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1999 > Obstétrique > Maladies inflammatoire du tube digestif MITD  Telecharger le PDF

Maladies Inflammatoires du Tube Digestif et vie génitale de la femme

J. Paris

Dans la mesure où il existe une coïncidence entre l’âge de la grossesse et l’âge des poussées évolutives de Maladies Inflammatoires du Tube Digestif (MITD), il est tout-à-fait concevable que Gastroentérologues et Obstétriciens se rencontrent au chevet de ces patientes. Ce qui nous permet de passer en revue - tabac, contraceptifs oraux et maladies inflammatoires ; la fertilité ; la grossesse ; l’accouchement chez ces patientes.

Tabac et MITD

La rectocolite hémorragique (RCH)

Le risque de développer une RCH est supérieur chez les non fumeurs et chez les ex-fumeurs que chez les adeptes du tabac. Il semble que l’effet protecteur soit dose dépendant.

Le fait de fumer diminue le flux sanguin pariétal digestif parallèlement au taux de la nicotinémie. Ceci a donné l’idée de traiter les RCH par des patchs de nicotine, mais les effets n’ont pas été à la hauteur des théories pathogéniques.

La constatation qu’il y a moins de femmes faisant une RCH est peut-être du au fait que depuis vingt ans, elles fument davantage.

Maladie de Crohn (MC)

Dans cette affection, le risque de développer la maladie et le risque de récidive après résection chirurgicale est nettement plus élevé chez les fumeurs.

Les Crohns ont une atteinte vasculaire focale qui sont confinés aux vaisseaux intramuraux des segments atteints et WAKEFIELD s’est fait le champion de la théorie vasculaire de la MC avec un dépôt de fibrine dans l’endothélium et un infiltrat inflammatoire du mur des vaisseaux avec nécrose et thrombose de ces vaisseaux.

Fumer entraîne un effet vasoconstrictif thrombogénique puisque le tabac induit une atteinte des cellules endothéliales à l’origine de microthrombi, ceci entraîne une diminution de la synthèse des prostacyclines, d’une diminution du plasminogène et une augmentation du fibrinogène et de la capacité d’agrégation plaquettaire.

En outre, la nicotine modifie et la qualité et la quantité du mucus, rendant la muqueuse plus vulnérable, et l’on se demande si la nicotine ou d’autres éléments de l’herbe de Nicot, ne modifierait pas la perméabilité intestinale avec modification de la barrière de défense muqueuse et pénétration d’agents bactériens, viraux ou X.

Contraceptifs oraux (co) et maladie de crohn

Comme le tabac, les CO ont une activité procoagulante et augmentent la tendance aux thromboses locales par augmentation du fibrinogène, du facteur II, des facteurs VII, VIII et X et une diminution de l’antithrombine III. Des études cas témoins n’ont cependant pas réussi à démontrer de façon formelle un rapport entre la prise de CO et le déclenchement d’une MC de même que les grandes études de cohorte portant sur des dizaines de milliers de femmes, suivies des années.

Ainsi, dans la mesure où les MC ont des signes anatomopathologiques évoquant une vascularite avec une augmentation de l’activité procoagulante, dans la mesure où le tabac et la pilule ont les mêmes conséquences, que l’on sait qu’il y a des MC qui s’améliorent à l’arrêt des CO , il parait tout-à-fait licite de déconseiller notamment dans les formes coliques, le tabac et peut-être la pilule. Mon expérience, sur plusieurs décennies, m’apporte que le sex ratio dans la MC s’est modifié en faveur de la femme, or la femme moderne fume et prend la pilule.

MITD et fertilite

Il ne semble pas que la MC influence la fertilité. Cependant il faut bien constater qu’elle est moindre chez les femmes atteintes de MC et il s’agit à la fois d’une décision personnelle des patientes mais aussi parfois de celle des médecins qui les soignent et qui craignent une grossesse, le retentissement des médicaments sur cette grossesse et sur l’enfant et un accouchement difficile. Cependant, la MC et la RCH n’altèrent peu les chances de grossesse sauf s’il y a une importante dénutrition amenant une aménorrhée, des poussées évolutives successives qui diminuent la sexualité, l’existence d’une stomie particulièrement mal vécue et pour les MC, des risques tubaires.

MITD et Grossesse

L’influence de la grossesse sur les MITD a particulièrement été étudiée par WILLOUGHBY et l’on peut résumer les faits de la façon suivante : quand la RCH est inactive à la conception, il y a pratiquement pas de poussée évolutive, alors que lorsqu’elle est active, il y a environ 60 à 80 % de persistance d’activité ou d’aggravation . Dans la MC, il n’y a pas, semble-t-il, de poussée évolutive plus importante dans le temps.

Il n’y a aucune raison de proposer des avortements thérapeutiques.

Influence des MITD sur la grossesse

Si les maladies ne sont pas actives, l’interruption spontanée de la grossesse est identique à celle de la population générale. Par contre, si la maladie est active, il est possible de constater dans les premières semaines jusqu’à 40 % d’avortement. La prématuré est discrètement supérieure : 16 % versus 7 %. Il n’y a par contre pas de malformation congénitale ni de risque d’hypotrophie foetale. L’allaitement n’est pas contre indiqué et le devenir foetal est absolument identique à ce qu’il est dans la population générale et il n’y a notamment pas d’influence sur le mode de délivrance par césarienne ou par voie naturelle, ou sur la survenue d’épisode d’éclampsie. La transmission génétique reste discutée ; si elle est extrêmement faible, c’est à dire 5 % environ pour les Crohn et 1,6 % pour les RCH, elle est plus élevée dans les familles juives avec des chiffres de 7,8 % pour les Crohn et de 4,5 pour les RCH. Dans le cas où les deux parents seraient atteints, le risque de transmission à l’enfant est de 36 %.

La mère, l’enfant et les thérapeutiques

Les obstétriciens n’apprécient pas beaucoup que leur patientes enceintes soient soumises à des prescriptions médicamenteuses, or il vaut mieux parfois poursuivre une thérapeutique dont la réputation de sécurité est connue plutôt que de constater une poussée évolutive de la maladie.

En ce qui concerne la salazopyrine et ses dérivés, on sait que sulfapyridine passe le placenta mais qu’il n’y a aucun risque de complication foetale ; s’il a été décrit un risque potentiel d’ictère nucléaire néo-natal parce que la sulfapyridine déplace la bilirubine de l’albumine, il n’a jamais été décrit dans la littérature. Il est souhaitable, comme souvent dans les MC d’ailleurs, de supplémenter en acide folique en raison de la malabsorption des folates.

Les corticoïdes n’entraînent pas d’anomalie foetale. Certes il y a un risque théorique d’insuffisance surrénale dans le post partum. Ceci étant la bêta hydroxylase placentaire détruit la cortisone active passant la barrière.

Il n’y a pas de risque non plus lors de l’allaitement.

Le flagyl et les autres antibiotiques n’ont pas été rendus responsables d’anomalie mais l’on sait par exemple que certaines molécules peuvent être foeto-toxique et teratogène chez la souris, ce qui amène à prendre quelques précautions.

Les anti-diarrhéiques (Codéine, Imodium, Diarsed) sont contre indiqués, sauf les pansements.

L’imurel est généralement prescrit aux formes chroniques actives cortico-résistantes ; il est donc souvent difficile de l’arrêter. Cependant, théoriquement, il faudrait mieux ne pas le prescrire, même si ALSTEAD et DAYAN qui ont observé 16 grossesses chez 14 femmes prenant de l’imurel, n’ont observé aucun problème. Il parait licite de bien réévaluer le bien fondé de la prescription, de la maintenir si elle est justifiée avec explications loyales de la patiente ; il faut mieux en effet n’avoir qu’un pourcentage de 5 % de rechute en maintenant l’imurel que 40 % de poussées évolutives pendant la grossesse.

La cyclosporine mérite les mêmes commentaires sauf peut-être lors des dernières semaines où il faut faire très attention à l’hypertension artérielle, à l’insuffisance rénale et à l’éclampsie. L’expérience constatée chez les greffés du rein ou du foie permet d’être tout-à-fait rassurant.

Le méthotrexate doit être formellement contre indiqué ; il est en effet mutogène et tératogène ; il faut donc l’arrêter avant le désir de grossesse.

Quant aux assistances nutritives, qu’il s’agit de nutrition entérale ou parentérale, elles peuvent être poursuivies sans aucun risque.

Grossesse et malades operees

La grossesse est le plus souvent parfaitement tolérée. Lorsqu’il existe une iléostomie, il peut arriver une dysfonction stomiale et un prolapsus, ce qui amènera peut-être à interrompre la grossesse au 8ème mois. L’anastomose iléo-rectale en continuité peut entraîner quelques douleurs abdominales de distension, de même qu’une détérioration fonctionnelle transitoire a été observée dans les anastomoses iléo-anales.

L’accouchement

Chez les malades opérées, qu’il s’agisse d’anastomose iléo-rectale, iléo-anale, de colo-proctectomie avec iléostomie, ou iléostomie temporaire, il est possible de proposer un accouchement par voie naturelle au 8ème mois afin d’éviter l’augmentation de volume des dernières semaines. Par contre, chez les malades porteuses de lésions périnéales, qu’elles soient ou non évolutives, il vaut mieux préférer la césarienne en raison des difficultés de cicatrisation du périnée. L’expérience prouve que même les épisiotomies premières dirigées ont bien du mal à se cicatriser.

Conclusion

La sexualité et la fertilité peuvent être considérées comme normale

Les CO et le tabac devraient être contre indiqués

La grossesse est possible sans gravité pour la maladie inflammatoire, sans risque pour l’enfant, même si un traitement d’entretien est poursuivi par le 5’ASA, l’Imurel, les corticoïdes

Si une poussée survient, elle sera traitée normalement, sans risque pour l’enfant

C’est la confrontation entre gastroentérologues et gynécologues obstétriciens qui permettra de juger du moment opportun de l’accouchement et de son mode.

Bibliographie

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