Les XXIXe JTA
> Présentation
> Programme
> Comité scientifique
> Intervenants
> Contacter les JTA

En pratique
> S'inscrire
> Renseignements
> Vol et Hébergement
> Programme social
> Conference AMP Jean Cohen

Les archives
> Andrologie
> Biologie
> Gynécologie
> Infertilité
> Médecine foetale
> Néonatologie
> Nutrition
> Obstétrique
> Pédiatrie
> Périnatalité
> Périnéologie
> Phlébologie
> Psychosomatique

> Authors' race

Rechercher

2009 > Néonatologie > Pématurité  Telecharger le PDF

L’étude Epipage – Devenir à 5 ans des anciens grands prématurés

A. Lapillonne

 Avant l'accés à cet article, nous vous proposons un QCM de pré évaluation, le QCM de post évaluation se trouve en fin d'article

QCM  de pré-évaluation

L’étude EPIPAGE est :

1) une étude épidémiologique française

2) une étude portant sur le suivi des grands prématurés

3) a donné des résultats relayés abondamment par la presse

4) est difficile à interpréter compte tenu de ses biais méthodologiques

Les résultats de l’étude EPIPAGE :

1) soulève des problèmes éthiques

2) sont comparables à ceux de l’étude EPICURE

3) ne rapporte des résultats que sur une centaine d’enfants

4) montrent que 40% de ces anciens grands prématurés présentent une déficience motrice, sensorielle ou cognitive.

QCM  d’EPP

D’après l’étude EPIPAGE :

1) 42% des enfants nés entre 24 et 28 semaines de grossesse nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique à 5 ans

2) 31% des enfants nés entre 29 et 32 semaines nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique à 5 ans,

16% des enfants nés à terme nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique 3) à 5 ans

4) L’étude EPIPAGE met en rapport de manière détaillée le taux de déficience à l’âge de 5 ans avec la durée de la grossesse

L’étude EPIPAGE

1) permet de définir avec précision un age gestationnel limite pour la prise en charge

2) montre que 85 à 90 % des enfants grands prématurés n’ont pas des séquelles graves

3) montre des résultats similaires à d’autres études européennes

4) n’est plus intéressante car trop ancienne

 

Introduction

L’étude EPIPAGE (Enquête épidémiologique sur les petits âges gestationnels) est une grande étude épidémiologique réalisée en France et visant à étudier le devenir des enfants nés très prématurés. Cette étude a donné lieu à de nombreuses publications rapportant entre autre la mortalité, le devenir pendant l’hospitalisation et le devenir à deux ans (1-4). Les résultats du devenir à 5 ans des anciens grands prématurés publié dans le Lancet en 2008 (5) ont donné lieu à de nombreuses réactions dans la presse généraliste.

Les gros titres des journaux au lendemain de cette annonce étaient parfois dénués de subtilités et de nuance et ont générés dans le grand public de vives inquiétudes. On a ainsi pu lire : "Grands prématurés: Une survie au prix de séquelles" (Libération), "Grands prématurés: Un avenir incertain" (Le point), ou encore "Déficience à l'horizon" (Site canadien de news en ligne). Une vision très négative s’est en fait dégagée de ces articles. Un commentaire de la Société Française de Néonatologie a été proposé au journal le Monde mais n’a pas été publié.

En réaction et pour plus de clarté, l’INSERM a publié un communiqué officiel (6) rapporté ci-dessous. Ce travail a également été discuté par le Pr. U. Simeoni lors de sa participation à la mission d’évaluation à l’Assemblée Nationale de la loi N° 2005-370, appelée couramment loi Leonetti (7). Afin de ne pas dénaturer les propos, le communiqué et un extrait de la communication du Pr Siméoni paru en date du 28 novembre 2008 sont rapportés ci-dessous.

Communiqué de l’INSERM

Dans les pays européens, de 1,1% à 1,6% des enfants nés vivants sont des grands prématurés, c'est-à-dire nés avant la fin du 7ème mois de grossesse ou avant 33 semaines de grossesse révolues. Divers facteurs expliquent une légère augmentation de leur nombre au fil des ans : plus de grossesses multiples et de traitements de l'infertilité, des maternités plus tardives, mais aussi des progrès réalisés dans la prise en charge médicale de ces enfants. En France, près de 10 000 enfants naissent grands prématurés chaque année. Peu de recherches ont été réalisées sur leur devenir en France et peu d'études de grande ampleur existent au niveau international ; c'est pourquoi l'Unité Inserm 149 a lancé en 1997 une grande étude intitulée EPIPAGE coordonnée par Béatrice Larroque.

L'ensemble des enfants grands prématurés nés en 1997 entre 22 et 32 semaines complètes de grossesse dans 9 régions françaises a ainsi été inclus dans l'étude. Au total, 2382 enfants ont été suivis depuis leur sortie de l'hôpital. En parallèle, un groupe de référence de 666 enfants nés à terme a été constitué afin de permettre des comparaisons à différents âges du suivi. Entre la sortie de l'hôpital et l'âge de 5 ans, des contacts ont été établis avec les familles afin de recueillir des informations sur la santé et le développement de l'enfant : 2 mois après la sortie de l'hôpital, aux âges de 9 mois, 1 an, 2, 3 et 4 ans.

A 5 ans, un bilan de santé conçu pour l'étude a pu être réalisé pour 1817 anciens grands prématurés du groupe initial et 396 enfants nés à terme du groupe de référence. Après un examen clinique de l'enfant incluant un examen neurologique standardisé, un test de la vision et un entretien avec les parents, deux questionnaires ont été remplis : l'un par le médecin, l'autre par la famille concernant la santé de l'enfant et son environnement familial. Une évaluation des capacités cognitives de l'enfant a été menée par un psychologue.

 

Pour les 1817 enfants nés grands prématurés étudiés, les résultats obtenus à l'âge de 5 ans sont les suivants : Bien que le taux de mortalité des grands prématurés ait fortement diminué avec les progrès réalisés dans leur prise en charge médicale pré- et post-natale, un tiers des anciens grands prématurés requièrent toujours une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique à 5 ans. 42% des enfants nés entre 24 et 28 semaines de grossesse et 31% de ceux nés entre 29 et 32 semaines nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique à 5 ans, contre 16% de ceux nés à terme.

 

Au total, presque 40% de ces anciens grands prématurés présentent une déficience motrice, sensorielle ou cognitive. Les taux de déficience sévère, modérée et légère s'élevant respectivement à 5%, 9% et 25%. 9% de ces anciens grands prématurés présentent une paralysie cérébrale (Infirmité motrice cérébrale se traduisant par des troubles moteurs). Un tiers de ces enfants ne marchent pas ou marchent seulement avec une aide.

32% ont obtenu un score de capacités cognitives (équivalent au Q.I) inférieur à 85 et 12% un score inférieur à 70, contre 12% et 3% respectivement dans le groupe de référence ; environ 5% des grands prématurés contre seulement 2% du groupe de référence n'ont pas achevé le test. Les difficultés cognitives des grands prématurés, qui risquent de les exposer à des troubles des apprentissages lors de leur scolarisation, ont pu de ce fait être sous-estimées. 1% seulement présentent des déficiences visuelles sévères (vision inférieure à 3/10 aux deux yeux).

Les taux de déficience sont d'autant plus élevés que les enfants sont nés plus prématurément, tant pour les déficiences motrices que pour les déficiences visuelles ou cognitives. Ainsi, 18% des enfants nés à 24-26 semaines de grossesse présentent une paralysie cérébrale à 5 ans, contre 12% de ceux nés à 29 semaines et 4% de ceux nés à 32 semaines.

 

Bien que le taux de mortalité des grands prématurés ait fortement diminué avec les progrès réalisés dans leur prise en charge médicale pré- et post-natale, l'enquête montre donc que près d'un tiers de ces anciens grands prématurés requièrent encore à 5 ans une prise en charge spécialisée. Si les études précédentes avaient fourni des données globales sur la santé des enfants nés très prématurément ou avec un très faible poids de naissance, l'enquête EPIPAGE met pour la première fois en rapport de manière détaillée le taux de déficience avec la durée de la grossesse. Les chercheurs montrent en effet que chaque semaine de grossesse en plus permet de réduire le risque de déficience.

Toutefois, bien que le risque de déficience à 5 ans soit moins élevé chez les enfants nés entre 29 et 32 semaines de grossesse, la majorité des grands prématurés naît dans cette période de grossesse. De fait, 60% des grands prématurés de l'étude EPIPAGE présentant à 5 ans des déficiences sévères à modérées étaient nés entre 29 et 32 semaines de grossesse. Les chercheurs estiment que "prévenir les troubles d'apprentissage associés aux déficits cognitifs dans ce groupe représente un réel défi pour la médecine périnatale actuelle".

Commentaire du professeur Simeoni

Les commentaires du professeur Simeoni lors de sa participation à la mission d’évaluation de la loi N° 2005-370, sont les suivants : « Cette étude très solide, menée à large échelle, visait à décrire le devenir à moyen terme, c'est-à-dire quelques années de vie, des enfants nés à trente-deux semaines de gestation ou moins. Elle a montré que, si la survie est possible, elle s’accompagne dans un certain nombre de cas de séquelles à long terme dues à la prématurité. Il s’en est suivi un débat dans la profession. Quel sens donner à ces chiffres ?

Il faut certes en tirer des conséquences en termes de prudence, mais l’étude n’indique pas à partir de quand les soins ont un sens et à partir de quand cela devient de l’obstination déraisonnable. Elle a, comme toute étude statistique, son intérêt et ses limites. Elle montre que 10 à 15 % de ces enfants ont des séquelles graves – ce qui signifie que 85 à 90 % n’en ont pas – et que 40 % présentent des troubles à long terme. Les résultats obtenus dans d’autres pays sont comparables.

Au total, je crois que le mérite de ce travail est de montrer qu’il ne suffit pas de donner des soins périnataux performants à ces enfants, ce qui est le cas dans notre pays, mais qu’il faut une prise en charge et un suivi adapté pour détecter d’éventuels troubles bien après leur hospitalisation.

Chacun convient que la réanimation néonatale doit s’appliquer avec des limites et avec un grand discernement afin d’éviter tout excès thérapeutique. Il faut néanmoins souligner que, malheureusement ou heureusement, les données de la médecine ne permettent pas de définir un seuil scientifiquement établi. On ne peut déterminer, par exemple, qu’en dessous de mille grammes ou de vingt-six semaines de gestation, l’état d’un enfant sera bien pire.

On a affaire à un continuum : plus la prématurité est importante, plus elle constitue un risque, mais il n’existe pas vraiment de rupture de pente. Nous savons maintenant que le pronostic, pour un enfant prématuré, est multifactoriel et ne saurait se résumer au poids à la naissance ou à la durée de gestation.

S’agissant des performances scolaires de ces enfants, d’autres études épidémiologiques tout aussi solides ont établi que le pronostic dépend davantage du milieu dans lequel grandit l’enfant. Le contexte éducatif et affectif compte au moins autant que l’âge gestationnel.

Le sujet suscite une certaine incompréhension. La première réaction du grand public ou des professionnels de santé – lesquels ne sont pas toujours les premiers informés sur ce problème – est qu’il faut poser une limite claire. Or, définir une limite a priori et de portée collective est très difficile. Comme toujours en médecine, c’est dans la relation singulière entre le médecin et le patient, guidée par les statistiques, que l’on peut tenter de l’établir tout en intégrant les derniers acquis de la science. Il faut ajouter que ces enfants n’ont souvent pas besoin de réanimation au sens propre à la naissance. Ils présentent des complications graduelles qui nécessitent des réponses graduelles, chaque cas étant différent. »

Bibliographie

Larroque B, Bréart G, Kaminski M, Dehan M, André M, Burguet A, Grandjean H, Ledésert B, Lévêque C, Maillard F, Matis J, Rozé JC, Truffert P; Epipage study group.  Survival of very preterm infants: Epipage, a population based cohort study. Arch Dis Child Fetal Neonatal Ed. 2004;89:F139-44.

Ancel PY, Livinec F, Larroque B, Marret S, Arnaud C, Pierrat V, Dehan M, N'Guyen S, Escande B, Burguet A, Thiriez G, Picaud JC, André M, Bréart G, Kaminski M; EPIPAGE Study Group. Cerebral palsy among very preterm children in relation to gestational age and neonatal ultrasound abnormalities: the EPIPAGE cohort study. Pediatrics. 2006;117:828-35.

Delobel-Ayoub M, Kaminski M, Marret S, Burguet A, Marchand L, N'Guyen S, Matis J, Thiriez G, Fresson J, Arnaud C, Poher M, Larroque B; EPIPAGE Study Group.,  Behavioral outcome at 3 years of age in very preterm infants: the EPIPAGE study. Pediatrics. 2006;117:1996-2005.

Bodeau-Livinec F, Marlow N, Ancel PY, Kurinczuk JJ, Costeloe K, Kaminski M. Impact of intensive care practices on short-term and long-term outcomes for extremely preterm infants: comparison between the British Isles and France. Pediatrics. 2008;122:e1014-21.

Larroque B, Ancel PY, Marret S, Marchand L, André M, Arnaud C, Pierrat V, Rozé JC, Messer J, Thiriez G, Burguet A, Picaud JC, Bréart G, Kaminski M; EPIPAGE Study group. Neurodevelopmental disabilities and special care of 5-year-old children born before 33 weeks of gestation (the EPIPAGE study): a longitudinal cohort study. Lancet. 2008;371:813-20.

http://www.inserm.fr/fr/presse/communiques/epipage_070308.html

http://www.assemblee-nationale.fr/13/rap-info/i1287-t2.asp#P1268_554456

 
QCM  de post-évaluation

L’étude EPIPAGE est :

1) une étude épidémiologique française

2) une étude portant sur le suivi des grands prématurés

3) a donné des résultats relayés abondamment par la presse

4) est difficile à interpréter compte tenu de ses biais méthodologiques

Réponse : 1,2,3

 

Les résultats de l’étude EPIPAGE :

1) soulève des problèmes éthiques

2) sont comparables à ceux de l’étude EPICURE

ne rapporte des résultats que sur une centaine d’enfants

montrent que 40% de ces anciens grands prématurés présentent une déficience motrice, sensorielle ou cognitive.

Réponse : 1,2,4

 

QCM  d’EPP

D’après l’étude EPIPAGE :

1) 42% des enfants nés entre 24 et 28 semaines de grossesse nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique à 5 ans

2) 31% des enfants nés entre 29 et 32 semaines nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique à 5 ans,

16% des enfants nés à terme nécessitent une prise en charge médicale ou paramédicale spécifique 3) à 5 ans

4) L’étude EPIPAGE met en rapport de manière détaillée le taux de déficience à l’âge de 5 ans avec la durée de la grossesse

Réponse : 1,2,3,4

 

L’étude EPIPAGE

1) permet de définir avec précision un age gestationnel limite pour la prise en charge

2) montre que 85 à 90 % des enfants grands prématurés n’ont pas des séquelles graves

3) montre des résultats similaires à d’autres études européennes

4) n’est plus intéressante car trop ancienne

Réponse : 2,3
 Alexandre Lapillonne
Université Paris Descartes et APHP, Service de néonatologie et nutrition, Groupe hospitalier Cochin-Saint-Vincent de Paul, Paris