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2005 > Gynécologie > Cancer du sein  Telecharger le PDF

Le futur de l'IRM en sénologie

R Guillon , A Maubon , M Viala , J. Rouanet et P. Mares

La définition du dépistage du cancer du sein est assez variable :

– en cancérologie officiellement, il s'agirait de détecter le cancer du sein avant les signescliniques ;

– une définition moderne plus adaptée serait « faire le diagnostic du cancer le plus petit possible, le plus tôt possible, en étant le moins invasif possible et en rassurant le maximum de patientes avec la plus grande sensibilité et une haute valeur prédictive négative...».

Le dépistage de masse organisé des cancers est appelé à remplacer le « bilan individuel suscité » par les professionnels (médecins généralistes ou spécialistes en particulier gynéco-obstétriciens). Dans le cadre du « bilan individuel suscité », situation en France précédant le dépistage de masse organisé, le radiologue était le consultant d'imagerie du sein et avait à la fois liberté de fonctionnement mais aussi responsabilité de résultat vis-à-vis des patientes et du correspondant.

Pour B. Duperray, des vérités sont souvent considérées comme indiscutables et définitivement admises concernant le dépistage de masse du cancer du sein : en effet, celui-ci apparaît obligatoirement efficace par son concept et son caractère général car il s'agit d'une opération de santé publique privilégiant l'intérêt général par rapport à l'intérêt particulier ; le dépistage aurait historiquement et scientifiquement prouvé son efficacité. Enfin l'histoire naturelle du cancer serait connue, évidente et obligatoire, le passage de l'hyperplasie épithéliale se faisant progressivement vers le cancer in situ puis vers le cancer invasif et les métastases ou presque... [1]

Dans l'organisation du dépistage français actuel, l'IRM n'apparaît pas officiellement volontairement comme examen décisionnel ou de recourspossible dans certaines situations et pourtant...

La biopsie reste dominante et indispensable, intervenant tôt dans la chaîne diagnostique (ACR 4, ACR 5) ; les nécessités du planning thérapeutique et l'organisation chirurgicale pour le ganglion sentinelle expliquent l'impératif de ce diagnostic anatomique précoce. Mais certaines situations fréquentes et difficiles ne sont pas réellement envisagées ; l'exemple de certains dossiersclassés ACR 3. est intéressant quand la succession mammographie-échographie reste incertaine. La biopsie chirurgicale garde sa place pour les petites lésions à risque de faux négatifs de la biopsie.

Quelle pourrait être la technique idéale aujourd'hui d'imagerie du sein ? C'est une technique qui serait très sensible, très spécifique, non irradiante, à haute définition non invasive mais autorisant repérage et biopsie facilement.

La mammographie est une technique assez sensible (environ 80 %) [2], très spécifique, de haute définition qui n'est pas invasive mais irradiante et qui permet le repérage et éventuellement la biopsie. La « relativement basse » sensibilité de la mammographie devrait progresser avec la qualité des appareillages, l'aide au diagnostic et une meilleure formation des radiologistes. Néanmoins, il est difficile d'ignorer que la mammographie « laisse passer » environ deux cancers sur 10 ; la mammographie de dépistage pourrait rester la règle tous les deux ans mais une dérogation particulière pourrait être acceptée pour les seins denses et les femmes minces qui sortiraient ainsi du dépistage classique [3]. Quant aux femmes sous THS, le problème n'est pour l'instant pas réglé mais reste entièrement d'actualité.

Le diagnostic positif de cancer du sein en IRM (Fig. 1) est basé à la fois sur la cinétique du gadolinium (pente verticale et wash-out) et sur la morphologie de la prise de contraste (aspect spiculaire ou en anneau).

L'IRM pour le diagnostic de cancer canalaire invasif a une sensibilité reconnue proche de 100 % et une spécificité variable allant de 40 à 97 %. [4].

Sur le plan technique, un consensus semble se préciser concernant la réalisation d'un examen IRM du sein. Le plan de coupe le plus utilisé est le plan axial transverse (visualisation des deux seins en même temps). Cet examen doit comprendre au minimum une séquence en T1 non injectée, une séquence en T2 avec suppression de graisse, ainsi qu'une séquence en T1 dynamique avec injection de gadolinium avec au moins cinq mesures et des soustractions par rapport au T1 initial. Il est possible d'associer à la séquence dynamique la suppression de graisse. Certains utilisent une séquence tardive en T1 après la fin du dynamique et dans un plan différent, volontiers le plan sagittal plus «parlant » pour les thérapeutes.

Concernant le cancer intra-canalaire in situ (Fig. 2) un rehaussement est retrouvé dans 96 % des cas, mais ne peut être considéré comme significatif que dans la moitié des cas [5]. Ces rehaussements doivent être mesurés en intensité brute et relative avec courbes et évalués morphologiquement dans le compte rendu [6]. La compréhension du cancer in situ doit continuer à faire l'objet de nombreuses recherches. En IRM la prise de contraste canalaire semble un élément particulièrement intéressant. Le caractère anatomo-pathologique micro-invasif est difficile à apprécier en imagerie.

Les indications classiques de l'IRM du sein sont aujourd'hui la surveillance du cancer après traitement, les prothèses et la recherche d'un primitif mammaire à mammographie normale (ganglion) (Fig. 3). Commencent à être tolérés le bilan pré-opératoire des cancers, mais aussi les cas d'imagerie discordante avec l'examen clinique.

Dans la surveillance des seins traités, toute prise de contraste 18 mois après la fin de la radiothérapie signe la récidive avec une sensibilité de 100 % et une spécificité de 96 %. La prise de contraste permet de différencier les aspects fibreux bénins des véritables récidives. La nécrose adipeuse est très facilement diagnostiquée à l'IRM grâce aux séquences avec suppression de graisse.

La surveillance des prothèses mammaires et de la glande restante apparaît à l'évidence, devoir être faite en l'IRM. Cette technique est la seule qui permette de bien visualiser les résidus glandulaires et d'étudier les parois et contenus prothétiques de manière satisfaisante, à la recherche de rupture intra ou extra-capsulaire.

Pour le bilan pré-opératoire des cancers du sein, l'IRM a démontré sa supériorité sur la mammographie de manière évidente avec une sensibilité de 80 %. Fisher en 1999 [7] découvre grâce à l'IRM pré-opératoire à propos de 463 cas de tumeurs du sein, 30 cancers multifocaux et 15 cancers controlatéraux que la mammographie avait laissé passer. Le fait de biopsier d'emblée annule ou au moins éloigne l'IRM préopératoire, ce qui n'est pas souhaitable.

Quant à la discordance radio-clinique, elle reste un élément important et si un doute clinique persiste à l'examen clinique malgré une mammographie « normale », une IRM doit pouvoir être réalisée sans contestation. En effet certaines zones sont parfois difficiles d'accès pour la mammographie, en particulier au niveau pré-pectoral et au niveau du sillon inférieur sous-mammaire (Fig. 4).

Le diagnostic de cancer lobulaire invasif bénéficie des progrès de l'IRM. 80 % de ces cancers présentent un rehaussement précoce mais l'intensité du rehaussement reste variable sur les séquences dynamiques habituelles [8]. Vu la difficulté de ce diagnostic par les autres techniques d'imagerie, l'apport de l'IRM est aujourd'hui déjà important pour ce diagnostic difficile.

Trois situations sont particulières :

– Les facteurs génétiques prouvés sont maintenant admis comme indication non discutable.

Pour les seins denses,

liberté doit être laissée aux cliniciens ou aux radiologues de décider ou non de l'indication d'une IRM en fonction du contexte, de l'aspect mammographique et/ou de l'examen clinique du correspondant clinique [9]. En effet le risque de « laisser passer » est plus élevé et la sensibilité de la technique mammographique plus faible dans cette situation. Les possibilités de prises de contraste multiples impliquent souvent une échographie post IRM ;

Pour les micro-calcifications,

Nakhara décrit en 2002 une prise de contraste dans 96 % des cancers in situ associés à des micro-calcifications. Une prise de contraste « typique » est cependant retrouvée dans la moitié des cas [10]. Cette opinion est reprise par Trecate en 2003, qui insiste sur les possibilités de l'IRM, avec une valeur prédictive négative de 100 % ! [11].

A. Tardivon en 2002 a pressenti l'importance de la valeur prédictive négative de l'IRM pour la détection d'un cancer du sein mais dans des populations sélectionnées [12]. De multiples auteurs insistent aujourd'hui sur la sensibilité de l'IRM dès qu'existe un doute clinique ou mammographique (seins difficiles, denses, multinodulaires).

Ainsi, l'IRM du sein est appelée à se développer obligatoirement mais plus ou moins rapidement. Il manque à l'IRM des séquences plus spécifiques et plus courtes qui pourraient permettre d'améliorer une spécificité encore insuffisante, de réduire son coût et de lui procurer un accès plus large. En effet le nombre de machines et le coût de l'examen rendent illusoire la généralisation proche de cette technique comme méthode de dépistage. L'application à certaines situations dont le bilan pré-opératoire des cancers du sein devrait faire évoluer les mentalités dans l'intérêt des femmes...

Dans l'avenir, C. Walter prévoit une grande destinée pour la fusionPET-IRM, mais à quel prix ? Cette association réduirait les indications de biopsie dans le sein de 60 à 17 %. En outre, la fusion mammographie/PET commence à apparaître au niveau de la recherche et pourrait donner des résultats intéressants [13]...

L'émergence de l'IRM du sein en matière de diagnostic, de pronostic de surveillance et son intégration urgente dans les possibilités de choix du dépistage, apparaît une évidence. La date de sa véritable application en pratique courante est cependant très lointaine. La création de centres spécialisés d'imagerie de la femme expérimentaux, en collaboration radio-clinique avec nos collègues gynécologues pourrait permettre évaluation et progression. Ces centres pourraient regrouper l'ensemble des acteurs régionaux dans l'intérêt des femmes. Des installations d'IRM dédiées à la femme pourraient ainsi être autorisées.

En effet rappelons que le dépistage français est basé sur la mammographie avec une sensibilité reconnue de 80 % pour cette technique. De nombreuses enquêtes démontrent que les femmes surestiment les bénéfices du programme de dépistage du cancer du sein [14]. La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades impose la transparence et l'information quant au niveau diagnostique des moyens proposés en particulier dans le dépistage. La question de la supériorité de l'IRM même pour le dépistage est déjà posée par certains, peut-être avec excès [15]. L'utilité d'un dépistage expérimental sur quelques sites choisis basé sur l'IRM et une mammographie simplifiée à la recherche de micro-calcifications pourrait être une solution légale momentanée élégante. Déjà une explication claire et de niveau national destinée aux femmes concernant la valeur de la mammographie devrait pouvoir être fournie dans le cadre de la campagne actuelle, ce qui pourrait éviter des conflits à venir.

Bibliographie

[1] Duperray B : L'histoire naturelle du cancer du sein remise en question par les résultats des expériences de dépistage. Paradoxe et données épidémiologiques. Journées de Radiologie (1999).

[2] Basset LW, Kim CH : Breast imaging : mammography and ultrasonography. Magn Reson Imaging Clin N Am. 2001 may ; 9 (2) : 251-71.

[3] Buist DS, Porter PL, Lehman C, Tuplin SH, White E : Factors contributing to mammography failure in women aged 40-49 years. J Natl Cancer Inst. 2004 oct 6 ; 96 (19) : 1432-40.

[4] Huang W, Fisher PR, Dulaimy K, Tudorica LA, O'Hea B, Button TM : Detection of breast malignancy : diagnostic MR protocol for inproved specificity. Radiology 2004 aug ; 232 (2) : 585-91.

[5] Neubauer H, Li M, Kuehne-Heid R, Schneider A, Kaiser WA : High grade and non-high grade ductal carcinoma in situ on dynamic MR mammography : characteristic findings for signal increase and morphological pattern of enhancement. Br J Radiol 2003 jan ; 76 (901) : 3-12.

[6] Viehweg P, Lampe D, Buchmann J, Heywang-Kobrunner SH : In situ and minimally invasive breast cancer : morphologic and kinetic features on contrast-enhanced MR imaging. Magma. 200 dec ; 11 (3) : 129-37.

[7] Fischer U, Zacharine O, Baum F, Von Heyden D, Funke M, Liersch T : The influence of preoperative MRI in the breasts on recurrence rate in patients with breast cancer. Eur Radiol. 2004 oct ; 14 (10) : 1725-31.

[8] Yeh ED, Slanetz PJ, Edmister WB, Talele A, Monticciolo D, Kopans DGB : Invasive lobular carcinoma : spectrum on enhancement and morphology on magnetic resonance imaging. Breast J 2003 Jan-Feb ; 9 (1) : 13-8.

[9] Sardanelli F, Giuseppetti GM, Panizza P, Bazzocchi M, Fausto A, Si G, Lattanzio V, Del Maschio A : Sensitivity of MRI versus mammography for detecting foci multifocal, multicentric breast cancer in fatty and dense breast using the whole-breast pathologic examination as a gold standard. Am J Roentgenol. 2004 oct ; 184 (4)/1149-57.

[10] Nakahara H, Namba K, Fukami A, Watanabe R, Maeda Y, Furusawa H, Mastu T, Akiyama F, Nakagawa H, Ifuku H, Nakahara M, Tamura S : Three-dimensional MR imaging of mammographically detected suspicious microcalcifications. Breast Cancer. 2001 ; 8 (2) : 116-24.

[11] Trecate G, Tess JD, Vergnaghi D, Bergonzi S, De Simone T, Mariani G, Musumeci R : Breast microcalcifications studied with 3D contrast-enhanced high-field magnetic resonance imaging : more accuracy in the diagnosis of breast cancer. Tumori. 2002 may-jun ; 88 (3) : 224-33.

[12] Tardivon AA, Guinebretiere JM, Dromain C, Vanel D : Imaging and management of nonpalpable lesions of breast. Eur J Radiol. 2002 apr ; 42 (1) : 2-9.

[13] Walter C, Scheidhauer K, Scharl A, Georing UJ, Theissen P, Kugel H, Krahe T, Pietrzyk U : Clinical and diagnostic value of preoperative MR mammography and FDG-PET in suspicious breast lesions. Eur Radiol. 2003 Jul ; 13 '7) : 1651-6.

[14] Behrenbruchu CP, Marias K, Armitage PA, Yam M, Moore N, English RE, Clarke J, Brady M : Fusion of contast-enhanced breast MR dans mammographic imaging date. Medical Image Analysis. Septembre 2003 ; 7 (3) : 311-40.

[15] Cancer du sein : les femmes surestiment les bénéfices du dépistage. Prescrire. Juin 2003 ; 23 (240) : 463-64.

[16] MRI better than mammography for detection of breast cancer ? The Lancet Oncology. 2004 ; 5 : 520.

* Montpellier, Nîmes, Limoges.

Figure 1 : Mammographie presque normale... A, B

Surdensité externe.

Masse hypoéchogéne à l'échographie (C)

Prise de contraste significative à l'IRM (D)

Cancer canalaire invasif

Figure 2 : Antécédents familiaux positifs.

Dystrophie fibro-kystique complexe à la mammographie (A)

et à l'échographie.

À l'IRM, prise de contraste avec pente significativesupéro-externe droite.

Repérage par échographie post IRM.

Carcinome canalaire in situ avec hyperplasie canalaire atypique .

LE FUTUR DE L'IRM EN SéNOLOGIE 557

Figure 3 : adénopathie axillaire. Échographie (A)

Mammographie non contributive(B)

À l'IRM, prise de contraste significative (C)

Repérage échographique post IRM.(D)

Cancer canalaire infiltrant.