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1998 > Gynécologie > Ostéoporose  Telecharger le PDF

Les marqueurs biochimiques de la perte osseuse

S Olivier et J. Bélaisch

Résumé

Le conditionnel règne en maître dans le château des marqueurs biochimiques de l’ostéoporose quel que soit le texte qui leur est consacré et quelle que soit la spécialité de leur auteur : biochimiste, rhumatologue ou épidémiologiste. Des espoirs multiples sont évoqués mais il est clair aujourd'hui qu’ils ne permettent aucun pronostic ferme pour un individu donné. L’utilité actuelle de ces dosages pour le gynécologue praticien peut donc être définie, sans aucun esprit de critique systématique, comme tout à fait négligeable.

Néanmoins la possibilité -à plus ou moins long terme- de reconnaître les femmes à risque de fractures du fait d’une résorption osseuse en excès sur la formation, est une perspective dont l’intérêt n’échappe à personne et qui explique l’opiniâtreté des recherches effectuées dans ce domaine. D’autres avantages sont également espérés du fait principalement de la rapidité des informations fournies par les marqueurs, en particulier quant à l’efficacité éventuelle de thérapeutiques de l’ostéoporose.

L’état actuel des études menées dans différents services de pointe de rhumatologie mérite donc d’être connu sans toutefois méconnaître le fait que certains services excellente réputation où cette discipline est exercée, ne disposent pas de laboratoire de biochimie capables de les réaliser ou encore que ceux existants ne pratiquent les dosages les plus performants que de façon exceptionnelle.

Savoir, à l’avance, distinguer parmi les femmes, celles qui risquent de souffrir de perte osseuse accélérée et reconnaître celles qui ne courent aucun risque, est un des grands souhaits des rhumatologues ou des gynécologues qui se consacrent au traitement de la ménopause.

L’étude des marqueurs de la formation et de la résorption osseuse pourrait permettre cette distinction. Ces marqueurs appartiennent à deux catégories : les uns reflètent une activité enzymatique des cellules osseuses et les autres sont issus de la dégradation du collagène osseux ou plus rarement sont libérés lors de sa synthèse.

Cependant, il faut bien admettre que les inconnues demeurent nombreuses dans le domaine des mécanismes de la perte osseuse.

les notions fondamentales sur l’evolution de la masse osseuse

Il n’est donc pas inutile de reprendre les notions de base en particulier celle de pic de masse osseuse et d’évolution de cette masse au cours de la vie.

Le pic de masse osseuse

est atteint selon les écoles,

- soit à 35 ans

- soit très vite après la puberté (BONJOUR(2)) pour les filles et pour les garçons. Il n’est cependant pas exclu non plus que la date d’acquisition du pic dépende des facteurs d’environnement et peut êtrede facteurs génétiques. Ainsi selon POLATTI et al.(20) le pic de masse osseuse chez les jeunes filles italiennes de la région de Pavie (Italie) serait atteint aux alentours de la 25ème année contrairement aux jeunes filles de la région genevoise explorées par l’équipe de BONJOUR qui l’atteignent vers 15-16 ans. De toute façon, il n’est pas certain que le pic soit atteint au même âge, même approximativement, pour tous les sites.

La décroissance physiologique

commencerait également à des dates variables selon les écoles :

- pour les uns, elle commencerait autour de 35 ans

- pour les autres, chez les femmes normales, il n’y aurait pas de modifications de la densité osseuse entre 35 et 5O ans, et cette perte commencerait avec les débuts de la carence estrogénique.

Enfin, selon certains, et cette assertion paraît logique, la perte osseuse commencerait précocement entre 4O et 5O ans, chez les femmes ayant des troubles du cycle révélateurs d’une fonction ovarienne déficiente.

L’intensité de la perte osseuse

Quoiqu’il en soit, cette perte n’est pas la même pour toutes les femmes. Elle va de O,2 à 1,3 % par an. En outre, elle varie selon le site exploré :

- de O,6 à O,8 % /an pour le triangle de Ward,

- de O,2 à O,6 % /an pour le col fémoral,

- de O,3 à 1,3 %/an pour les corps vertébraux

- enfin de O,4 à O,6 % / an pour le rachis dans son ensemble. L’étude des marqueurs ne peut donc en aucune façon donner un reflet utile de l’évolution de la densité osseuse de chaque secteur.

De plus, on sait que 2 à 1O % du squelette se renouvellent chaque année, mais 8O% de ce remodelage se produisent dans les os trabéculaires qui ne représentent que 2O % du squelette (ROUX (23).

De telles variations font comprendre que l’observation de marqueurs se situant au dehors des limites de la normalité ne peut que difficilement faire prévoir la survenue de fractures ou du moins le siège des fractures liées à une réduction de la densité osseuse.

Le risque fracturaire

Il faut ajouter que le niveau du pic de masse osseuse est un des éléments essentiel qui gouverne le risque fracturaire. En effet, une modeste augmentation de ce pic de masse osseuse ( O,5 écart type) suffirait pour réduire considérablement le risque de fracture au cours du dernier tiers de la vie (INSERM(14 )). Ainsi, l’étude des marqueurs du métabolisme osseux ne pourrait au mieux, informer sur le risque fracturaire qu’en association avec une densitométrie osseuse à la fois précise et adéquate qui permettrait de connaître l’état de départ de la masse osseuse.

Les fractures considérées habituellement dans les statistiques sont les fractures de l’avant bras et du poignet, de l’extrémité supérieure du fémur et des corps vertébraux ( conduisant à des tassements ) alors que d’autres fractures sont également très fréquentes chez les sujets âgés. Selon la STUDY of OSTEOPOROTIC FRACTURES, réalisée aux USA, les pieds, les orteils, l’humérus, les cïtes, les jambes, le bassin, la main et la clavicule se fracturent également souvent.

Si l’on tient compte de ce que les vitesses de déminéralisation de sont pas les memes pour tous les sites, on comprend qu’idéalement il faudrait étudier tous les os à l’aide de méthodes radiologiques pour juger du risque global de fracture. Et de fait, on peut lire dans le document d’expertise collective de l’inserm consacré aux stratégies de prévention et de traitement de l’ostéoporose : ì pour la plupart des auteurs, la meilleure valeur prédictive du risque fracturaire à un site particulier serait la mesure de la densité minérale osseuse du site en question ì.

Cependant la mesure à chacun des sites (hanche, radius, calcanéum apporterait une bonne valeur prédictive du risque fracturaire de n’importe quel site.

En ce qui concerne ces fractures au niveau de ces sites non classiques, l’étude des marqueurs pourrait avoir un intérêt si elle mettait en évidence une accélération certaine de la perte calcique alors que les sites principaux radiologiquement explorés sembleraient ne pas se modifier ou ne subir qu’une perte très réduite.

Dernier point à considérer avant d’aborder l’examen des marqueurs, les anomalies architecturales pourraient aussi contribuer à fragiliser les os. Or l’étude biologique ne peut vraisemblablement pas fournir d’indication sur l’architecture osseuse.

Les marqueurs biochimiques

Quelques notions fondamentales sur l’activité métabolique osseuse doivent êtrerappelées dans cette analyse réalisée pour les gynécologues et généralistes, par un gynéco-endocrinologue intéressé par la question de la perte osseuse ménopausique et non par un spécialiste des marqueurs.

Le processus de remodelage osseux,

Ce phénomène physiologique permanent nécessaire à l’intégrité mécanique du squelette et à son adaptation aux exigences de la vie du sujet, implique une résorption permanente couplée, selon un mode incomplètement compris, à une formation, permanente elle aussi. Lorsque la résorption l’emporte sur la formation, il y a perte osseuse et vice versa. Mais il y aura toujours association -on dit couplage- des deux processus.

Ainsi la mise en évidence d’un phénomène de formation ne signifie en aucune façon que celui-ci prédomine sur la résorption. Ce qui complique l’interprétation des données et qui explique que la réalisation de dosages de plusieurs marqueurs soit nécessaire pour apporter le maximum d’informations et meme soit pratiquement indispensable aujourd’hui.

En théorie ces marqueurs devraient permettre d’estimer soit remodelage dans son ensemble soit la formation osseuse soit la résorption... En fait le fonctionnement des unités individuelles de remodelage est réglé de façon individuelle...Tout au plus peut-on dire qu’à ce même instant -des dosages- la résorption ou la formation sont statistiquement prédominantes (GUERIS(13)).

On doit, à ce sujet, bien intégrer le vocabulaire des ostéologues qui parlent d’hyperemodelage lorsqu’ils veulent signifier qu’il y a perte osseuse, alors que le phénomène de croissance pourrait aussi bien être défini comme un hyperemodelage de conséquence toute différente.

Néanmoins les phénomènes de formation prenant de 60 à 120 jours pour s’accomplir tandis que ceux de la résorption durant environ 3 jours dans l’os trabéculaire, on peut comprendre que l’accélération du turn over conduise essentiellement à une perte de densité osseuse. Peut-être la solution serait-elle de parler d’hypermodelage pathologique?

En effet si le couplage est constant dans des conditions physiologiques, il existe des conditions pathologiques où ces deux phénomènes sont découplés et où l’on verra donc prédominer l’un ou l’autre processus.

Les deux mécanismes de la perte osseuse post ménopausique

Enfin on doit aussi prendre en compte la théorie selon laquelle il y aurait deux mécanismes dans la perte osseuse post ménopausique : d’une part, celle en relation avec le vieillissement qui serait essentiellement dû à un ralentissement de l’activité ostéoblastique de formation et d’autre part celle provoquée par la carence estrogénique qui déterminerait une hyperactivité de résorption .

Comme on le remarque aisément à la lecture de la littérature consacrée aux marqueurs, l’ensemble des auteurs qui les ont étudiés emploient le conditionnel pour parler des apports de ces dosages. On est donc aujourd’hui dans une période intermédiaire annonciatrice probable de progrès qui rendront possible l’appréciation du risque de survenue d’ostéoporose chez chaque femme individuellement; mais ce stade n’est manifestement pas encore atteint.

les marqueurs de l’osteoformation

Ils sont le témoin de l’activité ostéoblastique. Et ils se dosent dans le sang. L’un est la phosphatase alcaline sérique, l’autre l’ostéocalcine.

La phosphatase alcaline sérique

est le marqueur le plus ancien. Il s’agit d’isoenzyme provenant du foie, de l’os, de la rate et du rein. La spécificité de dosage est donc limitée. Néanmoins, les progrès accomplis dans les dosages immunoenzymatiques de type elisa, (alkphase, laboratoire meter, et ostase , laboratoire hybritec) et de type radiométrique dont les résultats sont comparables, qui dosent spécifiquement les p alc. D’origine osseuse, poussent certains à considérer ce marqueur comme un indice très valable de l’activité ostéoblastique. N’étant pas éliminées par le rein le dosage des p alc. Demeure valable même chez l’insuffisant rénal.

Bien qu’elles soient un marqueur de la formation osseuse leur taux est augmenté dans l’ostéoporose vertébrale, l’hyperthyroïdie l’hyperparathyroidie primitive aussi bien que l’acromégalie.

Le dosage de l’ostéocalcine (OSTC)

est plus utile. Ce petit peptide de 49 acides aminés est synthétisé uniquement par les ostéoblastes. Lors de la synthèse de cette protéine qui s’accumule dans la matière osseuse, une partie passe dans le sang et peut être dosée par radioimmunologie.

L’OSTC est un marqueur de turnover osseux lorsque le remodelage -résorption et formation- est couplé. Lorsque les deux processus sont découplés, elle constitue un marqueur de la formation.

Cette distinction est indispensable pour comprendre qu’en période de formation osseuse accélérée (enfance) et de perte osseuse (période post ménopausique) on puisse observer des variations dans le même sens : celui de l’élévation.

Les anglosaxons la dénomment Bone GLA protein (BGP) en raison de la présence de 3 résidus d’Acide Gamma Carboxy Glutamique (GLA) Elle est vitamine K dépendante et sa demi-vie plasmatique est courte -de l’ordre de 4 minutes- ce qui autorise des variations nyctémérales avec un pic nocturne à 4 heures du matin et un tardif vers 16 heures. La variation maximale étant de 15 % entre les valeurs extr’mes (voir ORCEL(17)). Ce cycle est retrouvé pour d’autres marqueurs et il est le témoin de l’augmentation de remodelage osseux durant la nuit. Il exige que le dosage soit toujours fait à la même heure.

Une autre exigence est celle d’une fonction rénale normale car en cas d’élévation de la créatinine, son taux s’élève notablement.

Enfin, la méthode de dosage employée retentit considérablement sur les résultats car certaines méthodes dosent non seulement les molécules entières, mais aussi les fragments de dégradation de cette protéine. Le dosage précis est aujourd’hui possible grâce à une méthode sandwich utilisant deux anticorps monoclonaux dont chacun reconnaissent une extrémité de la molécule intacte. Un dosage concomitant d’un sérum contrïle demeure indispensable pour éviter les différences inter-laboratoires. Les valeurs normales et stables pour l’adulte sont de 4 à 7 ng/ml ( DELMAS PD (1986) (5) et RUFFIE A. (25) ).

Les variations, selon l’âge, témoignent bien de la complexité des phénomènes de remodelage osseux et des relations avec les métabolismes. L’élévation à 1O-25 pendant la croissance de l’enfant, culmine à 4O-8O pendant la période pubertaire, mais le taux pourrait être réduit de moitié chez la femme enceinte.

Il a été établi par l’équipe de Pierre DELMAS, que le taux de OSTC circulante est corrélé aux paramètres histomorphométriques considérés comme l’étalon or de la formation osseuse (DELMAS PD 1985(4)). On admet donc que c’est le marqueur le plus sensible de l’activité des ostéoblastes (RIIS BJ, (21)).

En période ménopausique on observe une élévation de l’OSTC et une diminution de ce taux après administration de traitement d’estroprogestatifs. Selon RIIS, CHRISTIANSEN et OVERGAARD (22), l’association de ce dosage avec la détermination de la densitométrie osseuse permettrait de reconnaitre les femmes à risque de développement d’une ostéoporose, après une étude menée sur 12 ans. Cependant, cette affirmation ne fait pas l’unanimité et de toutes faÇons, seule une équipe disposant de moyens de dosage et d’évaluation très performants pourrait porter un pareil pronostic.

Le dosage de l’OSTC est également utile dans les maladies métaboliques osseuses (hyperparathyroÏdie, hyperthyroÏdie) et dans la maladie de Paget, où sa valeur est bien corrélée aux paramètres histomorphologiques de la formation osseuse.

Avant d’aborder l’étude des autres marqueurs il est indispensable de connaÎtre la biochimie du collagène et de sa formation.

Le collagène et les protéoglycans -aggrégats de protéines et d’hydrates de carbone- sont les constituants principaux des matrices extracellulaires destinées à former le milieu de soutien dans lequel évoluent les cellules de l’organisme. Le collagène de la matrice extracellulaire osseuse est de type 1.

Ce collagène est fabriqué dans les cellules sous la forme de procollagène qui comporte une partie centrale faite de 3 chaines unies en une triple hélice et deux peptides d’extension aux extrémités N et C terminales.

La molécule de procollagène est excrétée dans le milieu extra-cellulaire où elle sera clivée en trois parties inégales: une molécule de collagène 1 et deux peptides d’extension qui sont, eux, relargués et passent dans la circulation.

Aux extrémités de la molécule de collagène 1 stricto sensu se trouvent deux petites zones non hélicoÏdales appelées télopeptides : les télopeptides N et C.

C’est au niveau de ces télopepetides que se forment des ponts encore appelés ìcross linksî qui les unissent aux molécules voisines. Ainsi se forment des fibres de collagène.

Ces cross links résultent de la condensation de molécules de lysine et d’hydroxylysine présentes sur deux chaines voisines. Et cette condensation aboutit à la formation de pyridinoline et de desoxypyridinoline qui possédent une structure cyclique et la propriété d’émettre une fluorescence particulière.

Et ce sont les propeptides relargués lors de la formation des molécules de collagène et témoins donc de la formation osseuse et les télopeptides et les cross-links libérés lors de la dégradation des fibres de collagène lors de la résorption osseuse qui vont êreles principaux marqueurs du métabolisme osseux

Les propeptides d’extension du collagene

Le clivage enzymatique du procollagène aboutit donc à la formation d’une part de la molécule de collagène et d’autre part de 2 peptides.

L’un est porteur d’une terminaison carboxyle (P1CP) (Procollagène 1 C-peptide) l’autre d’une terminaison amine ( P1NP).

Le P1CP est faiblement corrélé aux paramètres histomorphométriques de formation ( PARFIT (18) ).

Il est élevé en période ménopausique en raison du couplage résorption-formation et de l’accélération du turn over qui comporte néanmoins une prédominance de la résorption à cette époque. Mais la concentration de P1CP semble très largement déterminée par des facteurs génétiques. Ainsi un sujet partant de valeurs très basses, pour lui physiologiques, peut parvenir à l’occasion d’une perte osseuse accélérée à une valeur 3 fois plus forte mais qui demeurera dans les valeurs normales du plus grand nombre. ìLa prise en compte des variations intra-individuelles est peut-’tre plus cohérente pour une bonne utilisation de ce dosageî (GUERIS(13)).

En résumé, en ce qui concerne la formation, le dosage de l’OSTC est le plus performant. Il représente la dernière phase de la formation osseuse, c’est à dire la minéralisation de l’os tandis que le P1CP est le témoin de la phase de prolifération ostéoblastique et les Ph. Alcalines de la maturation de ces cellules.

Les marqueurs de la resorption osseuse

Ils sont révélateurs d’un processus de catabolisme et pour cette raison, on comprend qu’ils se doseront dans les urines.

La calciurie.

Ce n’est pas un moyen d’appréciation très précis. Plus que celle des urines de 24 heures reflétant nécessairement le calcium alimentaire, on préfère doser l’élimination dans les urines de 2 heures, émises le matin à jeun, rapportées à la créatinine.

La phosphatase acide tatrate résistante

est une enzyme lysosomiale issue spécifiquement de l’os. Elle est produite par les ostéoclastes et libérée dans le sang. Comme elle n’est pas un produit de dégradation, elle est dosée dans le sérum. En 1996, on attendait encore la mise au point d’un dosage utilisant des anticorps monoclonaux. Sa concentration augmente avec l’accroissement deu turn over osseux

Les produits de dégradation du collagène

L’hydroxyproline

Considérée naguère - 1987- comme un marqueur utile à la prévision du risque fracturaire, on admet aujourd’hui que, comme l’hydroxyproline provient à la fois du collagène tissulaire et osseux et en raison de l’existence d’un métabolisme périphérique, la fraction excrétée n’a qu’une faible corrélation avec la résorption osseuse et que ce dosage est donc d’une faible sensibilité ( DELMAS1993(6)).

Les glycosides d’hydroxylysine

l’hydroxylysine est également un produit de dégradation du collagène non réutilisé pour la synthèse des nouvelles molécules. Le dosage en est si complexe qu’il n’est pas aujourd’hui considéré comme utilisable en pratique.

Les pyridinolines urinaires

Les molécules de collagène sont, comme on l’a vu, unies entre elles par des molécules de pontage. Lorsque le collagène est dégradé, ces molécules sont excrétées sous forme libre (40%) ou sous forme liée à des peptides (60%) dont les N telopeptides et les C telopeptides qui sont dosés immunologiquement. Ces derniers dosages relativement simples sont corrélés aux résultas du dosage beaucoup plus complexe de chromatographie en phase liquide de haute performance (HPLC).

Les dosages de Pyridinoline et de desoxyPyridinoline libres ont été validés (Pyrilink et Pyrilink D: Metra biochemical.). Des dosages des télopeptides C et N liés aux Pyridinolines sont également disponibles (N-télopeptide : Osteomark, C-télopeptide : Crosslaps). Ils se sont avérés êredes marqueurs de turn over osseux corrélés à l’histomorphométrie osseuse. Des dosages plasmatiques sont en cours de réalisation.

Il est interessant de noter que les concentrations urinaires de Pyridinolines ne semblent pas influencées par les apports alimentaires ni par l’exercice physique et qu’elles subissent des variations circadiennes avec un pic matinal (entre 5 et 8 heurs du matin) peut-’tre en relation avec la resorption osseuse provoquée par la position couchée qui favoriserait la resorption osseuse. Pour bien comprendre qu’un taux élevé de cross-links (pyridinoline et D pyridinoline) ne signifie pas excès de résorption sur la formation, il faut préciser que chez les enfants la quantité excrétée est 10 à 15 fois supérieure à celle excrétée par l’adulte sain en équilibre osseux (GUERIS).

Il semblerait que seules les formes peptidiques des cross-links sont sensibles aux bisphosphonates et non les formes libres chez les pagetiques et les sujets ostéoporotiques, tandis que les estrogènes chez la femme ménopausée induiraient une diminuation simultanée des formes libres et peptidiques.

Si cette différence était confirmée, le dosage des marqueurs apporterait un élément fort intéressant dans le choix du traitement approprié d’un état d’ostéopénie puisque les modalités thérapeutiques auraient une action distincte sur la dégradation enzymatique du collagène osseux.

L’utilisation des marqueurs dans la conduite du traitement de la menopause et des autres formes de carence

Estrogénique

On a considéré pendant des années que dans les années faisant immédiatement suite à la ménopause une perte osseuse notable avait lieu qui s’atténuait pendant les années ultérieures. Il semble aujourd’hui, d’après des études transversales, que cette perte se prolonge très longtemps et que le parallélisme inverse entre une densité minérale osseuse et la rapidité du turn over osseux soit plus franche 30 ans après la ménopause que dans les 10 premières années qui suivent l’arr’t des règles(GARNERO 1994)(11). Il n’en reste pas moins que la ménopause, c’est à dire l’arr’t de la sécrétion estrogénique, provoique une augmentation brutale du turn over osseux dont tous les marqueurs sont révélateurs. L’Ostéocalcine et les phosphatases alcalines s’élèvent de 50 à 100% et les pyridinolines urinaires de 100 à 150% (DELMAS et BEAUDREUL(7)).

Il semble aussi d’après de rares études longitudinales que les femmes perdant rapidement de l’os (ìfast loosersî) à la ménopause vont maintenir cette forte perte pendant des années. Si ces femmes ont à la ménopause une masse osseuse déjà réduite, elles vont courir un plus grand risque fracturaire que les autres. Selon RIIS et coll. (1995)(23) qui ont effectué une étude sur 15 ans le nombre de fractures périphériques et vertébrales, après 15 ans, était plus élevé chez les femmes caractérisées comme ìfast loosersî que chez celles perdant peu d’os lors de la première estimation. D’autre part les dosages combinés d’ostéocalcine sérique, d’hydroxyproline urinaire et de D-Pyridinoline urinaire effectués une seule fois, ont permis de prédire une perte osseuse sur les deux années suivantes avec un coefficient de corrélation de 0,77 ( UEBELHART (27)).

En fait l’utilisation combinée de dosages aujourd’hui considérés comme peu fiables et de dosages auxquels on attribue une plus grande spécificité est g’nante pour l’esprit et quoiqu’elle fasse penser qu’un jour prochain on pourrait atteindre l’objectif fixé, est très loin d’emporter la conviction.

GARNERO et coll. (10) ont estimé les effets d’un traitement par l’alendronate d’après les modifications des marqueurs dans les 6 mois. Ceux-ci étaient significativement corrélés avec la perte de la densité oseuse vertébrale, les coefficients de corrélation, selon le marqueur, variaient entre 0,2 et0,67. On peut suivre KANIS (16) quand il écrit ìces correlations sont étonnament élevées, étant donné qu’elles doivent prendre en compte le caractère régional de l’estimation de la densité osseuse et les erreurs à la fois dans l’estimation des valeurs de la densité osseuse et des marqueurs. Mais le même KANIS ajoute qu’avec l’amélioration de la spécificité des dosages la valeur prédictive s’améliorera également.

Surveillance d’une therapeutique chez la femme

On a pu observer après traitement substitutif de la ménopause une diminution de l’ostéocalcine et du peptide d’extension du procollagène 1 qui retournent aux valeurs préménopausiques de même que PYR ET DPYR qui avaient subi une franche augmentation; mais ces constataions ne sont vraies qu’à l’échelon du groupe.

De telles études qui ont l’avantage d’améliorer la connaissance de la physiopathologie de la perte osseuse et de son contrÙle par les médicaments, ne permettent encore pas, en effet, d’orienter individuellement le traitement des patientes. Mais il est clair que le principal avantage attendu des dosages de marqueurs sur la mesure de la densité osseuse par la radiologie tient dans la rapidité des informations qu’elle pourrait apporter sur l’efficacité d’une thérapeutique. Alors qu’il faut 2 ans à l’absorptiométrie biphotonique par exemple pour apprécier un éventuel gain, les marqueurs pourraient indiquer un effet bénéfique en 3 à 4 mois. Mais c’est là un objectif et non une réalité, au moins à l’échelle individuelle (JENSEN (15)) quoique les marqueurs puissent êreun instrument de recherche (SOWERS (26)).

Un autre bénéfice entrant dans la même optique est celui de l’établissement de la dose efficace d’un médicament, comme cela a été recherché dans l’étude de HARRIS ou encore la distinction entre les femmes sensibles ou insensibles à une thérapeutique en fonction par exemple de leur turn-over osseux comme CIVITELLI et coll cités par DELMAS et BEAUDREUL (7)le rapportent pour la calcitonine.

Les nouvelles molécules par exemple d’anti-estrogènes purs tels que le raloxifène peuvent également êretestées dans des études brèves, à l’aide des marqueurs. Ainsi DRAPER et coll. (9) ont observé en période post ménopausique chez des femmes saines, après une administration de 8 semaines, comparativement au placebo une réduction des P Alk et de l’OSTC sériques ainsi que des cross links pyridinolines et du calcium urinaires après administration de deux doses de cette molécule . Cette étude comportait également un volet lipidique qui a montré également un effet favorable sur le rapport HDL-C/LDL-C .

Enfin le mode d’action d’un traitement réduisant la perte osseuse peut êreétabli grâce à ces dosages, comme l’a montré l’étude de CHEN (3) pour la 1-alpha-hydroxyvitamine D3 qui est active chez les femmes âgées en modulant la sécrétion des hormones calcitropes.

D’autres études semblent en voie de favoriser les nouveaux marqueurs. Ainsi en est-il du dosage des N-télopeptides dans trois publications récentes : celle de POUILLES et coll. (19) de GORAI et coll. (12 ) et celle de DMOWSKI (8). Ce dosage s’est avéré plus fiable que celui de l’OSTC et du rapport hydroxyproline/ créatinine.

Le travail DMOWSKI et coll. est caractéristique de cette approche. Ces auteurs considèrent les pyridinolines cross link comme peu spécifiques ou exigeant des appareillages trop importants pour êreutilisables en clinique. En revanche, ils emploient un immunoessai basé sur un anticorps monoclonal pour doser quantitativement l’excrétion urinaire des N-télopeptides cross liés.

Ces marqueurs ont été étudiés parallèlement au dosage de l’estradiol plasmatique et à la mesure de la densité minérale osseuse de L1 à L4 et de col de fémur chez des patientes endométriosiques soumises à un traitement soit dèanalogue de la LHRH, soit de danazol pendant 6 mois. Les auteurs ont observé que pendant le traitement par l’analogue le taux d’E2 s’est abaissé de 53 % et le N telopeptide élevé de 38% au dessus des valeurs basales, élévation non observée avec le Danazol qui entrainait une baisse plus modeste de l’estradiol. La corrélation la plus forte était observée entre les N-télopeptides au 4ème mois et la densité osseuse à 1 mois après l’arr’t du traitement. Une modification à 3O% de N-télopeptide était considérée comme significative. Autre fait interessant, certaines femmes ayant un taux très abaissé d’E2 n’ont pas perdu d’os, ce qui témoignerait en faveur d’une valeur seuil de E2 différente selon les femmes. Accessoirement, le taux d’E2 était plus prédictif que les N-télopeptides de l’évolution de la densité osseuse du col du fémur.

Avec la possibilité dans les 4 mois de traitement de prévoir grâce au N telopeptide une évolution défavorable de la masse osseuse sous analogues, DMOWSKI et coll. concluent au choix possible de l’arr’t de l’analogue ou d’une add back therapie estrogénique ou enfin d’un éventuel changement du traitement pour le Danazol ìqui n’accélère pas la perte osseuse et peu même promouvoir la formation osseuseî.

Chez l'homme

Chez l’homme également les marqueurs osseux ont été étudiés. En particulier dans l’ostéoporose des hommes eugonadiques, avec fractures vertébrales, les effets de formes retard de la testostérone administrée par voie intramusculaire ont été mesurés par absorptiométrie à rayons X de double énergie et par les marqueurs osseux. Une réduction des taux de N-télopeptide et de D PYR urinaires a été observée qui était corrélée avec l’augmentation de la densité osseuse vertébrale. Tandis que la PYR et les phosphatases alcalines présentaient des valeurs très dispersées. Digne de remarque était la corrélation entre le taux d’estradiol et non de testostérone et l’élévation de la densité vertébrale ANDERSON (1)).

Conclusion

Les marqueurs du turn over osseux possèdent plusieurs avantages théoriques : ils ne sont ni couteux ni invasifs, ils peuvent êrerépétés et reflètent l’activité métabolique de la totalité du squelette. Ils ont un double désavantage théorique : ils sont sensibles, pour la plupart, à la clairance rénale et ne reflètent pas le processus de minéralisation. De ce fait ils ne représentent pas un substitut des méthodes radiologiques dans l’estimation du risque fracturaire. On peut espérer qu’un jour non trop lointain ils permettront de choisir la forme de traitement utile pour un patient donné, la dose minima efficace, et d’informer sur la nécessité ou non de reprise d’une thérapeutique préventive. Mais de nombreux progrès doivent encore êrefaits pour que ces objectifs soient atteints.

Bibliographie

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