radio-isotope.

L'un des avantages essentiels de la scintigraphie est la possibilité de mesurer le temps de vidange gastrique, dont l'allongement est associé à certains RGO pathologiques et peut faire l'objet de techniques spécifiques.

La scintigraphie est totalement non invasive et très peu irradiante. Elle nécessite des équipes d'exploration isotopique qui s'intéressent au R.G.O, qui sont peu nombreuses. C'est un examen cher.

La manométrie oesophagienne

permet d'apprécier le tonus du sphincter inférieur de l'oesophage, la qualité du péristaltisme oesophagien qui peut être modifié par une oesophagite sévère ou lors de certains troubles de la motricité oesophagienne mais aussi le tonus du sphincter supérieur de l'oesophage.

La manométrie oesophagienne présente l'avantage de permettre d'établir des mesures quantifiées mais nécessite un appareillage coûteux, et un entraînement important pour réaliser et analyser les tracés. Elle est donc réservée à quelques équipes très spécialisées pour l'établissement de certains diagnostics et pour le travail de recherche clinique qui accompagne la mise au point des thérapeutiques anti-reflux.

L'échographie de l'oesophage abdominal est une technique tout à fait nouvelle. Elle permet d'analyser la forme de l'oesophage mais également l'épaisseur des parois et donc d'indiquer un éventuel processus d'oesophagite et d'objectiver un reflux.

Cette technique présente le gros avantage de ne pas être invasive mais l'inconvénient d'être longue. Sa fiabilité est encore aléatoire puisque la technique est nouvelle. Elle nécessite une sonde performante et donc chère.

Le choix parmi les techniques d'exploration du RGO

Toutes les techniques d'exploration ne sont pas utiles chez un enfant qui présente un RGO. Mieux encore, la plupart du temps aucune n'est indiquée. Il est essentiel de dire et de redire qu'une pH-métrie est inutile chez un enfant qui vomit. Les indications techniques d'exploration du R.G.O doivent soigneusement pesées en fonction des situation cliniques et modulées en fonction de leur facilité de réalisation.

Lorsque le R.G.O est cliniquement évident et isolé c'est à dire sans symptomatologie douloureuse, sans retard staturo-pondéral, sans pathologie respiratoire, il est d'emblée raisonnable d'instaurer un traitement anti-reflux. Si l'évolution est favorable, il n'est pas nécessaire de faire des explorations complémentaires.

En cas d'échec du traitement ou lorsque le R.G.O clinique est compliqué, il faut recourir à des examens dont le but sera de mettre en évidence des conditions anatomiques particulières qui prédisposent au reflux (hernie hiatale) ou des complications éventuelles (oesophagite) du reflux. Les examens à privilégier seront selon des critères souvent plus géographiques que cliniques, un T.O.G.D ou une fibroscopie. La pH-métrie n'a, a priori, pas d'intérêt lorsque le reflux est connu.

En revanche, dans les situations cliniques dans lesquelles le R.G.O est possible mais non prouvé, comme la mort subite du nourrisson ou les bronchopathies chronique, c'est la preuve du reflux qui doit être apportée. La pH-métrie trouve ici ses indications essentielles. On peut préférer réaliser au préalable une fibroscopie, examen peu invasif et court: si celle-ci met en évidence des signes objectifs de reflux, tel une béance du cardia ou une oesophagite, la preuve du R.G.O sera faite sans qu'il soit nécessaire de recourir à une pH-métrie.

En bref, la mise route d'explorations complémentaires est inutile dans un reflux gastro-oesophagien clinique isolé, qui justifie la seule prescription d'un traitement anti-reflux. Un reflux clinique compliqué ne nécessite en principe qu'une exploration morphologique, radiologique et/ou fibroscopique. Ce sont les manifestations non digestives du reflux gastro-oesophagien qui, notamment dans les malaises du nourrisson et dans les affections respiratoires chroniques de l'enfant, justifient une exploration dynamique, dont la pH-métrie oesophagienne représente l'indication idéale.

Rappelons cependant que la preuve de la responsabilité du reflux gastro-oesophagien dans la genèse de ces manifestations non digestives est souvent difficile à obtenir et que c'est souvent l'efficacité du traitement anti-reflux qui peut être considérée comme la plus démonstrative.

Traitement du RGO

Le traitement du RGO de l'enfant repose sur des moyens physiques simples qu'il faut savoir toujours mettre en oeuvre et qui nécessitent une explication soigneuse de leur logique et de leur réalisation.

Les mesures diététiques

Il est admis que l'excès de remplissage gastrique favorise le RGO et qu'il faut donc recommander l'administration de repas nombreux de petit volume. L'administration de repas épais est une recommandation classique. Chez l'enfant nourri au biberon, elle peut être obtenue par addition dans le lait de pectines cellulosiques ou de mucilages Gélopectose® ou Gumilk®.

Chez l'enfant plus grand, il est indiqué de diminuer les liquides au cours des repas et de supprimer les eaux gazeuses, source d'hyperpression gastrique. Les recommandations visant à supprimer les aliments qui diminuent le tonus du sphincter inférieur de l'oesophage comme les graisses, le chocolat ou la menthe sont plus théoriques.

Le traitement postural

Le traitement postural est le plus fréquemment utilisé pour la simple raison mécanique que le réservoir que constitue l'estomac a moins de chances de se vider dans l'oesophage si l'orifice entre les deux organes est en position haute au lieu d'être en position latérale. Les examens radiologiques montrent qu'en décubitus ventral la jonction gastro-oesophagienne est surélevée et se trouve au niveau de la poche à air; par contre, en position assise, cette jonction est submergée par le contenu gastrique liquidien. Le décubitus ventral dans un harnais, très facile à réaliser à domicile et bien toléré par la majorité des enfants, paraît dont être le traitement positionnel de choix.

L'activité spontanée de l'enfant plus grand rend illusoire le maintien de ce type de posture et il faut savoir proposer assez tôt la simple élévation de la tête du lit de 15 cm , permettant de réduire l'exposition à l'acide pendant la nuit. Le décubitus latéral gauche ou dorsal est préférable au décubitus ventral en raison de la position anatomique du cardia.

Les protecteurs de la muqueuse

La protection de la muqueuse oesophagienne contre l'agressivité du reflux se justifie à un double titre: elle permet d'une part de réduire l'inflammation de la muqueuse et d'autre part de lutter contre le mécanisme de bronchoconstriction réflexe qu'induit la présence de liquide acide au contact de la muqueuse oesophagienne. Elle peut être réalisée à l'aide de pansements dépourvus de pouvoir neutralisant comme le Smecta® ou le Gaviscon®.

Les drogues gastrokinétiques

La principale barrière qui s'oppose au RGO est le tonus du SIO et la qualité du péristaltisme de l'oesophage. Cette barrière dépend de mécanismes de régulation endocriniens et neurogènes, sur lesquels agissent les modificateurs du comportement digestif, désormais appelés prokinétiques et dont le plus récent est le cisapride.

Les drogues gastrokinétiques réduisent le reflux en augmentant le tonus du sphincter inférieur de l'oesophage et en favorisant la vidange gastrique. Le Primpéran® est utilisé à la dose de 0,5-1 mg/kg/j, le Motilium® à la dose de 1-2 mg/kg/jet le Prépulsid® à la dose de 0,8 mg-1mg/kg/j.

Les inhibiteurs de la sécrétion gastrique acide

Parmi les inhibiteurs de la sécrétion gastrique acide, la plus employée est la ranitidine (Raniplex ® ou Azantac®). Les inhibiteurs de la pompe à protons sont encore en cours d'étude chez l'enfant.

En conclusion,

le RGO de l'enfant est une affection fréquente qui fait l'objet de multiples travaux que justifient ses relations potentielles à denombreuses affections chroniques ou aigues de l'enfant. Sa prise en charge bénéficie d'améliorations récentes considérables tant dans son diagnostic que dans son traitement. Toutefois, chez la plupart des enfants, le RGO demeure une affection banale, simple phénomène de maturation des premiers mois de la vie, qu'il convient de savoir observer, en respectant une prise charge adaptée à ce qui n'est parfois qu'une frontière de la pathologie.

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