Peut-on
considérer le spermogramme comme un critère de santé publique
?
S.
Hamamah, F. Enrezami, D. Attias
Centre
de Fécondation in vitro, Hôpital A. Béclère
92141 Clamart
Pendant trop longtemps; la responsabilité de l'homme dans l'infécondité
du couple a été méconnue. Depuis plus d'une vingtaine d'années
et grâce à l'assitance médicale à la procréation
(AMP), la part masculine dans l'infécondité est maintenant bien
démontrée. Dans un cas sur deux, il existe une composante masculine
dont l'étiologie est inconnue (Sherins, 1995). L'exploration clinique
et biologique doit aller de pair avec une recherche systématique des
facteurs de risques majeurs d'infécondité masculine (antécédents
d'infection génitales, varicocèle et notion de traumatisme testiculaire).
Plusieurs étude récentes ont observé une altération
de l'appareil reproducteur chez le mâle ainsi que des différeneces
régionales suggérant un lien entre environnement et spermatogénèse.
Si l'altération du sperme durant les 20 dernières années
se confirme, l'analyse du sperme devient un indicateur de santé publique
et que le principe de précaution peut se traduire par une réelle
action de prévention en milieu professionnel et surtôt par la non
utilisation de substance n'ayant pas fait la pruve de leur innocuité
dans les études toxicologiques chez l'animal. En plus, plus récemment,
les conditions de travail et l'environnement de l'homme infécond ont
fait l'objet de nombreux travaux et plus particulièrement, ceux de l'équipe
danoise (Carlsen et al. 1992) mettant en évidence une altération
du sperme durant les 20 dernières années. En revanche, d'autres
études, celles de Bujan et al, 1996), Paulsen et al, (1996) ont montré
le contraire durant la même période.
Le but de cette revue est de faire le point sur l'éventuelle évidence
du déclin du sperme chez l'homme dans les pays industrialisés
au cours des dernières decennies et de voir si l'analyse du sperme pouvait
être utilisée comme indicateur de l'état de l'appareil reproducteur
chez le mâle. Afin d'analyser les résultats du déclin observé
dans plusieurs travaux et les critiques formulées à l'encontre
de l'analyse du sperme, il semble intéressant de rappeler brièvement
les techniques d'analyse du sperme.
A.
LA REALISATION DU SPERMOGRAMME ET SPERMOCYTOGRAMME
La
réalisation d'un spermogramme, est un des premiers examen de l'exploration
de la fertilité du couple. Le spermogramme est informatif lorsque interprété
dans le plus large contexte de l'histoire du patient et de son dossier clinique.
Une analyse du sperme ne peut pas être définie simplement comme
normale ou anormale. Il est important pour le clinicien, s'il est bien fait,
de connaître les signes cytologiques révélateurs d'une dysfonction
testiculaire pour tenter une évaluation approximative de la fertilité
masculine .
Conditions
de recueil :
Le
sperme doit être recueilli de préférence au laboratoire,
par masturbation. Le réceptacle doit être stérile, non cytotoxique.
Il est indispensable d'examiner une éjaculation recueillie en totalité,
le sperme étant composé des sécrétions successives
de la prostate, des épididymes et des vésicules séminales,
dont le mélange ne s'effectue qu'au moment de l'émission. Une
abstinence sexuelle de 3 à 5 jours est conseillée avant le recueil.
Ce délai influence le volume et la numération (Olsen et al, 1995).
Divers facteurs externes peuvent modifier les résultats. Le spermogramme
doit donc être interprété en fonction des conditions du
recueil et de tout ce qui a pu arriver au patient les 3 mois précédents.
Lors de l'éjaculation, le sperme coagule pour se liquéfier progressivement,
généralement en une vingtaine de minutes et l'examen ne peut débuter
qu'à partir de ce moment. Selon les laboratoires, le sperme est conservé
à 37°C ou à température ambiante. Toutes ces conditions
interviennent sur la mobilité spermatique et suffisent à expliquer
les différences importantes, mêmes entre les laboratoires spécialisés.
Parametres
mesures dans le spermogramme:
1.
le volume: il doit être mesuré de façon précise avec
une pipette calibrée; il est normalement compris entre 2 à 6 ml.
Une volume trop faible peut évoquer une éjaculation incomplète.
2. le pH: il est mesuré à l'aide d'un papier indicateur de pH
sur lequel on dépose une goutte de sperme; il est compris entre 7,2-7,8.
3. le pourcentage de forme mobiles: il est apprécié à l'examen
direct sur une goutte de sperme de 10 à 20 µl entre lame et lamelle
(22 x 22 mm) à 37° au faible grossissement, puis au fort grossissement
sur 5 à 10 champs choisis au hasard. Le pourcentage de forme mobile est
évalué en routine de façon subjective; celui-ci peut être
influencé par: (i) la température et le temps d'observation, (ii)
l'épaisseur de la goutte de sperme, et (iii) la subjectivité de
l'observateur.
Actuellement, une évaluation objective du % de forme mobile et du type
du mouvement peut être réalisée à l'aide d'une analyse
d'image assisté par ordinateur. L'usage de ces machines dans l'analyse
objective de la mobilité nécessite une maitrise optimale des conditionsde
mesure, si non on risque d'obtenir des résultats qui ne sont forcement
pas le reflet réal d'une éjaculat donnée.
4. la vitalité (pourcentage de spermatozoïdes vivants): elle est
évaluée à l' aide d'un colorant vital comme l'éosine-nigrosine;
une goutte de sperme est ajouté à 2 goutte d'éosine à
1% et après 30 sec, on ajoute 3 gouttes de nigrosine à 10% (dans
le sérum physiologique). Un frottis est réalisé, on compte
100 spermatozoïdes sur différents champs du frottis et on évalue
le pourcentage de ceux qui sont morts " roses " ou vivants "
blancs ".
5. la numération: elle est appréciée par comptage des spermatozoïdes
dans un hémocytomètre (cellules de Thomas ou autre), après
immobilisation des spermatozoïdes dans un solution de Ringer formolé
à 1%.
6. l'analyse morphologique des spermatozoïdes " spermocytogramme "
est effectuée sur un frottis après fixation et coloration de Schorr
ou de Papanicolaou. Une classification à entrées multiples est
nécessaire pour tenir compte de l'existence de plusieurs anomalies sur
le même spermatozoïde (David et al, 1975). La classification française
de David répartit les anomalies en 13 groupes différents dont
7 anomalies de la tête, 2 anomalies de la pièce intermédiaire
et 4 anomalies flagellaires.
Anomalies
du nombre des spermatozoïdes :
1-
L'azoospermie :
L'azoospermie
se définit comme l'absence de spermatozoïde lors de la réalisation
d'au moins 2 à 3 spermogrammes pratiqués dans des conditions optimales:
ce diagnostic ne peut être affirmé que si on examine avec attention
le culot de centrifugation avant et aprés coloration pour infirmer la
présence de spermatozoïdes. Il faut être très prudent
dans le diagnostic définitif de l'azoospermie; car un phénomène
infectieux sévère peut entrainer une azoospermie réversible.
Il faudra aussi éliminer les anomalies de l'éjaculation, les anéjaculations
ou les éjaculations incomplètes ou tout simplement des éjaculations
rétrogrades. Un petit volume de sperme doit à ce moment là
alerter le clinicien et une recherche de spermatozoides dans les urines systématiquement
entreprise.
La recherche de l'origine excrétoire ou sécrétoire de cette
azoospermie s'appuie sur plusieurs paramétres, mais ne peut être
envisagée qu'aprés un examen clinique soigneux.
Les dosages des marqueurs séminaux dans l'éjaculat nous
permettront dans ceratins cas d'affirmer l'origine d'une azoospermie. Ceux-ci
sont normaux dans les azoospermies sécrétoires et pourront être
perturbés en cas d'obstruction du tractus génital. Plusieurs marqueurs
sont utilisés : la L-carnitine et l'a glucosidase ( épididyme),
le fructose (vésicules séminales), le citrate, le zinc ou les
phosphatases acides (prostate). Une obstruction épididymaire va se caractériser
par un taux de carnitine abaissé dans le liquide séminal .Mais,
le taux de carnitine dépend du niveau de l'obstruction; car si l'obstruction
est haut placée, il sera normal. Les marqueurs de vésicules séminales
et de la prostate permettent de localiser l'occlusion sur le tractus génital
et d'établir ainsi une cartographie fonctionnelle du tractus mâle.
L'agénésie vésiculo-déférentielle et/ou l'obstruction
des canaux éjaculateurs se caractérisent par un volume spermatique
réduit, un pH acide et par une chute du taux de carnitine, de fructose
et un taux élevé des phosphatases acides montre la participation
prédominante de la prostate. Cette situation est en dehors de tout recours
chirurgical alors que lors d'une obstruction épididymaire, une anastomose
épididymo-déférentielle peut être tentée.
Le dosage plasmatique de FSH (follicle stimulating hormone) peut nous
eclairer : le taux de FSH est le plus souvent augmenté en cas d'azoospermie
sécrétoire et semble normal lorsque la lignée germinale
est conservée. Mais les azoospermies normogonadotrophiques nous posent
de réels problèmes étiologiques car il existe des azoospermies
secrétoires à FSH normale.
Le dosage de l'inhibine B: elle est sécrétée dans
le sang par les cellules de Sertoli et agit sur l'hypophyse pour inhiber la
libération de FSH. Un déficit de la spermatogenèse se traduit
par une baisse de l'inhibine B qui constitue un marqueur plus sensible des atteintes
de la lignée germinale que l'élévation de la FSH.
2-L'oligozoospermie
:
L'oligozoospermie
se définit par une diminution du nombre de spermatozoïdes dans l'éjaculat
( < 40 106/ éjaculat). C'est le cas le plus fréquent de l'infertilité
masculine et c'est un problème difficile à résoudre. Les
oligozoospermies inférieures à 1 million peuvent être rattachées
aux azoospermies et explorées de la même façon que celles-ci.
L'oligozoospermie est rarement isolée et souvent associée avec
une asthénozoospermie et/ou une tératozoospermie. Cette oligozoospermie
peut avoir plusieurs etiologies:
- origine testiculaire sécrétoire ou excretoire (obstruction unilatérale
sur le tractus)
- un problème d'éjaculation (incomplète ou rétrograde).
- la présence de bactéries, d'infection ou d'inflammation du tractus
accompagnée ou non de leucospermie.
- la présence d'auto-anticorps dans le plasma séminal ou sur la
membrane plasmique des spermatozoïdes.
Cette oligozoospermie n'est pas un obstacle majeure à l'expression du
pouvoir fécondant du sperme.
Anomalies
de la mobilité (asthénozoospermie) :
L'asthénozoospermie
se caractèrise par une chute de la mobilité des spermatozoïdes.
Une mobilité est considérée comme normale au delà
de 50 %. Elle est primaire si la chute de mobilité intervient dés
la première heure ou secondaire si c'est 4 heures après l'émission
du sperme. Comme pour l'oligozoospermie, le diagnostic etiologique est difficile.
Il faut prendre soin d'évaluer le % de nécrozoospermie de façon
à éliminer une absence de mobilité due à une absence
de vitalité des spermatozoïdes.
Il existe des cas faciles c'est l'asthénozoospermie totale : absence
totale de mobilité de tous les spermatozoïdes. Dans les cas d'asthénozoospermie
plus ou moins importantes, on peut évoquer plusieurs étiologies:
- un phénomène infectieux et/ou une absence de fructose
- l'auto-immunisation par anticorps
-une dyskynésie flagellaire ( anomalie des strucutres flagellaires de
l'axonème ou des structures péri-axonémales).
- une anomalie de plasma séminal, notamment une hyperviscosité
due à des troubles de la liquéfaction
Anomalies
morphologiques des spermetozoïdes (teratozoospermies) :
Dans
les années 50, les études des pionniers de la spermiologie comme
Mac Leod ont montré l'importance de la morphologie dans l'évaluation
de l'infertilité. Les spermatozoïdes humains présentent un
fort pourcentage d'anomalies morphologiques ce qui les différencient
de toutes les autres espèces. Un sperme est considére comme "normal"
si il posséde 30 % de spermatozoïdes de morphologie normale.
Cette étude morphologique a été codifiée et quantifiée
et la plupart des laboratoires utilisent la classification de David et al, (1975)
qui tient compte des polymalformations des spermatozoïdes. L'avènement
de l'assistance médicale à la procréation (AMP) met en
évidence l'importance du pourcentage de formes normales dans l'éjaculat.
Il semble exister une certaine constance du profil tératozoospermique
chez le même individu pouvant laisser supposer l'existence d'un rapport
entre certaines perturbations morphologiques et certaines étiologies.
L'établissement du profil tératozoospermique d'un patient nécessite
la réalisation de 3 ou 4 spermocytogrammes à trois mois d'intervalle.
Il est évident, que l'association de nombreuses anomalies va aggraver
le handicap fonctionnel du spermatozoïde et dans certains cas, seule la
microscopie électronique permettra d'établir le diagnostic.
Si l'interprétation de la tératozoospermie, telle que la microcéphalie
totale ou la présence de flagelles courts pose moins de problémes,
en revanche il n'en est pas de même lorsqu'il s'agit d'anomalies de la
tête le plus souvent irréguliére . En effet, il existe des
relations significatives entre la fréquence des anomalies de gamètes
et les anomalies de certains tests fonctionnels : la mobilité, le test
de pénétration dans la glaire, le test de fixation sur la zone
pellucide de l'ovocyte. Le taux de clivage en FIVc est nettement plus faible
en cas de tératozoospermie sévère.
L'infection
: leucospermie et /ou bacteriospermie
La
leucospermie peut être révalatrice soit une infection infra-clinique
potentiellement à traiter soit des séquelles de celle-ci. Une
leucospermie ne peut être prise en compte que si une coloration différencielle
à la péroxydase a été effectuée.
A partir dequelle concentration pet-on parler de leucospermie ? Selon les auteurs
la concentration seuil peut varier de 103 à 106 . Il semble toutefois
qu'une valeur supérieure à 105 soit considérée comme
pathologique. Les leucocytes ont surtout une valeur indicative. Leur présence
doit faire soupçonner une infection, mais aussi un processus inflammatoire
(lithiase prostatique, séquelle d'infection, abstinence trop longue).
Il faut envisager alors une spermoculture et un ECBU du 1er jet d'urine à
la recherche de germes. Certaines infections sont plus ou moins latentes et
ne sont découvertes qu'au spermogramme.
Declin
de la qualite spermatique : mythe ou realite ?
Depuis
les années 70, plus d'une vingtaine d'articles ont été
publiés concluant à une baisse séculaire de la numération
spermatique chez l'homme. Mais, l'effet de ces travaux a été pendant
longtemps différé, compte tenu de la possibilité de biais
au niveau de la sélection et/ou de l'inclusion des données utilisées.
Des études anciennes et récentes ont relancé le débat
sur le sujet. La première de ses études correspond à une
méta-analyse* danoise des publications des 50 dernières années
(61 publications au total) par Carlsen et al. (1992), concernant les caractéristiques
du sperme de 15 000 hommes normaux. Les auteurs ont observé une baisse
globale d'environ 50% de la numération spermatique au cours de cette
période (113 millions/ml en 1940 à 66 millions/ml en 1990). De
même qu'une diminution du volume séminal de 3,4 ml à 2,75
ml au cours de la même période. Cette étude a suscité
beaucoup de controverses. D'une part, il s'agissait d'une méta-analyse
avec les défauts déjà liés à ce type d'étude
et d'autre part, par certaines hypothèses avancées sur le rôle
très probable de facteurs toxiques de l'environnement, notamment les
agents chimiques, dans l'augmentation des autres troubles de l'appareil reproducteur
mâle.
Controverses
à propos de l'étude danoise (Carlsen et al, 1992) :
Les
premières critiques sont celles de Tummon et al. (1992) qui contestait
la validité des données sur la qualité du sperme d'un laboratoire
à l'autre. De plus, au cours de la période d'étude, il
n'existait pas de contrôle de qualité intra et inter laboratoire
pour l'analyse du sperme. Les méthodologies de mesure de la concentration
pouvaient changer d'un centre à l'autre et ont pu être modifiées
au cours des années. Farrow et al, (1994) a également critiqué
l'étude danoise en montrant que ce travail intéressant et rigoureux
n'est toutefois pas exempt de biais possible tels que :
1- le mode de sélection des études choisies par la base de données
du Medline .
2- la distribution des sujets inclus dans l'étude n'est pas homogène
(statut fertile variable).
3- la méthode d'analyse utilisant le mode de régression linéaire
ne semble pas adapté pour étudier la relation entre la concentration
spermatique et l'année de l'étude.
Dans la " réanalyse" de l'étude danoise, Olsen et al.
(1995) aboutissaient aux même résultats pour le fait qu'il existait
une baisse de la concentration moyenne des spermatozoïdes et du volume
séminal de 1940 à 1990. Mais, en se basant sur les critiques de
Farrow et al. (1995), l'analyse a été effectuée selon d'autres
modèles statistiques. L'évolution séculaire des valeurs
de concentration spermatique moyenne pouvait être analysée selon
un modèle quadratique ou par deux régressions linéaires,
avant et après 1970. Ces deux modèles montrent une chute des caractéristiques
spermatiques jusqu'aux années 70 et depuis on assiste à une augmentation
même légère jusqu'aux années 1990 par un modèle
de type "marche d'escalier ". Si toutefois, le mode linéaire
a été admis seul, la régression aurait eu lieu au-delà
des années 40. Ces auteurs et d'autres comme Brake et Krause (1992) ont
repris des études dans la méta-analyse de Carlsen. Pour celles
publiées depuis 1970, les résultats rapportés sont concordants.
Il n'y a pas eu de déclin dans la qualité ni la quantité
des valeurs spermatiques mais au contraire une augmentation significative de
la concentration moyenne au cours des deux dernières décennies.
L'analyse des publications de la période antérieure (1938 à
1971) a montré effectivement une baisse dans les variables spermatiques.
Ce qui a permis de conclure, que cette baisse observée au cours des 50
dernières années n'était pas un phénomène
continu et linéaire et qu'elle avait probablement cessé d'évoluer
après les années 70. En outre, certains facteurs importants tels
que le délai d'abstinence et l'âge des sujets n'ont pu être
pris en compte et qui auraient influencé les caractéristiques
spermatiques. Bromwich et al. (1994), en reprenant les données de l'étude
danoise, ont démontré par le calcul que la baisse de la concentration
apparente au cours de la période d'étude, pouvaient résulter
de l'abaissement du seuil de référence de normalité, 60
millions/ml dans les années 40 contre 20 millions/ml en fin de l'étude.
Fisch etal, (1996 ); et Becker et Berhane (1997) soutenaient l'hypothèse
que la diversité géographique des études incluses dans
la méta-analyse danoise pouvait être un facteur de biais important.
Ils ont ainsi pu montrer qu'il existait bien une baisse significative de la
concentration spermatique au cours des 50 dernières années se
basant sur les études provenant des Etats Unis, qui constituaient 100%
de l'ensemble des études avant 1970 et à l'inverse qu'après,
80 % des études provenaient d'autres régions du monde.
Un des grands mérites de la méta-analyse de Carlsen et al. en
1992 est d'avoir suscité au cours des deux dernières années,
des études rétrospectives basées sur les données
de la qualité du sperme, collectées au sein d'un seul centre.
La première étude publiée avait été réalisée
par Auger et al. (1995) dans la région parisienne portant sur les variations
spermatiques d'un groupe important et homogène de 1351 donneurs de sperme,
de la période 1973 à 1992, montre que la concentration spermatique
diminue de 2,1% par an (89 millions/ml en 1973 à 60 millions/ml en 1992).
De même, La mobilité et la morphologie des spermatozoïdes
ont significativement baissé, et ceci respectivement de 0,6 % et de 0,5
% / an. Aucune variation du recrutement ni dans les moyens d'analyses n'était
observée au cours de cette période. En plus, des deux facteurs
déjà connus (la durée d'abstinence sexuelle et l'âge
du donneur qui influent de façon significative dans le déclin
observé), l'année de naissance des hommes, semble avoir aussi
une contribution significative. Plus les hommes étaient nés récemment,
moins la quantité et la qualité des spermatozoïdes étaient
bonnes. Après ajustement des données en fonction de l'âge
et de la durée de l'abstinence sexuelle, ces auteurs ont montré
que chaque année civile de naissance successive contribuait pour 2,6%
à la baisse annuelle de la concentration du sperme et pour 0,3% et 0,7%
à la baisse annuelle des pourcentages de spermatozoïdes mobiles
et normaux. En France, De Mouzon et al. (1996) ont montré une baisse
régulière du nombre de spermatozoïdes parmi des hommes consultants
pour infertilité du couple d'origine féminine, et nés entre
1950 et 1975. Cette baisse des variables spermatiques liée à l'année
de naissance a été confirmée en Ecosse par Irvine et al.
(1996). La concentration moyenne spermatique a chuté de 98 millions/ml
à 78 millions /ml parmi les donneurs nés respectivement avant
1959 et après 1970. Parmi les autres études qui ont suivi dans
d'autres pays, une baisse séculaire d'une ou plusieurs variables spermatiques
a été observée. C'est le cas du travail rétrospectif
réalisé à Athènes par Adamopoulos et al. (1996),
portant sur 17 ans (1977-1993) analysant les variations du volume séminal
et le nombre total des spermatozoïdes parmi 2385 hommes fertiles. Les résultats
ont démontré une diminution significative de ces variables en
fonction de l'année d'étude. En 1977, le taux moyen des spermatozoïdes
est de 154 millions/ml et de 130 millions/ml en 1993. Cette tendance régressive
est constante mais, plus évidente dans les 8 dernières années.
Le volume séminal a chuté en fin d'étude mais sans différence
significative par rapport à son début. Dans ce travail, l'âge
n'influe pas dans les résultats bien que pour d'autres auteurs l'âge
avancé des sujets au moment du recueil soit un élément
considérable. Le déclin des variables spermatiques observé
dans cette population homogène (race, ethnie, mode de vie, conditions
d'environnement) peut être la conséquence de la pollution locale,
du changement d'hygiène de vie et du mode alimentaire au cours des années
d'études.
L'étude réalisée en Belgique par Van Wadleghem et al. (1996),
parmi 416 donneurs volontaires, confirmait cette baisse au niveau de la quantité
et la qualité du sperme au cours de 18 années d'études.
Les techniques d'analyses biologiques et statistiques restaient inchangées.
La concentration moyenne des spermatozoïdes avait chuté de 12 millions/ml
au cours de la période étudiée. Le % des spermatozoïdes
ayant une mobilité et une morphologie normale avait diminué respectivement
de 52,7% à 31,7% et de 39,2% à 26,6% respectivement de 1977 à
1980 et de 1990 à 1995. L'analyse statistique des données selon
le modèle quadratique a présumé une régression de
la mobilité spermatique qui a été stoppée aux années
90. La suppression de certains produits toxiques et la stabilisation notable
de l'environnement pourraient être un facteur favorisant.
De même, Ginsburg et al. (1994), concluait à une diminution de
la concentration spermatique parmi deux groupes de sujets écossais homogènes,
respectivement de 1978 à 1983 et de 1984 à 1989. Le seul élément
retenu était dans la consommation de l'eau potable dont la distribution
diffère d'un groupe à l'autre.
Par contre, aux Etats-Unis, une telle baisse n'a pas été observée
dans certaines régions. L'étude multicentrique réalisée
en Californie par Paulsen et al. (1996), portant sur la régression de
la quantité et la qualité du sperme dans un groupe de 510 hommes
fertiles de 1973 à 1993, n'a montré aucune différence significative
dans les valeurs des paramètres spermatiques. Fisch et al. (1996) confirment
la stabilisation des caractéristiques spermatiques de 1970 à 1994
dans 3 Etats en Amérique. De même, en Finlande, Vierula et al.
(1996) ont noté une concentration spermatique moyenne la plus élevé
du monde. Aucun déclin des caractéristiques spermatiques n'a été
relevé depuis la seconde guerre mondiale. De même, dans l'étude
française de Bujan et al. (1996), qui analyse les variations spermatiques
chez 302 hommes fertiles sur une période de 16 ans à Toulouse,
la concentration spermatique reste inchangée. Le mode de recrutement
et les techniques d'analyses étaient semblables pendant toutes ces années.
Les résultats ont été ajustés en fonction de l'âge
du donneur au moment du recueil. Il contribue de façon significative
dans la variation de la concentration spermatique, responsable d'une diminution
de 3,3% par année d'âge.
Par ailleurs une étude multicentrique regroupant en France 8 Centres
d'Etudes et de Conservations des ufs et du Sperme (CECOS), de 1973 à
1990, a permis d'étayer l'hypothèse d'un véritable déclin
des caractéristiques spermatiques, variable selon les régions,
durant les 20 dernières années, sur une population de 4 710 hommes
fertiles. Le mode de recrutement et les méthodes de mesures sont restés
inchangés. Le volume séminal en moyenne est de 3,4 ml, la concentration
spermatique moyenne est de 80 millions/ml. Le nombre total en moyenne de spermatozoïdes
est de 264 millions/ml avec une motilité en moyenne de 65%. Il existe
une différence significative des caractéristiques séminales
d'une région à l'autre. Les résultats ont été
ajustés en fonction de l'âge (> à 34 ans ) et de la durée
d'abstinence sexuelle (> à 3 j). Le nombre total le plus important
de spermatozoïde était dans le nord de la France à Lille
et le plus faible à Toulouse dans le sud. La valeur moyenne la plus élevée
du volume séminal était à Caen de 4 ml et pour une valeur
minimale de 3 ml à Rennes. Le meilleur pourcentage de la mobilité
spermatique a été observé à Bordeaux (71%) et celui
le plus faible à Tours (59%).
Facteurs
influencants l'evolution observee des caracteristiques spermatiques
Etant
donné la complexité et le caractère probablement multifactoriel
des phénomènes impliqués dans le déclin observé,
il paraît nécessaire de s'appuyer sur l'épidémiologie,
la recherche clinique et la recherche fondamentale pour étayer ces données.
Population
étudiée :
Dans
certaines études, les méthodologies employées, les paramètres
inclus et les techniques d'analyses, auraient pu être des facteurs déterminants
dans les résultats observés. Dans la plupart des études,
les populations ne sont pas bien définies. L'homogénéité
de groupes d'études, le mode de recrutement et le statut de fertilité
ne sont pas détaillés (Auger et al, 1997).Dans la plupart des
études, les populations ne sont pas bien définies. L'homogénéité
de groupes d'études, le mode de recrutement et le statut de fertilité
ne sont pas détaillés (Auger, 1997).
Dans la méta-analyse de Carlsen et al, (1992), les études utilisées
provenaient de zones géographiques diverses, la plupart étaient
des Etats Unis dont la majorité de New York et les hommes étudiés
avaient un statut de fertilité variable. Des facteurs importants pouvant
influencer les caractéristiques spermatiques et moduler la concentration
n'étaient pas pris en compte comme covariables. Essentiellement, l'âge
du donneur, l'année de naissance et la durée d'abstinence sexuelle
avant le recueil, étaient pris en compte différemment d'une étude
à l'autre. De même il a été observé, une nette
différence de la qualité du sperme entre les centres après
ajustement des résultats en fonction de ces variables (Auger et al, 1997).
Dans la méta-analyse de Carlsen et coll. (1992), les études utilisées
provenaient de zones géographiques diverses, la plupart étaient
des Etats Unis dont la majorité de New York et les hommes étudiés
avaient un statut de fertilité variable. Des facteurs importants pouvant
influencer les caractéristiques spermatiques et moduler la concentration
n'étaient pas pris en compte comme covariables. Essentiellement, l'âge
du donneur, l'année de naissance et la durée d'abstinence sexuelle
avant le recueil, étaient pris en compte différemment d'une étude
à l'autre. De même il a été observé, une nette
différence de la qualité du sperme entre les centres après
ajustement des résultats en fonction de ces variables (Auger, 1997).
Dans l'étude multicentrique française (Fédération
CECOS, 1997), la population était homogène, constituée
des hommes fertiles, candidats au don du sperme. Néanmoins, en tenant
compte de ces facteurs, il a été observé une différence
significative des caractéristiques spermatiques parmi les différents
CECOS. Une différence qui persistait après normalisation des résultats
en fonction de l'âge et de la durée d'abstinence sexuelle. Il serait
donc utile de pouvoir standardiser les méthodes d'analyses et les modalités
de recrutement chez des hommes qui sont plus représentables de la population
générale (Auger et al, 1997).
Variation
intra et inter laboratoire dans l'analyse du sperme :
Plusieurs
études ont montré des variations notables dans la détermination
des caractéristiques spermatiques inter et intra laboratoires liées
à la diversité des moyens utilisés (Fédération
CECOS, 1997).
1-Difficultés à établir des normes :
Les valeurs de normalité établies par l'OMS ont été
modifiées entre 1987 et 1992 et elles le seront probablement dans le
manuel de l'OMS de 1997. L'oligozoospermie est évoquée lorsqu'il
y a une concentration spermatique = à 20 millions/ml, l'asthénozoospermie
pour un taux = à 25% de formes fléchantes ou = à 50% de
formes mobiles et la tératozoospermie pour un taux = à 30% de
formes normales, selon les normes de l'OMS de 1992. Si on comparait ces valeurs
avec celles de 1987, on observait qu'il y ait une diminution dans les valeurs
due pour une grande partie, aux travaux obtenus par la FIV montrant l'obtention
de grossesse avec des valeurs parfois bien inférieures à celle
de l'OMS.
Bien que l'analyse du sperme ne permette pas de prédire le pouvoir fécondant
d'un spermatozoïde, elle demeure la pierre angulaire dans l'exploration
de l'hypofertilité masculine. Le spermogramme peut être complété
par l'analyse fine des paramètres du mouvement spermatique grâce
au développement de techniques d'analyses microvidéographiques
automatisées (Guérin, 1993).
Depuis quelques années, plusieurs tests permettant d'explorer une ou
plusieurs fonctions spermatiques ne sont pas forcement prédictifs du
pouvoir fécondant du sperme. De plus, comme l'ont montré les progrès
de la micro-injection de spermatozoïde (ICSI) et la FIV, la concentration
du sperme n'est pas le seul déterminant de la fécondité
masculine.
Variabilité intra- individuelle des caractéristiques du sperme
:
Chez un individu, les caractéristiques du sperme sont susceptibles d'être
influencées par toute affection étant survenue dans les 3 mois
précédents l'examen. Il apparaît aussi hasardeux de tirer
des conclusions définitives sur la base d'un seul examen et il est conseillé
de le renouveler 3 mois après. Plusieurs facteurs peuvent influencer
la variabilité intra - individuelle (David, 1982) :
a) Les conditions de recueil :
Le recueil par masturbation au laboratoire est le seul moyen préconisé
pour éviter les risques d'erreurs importants de contamination, liés
à l'occasion d'un rapport sexuel par coït interrompu ou dans un
préservatif. Mais le degré d'excitation sexuelle par ce moyen
artificiel peut influencer la qualité du sperme.
b) Le délai d'abstinence :
Il est responsable de la variabilité intra individuelle. David en 1982,
a montré que pour des délais variant de 1 à 5 jours, le
volume, la numération, et le nombre total de spermatozoïdes dans
l'éjaculât, augmentent de façon linéaire de 0,4 ml,
13 millions/ml, et 87 millions/éjaculât, respectivement par jour
d'abstinence supplémentaire.
c) L'imprécision des techniques de mesures :
Les différents paramètres, sont mesurés selon des techniques
reconnues mais avec une marge d'erreur importante :
Dans l'étude multicentrique française des 8 CECOS (1997), les
conditions d'observation sont variables pour le volume, la concentration et
la mobilité. Par exemple, l'utilisation de la cellule de Mackler à
Rennes, pouvaient être responsable de la surestimation de la concentration
spermatique. Ailleurs, la numération était à l'hémacytomètre,
mais l'erreur peut être majorée en cas d'hyperviscosité
du sperme. Par contre, le pourcentage de mobilité, évalué
par observation d'une goutte de sperme entre lame et lamelle est une méthode
éminemment subjective. Le pourcentage le plus important était
dans les centres (Paris, Bordeaux, Rennes et Tours) où l'analyse était
effectuée en température ambiante. Enfin, l'analyse morphologique
d'interprétation difficile et impossible à standardiser parfaitement,
a été apprécié d'après la classification
de David en 1975. Cependant, ceci ne pouvait pas expliquer pour autant les variations
régionales observées car la stratégie d'évaluation
adoptée et les techniques d'analyses étaient identiques dans la
majorité des centres.
Facteurs endo et exogènes :
Certains facteurs tels que le climat, la géographie, les produits chimiques,
physiques et biologiques peuvent avoir un effet sur la qualité spermatique
(Sharpe et al. 1993, Carlsen et al. 1995 ; Jensen et al. 1995). Il est aussi
évident que le mode de vie et l'attitude comportementale diffèrent
d'un individu à l'autre et d'une région à l'autre. Les
données dans ce domaine, ne permettent pas pour le moment d'en établir
un lien étiologique commun avec le déclin des caractéristiques
du sperme. Toutefois, des théories permettent de retenir cette éventualité
comme hypothèses de travail (Sharpe et al. 1993).
1
- Facteurs génétiques :
Leur implication de façon directe est peu probable, étant donné
la rapidité de l'évolution de ce phénomène (environ
2% de baisse par an de la production spermatique) et le fait qu'elle survienne
dans diverses zones géographiques. On ne peut pas écarter l'hypothèse
selon laquelle une susceptibilité génétique de certains
individus pouvaient les rendre particulièrement sensibles à des
modifications spécifiques de l'environnement.
2 - Anomalies intercurrentes de l'appareil producteur mâle :
Un lien semble exister dans la population entre l'incidence des anomalies du
tractus génital mâle et les valeurs moyennes de production spermatique.
Une baisse apparente des numérations de spermatozoïdes s'accompagnait
d'autres anomalies observées au niveau du système reproducteur
masculin. C'est ainsi qu'au cours des 50 ans correspondant à la méta-analyse
de sperme, la fréquence du cancer du testicule s'est accrue de façon
très importante dans certains pays tels que le Danemark, les Etats-Unis
et la Grande Bretagne (Toppari et al. 1995). L'augmentation observée
se situait entre 2 et 4% par an chez les hommes de moins de 50 ans. De même,
l'incidence moyenne de l'hypospadias et de crypthorchidie, tout en variant dans
sa répartition géographique, avait également augmentée.
Les causes de cette fréquence accrue restent inconnues. Ces anomalies
sont accompagnées d'une chute importante de la qualité du sperme
(Carlsen et al. 1995). Par ailleurs, il a été noté que
l'incidence de l'hypospadias et du cancer du testicule est très basse
en Finlande où la concentration spermatique moyenne est la plus élevé
du monde. Cette incidence est très élevée au Danemark où
la concentration spermatique est deux fois plus faible (Jensen et al. 1995).
3-
Facteurs environnementaux :
Certaines études épidémiologiques ont supposé que
des facteurs d'environnement puissent être impliqués dans les altérations
de la reproduction masculine (Thonneau, 1993 ; Sharpe et al. 1993).
A/ Exposition aux radiations ionisantes et à la chaleur :
Sur le plan de la reproduction humaine, nous connaissons l'effet délétère
des radiations sur les lignées germinales de l'homme et sur les capacités
reproductrices du couple. Le testicule est l'un des organes les plus vulnérables
aux rayonnements et à la chaleur. L'exposition à ces différents
agents a certainement augmenté au cours des 50 dernières années.
Leurs effets nocifs pouvaient s'exercer au cours de développement de
l'appareil génital de la vie ftale, en perturbant la cascade normale
d'expression génétique impliquée dans la différenciation
des gonades et les mécanismes de la régulation endocrinienne gonadique
(Toppari et al. 1995).
De nombreux travaux démontrant l'influence de la chaleur sur la spermatogenèse
chez l'homme, dans un cadre professionnel (Figa Talamenca et al. 1992 ). Dans
cette étude, les auteurs notent chez les hommes exposés à
des hautes températures, une plus grande proportion de couples sans enfant,
de plus grandes difficultés à concevoir et sur le plan biologique,
une diminution de la mobilité des spermatozoïdes.
Par ailleurs, l'équipe toulousaine a retrouvé, chez des hommes
consultant pour infécondité, un pourcentage important d'hyperthermie
scrotale associée à des altérations de la spermatogenèse
(Bujan et al. 1988).
B/
Exposition aux agents toxiques :
- Effet
de l'strogène sur la fonction reproductive masculine :
L'enquête
danoise du ministère de l'environnement a confirmé qu'il existe
une classe d'agents chimiques possédant des activités estrogéniques
ou anti-androgéniques, incriminée dans l'altération de
la qualité du sperme et dans la prévalence des anomalies génitales
masculines.
L'expérience de diethylstilbestrol (DES) rapporté par Jensen et
al. (1995) entre 1950 et 1970 de plusieurs millions de femmes enceintes traitées
par ce produit a montré une élévation de l'incidence chez
l'homme de crypthorchidie et de l'hypospadias, ainsi qu'une diminution de la
concentration spermatique (de 123 millions/ml à 83 millions/ml).
L'incidence d'hypospadias et du cancer des testicules augmente à l'âge
adulte. Gill et al. (1979), sur des échantillons spermatiques chez les
non exposés au DES, trouvent que la concentration spermatique est nettement
diminuée. Le volume séminal n'est pas modifié, mais la
mobilité spermatique, le nombre total des spermatozoïdes et le %
des spermatozoïdes avec morphologie normale est statistiquement plus faible
que les hommes non exposés. La majorité des hommes exposés
ont une concentration spermatique bien au-dessous de la limite considérée
normale pour les hommes fertiles. Par ailleurs, cette hypothèse permet
de conclure que certains produits chimiques de l'environnement ayant un effet
strogène-like constitue un facteur de risque sur la qualité
du sperme (Carlsen et al. 1995).
- Autres
produits chimiques :
De
nombreux produits, utilisés en milieu agro-alimentaire et industriel,
semblent perturber la qualité du sperme. Il s'agit souvent d'exposition
multifactorielle où il est difficile de faire la part respective de chaque
facteur. Depuis les travaux publiés par Warthon et al. (1977), plusieurs
auteurs ont montré l'atteinte spécifique du 1, 2- dibromo-3-chloropropane
(DBCP) au niveau des tubes séminifères, la relation dose effet,
et aussi les possibilités de récupération de certains épithéliums.
Dans les années 70, l'industrie agro-alimentaire américaine a
utilisé comme pesticide le DBCP, dix ans après, plus de 1 000
travailleurs étaient devenus stériles. Une recherche multicentrique
européenne (Toppari et al. 1995) menée dans le domaine, a permis
d'attirer l'attention des pouvoirs publics et des industries concernées,
sur la nécessité d'évaluation épidémiologique
rigoureuse et d'éventuelles mesures de santé publique. Il importe
donc, de faire le point des connaissances disponibles dans le domaine et d'identifier
avec précision les facteurs responsables des évolutions des caractéristiques
spermatiques et des anomalies de l'appareil reproducteur observées aussi
bien chez l'homme que chez l'animal. De plus, les recherches cliniques touchant
les conséquences de travail posent des difficultés d'acceptation
dans les milieux professionnels, et aussi chez les intéressés.
Actuellement, les recherches en cours s'orientent en direction de populations
spécifiques particulièrement exposées à certains
produits où l'environnement industriel semble être particulièrement
polluant et néfaste pour les fonctions de reproduction.
C/
Variations spermatiques saisonnières :
Dans
les espèces animales, l'effet saison a été largement observé.
Cependant, chez l'homme, il est difficile de le mettre en évidence. Chez
l'animal, la périodicité de la reproduction joue un rôle
important dans l'adaptation des organismes à leur environnement Chez
l'homme, des variations saisonnières de la fertilité spontanée,
ont été observées dans tous les pays du monde. Plusieurs
hypothèses ont été émises pour expliquer les fluctuations
de la fécondité. Parmi elles, la qualité du sperme qui
semble être le facteur le plus important où le rôle du climat
et le photopériodisme serait intéressant. De nombreux travaux
de la littérature ont été analysés par Zerah et
al. (1997), concernant les variations saisonnières de la fertilité
humaine et animale. Une très importante variation saisonnière
de la spermatogenèse associée à des variations de la masse
testiculaire a été observée chez le daim (Walkden-Brown
et al. 1994). Chez l'homme, l'étude réalisée par Swatowski
et al. (1994) parmi de couples infertiles, ont montré une corrélation
entre l'augmentation des formes normales et la diminution de la mobilité
en fonction des saisons. La variation du pourcentage de formes normales en fonction
des saisons est statistiquement significative. Saint-Pol et al. (1989), s'intéressant
à des hommes fertiles, ont démontré une variation saisonnière
très significative du nombre de spermatozoïde dans l'éjaculat.
Conclusions
Que
le déclin du sperme soit confirmé ou non pendant les 20 dernières
années, aucune relation n'a pu être établie avec l'index
de la fertilité masculine. On sait néanmoins, par quelques études,
que certaines des caractéristiques du sperme peuvent influencer la survenue
de la grossesse.
Dans l'état actuel des connaissances, il n'est pas possible de répondre
de façon univoque à cette question. Cependant, le principe de
précaution devrait se traduire par: (i) une réelle action de prévention
en milieu professionnel; (ii) la non utilisation de substances n'ayant pas fait
la preuve de leur innocuité dans les études toxicologies chez
l'animal; (iii) l'évitement d'un facteur de risque découvert lors
des conslutations pour infécondité masculine. Ceci implique une
véritable réfexion de tous les acteurs de notre société.
Bibliographie
ADAMANPOULOS
D., PAPPA A., NICOPOULOU S., ANDREOU E., KARAMERTZANIS M., MICHOPOULOS J., DELIGIANNI
V., SIMOU M. (1996). Seminal volume and total sperm number trends in men attending
subfertility clinics in the greater Athens area during the period 1977-1993.
Hum.Reprod., 11 : 1936-1941.
AUGER J. (1997). Evolution de la fertilité de l'homme au cours des 20
dernières années. Contracept. Fertil. Sex., 6, 25 : 524-529.
AUGER J., KUSTMANN J. M., CZYGLIK F., JOUANNET P. (1995). Decline in semen quality
among fertile men in paris during the past years. New Engl. J. Med., 332 : 281-285.
BECKER S., BERHANE K. (1997). A méta-analyse of 61 sperm count studies
reviseted.
Fertil. Steril., 67 : 1103-1108.
BRAKE A., KRAUSE W. (1992). Decreasing quality of semen (letter). Br. Med. J.,
305 : 1498.
BROMWICH P., COHEN J., STEWART I., WALKER A. (1994). Decline in sperm counts
: an artefact of changed reference range of " normal "? Br. Med. J.,
309 : 19-22.
BUJAN L., MANSAT A., PONTONNIER F., MIEUSSET R. (1996). Sperm concentration
in donor 1977-1992 in Toulouse, France. Br. Med. J., 312 : 471-472.
BUJAN L., MIEUSSET R., MANSAT A. (1988). Conditions de travail, spermatogenèse
et fertilité masculine. Arch. Mal. Prof. 49 (2) : 97-102.
CARLSEN E., GIWERCMAN A., KEIDING N., SKAKKEBAEK N. E. (1992). Evidence for
decreasing quality of semen during past 50 years. Br. Med. J., 305 : 609-613.
CARLSEN E., GIWERCMAN A., KEIDING N., SKAKKEBAEK N. E. (1995). Declining semen
quality and increasing incidence of testicular cancer : is there a common cause
? Environ Health Perspect. , 103 : 137-139.
DAVID G., BISSON J. P., CZYCLIK F., JOUANNET P. (1975). Anomalies morphologiques
du spermatozoide humain. Proposition pour un système de classification.
J. Gyn. Obstet. Biol. Reprod. Suppl. 4, 17.
DAVID G. (1982). Facteurs de variation des caractéristiques. Colloque
INSERM : 57-68.
DE MOUZON J., THONNEAU P., SPIRA A., MULTIGNER L. (1996). Semen quality has
declined among men born in France since 1950. Br. Med. J., 313 : 43.
FARROWS S.(1994). Falling sperm quality : fact or fiction ? Br. Med. J., 309
: 1-2.
Fédération CECOS, AUGER J., JOUANNET P. (1997). Evidence for regional
differences of semen quality among fertile french men. Hum. Reprod., 12 : 740-745.
FIGA-TALAMANCA I. , DELL'ORCO V., PUPI A., DONDERO F., GANDINI L., LENZI A.
et Al. (1992). Fertility and semen quality of workers exposed to high temperatures
in the ceramics industry. Reprod. Toxicol. 6, 6 : 517-523.
FISCH H., GOLUBOFF E. T. (1996). Geographic variations in sperm counts : a potentiel
bias in studies on semen quality. Fertil. Steril., 65 : 1044-1046.
FISCH H., GOLUBOFF E. T., OLSON J. H., FELDISHUH J., BRODER S., BARAD D. H.
(1996). Semen analysis in 1238 men from the United States over a 25 year period
: no decline in quality. Fertil. Steril., 65 : 1009-1014.
GILL W.B., SHUMACHER G.F.B., BIBBO M. (1977). Pathological semen and anatomical
abnormalities of the genital tract in human male subjects exposed to diethylstilbestrol
in utero. J. Urol., 117 : 477-480.
GINSBURG J., OKOLO S., PRELEVIC G., HARDIMAN P. (1994). Residence in the London
area and sperm density. Lancet, 343 : 230.
GUERIN.J. F. (1993). Le sperme normal. Rev. Prat. (Paris), 43, 8 : 932-935.
IRVINE D. S., CAWOOD E., RICHARDSON D., MACDONALD E., ATKEN J. (1996). Evidence
of deterioration semen quality in the united kingdom : birth cohort study of
577 men in scotland over 11 years. Br. Med. J., 312 : 467-470.
JENSEN T.K., TOPPARI J., KEIDING N., SKAKKEBAEK N. E.(1995). Do Environmental
Estrogens Contribute to the decline in Male Reproductive Health ? Clin. Chem
, 12, 41 : 1896-1901.
OLSEN G. W., BODNER K. M., RAMLOW J. M., ROSE C. E., LIPSHULTZ L. I. (1995).
Have sperm counts been reduced 50% in 50 years ? Fertil. Steril., 63 : 887-893.
PAULSEN C. A., BERMANN G., WANG C. (1996). Data from men in greater Seattle
area reveals no downward trend in semen quality : further evidence that deterioration
of semen quality is not geographically uniform. Fertil. Steril., 65 : 1015-1020.
SAINT-POL P., BEUSCART R., LEROY B., HERMAND E., SABLONSKI W. Université
de Lille Cedex France. Fertility and Sterility, Vol 57, n°5, 1030-1033.
SHARPE R.M., SKAKKAEBACK N.E. (1995) Are estrogens involved in falling sperm
couts and disorders of the male reproductive tract ? Lancet 351 :1392-1395.
SHERINS R. (1995). Are semen quality and male fertility changing ? (editorial).
New Engli. J. Med. 332, 327.
THONNEAU P. (1993). Fertilité et environnement : un nouveau challenge.
Contracept. Fertil. Sex., 9, 21 : 639-641.
TOPPARI J., LARSEN J. C., CHRISTIANSEN P., GIWEREMAN A., GRAND-JEAN P., GUILLETTE
L.J. et al. (1995). Male reproductive health and environmental chemicals with
estrogenic effects. Copenhagen : Danish Environmental Protection Agency, Miljoproject
209 : 1-166.
TUMMON I. S., MORTIMER D. (1992). Decreasing quality of semen (letter). Br.
Med. J., 305 : 1228-1229
VAN WADLENGHEM K., DE CLERCQ N., VERMEULEN F., SHOONJANS F., COMHAIRE F. (1996).
Deterioration of semen quality in young healthy belgian men. Hum.Reprod., 11
: 325-329.
VIERULA M., KEISKI A., SAARENEN M., SAARIKOSKI S., SUOMINEN J. (1996). High
and unchanged sperm counts of Finish men. Int J. Androl., 19 : 11-17.
WALKDEN-BROWN SW., RESTAL B.J., TAYLOR WA. (1994). Department of agiculture,
University of Queesland. Australia Reprod.Fertil. DEV. 6(6) : 727-36.
WORTHON D., KRAUSS R.M., MARSHALL S., MILBY T. H. (1977). Infertility in male
pesticide workers. Lancet, 2 : 1256-1261.
ZERAH S., DE MOUZON J., PFEFFER J., TAAR J.P. (1997). Variations saisonnières
des caractéristiques du sperme. Contracept. Fertil. Sex., 7, 8, 25 :
519-523.
|