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2008 > Infertilité > ICSI  Telecharger le PDF

Les ICSI difficiles existent-elles

S. Hamamah , H Dechaud , L Reyftmann, et V Loup

Les indications d’ICSI liées à la qualité du sperme

Les indications de l’ICSI reposent tout d’abord sur la qualité du sperme, la présence d’une oligospermie sévère ou d’une azoospermie.

La définition des oligospermies ne fait pas consensus, même si le nombre le plus souvent retenu est moins d’un million de spermatozoïdes/ml En pratique, ce n’est pas le problème principal.

L’asthénozoospermie

Le problème est plutôt celui d’une association avec une asthénozoospermie. Il est majeur avec moins de 5% de a+b (respectivement mobilité progressive rapide et progressive lente). Dans le cas d’une telle asthénospermie sévère, il faut demander un second prélèvement, diminuer la durée de centrifugation qui peut être à l’origine de la production de radicaux libres ( ROS), et aller à la pêche aux spermatozoïdes. Avant de manipuler les ovocytes, il faut changer la micro-pipette utilisée pour récupérer les spermatozoïdes en raison de la présence potentielle d’impuretés. L’utilisation de méthylxanthines dont la pentoxifylline (PTX), qui entraîne une augmentation de l’AMPc intra-cellulaire, a été proposée par certaines équipes mais reste controversée en termes de toxicité pour la capacité de fécondation ou le développement embryonnaire [1]. En cas de sperme obtenu par MESA, PESE, TESA ou TESE, la mobilité et la vitalité sont diminuées [2].

En cas d’asthénospermie complète, il est difficile de distinguer les spermatozoïdes vivants immobiles des spermatozoïdes morts. Le taux de fécondation dans ce cadre est augmenté si l’ICSI est réalisée avec des spermatozoïdes sélectionnés par HOST (hypoosmotic swelling test) [3]. Le problème est qu’en cas de défect de l’axonème ou de syndrome des cils immobiles, il n’y a pas de réponse à l’HOST même si les spermatozoïdes sont vivants.

La tératospermie

Les anomalies morphologiques n’ont pas toutes les mêmes répercussions. En pratique, se pose le problème du choix des spermatozoïdes à injecter, particulièrement en cas de syndrome des têtes rondes. Il est alors nécessaire d’assister l’ovocyte dans son activation afin de terminer sa méiose et réaliser ainsi sa maturation nucléaire et obtenir une fécondation. Certaines anomalies sont à exclure, notamment la globozoospermie et la macrocéphalie. Si tous les spermatozoïdes sont microcéphales, le taux de fécondation est effondré. Les compétences du spermatozoïde nécessaires à l’obtention d’embryons ne sont pas acquises chez les sujets globozoospermiques, avec des taux de fécondation et de grossesse évolutive faibles. Le nombre de mutations non connues et le taux d’aneuploïdie sont élevés [4,5]. En cas de macrocéphalie, une fécondation peut être obtenue mais il n’y a pas d’implantation [6]. L’IMSI peut ici trouver sa place, dans le cadre des anomalies de la tête essentiellement [7].

La nécrospermie

Le seuil de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est fixé à 50%. C’est pratiquement le seul facteur spermatique pouvant affecter la qualité embryonnaire et le taux de grossesse en ICSI. Sa prévalence est de l’ordre de 0,2 à 0,5% des hommes patients infertiles. Certaines équipes proposent une biopsie testiculaire à la recherche de spermatozoïdes n’ayant pas subi de dommages génomiques lors du processus d’apoptose post-éjaculation [8]. Le taux de fécondation avec spermatozoïdes obtenus par biopsie testiculaire est de 67%. Le problème, en cas d’anomalie ultra-structurale associée, est l’échec de fécondation ou le faible taux de développement embryonnaire. C’est le cas en présence d’un syndrome de Kartagener ou d’une anomalie du centrosome [9]. En pratique, un second prélèvement ½ heure à 1 heure plus tard peut-être réalisé et la place du test hypo-osmotique peut-être discuté.

La durée d’abstinence

Les évidences ne sont pas toujours celles attendues ! Ainsi, l’augmentation de la fréquence coïtale réduit le délai moyen à concevoir et le statut acrosomial se dégrade avec la durée d’abstinence [10]. L’optimum est atteint pour 2 jours chez le normozoospermie et 1 jour chez l’oligospermie. La mobilité et la morphologie sont optimales après 1 jour d’abstinence chez l’oligospermie, avec une dégradation dès 4 jours [11]. La mobilité diminue après 4 jours chez les candidats à la vasectomie [12].

L’azoospermie sécrétoire

Elle peut être connue et programmée en biopsie testiculaire ; il faut alors demander systématiquement un prélèvement de sperme avant d'envoyer la patient aule bloc. Nous le faisons dans notre service, ce qui conduit à annuler le geste chirurgical dans un tiers des cas. La biopsie testiculaire est un geste difficile à réaliser et la congélation ovocytaire est défendable. L’azoospermie sécrétoire peut aussi être découverte le jour J, et c’est tout l’intérêt de la congélation systématique de paillettes de secours en cas d’oligoasthénotératospermie sévère (OATs).

Dans les cas difficiles, une observation microscopique méticuleuse de l’éjaculat est nécessaire, pouvant permettre de repérer des spermatozoïdes occasionnels voire mobiles. Des spermatozoïdes utilisables en ICSI sont retrouvés dans 30% des cas avant biopsie testiculaire si une analyse du recueil est effectuée régulièrement [13].

Dans notre centre, nous réalisons systématiquement le prélèvement testiculaire simultanément à l’ICSI, le sperme congelé dans le cas des azoospermies non obstructives étant moins performant en termes de grossesses obtenues. La préparation et la technique sont à réaliser minutieusement, avec un examen entre lame et lamelle. Si aucun spermatozoïde n’est observé dans ces conditions, se pose le problème de l’heure d’injection qui n’est plus respecté, avec un risque de vieillissement ovocytaire.

L’ICSI avec spermatide

Le taux dé fécondation avec spermatide est inférieur à celui obtenu avec spermatozoïdes [14]. Il est en outre difficile d’identifier les spermatides, avec des résultats meilleurs avec des spermatides allongées que des spermatides rondes [15].

Les autres indications d’ICSI

L’infertilité féminine

Autrefois débattue, l’infertilité d’origine féminine n’est plus pas une indication d’ICSI, y compris dans les cas du faible recueil ovocytaire à la ponction ou de cycle spontanénaturel ou /semi-naturel modifié chez les mauvaises répondeuses. La comparaison de l’ICSI à la FIV en présence d’un seul ovocyte et d’un sperme normal ne montre pas de supériorité de l’une par rapport à l’autre, quel que soit l’âge de la femme (> ou < 39 ans) [16]. L’ICSI n’est donc pas plus performante que la FIV en l’absence d’indication masculine.

Les échecs répétés de FIV

Les échecs de FIV avec sperme normal représentent aujourd’hui 10% environ des indications d’ICSI en France. A quel moment faut-il passer à l’ICSI ? Tout dépend de la qualité et de la maturité ovocytaires. En cas de persistance de l’échec en ICSI, une étude génomique peut avoir un intérêt. Les ovocytes dysmorphiques, qui concernent environ un ovocyte sur deux, n’ont pas d’impact sur la fécondation mais sont associés à un moindre potentiel évolutif des embryons.

La technique d’ICSI

Dans un récent travail, Ebner et collal. indiquaient que la décoronisation totale ou partielle doit être la plus rapide possible (pH, température) [17]. Le risque, si non, est de lyser et perdre les ovocytes, que la décoronisation soit enzymatique (hyaluronydase) ou mécanique. Les problèmes de matériel sont aussi variés que le matériel est complexe. La technique d’ICSI est réalisée hors étuve, ce qui exige le maintien de la température (platines chauffante), du pH (huile minérale) et de la stérilité (pas de hotte à flux laminaire, air stérile).

L’injection peut ne pas être sentie ou provoquer la lyse des ovocytes. Certaines questions restent en suspens, telle la hyaluronidase, actuellement extrait testiculaire mais qui pourrait dans l’avenir être d’origine recombinante. De même, le processus d’immobilisation et de captation du spermatozoïde peut être facilité par l’utilisation d’une solution visqueuse tel le polyvinylpirrolidone (PVP). Mais son usage soulève des questions de toxicité et d’impact sur le développement embryonnaire. Enfin, l’échec de fécondation après ICSI représente environ 3% des cycles [18].

Obtenir un embryon est-il suffisant ? Que transmet le spermatozoïde à l’embryon pour assurer son implantation, une grossesse à terme et la qualité du conceptus ? Quels peuvent être les attentes et les résultats ? Il faut informer les couples des difficultés de la technique et des résultats (retard de développement embryonnaire, blocage embryonnaire quand l’injection a été réalisée tardivement et conduit à un vieillissement ovocytaire précoce). Enfin, la place du don de sperme est une alternative, mais sans consensus actuellement sur le moment de sa réalisation.

Conclusion

Finalement, pour se préparer à ces ICSI difficiles, il faut avoir réalisé un bilan andrologique complet, avec un suivi andrologique, un bilan génétique (caryotype et micro-délétions) et cibler un meilleur cycle de spermatogénèse si l’âge de la femme le permet ; chez les hommes étiquetés azoospermiques, il est possible de temps en temps de trouver des spermatozoïdes dans l’éjaculat. La biopsie testiculaire ne donne en effet que l’état d’un testicule, dans un endroit limité, et non pas de la totalité des 2 testicules. La conservation de paillettes de secours peut-être bien utile. L’équipe devra repérer ces ICSI difficiles et les évaluer pour établir une stratégie de prise en charge. Elle devra savoir refuser, quand la biopsie a des résultats limites et selon le statut génétique. Enfin, l’équipe devra informer des chances limites, avec des fréquences élevées d’aneuploïdie et des taux de grossesse faibles. Ce n’est pas parce que l’ICSI peut être réalisée, qu’elle doit l’être…

Bibliographie

1. Nivsarkar M, Patel RY, Mokal R. Modulation of sperm membrane conformation by pentoxifylline in oligospermia: a biophysical investigation of sperm membrane in vitro.

Biochem Biophys Res Commun. 1996;225:791-5.

2. Verheyen G, Nagy Z, Joris H, De Croo I, Tournaye H, Van Steirteghem A. Quality of frozen-thawed testicular sperm and its preclinical use for intracytoplasmic sperm injection into in vitro-matured germinal-vesicle stage oocytes. Fertil Steril. 1997;67:74-80.

3. Casper RF, Meriano JS, Jarvi KA, Cowan L, Lucato ML. The hypo-osmotic swelling test for selection of viable sperm for intracytoplasmic sperm injection in men with complete asthenozoospermia. Fertil Steril. 1996;65:972-6.

4. Pirrello O, Machev N, Schimdt F, Terriou P, Ménézo Y, Viville S. Search for mutations involved in human globozoospermia. Hum Reprod. 2005;20:1314-8.

5. Morel F, Douet-Guilbert N, Moerman A et al. Chromosome aneuploidy in the spermatozoa of two men with globozoospermia. Mol Hum Reprod. 2004;10:835-8.

6. In't Veld PA, Broekmans FJ, de France HF, Pearson PL, Pieters MH, van Kooij RJ. Intracytoplasmic sperm injection (ICSI) and chromosomally abnormal spermatozoa. Hum Reprod. 1997;12:752-4.

7. Bartoov B, Berkovitz A, Eltes F et al. Pregnancy rates are higher with intracytoplasmic morphologically selected sperm injection than with conventional intracytoplasmic injection. Fertil Steril. 2003;80:1413-9.

8. Cummins JM, Jequier AM. Concerns and recommendations for intracytoplasmic sperm injection (ICSI) treatment. Hum Reprod. 1995;10 Suppl 1:138-43.

9. Simerly C, Wu GJ, Zoran S et al. The paternal inheritance of the centrosome, the cell's microtubule-organizing center, in humans, and the implications for infertility. Nat Med. 1995;1:47-52.

10. Levitas E, Lunenfeld E, Weisz N, Friger M, Har-Vardi I, Potashnik G. Relationship between sexual abstinence duration and the acrosome index in teratozoospermic semen: analysis of 1800 semen samples. Andrologia. 2006;38:110-2.

11. Levitas E, Lunenfeld E, Weiss N et al. Relationship between the duration of sexual abstinence and semen quality: analysis of 9,489 semen samples. Fertil Steril. 2005;83:1680-6.

12. Pasqualotto FF, Sobreiro BP, Hallak J, Athayde KS, Pasqualotto EB, Lucon AM. High percentage of abnormal semen parameters in a prevasectomy population.

Fertil Steril. 2006;85:954-60.

13. Ron-El R, Strassburger D, Friedler S, et al. Extended sperm preparation: an alternative to testicular sperm extraction in non-obstructive azoospermia. Hum Reprod. 1997;12:1222-6.

14. Fishel S, Green S, Hunter A, Lisi F, Rinaldi L, Lisi R, McDermott H. Human fertilization with round and elongated spermatids. Hum Reprod. 1997;12:336-40.

15. Vanderzwalmen P, Zech H, Birkenfeld A et al. Intracytoplasmic injection of spermatids retrieved from testicular tissue: influence of testicular pathology, type of selected spermatids and oocyte activation. Hum Reprod. 1997;12:1203-13.

16. Gozlan I, Dor A, Farber B, Meirow D, Feinstein S, Levron J. Comparing intracytoplasmic sperm injection and in vitro fertilization in patients with single oocyte retrieval. Fertil Steril. 2007;87:515-8.

17. Ebner T, Moser M, Sommergruber M, Shebl O, Tews G. Incomplete denudation of oocytes prior to ICSI enhances embryo quality and blastocyst development. Hum Reprod. 2006;21:2972-7.

18. Liu J, Nagy Z, Joris H, Tournaye H et al. Analysis of 76 total fertilization failure cycles out of 2732 intracytoplasmic sperm injection cycles. Hum Reprod. 1995;10:2630-6.

Résumé

Les indications de l’ICSI reposent sur la qualité du sperme, la présence d’une oligospermie sévère ou d’une azoospermie. En cas d’asthénozoospermie sévère, un 2ème prélèvement peut-être demandé. En cas d’athénozoospermie complète, le taux de fécondation peut être augmenté si l’ICSI est réalisée avec des spermatozoïdes sélectionnés par HOST (hypoosmotic swelling test). Les anomalies morphologiques n’ont pas toutes les mêmes répercussions. Certaines anomalies sont à exclure, notamment la globozoospermie et la macrocéphalie.

L’azoospermie sécrétoire peut-être connue ou découverte le jour J, d’où l’intérêt de congeler des paillettes de secours en cas d’oligoasthénotératospermie sévère. Une observation microscopique méticuleuse de l’éjaculat peut permettre de repérer des spermatozoïdes occasionnels voire mobiles. L’infertilité d’origine féminine n’est plus une indication d’ICSI. En cas d’échec de FIV avec sperme normal, le passage à l’ICSI dépend de la qualité et de la maturité ovocytaires.

Pour la réalisation technique de l’ICSI, Les problèmes de matériel sont aussi variés que le matériel est complexe. Elle est réalisée hors étuve, ce qui exige le maintien de la température et du pH et la stérilité. Certaines questions restent en suspens. Il faut informer des chances limites de l’ICSI, avec des fréquences élevées d’aneuploïdie et des taux de grossesse faibles.

Département de médecine et biologie de la reproduction, INSERM U 847 Hôpital Arnaud de Villeneuve, 371, Avenue du Doyen Gaston Giraud, 34295 Montpellier cedex 5