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1998 > Pédiatrie > Malformations fœtales  Telecharger le PDF

Masses abdominales, révélations périnatales

H. Ducou Le Pointe

Le diagnostic de tumeur à la période périnatale est un diagnostic rare. Le diagnostic était réalisé par le pédiatre, depuis quelques années, grâce à la généralisation et à l’amélioration de l’échographie anténatale, le diagnostic est fait de plus en plus souvent par les obstétriciens.

Les questions auxquelles doit répondre l’imagerie devant la découverte d’une masse en période anté ou néonatale est la même :

- détermination de l’organe d’origine du processus tumoral. Cette détermination peut être difficile surtout lorsque la tumeur est volumineuse.

- détermination du caractère tissulaire, liquidien ou mixte de la masse.

- taille de la masse

- existence de localisations secondaires

A partir de ces données de l’imagerie, il sera alors possible de proposer des hypothèses diagnostiques. Pour ce faire on dispose principalement en anténatal de l’échographie qui permet le plus souvent de répondre à ces questions. L’IRM anténatale est quelquefois utile pour compléter les données de l’échographie.

En période post-natale, l’exploration d’une masse abdominale commence par la réalisation d’un abdomen sans préparation (l’ASP reste un examen utile à la recherche de calcifications, de déplacement des anses digestives, ou à la visualisa-tion d’une ostéolyse) et d’une échographie.

Les autres examens d’imagerie (urographie intraveineuse, cystographie, tomodensitométrie et IRM) découleront des constatations de ces premiers examens.

La grande majorité (80 à 90%) des masses néonatales sont rétropéritonéales. L’appareil urinaire représente à lui seul 50% des étiologies.

Masses urinaires

En anténatal on pourra être orienté par certains signes d’appel comme la constatation d’un oligohydramnios qui peut être associé à un syndrome obstructif urinaire bilatéral, à une dysplasie multikystique bilatérale ou unilatérale associée à un syndrome obstructif controlatéral, ou bien à une polykystose rénale récessive.

L’échographie peut révéler également la présence de kystes rénaux, une dilatation des voies urinaires ou bien encore un épaississement de la paroi vésicale.

Le syndrome de la jonction pyélo-urétérale

est l’étiologie la plus fréquente des masses néonatales. Elle peut être bilatérale dans 10 à 25% des cas. Le diagnostic est le plus souvent réalisé lors de l’échographie anténatale. Elle montre des images anéchogènes liquidiennes communiquant entre elles associées à une dilatation pyélique. L’uretère sous-jacent n’est pas dilaté.

L’échographie précise également l’épaisseur du parenchyme rénal restant. Lorsque cette dilatation est importante elle nécessitera une prise en charge post-natale rapide car ces enfants risquent des complications infectieuses graves. Le principal diagnostic différentiel du syndrome de la jonction pyélo-urétérale est la dysplasie multikystique.

En échographie la dysplasie multikystique se caractérise par l’existence de plusieurs masses anéchogènes liquidiennes, de taille variable, ne communiquant pas entre elles. Il n’est pas possible d’identifier un parenchyme rénal périphérique, on peut tout au plus mettre en évidence quelques éléments tissulaires entre les kystes sans que l’ensemble ait réellement une forme de rein. L’une des hypothèses physiopathologiques est que la dysplasie multikystique serait la conséquence d’un obstacle sévère sur les voies urinaires.

Ceci explique la possibilité non exceptionnelle de syndrome obstructif controlatéral associé à une dysplasie multikystique. Classiquement la dysplasie multikystique donne un rein muet à l’urographie intraveineuse. En pratique il existe quelques rares cas ou différencier dysplasie multikystique et hydronéphrose géante est difficile. On peut avoir recours alors à l’opacification percutanée des voies urinaires.

Devant une dilatation unilatérale des voies urinaires (urétéropyélocalicielle) on peut être amené à diagnostiquer l’existence d’un méga-uretère en relation avec un obstacle de la jonction urétérovésicale ou bien l’existence d’un important reflux vésico-urétéro-pyélocaliciel.

Devant une dilatation bilatérale des cavités pyélocalicielles et des uretères chez un garçon, l’étude en échographie devra se focaliser particulièrement sur la vessie à la recherche d’une paroi vésicale épaissie pouvant traduire des signes de vessie de lutte. On essayera également de mettre en évidence une dilatation de l’urètre postérieur permettant ainsi de poser le diagnostic de valves de l’urètre postérieur.

La thrombose des veines rénales

peut être une complication d’une déshydratation ou d’un sepsis ou bien d’un diabète maternel. La thrombose des veines rénales peut entraîner la palpation d’une masse lombaire associée à une hématurie, à une protéinurie ou à une hypertension transitoire. En échographie le rein est augmenté de taille, dédifférencié. L’échographie doppler qui n’est pas toujours facilement réalisable chez un nouveau-né peut montrer l’absence de flux dans la veine rénale ou bien un flux diminué. L’étude des index de résistance montre un index de résistance augmenté voire une inversion du flux diastolique.

Cette thrombose de la veine rénale est associée parfois à une hémorragie surrénalienne chez le nouveau-né.

La polykystose rénale autosomique récessive.

Le diagnostic peut être évoqué in utero devant la constatation d’un oligohydramnios et de deux reins augmentés de taille et d’échostructure hyperéchogène. A la naissance les reins peuvent être palpés cliniquement, l’échographie permettra également de retrouver comme en anténatal une augmentation importante de la tailles des reins associée à une hyperéchogénicité globale des deux reins. Cette polykystose rénale ne doit pas être confondue avec la polykystose autosomique dominante qui ne donne habituellement pas de manifestation échographique à la période néonatale.

Les lésions kystiques n’apparaîtront que plus tardivement dans la vie.

La tumeur de Bolande.

Cette tumeur porte également d’autres noms dans la littérature : néphrome mésoblastique, hamartome rénal foetal. La tumeur de Bolande est la tumeur rénale la plus fréquente dans les premiers mois de la vie. La circonstance habituelle de découverte est la palpation d’une masse asymptomatique, unilatérale, chez un enfant de moins de trois mois. C’est une tumeur non encapsulée, composée de cellules musculaires lisses ou fibroblastiques. Des tubules et des glomérules peuvent être visualisés au sein de cette masse. En échographie la masse est généralement solide mais peut présenter une composante kystique et peut même être parfois calcifiée. En urographie intraveineuse ou en tomodensitométrie, la visualisation d’une sécrétion rénale au sein de la zone tumorale est un élément très en faveur de ce diagnostic. Le diagnostic de néphroblastome est rarement envisagé à la période néonatale bien que quelques cas aient été décrits dans la littérature. Ceci ne change pas l’attitude thérapeutique car en période néonatale, dans les deux cas, il sera réalisé une néphrectomie.

La néphroblastomatose

est une lésion rare, caractérisée par la persistance de blastème rénal principalement à la périphérie du cortex rénal. Les lésions de néphroblastomatose peuvent être les précurseurs d’une tumeur de Wilms. Le diagnostic échographique peut être difficile car l’échostructure des foyers de néphroblastome peuvent être proches de celui du cortex rénal. La tomodensitométrie mais surtout l’IRM démontrent mieux ces lésions qui peuvent être diffuses en bande ou bien localisées.

Masses retroperitoneales non renales

Hématome des surrénales.

L’hématome des surrénales est l’étiologie la plus fréquente des masses surrénaliennes à la période néonatale. L’étiologie est inconnue mais elle est plus souvent associée avec un accouchement difficile, traumatique, une hypoxémie, des troubles de la coagulation, une septicémie, un choc ou la mise sous une oxygénation extracorporelle type ECMO. Des cas d’hématome de la surrénale en anténatal ont été décrits. Au début l’hématome apparaît comme une structure ronde anéchogène, suprarénale. Mais généralement ils sont découverts à un stade un peu plus tardif où l’échostructure est mixte puis progressivement va apparaître au sein de cette lésion un centre plus hypoéchogène. Les semaines suivantes apparaitront des calcifications périphériques visibles en échographie mais également sur les clichés simples. Si le diagnostic est relativement simple quand le contexte clinique évoque ce diagnostic et que les lésions sont bilatérales, ce diagnostic peut devenir plus difficile lorsque la lésion apparaît principalement échogène, qu’elle est unilatérale et qu’elle ne se modifie pas rapidement dans le temps. Dans ce cas le diagnostic différentiel qui se pose alors est celui d’un neuroblastome kystique néonatal. Dans ce dernier cas, l’imagerie ne permet pas de trancher. Il faut alors avoir recours aux marqueurs biologiques ou à une ponction biopsie percutanée. En conséquence, toute lésion surrénalienne ne faisant pas sa preuve doit être opérée.

Le neuroblastome

peut être également découvert à la période anté ou néonatale et peut être limité à une masse surrénalienne ou bien s’associer à des lésions métastatiques hépatiques. En imagerie le diagnostic peut être évoqué devant la présence sur une radiographie simple de fines calcifications au sein de la masse. En échographie elle apparaît solide, hypoéchogène, nodulaire, ne se modifiant pas au cours des examens successifs. Le diagnostic sera confirmé par le dosage des catécholamines urinaires, la réalisation d’une scintigraphie à la mIBG. Dans quelques rares cas, le neuroblastome est non sécrétant et ne fixe pas la mIBG. Dans ce cas là le diagnostic en imagerie peut être possible. La ponction percutanée, voire l’exérèse chirurgicale, permettront alors d’en réaliser le diagnostic.

Le tératome.

La localisation privilégiée du tératome en période néonatale est la région sacrococcygienne. Cette masse se développe donc en arrière du rectum. Cliniquement il s’agit d’une masse développée dans la fesse. Il est possible que seule une partie de la masse soit visible cliniquement. Le tératome sacro-coccygien peut être également suspecté à la période anténatale sur l’examen échographique. En post-natal les radiographies simples peuvent montrer la présence de tissu osseux ou de dents, le scanner et l’échographie démontrant le caractère pluritissulaire de cette masse et son extension abdominale. Ces tératomes à la période néonatale peuvent être volumineux mais ils sont généralement bénins. Ils posent surtout un problème d’exérèse chirurgicale qui peut être difficile quand ils sont volumineux.

Masses péritonéales et digestives

10 à 20% des masses néonatales sont dues au tube digestif et un faible pourcentage a une origine hépatosplénobiliaire.

La duplication digestive

est le syndrome de masse le plus fréquent du tube digestif en période périnatale. Cette masse est généralement ronde, le plus souvent située dans la région iléo-caecale, et se développe toujours sur le bord mésentérique du tube digestif. Cette masse peut parfois communiquer avec la lumière intestinale. Cette lésion peut être suspectée soit par l’échographie anténatale, soit par la palpation d’une masse régulière, compressible et mobile. Elle peut entraîner un syndrome occlusif en période néonatale. Sur l’échographie, la duplication apparaît comme une masse anéchogène ou hypoéchogène, uniloculaire, à paroi bien définie. L’étude de la paroi de cette lésion doit être attentive car elle permet d’en faire le diagnostic. Pour celà on doit mettre en évidence au moins deux couches, une couche interne hyperéchogène représentant la muqueuse et une couche plus externe hypoéchogène représentant la musculeuse.

Les kystes du mésentère

sont des malformations congénitales résultant en période néonatale d’une malformation du système lymphatique. En échographie ils se présentent comme une masse anéchogène, mobile, à paroi fine.

Les masses hépatiques biliaires

sont rares chez l’enfant. L’hémangio-endothéliome peut entraîner une hépatomégalie clinique associée à une insuffisance cardiaque due à des shunts multiples dans la tumeur. Dans la moitié des cas ces enfants présentent également des angiomes cutanés. En échographie les lésions peuvent apparaître hypoéchogènes ou hyperéchogènes. L’hyperéchogénécité s’explique par de multiples interfaces vasculaires. L’artère hépatique peut être augmentée de taille et on note souvent une disparité de calibre entre l’aorte au dessus et en dessous du tronc coeliaque.

Le kyste du cholédoque

est rarement diagnostiqué dans la période néonatale mais plus tardivement sur la triade ictère, douleurs abdominales et palpation d’une masse. Cependant le kyste du cholédoque peut être visible à la période néonatale, il apparaît comme une masse anéchogène, située près du tronc porte. La dilatation de la voie biliaire intrahépatique est rare. Le diagnostic repose sur la visualisation d’une structure canalaire (voie biliaire) branchée sur le kyste.

Le kyste biliaire

est également une lésion rare en période néonatale. Il apparaît comme une lésion anéchogène, aux contours bien limités. De façon exceptionnelle ce kyste peut être pédiculé et poser un problème de diagnostic différentiel avec un kyste du mésentère ou bien un kyste de l’ovaire.

Les masses génitales

L’hydrométrocolpos

à la période néonatale est souvent associé à un sinus urogénital, à une malformation anorectale, voire à un cloaque. L’échographie met en évidence une masse kystique située entre la vessie et le rectum. Généralement la distension est plus vaginale qu’utérine. Le vagin est reconnaissable à sa paroi fine alors que l’utérus a une paroi plus épaisse. Lorsque cet hydrométrocolpos est volumineux il peut entraîner une dilatation des voies urinaires.

Le kyste de l’ovaire

est une cause fréquente de masse pelvienne chez le nouveau-né. Le kyste de l’ovaire à la période néonatale serait lié à un développement exagéré d’un follicule stimulé par les hormones maternelles. Ce kyste peut être découvert par l’échographie anténatale. Il n’est pas situé simplement dans la cavité pelvienne mais peut être retrouvé n’importe où dans la cavité abdominale. Non compliqué il apparaît comme une masse anéchogène, à paroi fine. La torsion est la complication la plus fréquente de ces kystes, ce qui justifie une prise en charge chirurgicale dès la naissance. Les principaux signes d’un kyste compliqué (hémorragie ou torsion) sont l’apparition d’un niveau liquide-liquide au sein du kyste ou bien la visualisation de septas.

En conclusion,

les masses abdominales en période périnatale sont nombreuses, dominées principalement par les masses d’origine urinaire. L’échographie anténatale joue actuellement un rôle très important pour la prise en charge post-natale des enfants. Ceci démontre la nécessaire collaboration des équipes obstétricale et pédiatrique aussi bien sur un versant clinique que sur le versant de l’imagerie.

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Service de Radiologie, Hôpital d’enfants Armand-Trousseau, PARIS