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2006 > Andrologie >  Telecharger le PDF

Que faire face à la pathologie bénigne du sein des femmes à haut risque de cancer du sein ?

A. Pigné et R Hocquemller

Si l’on connaît depuis 1883 et le traité de Reclus sur la maladie fibrokystique (sic in [1]) le risque de cancérisation de certaines pathologies bénignes du sein, comment prendre en compte les données épidémiologiques récentes, en terme de risque relatif de développer un cancer mammaire chez les patientes porteuses de telles affections, lorsqu’elles sont découvertes dans le cadre d’un suivi systématique mis en place devant un risque déjà augmenté du fait notamment d’un histoire familiale significative, voire de la mise en évidence d’une mutation BRAC-1 ou 2 ?

Les risques relatifs associés à différents facteurs se multipliant pour donner le risque relatif « personnel » d’une patiente. Aussi, un risque peu significatif, comme le RR de 1,5 sous THSM, chez une patiente sans autre facteur de risque, prend une toute autre valeur chez une patiente ayant deux antécédents au premier degré, son risque personnel passant de 6 à 9.

Il en va de même pour les pathologies bénignes du sein qui constituent pour la plupart un facteur de risque « acceptable » dans la population générale, justifiant leur prise en charge habituelle, qui pourraient justifier d’une autre attitude lorsque ce risque se multiplie à celui inherant aux autres antécédents de la patiente la faisant déjà classer « à risque ».

Données épidémiologiques :

Le risque relatif de développer un cancer dans la cohorte de 9087 patientes présentant diverses pathologies bénignes mammaires et suivies entre 1957 et 1991 à la Mayo Clinic, étudiée par Hartmann et al. en 2005, est en moyenne de 1,56 [2]. Cependant il existe des disparités entre les diverses pathologies bénignes (cf tableau).

Type de lésion

Risque relatif

Kystes mammaires

Non augmenté sauf si antécédents familiaux de K [3][4]

Serait augmenté chez femme jeune et dans l’année suivant une ponction évacuation [5]

Adénose

1,5 à 2 si isolée ; 6,7 si hyperplasie atypique associée[6]

Hyperplasie épithéliale

Entre 1,3 et 13 suivant la présence d’atypie et l’âge (in [1])

Adénofibrome

RR augmentant avec l’âge de survenue[7][8]

3,1 si fibroadénome complexe[9]

3,88 si environnement type mastopathie proliférante[9]

Centre prolifératif d’Aschoff

1 à 5 suivant composante épithéliale (Consensus, 1985[10])

1,8 si CPA microscopique associé à autre path. bénigne

Par ailleurs, dans cette étude rétrospective sur un large cohorte, il semble que le risque relatif dépendent non seulement de données anatomopathologiques, notamment la présence d’atypies (RR = 4,24), et, sans atypies, le côté proliférant (RR = 1,88) ou non proliférant (RR = 1,27), mais aussi des antécédents familiaux de cancer du sein, qui semble cependant être un facteur indépendant[2].

Conduites à tenir pratiques :

Hormis les données épidémiologiques précitées, la littérature est pauvre en études permettant d’adapter la conduite à tenir dans le cas particulier de la découverte clinique ou radiologique d’une pathologie a priori bénigne chez une patiente par ailleurs à haut risque de cancer du sein.

Quelle est la place de l’IRM ? quelle est celle des microprélévements radiodirigés, cytoponction, microbiopsies ou Mammotome ?

Pour ce qui est de l’IRM, on peut se demander quel apport elle pourrait avoir dans notre problématique, du fait que son principal écueil réside dans son taux relativement élévé de faux positifs cancéreux dans certaines pathologies bénignes de plus de 5mm[11]. Elle ne serait donc pas discriminante pour poser ou non une décision chirurgicale d’exérèse.

Comme nous l’avons vu plus haut, non seulement la nature même de la lésion bénigne à son importance, mais également, voire surtout dans le cas des adénofibromes, son environement histologique. Ceci exclut donc a priori la cytoponction à l’aiguille fine de la stratégie diagnostique, ses résultats étant purement cytologiques et non histologiques.

Une étude interessante de Della Salla semble montrer la supériorité du Mammotome face à une microbiopsie dans le diagnostic de cancer devant des images mammographiques a priori bénignes, avec des résultats comparables à une biopsie chirurgicale[12].

Reste la question du traitement chirurgical d’emblée devant toute lésion dépistée chez une femme à haut risque de cancer du sein…

Si celle-ci peut sembler licite au vu des données épidémiologiques précitées et de la nécessité d’un examen histologique de la lésion et de son pourtour à des fins pronostiques, on peut lui opposer deux arguments.

D’une part, si une telle attitude est concevable dans le cadre de lésions focales, quid des lésions diffuses du sein ? La présence d’un aspect fibro-kystique diffus doit-il être un argument pour proposer à une patiente, par ailleurs à haut risque, une mammectomie bilatérale prophylactique ?

D’autre part, si une corrélation statistique est établie entre certains types de lésions et l’augmentation du risque relatif de cancer, rien n’indique que l’ablation chirurgicale de cette lésion une fois diagnostiquée réduise ce risque de développer un cancer mammaire ultérieurement. Car tout semble porter à croire, notamment dans le cas des adénofibromes, que la survenue d’un cancer même en leur sein, n’est pas due à une dégénérescence du fibrome[8], car si tel était le cas, les contingents carcinomateux dans un fibrome ne seraient que lobulaires.

Aussi, si tant est que l’on s’est donné les moyens d’obtenir un prélèvement histologique de qualité, et ce à des fins purement pronostiques, on peut se poser la question de la nécessité d’une conduite à tenir particulière quant à ces lésions bénignes, chez ces femmes qui vont de toutes façons bénéficier d’une surveillance accrue du fait de leur risque carcinologique mammaire élevé préexistant.

Conclusion :

Les arguments manquent à l’heure actuelle pour proposer une attitude systématique devant la survenue de lésions mammaires bénignes chez une femme par ailleurs à haut risque de développer un cancer du sein.

Cependant, plus que chez d’autres femmes, la nécessité d’avoir une histologie à des fins pronostique de survenue ultérieure de cancer semble importante.

Si sur des lésions focales dont l’ablation est peu délabrante, celle-ci semble licite pour obtenir un examen anatomopathologique de qualité, on peut se poser la question de la place des micro prélèvements radio-dirigés, notamment par Mammotome, dans le cas de lésions diffuses, multifocales, ou dont l’ablation large entraînerait un préjudice esthétique chez la patiente sans gain en terme pronostic.

La pertinence de tels examens dans ce cas reste à évaluer.

Bibliographie

[1] Centre Européen d’Explorations Gynécologiques, 11 rue Lacépède, 75005 Paris.

[1] Espié M et Tournant B. Epidémiologie des lésions bénignes du sein. Encycl Méd Chir (Editions scientifiques et médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Gynécologie, 812-A-10, 2001, 6p.

[2] Hartmann LC, Sellers TA, Frost MH, Lingle WL, Degnim AC, Ghosh K, Vierkant RA, Maloney SD, Pankratz VS, Hillman DW, Suman VJ, Johnson J, Blake C, Tlsty T, Vachon CM, Melton LJ 3rd, Visscher DW. Benign breast disease and the risk of breast cancer. N Engl J Med. 2005 Jul 21; 353 : 229-37.

[3] Haagensen DE Jr. Is cystic disease related to breast cancer? Am J Surg Pathol 1991 ; 15 : 687-694 .

[4] Dupont WD, Page DL. Risk factors for breast cancer in women with proliferative breast disease. N Engl J Med 1985 ; 312 : 146-151.

[5] Dixon JM, McDonald C, Elton RA, Miller WR. Risk of breast cancer in women with palpable breast cysts: a propective study. Lancet 1999 ; 353 : 1742-1745.

[6] Jensen RA, Page DL, Dupont WD, Rogers LW. Invasive breast cancer risk in women with sclerosing adenosis. Cancer 1989 ; 64 : 1977-1983.

[7] Moskowitz M, Gartside F, Wirman JA, McLaughlin C. Proliferative disorders of the breast as risk factors for breast cancer in a self-selected screened population: pathologic markers. Radiology 1980 ; 134 : 289-191.

[8] Pick PW, Lossifides IA. Occurrence of breast carcinome with fibroadenoma. A review. Arch Pathol Lab Med 1984 ; 108 : 590-594.

[9] Dupont WD, Page DL, Parl FF, Jones CL, Plummer WD, Rados MS. Long term risk of breast cancer in women with fibroadenoma. N Engl J Med 1994 ; 331 : 10-15.

[10] Hutter RV. Consensus meeting New York, 3-5. X.1985. Is fibrocystic disease of the breast precancerous ? Arch Pathol Lab Med 1986 ; 110 : 171-173.

[11] Langer SA, Horst KC, Ikeda DM, Daniel BL, Kong CS, Dirbas FM. Pathologic correlates of false positive breast magnetic resonance imaging findings: which lesions warrant biopsy? Am J Surg. 2005 Oct ; 190 : 633-40.

[12] Della Sala SW, Pellegrini M, Bernardi D, Dalla Palma F, Bonzanini M. Advantages and limits of percutaneous breast core biopsy with Mammotome and stereotactic equipment in upright seated patient. Radiol Med (Torino) 2004 Oct;108 : 335-44.