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2008 > Périnéologie > Réctocèle antérieure  Telecharger le PDF

Rectocèle antérieure de la femme: Prise en charge par voie trans-anale

P. Lehur et G Meurette

Résumé

La correction des rectocèles isolées se fait préférentiellement par voie basse, périnéale.

La voie trans-anale traditionnelle (Sullivan, Khubchandani) qui assure une plicature endoluminale de la couche musculaire rectale et une résection de la muqueuse rectale distendue par la rectocèle a été remplacée par les techniques de résection rectale trans-anale agrafée (STARR)(Longo) en cours d’évaluation.

La rectocèle est une manifestation clinique extrêmement fréquente, définie comme une hernie de la paroi antérieure du rectum à travers la cloison recto-vaginale. Elle appartient à la fois aux troubles de la statique rectale dont elle représente une forme clinique particulière, et aux troubles de la statique pelvi-périnéale. C’est en effet une des composantes habituelles des prolapsus génitaux où la rectocèle s’observe en association à des anomalies de la statique de l’étage pelvien antérieur, uro-génital.

L’expression clinique des rectocèles est double. Elles peuvent être responsables de manifestations digestives et gynécologiques, associées à des degrés divers. Cette dualité influe sur les modalités du bilan et de la prise en charge des rectocèles qui différent selon que l’accent est mis sur le versant digestif ou gynécologique des troubles. La meilleure connaissance actuelle des troubles de la statique pelvi-périnéale et leur approche multidisciplinaire ont permis une meilleure standardisation des pratiques.

Objectifs thérapeutiques

Quatre objectifs sont à atteindre lors du traitement chirurgical de la rectocèle antérieure de la femme :

(a) la correction durable du défect de la cloison recto-vaginale et de la hernie rectale est l’objectif principal. Il a pour but de restaurer une fonction ano-rectale normale. Le critère de jugement est ici fonctionnel et non anatomique, c’est la normalisation de la défécation;

(b) le traitement recherche la correction, au cours de la même intervention, des anomalies associées à la rectocèle et responsables d’une symptomatologie : incontinence urinaire éventuellement masquée par la rectocèle, prolapsus utérin associé, incontinence anale;

(c) le traitement doit éviter de démasquer d’autres troubles de la statique pelvi-périnéale, élytrocèle par exemple, susceptibles de se décompenser dans le temps et de nécessiter une nouvelle intervention;

(d) enfin, le traitement ne doit pas engendrer de séquelles qu’elles soient douloureuses liées aux incisions, anales avec l’apparition d’une incontinence post-opératoire, ou encore sexuelles avec une dyspareunie secondaire.

Répondre à ce cahier des charges est un programme ambitieux qui justifie une évaluation clinique et fonctionnelle complète et fait une large place à une pratique multidisciplinaire, pour assurer un résultat fonctionnel de qualité.

Traitement chirurgical de la rectocèle antérieure de la femme

De nombreuses techniques ont été décrites pour la correction chirurgicale des rectocèles. Longtemps prises en charge par les chirurgiens gynécologues, la première approche de cette pathologie a été vaginale ou périnéale. Avec le développement d’explorations fonctionnelles ano-rectales performantes et la reconnaissance du rôle de la rectocèle dans les troubles de l’évacuation rectale dans les années 80, une approche trans-anale des rectocèles a été développée et adoptée par les chirurgiens digestifs. A l’heure actuelle, la prise en charge multidisciplinaire des troubles de la statique pelvi-périnéale est privilégiée. Le traitement des rectocèles s’intègre dans une stratégie globale de correction des différentes anomalies identifiées ou potentielles.

Cure de rectocèle par voie trans-anale

La technique initialement décrite par Sullivan et Khubchandani avait pour but de corriger la hernie rectale antérieure par voie endoluminale, rectale. Elle est maintenant abandonnée au profit d’une intervention plus complète et rendue plus simple par l’utilisation d’agrafeuses mécaniques, la résection trans-anale agrafée du rectum (STARR pour « stapled transanal rectal resection »). L’accès dans ces 2 techniques se fait à travers le canal anal dilaté : elles font partie à ce titre des innovations techniques dites NOS « natural orifice surgery ».

Dans la cure endorectale de la rectocèle « première manière », l’intervention avait pour but de restaurer une paroi rectale antérieure solide avec la remise en tension de la musculeuse rectale déformée et l’apparition d’une fibrose cicatricielle dans la sous-muqueuse rectale « avivée ». L’intervention supprimait également l’excès de muqueuse rectale qui s’est développé dans le diverticule de pulsion que représentent la rectocèle et le prolapsus muqueux antérieur souvent associé.

L’approche chirurgicale développée par Antonio Longo repose sur un nouveau concept physio-pathologique dans lequel la rectocèle est intégrée sans en être l’élément pathologique unique. L’approche n’est plus de corriger une anomalie anatomique, mais de résoudre un problème fonctionnel : la constipation terminale ou dyschésie (regroupée sous l’entité d’« Obstructed defecation syndrome » – ODS pour les auteurs italiens et anglo-saxons). C’est une pathologie fréquente caractérisée par des difficultés d’exonération alors que le besoin d’évacuer est normalement ressenti. Les femmes multipares, ménopausées sont les plus exposées, elles rapportent dans ce contexte des efforts importants de poussée, la nécessité de manœuvres digitales d’aide à l’évacuation, une sensation d’évacuation incomplète et fragmentée. L’examen clinique met en évidence une rectocèle que confirme la défécographie. Cet examen retrouve le plus souvent une procidence interne du rectum associée à la rectocèle. La résection rectale trans-anale agrafée du bas rectum, technique STARR, vise à faire disparaître les symptômes de constipation terminale en corrigeant de façon concomitante les lésions anatomiques identifiées : la procidence interne du rectum et la rectocèle. Le principe de l’interventionen est résumé sur le shéma ci-dessous, avec l’aspect pré- et post-opératoire agrafé (idéal) du bas-rectum.

Indications chirurgicales dans la rectocèle antérieure de la femme

La présence d’une rectocèle, même volumineuse, n’est pas en soi une indication à une prise en charge. De nombreuses patientes avec des rectocèles de taille significative n’ont en effet aucun symptôme. De même, la présence d’une rectocèle chez une patiente constipée ne signifie pas automatiquement que la rectocèle est la cause essentielle de sa constipation. Seules, les rectocèles symptomatiques justifient une prise en charge, éventuellement chirurgicale. Il est important d’expliquer clairement aux patientes que seuls, les symptômes liés à la rectocèle seront supprimés par l’intervention chirurgicale. Les manifestations de côlon irritable (colite spasmodique), fréquemment associées, ou encore celles qui sont liées à une descente périnéale excessive ou un anisme, peu ou pas modifiées par la chirurgie, resteront invalidantes.

Choix de la technique chirurgicale

La sélection des patientes à opérer repose sur l’appréciation clinique de la gêne fonctionnelle, et l’évaluation clinique et radiologique de la rectocèle (volume, taille supérieure à 3 cm, persistance de l’opacification de la rectocèle après exonération). Elle n’est pas toujours aisée et la responsabilité de la rectocèle dans la symptomatologie reste parfois difficile à affirmer et à quantifier. Cependant, la bénignité des gestes thérapeutiques par voie basse permet de les proposer en cas d’incertitude et en prévenant la patiente de la possibilité d’échec fonctionnel.

En cas de rectocèle symptomatique, nous optons pour une opération de STARR lorsqu’il existe des symptômes de constipation terminale. Si la gêne est essentiellement gynécologique (inconfort, dyspareunie…), nous donnons la préférence à la voie périnéo-vaginale. Cet abord autorise outre la correction de la rectocèle, une bonne réparation du plancher pelvien, sans risque notable de dyspareunie si des précautions techniques spécifiques sont prises.

Il est enfin admis que la voie haute est à réserver aux rectocèles associées à une pathologie uro-génitale ou une grande élytrocèle justifiant un abord abdominal. L’intervention permet ainsi la correction de l’ensemble des troubles de statique pelvienne. La réalisation d’une périnéorraphie postérieure en complément du geste par voie haute est recommandée. Cette approche devenue moins invasive grâce à la cœlioscopie est à privilégier chez les femmes jeunes, l’efficacité du geste sur le long terme étant reconnue

En résumé, pour le chirurgien confronté à une rectocèle, de nouvelles options sont apparues et il est utile de les mettre en œuvre dans l’intérêt des patientes à prendre en charge. Les fondements de la décision chirurgicale restent cependant les mêmes :

à l’étape diagnostique, il est indispensable d’établir le caractère symptomatique de la rectocèle, de s’assurer par les examens appropriés (défécographie avec opacification des anses grêles, manométrie ano-rectales), que les symptômes rapportés sont bien en rapport avec la rectocèle, et d’identifier les autres anomalies, patentes ou potentielles, de statique pelvi-périnéale et/ou d’incontinence urinaire,

à l’étape thérapeutique, il est indispensable d’expliciter le traitement et les résultats attendus à la patiente, de choisir ensuite la voie d’abord et la technique la plus appropriée pour traiter la rectocèle en fonction de son expression clinique, et d’y associer en cas de besoin, la correction des autres troubles de la statique pelvi-périnéale identifiés, prévenant ainsi le risque de dégradation à long terme de la réparation effectuée et l’apparition d’un prolapsus sur un autre des étages pelvi-périnéaux.

Bibliographie

1. Jayne DG, Finan PJ. Stapled transanal rectal resection for obstructed defaecation and evidence-based practice. Br J Surg 2005; 92:793-4.

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3. National Institute for Health and Clinical Excellence. Stapled transanal rectal resection for obstructed defaecation syndrome; http://guidance.nice.org.uk/IPG169/guidance/pdf/English/download.dspx. Interventional Procedure Guidance 169 2006.

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5. Meurette G, Stuto A, Fantoli M, Villani RD, Queralto M, … Lehur PA. Outcomes of stapled trans-anal rectal resection (STARR) vs. biofeedback in the treatment of outlet obstruction associated with rectal intussusception and rectocele: A Multi-center randomized controlled trial. Soumis à Dis Colon Rectum. Sept 2007

 

Clinique de Chirurgie Digestive et Endocrinienne (Hôtel-Dieu)
Institut des Maladies de l’Appareil Digestif. CHRU de NANTES.