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2010 > Gynécologie > Hyperplasie de l'endométre  Telecharger le PDF

Traitement conservateur du cancer et Des hyperplasies atypiques de l’endometre.

J. Benifla

Traitement conservateur du cancer et Des hyperplasies atypiques de l’endometre.

JL. Benifla

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QCM PRE TEST:

Dans le cadre d’un cancer de l’endomètre stade IA chez la femme jeune, quelles sont les propositions qui paraissent vraies ?

 1-Un traitement radical est l’attitude thérapeutique de choix

2-Une prise en charge chirurgicale conservatrice n’a pas sa place au-delà de 50 ans

3-Une cœlioscopie doit être systématique en cas de thérapeutique conservatrice

4-L’évaluation de la réserve ovarienne est un critère fondamental

 

Quels examens complémentaires vous paraissent indiscutables pour traiter par hystéroscopie opératoire un cancer de l’endomètre stade IA ?

1-une hystérosalpingographie

2-un spermogramme et spermoculture du partenaire

3-un dosage de l’AMH

4-un dosage de l’ACE

 

Parmi ces propositions, quelles sont celles qui sont correctes concernant la prise en charge conservatrice d’un cancer de l’endomètre stade IA ?

1- Parmi les examens complémentaires, la demande d’un scanner abdominopelvien est superflu, car l’IRM suffit

2- La cœlioscopie est uniquement réalisée pour la vérification d’autres facteurs d’infertilité

3- Lors de la réalisation du traitement conservateur par hystéroscopie opératoire, l’obturation tubaire proximale est essentielle

4- La découverte d’un hydrosalpinx pendant cette cœlioscopie de bilan est un critère d’exclusion du traitement conservateur du cancer de l’endomètre stade IA

Introduction :

L’adénocarcinome et l’hyperplasie atypique de l’endomètre sont deux pathologies qui surviennent essentiellement chez des femmes ménopausées. Cependant, dans environ 5 % des cas, ces pathologies concernent des femmes plus jeunes, en âge de procréer [1-3].

Aujourd’hui, le désir de grossesse est devenu plus tardif qu'auparavant, et on constate que la fréquence avec laquelle cette entité coïncide avec un projet de grossesse, voire une consultation pour une infertilité augmente. Ainsi a émergé l’idée d’un traitement conservateur chez ces patientes dont la prise en charge classique reposait jusqu'alors sur le principe intangible de l'hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale.

Le principe général consiste à proposer, dans ce contexte très particulier, un protocole conservant la fonction utéro-annexielle fondé sur un contrôle local de la lésion endométriale associé à la prescription d’un traitement antigonadotrope et de s’assurer de l’absence d’évolutivité des lésions par une surveillance attentive.

L’objectif idéal d’une telle prise en charge consiste sur le plan carcinologique dans la rémission totale et définitive de la lésion et en termes de fertilité, dans l’obtention d’une grossesse spontanée ou éventuellement par assistance médicale à la procréation. Mais en réalité, l’objectif consiste à obtenir

• une rémission la plus longue possible, mais nécessairement temporaire notamment en raison de la persistance des facteurs de risque de cancer ou d’hyperplasie atypique de l’endomètre,

• pour permettre à la patiente de mener une grossesse à terme

• sans mettre en jeu son pronostic vital.

Matériels et Méthodes :

Classiquement, le traitement du cancer de l’endomètre stade I repose sur l’hystérectomie totale extrafasciale avec annexectomie bilatérale, une exploration de la cavité abdomino-pelvienne comprenant  une cytologie péritonéale première, des biopsies de toutes les zones suspectes, en particulier sur le péritoine ou le grand épiploon.

Une stadification précise devrait théoriquement requérir systématiquement le contrôle des ganglions pelviens et para‑aortiques. Cependant, l’intérêt de la lymphadénectomie, notamment para‑aortique, n'a pas été clairement établi dans ce contexte. L’envahissement ganglionnaire pelvien dans les stades I est de l’ordre de 10% et encore moins élevé pour les stades IA. Il semble donc acceptable de méconnaître le statut ganglionnaire pelvien dans le cadre du traitement conservateur des formes débutantes de la maladie, sous couvert d’une IRM réalisée et interprétée par un radiologue en ayant l’expérience et ne révélant pas d’adénopathie pelvienne.

L’association d’une atteinte néoplasique ovarienne simultanée à la localisation utérine, rapportée augmentée par plusieurs auteurs chez les femmes jeunes [1], justifie que l’on se pose la question de l’opportunité de la conservation ovarienne.

L’analyse des données de la littérature sur ce point précis nous permet d’évaluer ce « risque ovarien ». Deux études estiment que le risque d’atteinte annexielle en cas de cancer apparemment localisé à l’utérus était de l’ordre de 5% [4, 5].

Il apparaît donc raisonnable, sous réserve d’un bilan préopératoire biologique et radiologique rigoureux normal, et en se limitant aux stades IA, d’accepter le principe d’un traitement conservateur faisant l’impasse sur l’évaluation carcinologique microscopique ovarienne et ganglionnaire pelvienne.

1/ Bilan préthérapeutique

La proposition d'un traitement conservateur suppose un bilan préalable rigoureux permettant d'une part d’évaluer au plus juste le staging chirurgical, d'autre part d'évaluer la fertilité conjugale et enfin de s'assurer de l'absence de contre-indication propre au traitement médical envisagé.

a. Bilan de la pathologie endométriale

Ce bilan comporte deux volets :

· l’étape diagnostique, au cours de laquelle le type d’examen demandé initialement dépend des circonstances de découverte de la pathologie (ménométrorragies, infertilité…)

· le bilan d’extension qui, dans le cas précis de notre étude, va s’efforcer de s’assurer de la classification certaine au stade IA.

1. L'échographie pelvienne, par voie endovaginale, est l’examen de première intention nécessaire à l’appréciation de la cavité, l'épaisseur et l'aspect de l'endomètre. Pour certains, elle élimine avec une bonne fiabilité un envahissement myométrial, sa sensibilité moyenne étant alors de 88% [6]. Surtout, il a été montré que la sensibilité et la spécificité de l’échographie dans l’évaluation de l’invasion myométriale des tumeurs de grade 1 étaient respectivement de 100% et 93,7% contre seulement 69,2% et 88,9% pour les tumeurs de plus haut grade [7].

2. L'IRM abdomino-pelvienne avec injection de gadolinium doit, dans un tel contexte, être systématique. Elle permet d’apprécier l’extension en profondeur dans le myomètre, l’extension au col utérin, la présence éventuelle d’adénomégalies pelviennes ou lombo-aortiques, l’aspect des ovaires (au mieux apprécié par coelioscopie), qui sont autant d’éléments fondamentaux dans la prise en charge thérapeutique.

Alors que la supériorité de l’IRM sur l’échographie endovaginale et le scanner abdominopelvien semble démontrée dans l’évaluation préopératoire des cancers de l’endomètre [8], la méta-analyse de Kinkel précise que cette supériorité ne devient statistiquement significative pour l’appréciation de l’extension myométriale et cervicale que lorsque l’IRM est couplée à une injection de gadolinium [9]: il est donc licite d’inclure cet examen dans le bilan préthérapeutique.

3. Le scanner abdominopelvien s'assure essentiellement de l'absence d'adénomégalie suspecte. On sait que même dans les stades débutants du cancer de l'endomètre, le risque d'essaimage lymphatique n’est jamais nul. Bien que la taille des ganglions soit liée à l’envahissement histologique, plus de la moitié des ganglions envahis mesurent moins de 1 cm et 29% des ganglions indemnes sont de dimension supérieure à 1cm : l’imagerie n’a donc de valeur que positive en ce qui concerne la recherche d’une atteinte ganglionnaire [10].

Idéalement, le bilan préthérapeutique doit comporter au minimum une échographie pelvienne endovaginale et une IRM pelvienne, et éventuellement un scanner abdomino-pelvien : l’association de ces trois examens permet d’optimiser la détection d’une extension du carcinome endométrial au-delà du stade IA.

4. Le frottis cervical doit théoriquement s’assurer de l’absence de cellules suspectes au niveau de l’exocol et de l’endocol.

5. L’identification  initiale, lorsque le traitement conservateur est envisagé,  relève de l’anesthésie générale pour un double bilan endoscopique:

b. Cœlioscopie première dont l'objectif est quadruple:

- pratiquer une cytologie péritonéale.

- faire le bilan de la cavité pelvienne et de l'ensemble du tractus génital, éliminant notamment une localisation ovarienne secondaire au processus endométrial.

- assurer une occlusion temporaire (durant le temps de l’intervention hystéroscopique) des deux conduits tubaires à leur émergence utérine afin d'éviter le passage transtubaire de cellules malignes endométriales lors de l’hystéroscopie.

- rechercher une anomalie pouvant altérer la fonction reproductrice. Schématiquement, elle se limite à chercher et éventuellement à assurer dans le même temps opératoire le traitement endoscopique du syndrome des ovaires polykystiques (drilling ovarien bilatéral), fréquemment associé aux pathologies endométriales malignes de la jeune femme.

c. L’hystéroscopie

L’hystéroscopie est secondairement entreprise, en phase liquide comme c'est la règle, sous anesthésie générale, l’occlusion tubaire temporaire per coelioscopique prévenant son risque d’essaimage péritonéal. Elle permet également de guider les prélèvements anatomopathologiques et donc d’améliorer la sensibilité du diagnostic histologique. La biopsie exérèse de la lésion relève de procédures possiblement différentes :

- le curetage biopsique simple orienté sur la lésion puis concernant l'ensemble de la cavité est la mesure habituelle à laquelle ont recouru la plupart des auteurs. Il est montré en effet que le curetage biopsique après dilatation cervicale sous anesthésie générale permet une meilleure concordance des données histologiques que la simple biopsie d’endomètre pratiquée en consultation, particulièrement dans l’identification du grade histopronostique [11].

- la résection hystéroscopique à l'anse limitée à la lésion est une alternative théoriquement intéressante. Toutefois, il convient de pondérer l’avantage d’une éxérèse compléte de l’assise tumorale par un risque synéchique nuisible au projet de grossesse et par un hypothétique risque de dissémination hématogène per-opératoire.

La pièce, produit de curetage ou de résection, est confiée à l'examen anatomo‑pathologique à des fins diverses:

- caractérisation du type histologique

- appréciation du degré de différenciation tumorale.

- établissement du grade histo‑pronostique.

- évaluation des récepteurs hormonaux.

6.     Le dosage du CA 125 plasmatique a fait l'objet de plusieurs publications qui semblent démontrer son intérêt dans l'évaluation de l'extension extra-utérine des lésions carcinologiques endométriales [12-14].

c.Bilan d'infertilité:   

Le traitement conservateur s’adresse aux patientes ayant un âge « raisonnable » (40-45 ans, en fonction de la réserve ovarienne, constitue à notre avis un seuil pertinent), laissant penser à un espoir réel de grossesse, en tenant compte éventuellement des possibilités d’assistance médicale à la procréation (AMP).

Le bilan doit comporter :

- une évaluation de la réserve ovarienne à J3 du cycle associant un dosage des taux plasmatiques de FSH, d'oestradiol, d'inhibine B et AMH (hormone anti-mullerienne).

- un dosage de la prolactinémie

- un bilan de fertilité conjugale complet excluant un facteur majeur d'infertilité associé (avec spermogramme, spermocytogramme et spermoculture)

Le bilan tubaire est discutable, essentiellement pour deux raisons :

- tout d’abord, l’hystérosalpingographie expose au risque théorique de dissémination intrapéritonéale de cellules néoplasiques ;

- par ailleurs, la découverte d’une pathologie tubaire compromettant les chances de grossesse ne constituerait pas un facteur d’exclusion car il serait  toujours possible de recourir aux techniques d’AMP.

En pratique, l’hystérosalpingographie a souvent été demandée auparavant au titre d’un bilan d’infertilité et peut être à l’origine de la découverte de la pathologie endométriale.

d. Bilan lié au traitement médical

On s’assurera en premier lieu de l’absence de  contre-indication au traitement médical supposé (notamment progestatifs, analogues de la LH-RH…). Il est également nécessaire de prendre en charge les facteurs morbides associés (obésité, diabète). 

e. Information de la patiente

Il est indispensable d’obtenir de la part de la patiente une compliance certaine à une surveillance prolongée et soutenue. La fréquence des contrôles hystéroscopiques et histologiques (tous les 3 à 6 mois) est souvent vécue comme une lourde contrainte par les patientes et peut être à l’origine d’un défaut de suivi qui peut être préjudiciable. De même, le souhait de grossesse est parfois tel que le désir de conservation de la fonction reproductrice est au premier plan, au détriment du risque encouru. Il est donc important d’établir un « contrat » strict avec la patiente et idéalement avec son conjoint avant d’instaurer un traitement conservateur, par le biais d’un consentement éclairé.

Au terme de cette étape, le protocole de prise en charge médicale conservatrice d'un cancer de l'endomètre peut être proposé à une patiente désireuse de grossesse à condition que tous les critères figurant ci‑après soient respectés :

- hyperplasie avec atypie endométriale ou carcinome débutant de stade IA et de grade histopronostique 1.

- bilan d'extension tumorale locorégional et général négatif.

- bilan de fertilité conjugale autorisant a priori les chances d'une fécondation spontanée. En pratique, le recours à une assistance médicale à la procréation est souvent envisagé dès l’instauration du traitement et ne constitue pas un obstacle à une prise en charge conservatrice.

- souhait de grossesse clairement affirmé par le couple ayant bénéficié d'une information complète et ayant donné son consentement éclairé qui comprend l'acceptation d'un risque cancérologique aussi faible soit‑il.

- certitude d’une compliance rigoureuse à un suivi sérieux

2/ les différents types de traitement médicaux proposés

Bien que certains auteurs se soient contentés d’un traitement par curetages endoutérins itératifs exclusivement [15, 16], la plupart des traitements conservateurs sont basés sur une hormonothérapie antigonadotrope complémentaire.

a. Les progestatifs:

Kelley a été le premier, en 1961, à montrer une réponse favorable aux progestatifs dans les cancers avancés de l’endomètre [17].

Depuis, les progestatifs ont longtemps été utilisés dans le traitement palliatif des adénocarcinomes de l’endomètre récidivants ou métastatiques avec des taux de réponse de l’ordre de 20 à 40%. Ce taux relativement limité de réponse est probablement lié au fait que ces tumeurs avancées se caractérisent par l’absence de récepteurs hormonaux fonctionnels [18].

Depuis les cas princeps rapportés par Kempson et O’Neill à la fin des années soixante [19, 20], plusieurs cas sporadiques ont fait l’objet de case-reports avant que ne soient publiées de réelles séries sur l’utilisation des progestatifs à fortes doses chez des femmes jeunes ayant un adénocarcinome ou une hyperplasie atypique de l’endomètre, dans le but de conserver la fonction utéro-annexielle. Depuis, d’autres équipes ont rendu compte de traitements conservateurs utilisant les progestatifs : les taux de réponse varient  de 83 à 94% pour l’hyperplasie atypique et de 57 à 75% pour l’adénocarcinome bien différencié; les taux de récidive sont respectivement de 13% et 11 à 50% [21, 22].

Bien que le traitement progestatif soit le traitement médical le plus fréquemment employé dans l’objectif d’une conservation utérine pour cancer ou hyperplasie atypique de l’endomètre et donc le mieux évalué actuellement, il apparaît qu'il n'y a pas de consensus établi concernant :

- le choix d'un progestatif de référence.

- les posologies.

- le mode d'administration continu ou discontinu.

- la durée moyenne du traitement qui, voisine de 6 mois, connaît des extrêmes allant de 3 à 18 mois.

Certaines équipes proposent d’utiliser des dispositifs intra-utérins au lévonorgestrel permettant une délivrance locale de progestatifs qui pourrait théoriquement améliorer leur efficacité sans majorer les effets systémiques  [23, 24]ou un grade plus élevé et les patientes n'ne biopsie d'.Toutefois, au moins un cas rapporté récent fait état de la progression d’une hyperplasie atypique traitée par dispositif intra-utérin au lévonorgestrel vers un authentique adénocarcinome chez une jeune femme désireuse de grossesse [25]. Mais dans le cas de cette patiente, le dispositif intra utérin était utilisé seul, sans traitement antigonadotrope systémique associé.

b. Les analogues de la GnRH:

Le traitement des hyperplasies endométriales et leur régression sous analogues ont été mis en évidence par Grimbizis [26] et Agorastos [27].

Sur le plan physiopathologique, leur prescription dans le traitement médical conservateur des hyperplasies atypiques et des carcinomes endométriaux est parfaitement légitime en raison de leur effet inhibiteur sur les oestrogènes endogènes et leur effet anti-prolifératif direct sur les cellules endométriales [28].

Jadoul a obtenu des résultats encourageants chez 5 patientes ayant un adénocarcinome endométrial grade 1 et 2 patientes ayant une hyperplasie atypique de l’endomètre [21].

Il faut toutefois noter que pour l’instant, les analogues n’ont été que rarement prescrits en première intention dans cette indication et que parmi les 56 cas d’hyperplasies (dont seulement 3 complexes avec atypies) publiés par Grimbizis, aucune des 3 hyperplasies complexes associées à des atypies cellulaires n’a régressé sous analogues de la GnRH [26].

Les analogues de la GnRH ont parfois été proposés en association avec les progestatifs : l’étude prospective sur 5 ans de Perez-Medina, et portant sur 19 cas d’hyperplasies atypiques témoigne d'un taux de réponse de 84% [28].

Les analogues de la GnRH constituent donc une alternative intéressante, seuls ou associés aux progestatifs, mais leur efficacité dans cette indication est encore incomplètement évaluée.

c. Les anti-oestrogènes

L’utilisation d'un anti-œstrogène, tel que le tamoxifène, pourrait sembler logique dans le contexte d'une affection dont l'oestrogéno-dépendance à été soulignée.

Théoriquement, le tamoxifène inhibe la liaison entre l’estradiol et son récepteur et permet une augmentation du taux de récepteurs à la progestérone dans les adénocarcinomes de l’endomètre lorsque ce  taux est faible, ce qui permettrait, au moins initialement, une meilleure réponse au traitement progestatif [29].

On retrouve dans la littérature plusieurs protocoles l’associant aux progestatifs. Ainsi les travaux de Kung [6], Lai [30] et Wang [31] rapportent son administration sans que l'on puisse conclure, sur de si courtes séries, à son efficacité.

L’étude de Pandya, qui compare les effets du megestrol associé au tamoxifène versus megestrol seul chez 41 patientes ayant un cancer de l’endomètre avancé, conclut que l’ajout du tamoxifène n’apporte pas de bénéfice clinique dans cette indication et peut même être délétère avec un cas d’embolie pulmonaire [32].

 De plus, le rôle inducteur du tamoxifène sur la croissance endométriale et son action myométriale reconnus dans d’autres contextes (traitement adjuvant dans le cancer du sein) ne rendent pas très logique son utilisation dans le cadre d'une pathologie à point de départ endocavitaire. 

d. Autres traitements proposés 

D’autres types de traitements ont été essayés chez des femmes jeunes atteintes de cancer ou hyperplasie atypique de l’endomètre de façon sporadique : il y a par conséquent trop peu de données à leur sujet pour que l’on puisse juger du  réel bien-fondé de leur prescription dans cette indication. Nous nous contentons donc de les citer dans le souci d’être exhaustifs :

- Citrate de clomiphène (Clomid®), AMP directement [16, 33, 34]

- contraception orale [33]

- bromocriptine [33]

- antagonistes GnRH (Danazol®) [35, 36]

- Tibolone® [21]

Finalement, deux grandes classes thérapeutiques ont, à ce jour, fait leur preuve dans le traitement médical des cancers et hyperplasies atypiques de l’endomètre : les progestatifs et dans une moindre mesure les analogues de la GnRH.

Résultats : Le registre national

Afin de mieux préciser les modalités du traitement conservateur chez les femmes jeunes, nous avons poursuivi et étendu l’enquête nationale initiée il y plusieurs années visant à identifier les patientes auxquelles a été proposé un traitement conservateur d’une hyperplasie atypique ou d’un cancer de l’endomètre en vue de préserver leur fertilité.

Ont été incluses toutes les patientes ayant été traitées selon un protocole conservateur, quels que soient notamment les antécédents, l’âge, le type de cancer de l’endomètre (stade, grade…), le type de traitement proposé dans le but de préserver la fertilité.

Ceci ne signifie pas que nous approuvions systématiquement les différentes attitudes de prise en charge de ces patientes.

31 patientes traitées dans 16 centres français entre 1997 et 2008, âgées de 27 à 42 ans au moment du diagnostic (35 ans en moyenne), ont pu être recensées. 31 cas ont été colligés (14 adénocarcinomes et 17 hyperplasies atypiques). L’âge moyen des patientes au moment du diagnostic était de 35 ans (28 – 42). L’anomalie endométriale était diagnostiquée dans 27 cas à l’occasion d’un bilan d’infertilité.

La rémission lésionnelle a été obtenue dans 25 cas (77,4%). 13 hystérectomies ont finalement été réalisées. Dans 3 cas, la stadification après traitement chirurgical radical a mis en évidence un cancer au stade III.

13 grossesses ont été obtenues, après assistance médicale à la procréation (AMP) dans 5 cas. Parmi ces 13 grossesses, 11 ont été menées à terme et 2 se sont compliquées (1 FCS et 1 GEU). 

Cette étude constitue l’une des plus larges séries évaluant le traitement conservateur du cancer et de l’hyperplasie atypique de l’endomètre dans le but de préserver la fonction reproductrice des patientes désirant une grossesse. La prise en charge des patientes apparaît globalement satisfaisante car la rémission lésionnelle a été obtenue dans  plus de 80% des cas. Si la récidive est survenue dans un cas sur cinq, aucun décès n’est survenu avec un recul moyen de 35 mois. Surtout, la probabilité de grossesse approche les 50% à deux ans.

Cette étude constitue une nouvelle étape dans la création du registre national dont l’objectif est, à l’issue de la synthèse de ces données, de proposer une ligne de conduite consensuelle tant sur le plan carcinologique que sur celui de la fertilité. Le faible nombre de cas concernés par cette prise en charge rend difficile une évaluation pertinente à l’échelle individuelle : l’intérêt d’une analyse des données à l’échelle nationale constitue un bénéfice incontestable.

L’incidence est suffisamment faible et l’enjeu suffisamment important pour qu’il nous paraisse primordial dorénavant, avant de proposer un traitement conservateur, de demander une relecture systématique des lames histologiques. Dans le même but, il convient d’effectuer un prélèvement histologique de qualité, assuré par des biopsies dirigées, sous contrôle hystéroscopique.

Nous retiendrons également de cette étude et des données de la littérature la fréquence non négligeable des lésions ovariennes malignes (primitives ou secondaires) associées à un adénocarcinome de l’endomètre chez les femmes jeunes (9,7%). Ceci justifie la mise en œuvre de tous les moyens susceptibles d’éliminer avec un maximum de fiabilité une extension extra-cavitaire de la tumeur endométriale d’une part, et déterminer les critères pronostiques de la tumeur et la prédictivité de la réponse au traitement d’autre part.

Nos résultats en terme de fertilité sont similaires comparés à ceux publiés par d’autres équipes. Toutefois, ils demeurent faibles et le recours à l’AMP nous apparaît indispensable. La seule perspective qui semble avoir fait ses preuves dans la littérature, en particulier sur les excellents résultats de Jadoul [21], est le passage rapide dans un programme de fécondation in vitro, dès l’obtention d’une rémission lésionnelle.

La question de l’hystérectomie systématique en post-partum n’est pas tranchée. Certains auteurs la préconisent. Cette attitude semble raisonnable une fois le projet de maternité accompli du fait de la persistance du risque carcinologique, si faible soit-il.

En ce qui concerne les traitements médicaux, les progestatifs sont les plus employés. Il n’y a pas de consensus actuellement sur le type de progestatif, la posologie et la durée de traitement : après analyse de la littérature, nous n’avons pas identifié de protocole ayant fait la preuve de sa supériorité. Les analogues de la GnRH ont encore besoin d’être évalués mais les résultats de notre étude n’incitent pas à les employer en cas de traitement conservateur. A l’inverse, la résection hystéroscopique sans traitement médical associé  semble constituer une alternative intéressante en cas de traitement conservateur. Toutefois, ils méritent d’être réévalués plus à distance

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QCM POST TEST:

Dans le cadre d’un cancer de l’endomètre stade IA chez la femme jeune, quelles sont les propositions qui paraissent vraies ?

1-Un traitement radical est l’attitude thérapeutique de choix

2-Une prise en charge chirurgicale conservatrice n’a pas sa place au-delà de 50 ans

3-Une cœlioscopie doit être systématique en cas de thérapeutique conservatrice

4-L’évaluation de la réserve ovarienne est un critère fondamental

 Réponses : 1, 2, 3, 4

 

Quels examens complémentaires vous paraissent indiscutables pour traiter par hystéroscopie opératoire un cancer de l’endomètre stade IA ?

1-une hystérosalpingographie

2-un spermogramme et spermoculture du partenaire

3-un dosage de l’AMH

4-un dosage de l’ACE

Réponse : 3, 4

 

Parmi ces propositions, quelles sont celles qui sont correctes concernant la prise en charge conservatrice d’un cancer de l’endomètre stade IA ?

1- Parmi les examens complémentaires, la demande d’un scanner abdominopelvien est superflu, car l’IRM suffit

2- La cœlioscopie est uniquement réalisée pour la vérification d’autres facteurs d’infertilité

3- Lors de la réalisation du traitement conservateur par hystéroscopie opératoire, l’obturation tubaire proximale est essentielle

4- La découverte d’un hydrosalpinx pendant cette cœlioscopie de bilan est un critère d’exclusion du traitement conservateur du cancer de l’endomètre stade IA

Réponses : 3

 

Mots clés : Cancer de l’endomètre stade IA, hystéroscopie opératoire, Infertilité, AMH

 

M. Koskas, JL. Benifla, P. Madelenat

Service de Gynécologie-Obstétrique Hopital Bichat

148 Rue Henri Huchard, 75018 Pari