L'intolérance aux protéines du lait de vache (I.P.L.V.) est relativement imprécise à définir , puisque cette entité recouvre l'ensemble des manifestations indésirables induites chez le nourrisson, par le lait de vache(1-2). La notion d' "intolérance" implique la coexistence de mécanismes physiopathologiques différents aboutissants à des expressions cliniques et biologiques variées. On s'accorde actuellement, comme cela est proposé par le Comité de Nutrition de la Société Française de Pédiatrie, à ce que l'élimination d'une protéine et l'épreuve de réintroduction permettent d'établir une relation de cause à effet entre l'ingestion de l'aliment (ou de la protéine) et une réaction clinique, qu'il s'agisse de manifestations digestives, cutanées ou respiratoires. Le Comité de Nutrition accepte donc formellement la notion d'allergie, c'est-à-dire impliquant des phénomènes de nature immunitaire. Quelques dates marquantes pour l'allergie aux P.L.V. (3) - 1882 - description par Quincke de l'œdème angioneurotique - 1902 - identification par Richer et Portier de l'anaphylaxie - 1903 - Maurice Arthus décrit le phénomène éponyme, en utilisant le lait - 1906 - Von Pirquet introduit le terme d'allergie - 1907 - Besredka - désensibilisation - 1923 - Coca et Cooke : atopie - 1967 - Isolement des IgE plus spécifiquement : - 1905 - Finkelstein = choc anaphylactique au lait de vache - 1910 - accidents au 1° biberon Particularites de l'A.P.L.V. 1 - substances nécessaires à la survie 2 - Diagnostic par épreuve d'exclusion - réintroduction 3 - Obligation de disposer d'un substitut nutritionnel 4 - Tableaux cliniques disparates 5 - Tests cutanés ou humoraux discordants 6 - discordance clinique / histologie 7 - pas de désensibilisation 8 - résolution spontanée 9 - n'existerait que chez le nourrisson Les aspects cliniques : delai d'apparition 1 - formes aiguës hyper-réagéniques - délai <1h 2 - formes intermédiaires - delai 1 à 2h 3 - formes retardées - delai > 24h En fait ces différents types peuvent coexister ou se succéder chez le même enfant. Les symptomes adigestifs : 1 - diarrhée 2 - vomissements 3 - Hématémèse 4 - déshydratation 5 - anorexie 6 - douleurs abdominales - coliques 7 - météorisme 8 - érythème péri-buccal 9 - érythème péri-anal 10 - œdème et prurit oro pharyngés 11 - aphtes Regroupements syndromiques : formes aiguës : - vomissements + diarrhée - état de choc Décès - ± fébrile formes chroniques - entéropathie | - diarrhée ± chronique - cassure Courbe de poids Diarrhée " intraitable " | - constipation - entéropathie exsudative - entéropathie hémorragique - anémie ferriprive - (M.S.I.N) formes coliques - colite - rectite - proctite - hyperplasie lymphoïde - entérocolite ± ulcéro nécrosante - colon irritable - coliques du nourrisson formes cutanées- dermatite atopique - eczéma - urticaire - dermatite herpétiforme dformes respiratoires- asthme - rhinite - otite - pneumopathie ( de Heiner - (AJDC - 1960) eformes neurologiques- migraines - troubles du sommeil - troubles du comportement (discuté) - infarctus du myocarde - syndrome néphrotique - thrombopénie - + aplasie radiale A ce polymorphisme clinique correspond un polymorphisme physiopathologique. > pour Navarro : l'APLV aiguë emprunte la voie humorale (IgE) L'APLV chronique emprunte la voie cellulaire (muqueuse) > Il n'y a pas de mécanisme commun aux autres allergies alimentaires comme les allergies aux protéines - de Soja - de riz - gluten : maladie cœliaque > Cette dernière a un caractère permanent ,définitif, alors que l'IPLV est transitoire. > La fréquence de l'atopie familiale dans l'APLV a été estimée de 70 à 10% ! > La phase de sensibilisation elle-même n'est pas très explicite : - in utéro ? quelle voie ? - par le lait de mère - certitude. [ explique les réactions / 1° biberon] > Les anticorps anti PLV (chez le nourrisson au lait de vache) sont des IgE -> IgA [très peu d'IgE] Sur ces bases que peut nous apporter la biologie pour le diagnostic de l'IPLV ? Eléments biologiques du diagnostic . ( hors bilan nutritionnel) - IgE totales - IgE spécifiques - TTL - tests cutanés et TPO Modalités de sensibilisation [classification de GELL et COOMBS] TYPE | I | II | IV | | INTERMEDIAIRE | ARTHUS | LYMPHOCYTES T | DELAI | quelques heures | 4 à 12h | 1 à 3 js | FREQUENCE | 30% | 50% | 20% | SIGNES | diarrhées aigues Anaphylaxie <5% | hémorragie dig. entéropathie Exudative | Diarrhées chronique <10% malabsorption eczéma Asthme | IgE | + | - | - | Qui plus est, ces différents types sont souvent intriqués. Le dosage des IgE spécifiques a-t-il la moindre utilité pratique pour le diagnostic ? J. Navarro : " Les RASTS sont d'autant plus positifs que le diagnostic est évident ! " (4) Les tests cutanés interrogent les IgE fixés sur les mastocytes cutanés. On sait depuis longtemps que l'exploration de l'immunité cellulaire par le TTL n'est pas spécifique. On sait depuis peu que les tests de perméabilité intestinale ne sont pas plus ! - aucun examen biologique ne nous est utile.
Que reste-t-il pour le diagnostic ? La clinique 1° - nous devrons évoquer l'IPLV devant : - une forme digestive : aiguë (diarrhées - vomissements) : prolongée (malabsorption) - une forme allergique d'expression générale ( ex : urticaire généralisée) Ici le " SENS PEDIATRIQUE " du médecin apparaît irremplaçable. 2°- Compte tenu des tableaux cliniques rencontrés le diagnostic d'APLV est très peu probable au-delà de l'âge de six mois. 3° - Le 2° élément du diagnostic : constatation des effets bénéfiques rapides du régime d'exclusion, c'est-à-dire : prescription d'un hydrolysat. 4° - Le régime d'exclusion doit avoir un effet " spectaculaire ", c'est à dire rapide et incontestable, sur la disparition des symptômes. 5° - Le 3° élément du diagnostic : la constatation d'une rechute à la réintroduction est un vrai test de provocation, avec risque de choc. On déconseille donc formellement ce test à l'étape du diagnostic qui sera, de facto, réalisé lors des tentatives de réintroduction… plus tard ! 6° - Il est donc très important, pour nous, de ne pas poser le diagnostic d'APLV à la légère et en particulier devant des présentations cliniques discutables. La dernière étape du diagnostic clinique c'est donc la Re-introduction Celle-ci va permettre un diagnostic, à peu prés formel, mais tardif, s'il y a rechute. Par contre l'absence de toute rechute immédiate ou différée laisse un diagnostic inachevé, mais qui, puisque l'enfant va bien, n'intéresse plus personne- (mais autorise toutes les suppositions). Les modalités : - varient d'une équipe à l'autre la logique échappant souvent au lecteur : les études montrent que : -50% sont " guéris " à 9 mois -85% sont " guéris " à 18 mois il existe des formes chroniques : 1 à 2 ans des formes prolongées : 5 ou 6 ans ! Les préconisations : - au plus tôt après 2 à 3 mois de régime d'exclusion - en principe avant l'âge de1 an - si rechute : plus de 6 mois après. puis de 6 mois en 6 mois - en service spécialisé - Pas de consensus sur les protocoles. En guise de conclusin Beaucoup de questions restent non résolues. - l'IPLV est-elle une seule et même maladie ? - l'IPLV est-elle une APLV ? - Y a-t-il de fausses APLV ? - Existe-t-il une limite de tolérance clinique ou allergique ? - Comment s'acquiert la tolérance ? - Pourquoi une affection est-elle de durée variable ? - Qu'en est-il des formes de l'adulte ? - Qu'en est-il de l'effet éventuellement protecteur ou suspensif du lait maternel ? (ou des laits HA ou des hydrolats poussés ?) BIBLIOGRAPHIE 1- OLIVES J.P. BRETON A. Allergies et intolérances alimentaires de l'enfant. La revue du Praticien 1998 ;48, 389-393 2- FERGUSON A. Definitions and diagnosis of food intolerance and food allergy: consensus and controversy. J. Pediatr. 1992 ; 121: 507-511 3- NAVARRO J. SCHMITZ J. Allergies alimentaires. in Progrès en pédiatrie 10. 1993 Doin Ed. Paris. 4- NAVARRO J. SCHMITZ J. Allergies alimentaires. in Gastro-entérologie Pédiatrique 2° édition. 2000 Flammarion Ed. Paris épartement de Pédiatrie - Unité de Gastro Entérologie et Nutrition Pédiatrique - CHU Toulouse - J.T.A 2002 |