LA RESPONSABILITE MEDICO-LEGALE DES SAGES-FEMMES
S. TAYLOR * Hôpital Antoine-Béclère, Clamart.
I. LE PRINCIPE : LA RESPONSABILITE
L'article 7 du nouveau Code de déontologie de 1991 dit que :
" La sage-femme ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque
forme que ce soit ".
Ceci veut dire que la sage-femme a une complète indépendance professionnelle.
Sa responsabilité peut donc être engagée au même titre que celle de
l'obstétricien, de la clinique ou de l'hôpital public.
Aussi je me propose de vous exposer succinctement quelques notions de responsabilité.
Il y a responsabilité lorsqu'une faute a été commise entraînant un dommage et
qu'il existe un lien de causalité entre ce dommage et cette faute.
Si l'une de ces conditions n'est pas remplie, la responsabilité n'est pas mise en
oeuvre.
Quelques exemples
- Exemple n° 1 : un enfant naît infirme moteur cérébral, suite à une
souffrance foetale aiguë, sans que celle-ci ait été prise en compte et qu'aucun moyen
n'ait été mis en oeuvre.
Un dommage est reconnu lié à une souffrance foetale, votre responsabilité est
établie.
- Exemple n° 2 : une fièvre maternelle survient pendant le travail, elle
est traitée et la surveillance du rythme cardiaque foetal, bien menée, objective le
bien-être foetal. A la naissance, l'enfant présente des troubles neurologiques majeurs
liés à une porencéphalie. Il n'existe pas de lien de causalité entre la fièvre
maternelle et l'état de l'enfant à la naissance, votre responsabilité ne peut être
mise en oeuvre.
- Exemple n° 3 : Il existe une souffrance foetale aiguë pendant le
travail ; à la naissance, l'enfant est bien portant et indemne de toute séquelle.
Il n'y a pas de dommage donc pas de responsabilité.
Maintenant que nous avons défini ce qu'est la responsabilité, voyons quelles sont les
différentes actions en responsabilité liées à la pratique médicale.
II. COMMENT FAIRE ETABLIR LA RESPONSABILITE ?
a. Devant les juridictions civiles
Lorsque la faute s'est produite au cours de l'exercice libéral des professions de
santé, il y a saisine de la juridiction civile par la victime ou ses ayants droit. Une
action civile sera menée devant la juridiction pénale.
b. Devant la juridiction pénale
1. Tribunal correctionnel
En cas de délit imputable à un agent du service public, mais lorsque cette faute est
détachable du service hospitalier (par exemple en cas de vol d'argent d'un patient par un
agent du service public).
2. Cour d'assises
Le plaignant souhaite que la faute soit reconnue afin que le responsable se sente
coupable. Le plaignant veut une sanction de l'auteur du dommage.
Une expertise pénale régie par les dispositions du Code de procédure pénale doit
être mise en oeuvre par le magistrat, notamment le juge d'instruction ou la chambre
d'instruction dans le cas où se pose une question d'ordre technique.
Celle-ci a pour but essentiel d'apprécier les conséquences des blessures et leurs
incidences en ce qui concerne l'application des peines prévues par le Code pénal, en
particulier : blessures volontaires ou involontaires ayant entraîné soit la mort,
soit une incapacité temporaire, soit des séquelles génératrices d'incapacité
permanente.
Cette expertise exclut toute indemnisation du dommage subi par la victime.
3. Juridiction administrative
Si l'objet de la plainte est lié à l'activité professionnelle de l'agent, la
responsabilité de l'Etablissement public peut être mise en oeuvre par un usager du
service public.
Le plaignant adresse un recours gracieux au directeur de l'hôpital. Celui-ci adresse
au service contentieux administratif ce recours.
Une enquête est menée à la demande du service contentieux par le directeur de
l'hôpital.
Celui-ci devra recueillir toutes les informations nécessaires à l'enquête.
Le service public aura à déterminer s'il est ou non responsable.
4. Juridiction ordonnale
Il s'agit de la responsabilité disciplinaire.
C'est l'action envers le responsable qu'engage le Conseil de l'Ordre et les
éventuelles sanctions qu'elle prononce envers lui. (avertissement, blâme, suspension,
radiation, ...).
III. QUELLES SONT LES CONSEQUENCES DE LA RESPONSABILITE ?
Quand la responsabilité est établie c'est-à-dire qu'un lien de causalité est
établi entre une faute et un dommage, cela implique un droit à des dommages et
intérêts.
A qui le plaignant peut-il les demander ?
1. Tribunaux civils
Dans les cas décrits plus haut, de responsabilité civile, en particulier, pour les
professionnels de santé au cours de leur exercice libéral, ce sont les tribunaux civils
qui sont saisis.
2. Tribunal pénal
La victime ou ses ayants droit se portent partie civile afin d'obtenir un
dédommagement.
3. Tribunaux administratifs
Après enquête, un dédommagement pourra éventuellement être proposé à l'usager,
ce montant étant à régler par la direction de l'hôpital public.
Parfois, une décision défavorable ou une non-réponse est faite à l'usager. Dans ce
cas, c'est que l'enquête a conclu en l'absence de responsabilité de l'établissement.
Si la ou les victimes ou ses ayants droit veulent poursuivre leur action, ils
saisissent les tribunaux administratifs.
CONCLUSION
Voici clairement, j'espère, exposées les différentes voies possibles offertes aux
plaignants.
Mais bien entendu, nous tous, personnels soignants, mettons en oeuvre au mieux notre
compétence afin de ne pas y être confrontés.
La formation continue de chacun, les échanges de nos expériences et de nos
connaissances doivent permettre de prodiguer à nos patients des soins en accord avec les
données de la science.
C'est en participant à des journées de travail telles que celles que nous suivons
actuellement que nous nous enrichirons mutuellement et améliorerons nos connaissances.
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