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2008 > Gynécologie > Echographie obstétricale  Telecharger le PDF

Suivi échographique des IVG médicamenteuses

P Lefebvre

Yves ARDAENS, Lille ; Philippe LEFEBVRE, 

L’IVG médicamenteuse peut être pratiquée jusqu’au 63e jour d’aménorrhée. Elle doit cependant suivre un protocole spécifique selon la date de la grossesse.

Aussi, pour réaliser une telle IVG, il est nécessaire d’une part d’affirmer le siège intra-utérin de la grossesse en éliminant une GEU et d’autre part de dater la grossesse.

Par ailleurs, il est indispensable, après l’IVG, de s’assurer de l’expulsion complète.

À chaque étape, en dehors de l’examen clinique, de la symptomatologie et du dosage de l’hCG, l’échographie est un examen de référence, souvent nécessaire. Cependant, les images échographiques peuvent être sources d’erreurs d’interprétation.

Avant l’IVG médicamenteuse

1. Affirmer la grossesse et éliminer une grossesse extra-utérine (GEU)

Seule la présence d’un embryon ou d’une vésicule ombilicale (VO), au sein d’une image échographique de sac ovulaire intra-utérin, permet de poser un diagnostic formel et donc d’éliminer un pseudo-sac gestationnel 

Sac ovulaire et vésicule ombilicale

Vers 5 semaines d’aménorrhée (SA) : diamètre ovulaire moyen entre 6 et 10 mm.

On repère la vésicule ombilicale sous forme de deux petits échos parallèles, séparés de 1 à 2 mm, excentrés, au contact de la paroi ovulaire. Quelques jours plus tard, la totalité du contour apparaît nettement avec un diamètre moyen qui augmente rapidement jusqu’à 3 à 5 mm 

Sac ovulaire embryonné

Vers 5 semaines et 3 jours d’aménorrhée ou 24 jours de grossesse, l’embryon est théoriquement visible, par voie endovaginale, lorsque sa longueur se situe entre 1 et 2 mm. L’activité cardiaque est habituellement repérable dès que l’embryon est visible, avec un rythme assez lent (80 bpm). Les battements du tube cardiaque se voient parfaitement en mode B et la fréquence peut s’évaluer en mode TM : il est inutile d’effectuer un écho-Doppler de l’embryon à ce stade.

• Au total

– Un sac ovulaire de plus de 10 mm doit normalement contenir une vésicule ombilicale.

– Un sac ovulaire de plus de 16 mm doit normalement contenir un embryon vivant.

– Un embryon de 4 mm ou plus doit normalement présenter une activité cardiaque.

2. Situations douteuses et images pièges

Schématiquement, quatre situations douteuses sont possibles : la cavité utérine paraît vide ; on visualise une petite image liquidienne ; l’image ressemble à un pseudo-sac gestationnel ; il s’agit d’un avortement en cours.

La cavité utérine paraît vide ou est mal visible

Un utérus mal visible ou une cavité utérine vide par échographie sus-pubienne impose de recourir à la voie vaginale. Si les conditions d’examen restent insuffisantes (obésité, grand utérus, fibromyome, cicatrices), il faut :

– refaire le dosage de l’hCG afin de surveiller l’évolution ;

– renouveler l’échographie après 48 heures ;

– dans le doute et si le taux d’hCG est supérieur à 1 500 UI, la suspicion de GEU l’emporte toujours 

par voie vaginale, on visualise un œuf intra-utérin, la masse annexielle droite correspond à un corps jaune kystique.

Petite image liquidienne infracentimétrique : œuf ou image « piège » ?

Entre 4 et 5 SA : la vésicule ombilicale n’est pas encore visible et la couronne trophoblastique n’est pas toujours très nette.

Sur le plan morphologique, il est impossible de différencier à ce stade un petit sac ovulaire d’une glande kystique endométriale ou d’autres images pièges :

• Les kystes intraglandulaires sont fréquents en cas de réaction déciduale et peuvent se voir notamment en cas de GEU. Ils forment des petites images liquidiennes pouvant atteindre 2 à 3 mm, parfois multiples avec aspect glandulo-kystique ; ils peuvent simuler un petit œuf.

• Les images intracavitaires : les rétentions liquidiennes (hématométrie, hydrométrie, pyométrie) et surtout les polypes intracavitaires glandulo-kystiques qui sont parfois très trompeurs

Images myométriales sous-muqueuses

On observe de petits fibromes sous-muqueux en nécrobiose ou des nodules d’adénomyose, trompeurs lorsqu’ils ont aspect en cocarde. La situation extramuqueuse de ces images permet de redresser le diagnostic 

Devant une petite image « kystique » centro-utérine, mesurant de 2 à 10 mm, éléments en faveur du diagnostic d’œuf intra-utérin :

– l’œuf est initialement intramuqueux et non intracavitaire ;

– la présence d’une couronne trophoblastique qui va rapidement différencier l’œuf d’une glande kystique qui ne se modifie pas au contrôle échographique ;

– la croissance : un œuf normal grossit d’environ 1 mm par jour à cette période et rapidement apparaîtront les structures embryonnaires, vésicule ombilicale puis embryon ;

– néovascularisation au site d’implantation en Doppler couleur.

Image ovulaire de grande taille et vide : pseudo-sac ou œuf non évolutif ?

Ce piège correspond soit à une hypertrophie endométriale entourant une hydro-hématométrie, soit à une caduque détachée avec épanchement central 

Le diagnostic différentiel repose alors sur les arguments suivants :

– la localisation du sac : l’œuf est habituellement excentré, alors que le pseudo-sac est central. La coupe frontale de l’utérus, éventuellement en mode 3 D, peut être utile pour apprécier ce signe ;

– la structure : la grossesse intra-utérine forme une double « couronne » échogène correspondant à la caduque et au trophoblaste, alors que le pseudo-sac n’est formé que d’une seule couronne endométriale ;

– le Doppler : formé d’endomètre, le pseudo-sac n’est entouré d’aucun flux de type artériel ou veineux. La mise en évidence d’un flux artériel ou veineux avec vitesse circulatoire > 20 cm/s affirmerait la nature ovulaire de l’image et éliminerait un pseudo-sac (sensibilité 84 %, spécificité 100 %). 

Dater la grossesse

L’échographie doit être corrélée au dosage d’hCG plasmatique.

On retiendra les normes d’interprétations suivantes :

– hCG < 10 mUI/ml : pas de grossesse ;

– hCG entre 10 et 500 mUI/ml : repérage échographique ± ;

– hCG entre 500 et 1 000 mUI/ml : l’œuf mesure 1 à 3 mm ;

– hCG entre 1 000 et 7 000 mUI/ml : la valeur de 1 500 mUI/ml est aujourd’hui retenue comme seuil de visualisation d’un œuf intra-utérin par voie vaginale, ce seuil de « visibilité » étant porté à 2 500 par voie abdominale ;

– hCG > 7 000 mUI/ml : un œuf intra-utérin est toujours visible et il contient une vésicule ombilicale caractéristique ;

– hCG > 10 000 mUI/ml : l’embryon et l’activité cardiaque sont habituellement retrouvés.

 

Corrélation entre date de grossesse, taux d’hCG plasmatique et échographie

Date de la grossesse

Taux d’hCG

(mUI/ml)

Échographie vaginale

4-5 SA

< 10

10-500

Pas de grossesse

œuf non visible

5-6 SA

500-1 000

Diamètre ovulaire : 5-10 mm

Embryon : 1-3 mm

(visible dans un tiers des cas)

Activité cardiaque repérable

1 000-1 500

Embryon : 3-6 mm

Battements cardiaques

> 2 500

Visible par écho sus-pubienne

7 SA

> 7 000

Embryon > 6-7 mm

hCG > 1 000-1 500 mUI/ml + œuf non visible : suspicion de GEU

L'écho doppler

Le mode Doppler peut être très précieux dans l’identification d’une grossesse débutante dont le diagnostic est douteux, mais il est nécessaire de disposer d’une imagerie couleur d’une très grande sensibilité.

Le Doppler couleur permet de repérer la néovascularisation qui se développe dans l’endomètre, au contact du trophoblaste, dès l’implantation de l’œuf. Un signal couleur est même parfois identifiable dans la zone d’implantation, avant même la visualisation du sac ovulaire et le retard de règles. Il s’agit d’un flux artériel à basse résistance (Index de Résistance IR = 0,40 à 0,50) avec des vitesses systoliques dépassant le plus souvent 20 cm par seconde. Ce type de flux similaire à celui d’un corps jaune ne se rencontrerait pas dans l’endomètre normal et permettrait pratiquement d’exclure une GEU.

La mise en évidence d’un flux de type veineux a moins de valeur car il peut se voir en cas de réaction déciduale, quel que soit le siège de la grossesse.

Après l’IVG médicamenteuse

Le moment optimum du contrôle se situe entre le 14ième et le 21ième jour après la prise de mifepristone. L’indication de l’échographie repose sur l’existence de signes fonctionnels inhabituels et sur la mauvaise décroissance voire l’augmentation du taux d’hCG. Sa réalisation est indispensable lorsque le taux d’hCG plasmatique deux à trois semaines après l’IVG , reste supérieur à 10% du taux initial. Dans ces situations, il est essentiel de prêter une attention particulière à l’aspect de la cavité utérine et d’évaluer l’épaisseur endométriale  La cavité est vide. L’endomètre est absent ou peu abondant, entourant parfois une petite hématométrie résiduelle.

Grossesse persistante

La poursuite d’une grossesse évolutive survient dans 0,5 à 1% des IVG médicamenteuses. Elle est suspectée par le dosage d’hCG et facilement confirmée par l’échographie. L’évacuation par aspiration doit être proposées rapidement

Rétention d’œuf mort

L’échographie peut montrer un œuf non embryonné, non évolutif ou aspect d’œuf clair, souvent hypotonique et aplati. Cet aspect nécessite une aspiration chirurgicale ou une nouvelle dose de misoprostol. 

Expulsion en cours

L’échographie permet parfois de saisir l’œuf en cours d’expulsion, déformé en « sablier » lors du passage au niveau du col utérin. Il ne faut pas omettre de regarder le col et l’isthme. Le sac ovulaire peut aussi être retrouvé dans le vagin. L’expulsion d’un œuf mort se fait volontiers en deux temps, d’abord le sac amniotique, avec ou sans embryon, puis le trophoblaste. Un nouveau contrôle échographique de vacuité sera éventuellement prescrit.

La cavité contient des structures hyperéchogènes qui peuvent correspondre à du trophoblaste, de la caduque ou des caillots. C’est la situation la plus délicate, car il est souvent difficile d’identifier le trophoblaste avec certitude.

La présence d’un signal Doppler artériel dans la cavité plaide pour une rétention trophoblastique. À l’inverse, la présence d’une cavité épaisse homogène sans signal Doppler et de moins de 15 mm, est une situation habituelle après IVG médicamenteuse. Cet aspect échographique est un piège et ne doit pas conduire à un curetage systématique. Le plus souvent, il s’agit de débris de caduques et de caillots qui s’expulseront spontanément ou après une nouvelle prise de prostaglandines 

Les facteurs de risque d’échec de l’IVG médicamenteuse

Une étude rétrospective effectuée entre 2001 et 2005 par le Service d’Orthogénie de l’hôpital de la Fraternité (Roubaix) a porté sur 1 850 patientes chez lesquelles l’IVG médicamenteuse a été efficace dans 97,08 % des cas. On a répertorié 54 échecs (2,92 %) : 7 grossesses évolutives, 42 rétentions, 4 reprises en urgence et une perdue de vue.

Les résultats sont les suivants :

– la moyenne d’âge des femmes ayant subi une IVG médicamenteuse est supérieure dans le groupe où l’IVG a échoué (en moyenne 30,8 ans versus 27,2 ans) ;

– les femmes nullipares ont présenté significativement moins d’échecs que les patientes multipares (1,37 % versus 4,30 %) ;

– Dans cette étude limitée aux grossesses inférieures à 50 jours d’aménorrhée, l’efficacité de l’IVG ne varie pas en fonction du terme de la grossesse (43 jours d’aménorrhée en moyenne) ;

– dans le groupe où l’IVG a été un succès, la moyenne du taux de b-hCG à J1 était inférieure à celle du groupe dans lequel l’IVG a échoué (46 000 mUI/l versus 37 000 UI/ml en moyenne) ;

– 638 patientes ont expulsé après la première dose de 400 µg de misoprostol ; 1 149 patientes ont dû recevoir une deuxième dose de misoprostol (400 µg) ; 35 patientes n’ont pas expulsé, mais n’ont pas reçu de deuxième dose (refus, départ du service) ; 28 n’ont reçu aucune dose de misoprostol car elles avaient expulsé avant la 48e heure. Dans le groupe ayant reçu deux doses de misoprostol, 43 ont échoué, dont 2 reprises le jour même pour hémorragie et une pour douleurs pelviennes.

Au total, l’efficacité de l’IVG médicamenteuse est globalement très satisfaisante, dès lors que les indications et le protocole associant 600mg de mifepristone aux prostaglandines sont respectés et ceci, quels que soient les profils des patientes. Il reste cependant nécessaire d’informer les femmes du risque d’échec de la méthode lorsque la parité est importante (au-delà de 3 ou 4 enfants).

En pratique :

• L’échographie endovaginale est l’examen de référence avant une IVG médicamenteuse pour confirmer la grossesse, sa localisation et sa datation.

• Le contrôle échographique après IVG n’est pas toujours indispensable. Il entraîne en effet des curetages injustifiés devant des résidus cavitaires. En règle générale, la clinique et l’évolution du taux de b-hCG devraient suffire.

Il vaut mieux réserver l’échographie aux cas où le taux d’hCG reste supérieur à 10 ou 20 % du taux initial. Dans tous les cas, le dosage ne doit pas être trop précoce, sauf en cas d’absence certaine d’expulsion ou d’évènements indésirables (hémorragie persistante importante, douleurs inhabituelles).

La persistance d’un sac gestationnel est le seul élément échographique permettant d’affirmer un échec.

• Un geste complémentaire sur une cavité apparaissant épaisse et hétérogène, sur le plan échographique, ne se justifie qu’en cas de manifestations cliniques associées, de suspicion de rétention de trophoblaste à l’écho-Doppler ou de mauvaise décroissance du taux d’hCG.

• Il persiste un risque iatrogène lié au contrôle inadéquat ou aux difficultés d’interprétation des images échographiques. S’il est préférable qu’un même opérateur intervienne avant et après l’IVG, ce n’est cependant pas indispensable. Il suffit qu’il connaisse les aspects échographiques post-IVG médicamenteuse et qu’il fasse un compte-rendu des images, sachant que la conduite à tenir appartient au médecin qui pratique l’IVG médicamenteuse.

• L’échographie sus-pubienne a des indications limitées.

• L’écho-Doppler, n’est pas disponible dans tous les centres. Elle est parfois utile, mais son indication se limite à certaines images d’interprétation difficile (par exemple : rétention trophoblastique ou caillot ?).

Des recommandations françaises et européennes devraient permettre de préciser les indications des échographies et ainsi faciliter la tâche de chacun des intervenants.

 

 Roubaix