Prise en charge chirurgicale des endométrioses
de la cloison recto-vaginale. À propos d'une série continue de 50 cas
Surgical
management of rectovaginal septum endometriosis from a continuous
series of 50 cases
O. CAMAGNAa *, C. DHAINAUTa,
O. DUPUISb, E. SONCINI a, B. MARTINc,
L. PALAZZO d, D. CHOSIDOWe, P. MADELENATa
Résumé
Objectifs
Déterminer l'apport de l'IRM et de l'EESAR
au diagnostic et au pronostic chirurgical de l'endométriose de la cloison recto-vaginale
et analyser la prise en charge chirurgicale pour en évaluer les résultats
fonctionnels et les complications.
Patientes et méthodes
Série rétrospective continue de 50 patientes
opérées pour suspicion clinique d'endométriose de la cloison recto-vaginale.
39 patientes ont eu une IRM, 31 une EESAR et 28 les deux examens. Toutes les patientes
ont eu une dissection complète de la cloison recto-vaginale et l'ensemble des
lésions a été réséqué.
Résultats
Pour le diagnostic de nodule endométriosique
de la cloison recto-vaginale, les résultats de l'IRM sont : sensibilité
73 %, spécificité 50 %, VPP 89 %, VPN 25 % ; pour l'infiltration des ligaments
utéro-sacrés : sensibilité 84 %, spécificité 95 %, VPP
94 %, VPN 86 % et pour l'infiltration de la paroi rectale : sensibilité 53
%, spécificité 82%, VPP 69 %, VPN 69%. Les résultats de l'EESAR,
pour le diagnostic de nodule de la cloison recto-vaginale sont : sensibilité
93 %, spécificité 100 %, VPP 100 %, VPN 50 % et pour l'infiltration de
la paroi rectale : sensibilité 100 %, spécificité 71 %, VPP 81 %,
VPN 100 %. L'EESAR apparaît plus sensible que l'IRM pour détecter une
infiltration de la paroi rectale (p = 0,002) et pour le diagnostic de nodule de
la cloison recto-vaginale (p = 0,03).
89 % de ces patientes ont eu une
clioscopie première et 15 laparoconversions ont été effectuées,
dont 11 pour réaliser une résection digestive : 45 nodules ont été
retrouvés. Dans 43 cas, le nodule a été réséqué, associé
à 19 résections digestives, 30 colpectomies et 22 résections de ligaments
utéro-sacrés. Deux patientes ont refusé la réalisation d'une
résection digestive et leur nodule a dû être laissé en place.
Trois patientes ont nécessité la réalisation d'une intervention de
Hartmann secondaire et drainage pelvien par Mickulcz pour péritonite. 41 nodules
étaient des nodules d'endométriose floride : dans les 2 autres cas il
s'agissait de nodules de fibrose. Trente-trois patientes ont été interrogées
sur l'évolution de leurs douleurs avec un recul moyen de 20 mois : 90 % sont
satisfaites du résultat de leur prise en charge.
Discussion et conclusions
Nos résultats confirment l'intérêt
de l'IRM pour le diagnostic d'endométriose de la cloison recto-vaginale et
des ligaments utéro-sacrés ; valident l'EESAR pour affirmer le diagnostic
de nodule de la cloison recto-vaginale et mettent en évidence sa capacité
à faire le diagnostic d'une infiltration associée de la paroi rectale.
Le traitement chirurgical des nodules
sans infiltration digestive est réalisé par voie clioscopique ou clio-vaginale
mais en cas d'infiltration digestive, la laparotomie est actuellement privilégiée
pour réaliser l'exérèse complète des lésions. Les complications,
en particulier les péritonites, sont peu fréquentes. Nos données
confirment l'efficacité du traitement chirurgical radical pour l'amélioration
de la symptomatologie douloureuse. Les résultats sur la fertilité semblent
satisfaisants mais les risques de complications incitent à la prudence
dans cette indication.
L'examen clinique en période cataméniale
est essentiel pour évoquer le diagnostic. L'IRM permet de réaliser une
cartographie de l'ensemble des lésions sous-péritonéales et l'EESAR
permet de diagnostiquer un envahissement de la paroi rectale. L'association pré-opératoire
de ces deux examens est actuellement indispensable à la prise en charge chirurgicale
de ces patientes qui consiste en l'exérèse complète des lésions
endométriosiques et est efficace sur les douleurs et l'infertilité. Les
complications sont rares mais sévères et justifient une prise en charge
dans un centre spécialisé.
Mots clés : endométriose
profonde ; cloison recto-vaginale ; IRM ; écho-endosonographie ano-rectale ;
cliochirurgie
Abstract
Objectives
To assess the value of MRI and ARES for the diagnosis
and surgical prognosis of rectovaginal septum endometriosis and to analyse the surgical
management in order to evaluate its functional results and complications.
Patients and methods
Retrospective study of 50 consecutive patients
operated for a clinical presumption of endometriosis nodule of the recto vaginal
septum. 39 patients had a MRI, 31 an ano-rectal endosonography (ARES) and 28 both
exams. All the patients had a complete dissection of the rectovaginal septum and
all lesions were excised.
Results
For the diagnosis of rectovaginal septum endometriosis
nodule, MRI results are: sensitivity 73 %, specificity 50%, positive predictive
value (PPV) 89 %, negative predictive value (NPV) 25%; for uterosacral ligaments
involvement: sensitivity 84 %, specificity 95 %, PPV 94 %, NPV 86 % and for rectal
wall infiltration: sensitivity 53 %, specificity 82 %, PPV 69%, NPV 69%. The ARES
results for diagnosis of rectovaginal septum endometriosis nodule are: sensitivity
93 %, specificity 100 %, PPV 100 %, NPV 50 % and for rectal wall infiltration: sensitivity
100 %, specificity 71 %, PPV 81 %, NPV 100 %. ARES appeared more sensitive than
MRI for the detection of rectal wall infiltration (p = 0.002) and for rectovaginal
septum endometriosis nodule diagnosis (p = 0.03).
89 % of the patients had a celioscopy
in first intention and 15 laparoconversions were performed, 11 in order to perform
a digestive resection: 45 nodules were found. In 43cases the nodule was excised,
associed to 19 digestive resections, 30 colpectomys, and 22 uterosacral ligaments
resections. 3 patients required an additional surgical treatment by Hartman's procedure
with Mickulicz's drainage for peritonitis.41 nodules were endometriosis nodules:
the 2 other cases were fibrosis nodules. 33 patients were interviewed about the
evolution of their pains over a mean history of 20 months: 90 % of the patients
were satisfied with the management results.
Discussion and conclusions
Our data support the efficiency of MRI for rectovaginal
septum endometriosis nodule and uterosacral ligaments involvement diagnosis ; accord
ARES to rectovaginal septum endometriosis nodule diagnosis and its reliability in
establishing a diagnosis of rectal wall involvement.
The surgical cure of recto vaginal
septum nodules without digestive infiltration is performed by coelioscopic or coelio-vaginal
procedure, but in case of associated digestive affliction, laparotomy is actually
the standard procedure in order to achieve a complete cure of the lesions. Complications,
in particular peritonitis, are not frequent. Our data support the efficiency of
radical surgical treatment for the improvement of pain symptoms. Results on fertility
seem to be satisfactory, but complications risks suggest being careful in this indication.
Clinical examination during a catamenial
period is essential in order to evoke the diagnosis. MRI yields a complete map of
the sub-peritoneal and peritoneal lesions and ARES allows for the diagnosis of an
infiltration of the rectal wall. Pre-operative association of those two exams is
actually indispensable for the surgical management of those patients, which consists
in complete excision of endometriosical lesions and is efficient at treating pain
symptoms and fertility. Complications are rare but severe therefore justifying a
cure in specialised centers.
Keywords: deep endometriosis; rectovaginal
septum; MRI; ano-rectal endosonography; operative laparoscopy
Introduction
L'endométriose de la cloison recto-vaginale
appartient aux endométrioses profondes, définies par l'infiltration sur
plus de 5 mm en profondeur de l'espace sous-péritonéal par du tissu endométrial
[1-3]. La prévalence de ces dernières, étudiée par Koninckx
sur une série de 1 252 clioscopies réalisées pour douleurs
pelviennes associées ou non à une infertilité serait de 16,8 % en
présence de douleurs, de 5,8 % en cas d'infertilité et de 26,3 % en cas
d'association des deux [4]. Parmi celles-ci, la localisation à la cloison recto-vaginale
serait la plus fréquente [2,3,5] mais il n'existe pas de consensus sur ce point
[6].
Le maître symptôme de l'endométriose
de la cloison recto-vaginale est la douleur, dont la prévalence et l'intensité
pourraient dépendre de la profondeur d'infiltration [2,3]. La symptomatologie
associe à des degrés divers des douleurs « gynécologiques »
(dysménorrhée, dyspareunie profonde, douleurs pelviennes chroniques) et
un syndrome rectal (douleurs à irradiation anale, rectorragie, dyschésie,
épreinte cataméniale). Les résultats positifs sur la fertilité
de l'excision des lésions profondes sont en faveur d'une relation de cause
à effet [5,7-12].
Le diagnostic clinique est facilité
par l'examen en période cataméniale [13] et un interrogatoire orienté
[14], mais il est insuffisant pour évaluer l'étendue des lésions
sous-péritonéales [15]. Les examens complémentaires pour le diagnostic
et le pronostic chirurgical ont été peu étudiés : l'IRM et l'écho-endosonographie
ano-rectale (EESAR) sont en cours d'évaluation [16-20].
Le traitement est chirurgical et consiste
en l'exérèse de toutes les lésions endométriosiques [5-12,21-26].
Le premier but de cette étude
est de déterminer l'apport de l'IRM et de l'EESAR au diagnostic et au pronostic
chirurgical de l'endométriose de la cloison recto-vaginale.
Son deuxième but est d'analyser
la prise en charge chirurgicale pour en évaluer les résultats fonctionnels
et les complications.
Patientes et méthodes
Patientes
Cinquante patientes ont été opérées
dans le service de gynécologie-obstétrique de l'hôpital Bichat-Claude-Bernard
entre janvier 1998 et octobre 2001 pour une suspicion clinique de nodule endométriosique
de la cloison recto-vaginale.
L'âge moyen des patientes au moment
de l'intervention était de 32 ans (20-50), pour une taille moyenne de 164 cm
(150-173), un poids de 58,7 kg (47-80) soit un BMI moyen de 21,8 kg/m2.
Toutes les patientes consultaient pour des douleurs pelviennes invalidantes : 42
patientes présentaient une dysménorrhée sévère (84 %),
38 des dyspareunies (76 %), 29 des dyschésie (58 %) et 35 des douleurs permanentes
(70 %). La parité moyenne était de 0,56 (0-3) et la gestité moyenne
de 0,74 (0-5). Quarante et une patientes (82 %) déclaraient désirer une
grossesse dans l'avenir, dont 29 nullipares (58 %). Quatorze patientes présentaient
une infertilité associée (28 %).
Quarante et une patientes avaient eu
préalablement une ou plusieurs clioscopies (82 %), avec une moyenne de 2,5
clioscopies par femme (1 à 5) pour douleurs pelviennes et/ou endométriose,
dont 66 % nécessitant une ou plusieurs exérèses chirurgicales. Six
patientes avaient déjà eu une prise en charge chirurgicale pour endométriose
profonde (4 de la cloison recto-vaginale et 2 des ligaments utéro-sacrés).
Trente-six (72 %) avaient déjà reçu un traitement par analogues de
la LH-RH pendant une durée moyenne de 7,2 mois (1-24), en une à trois
cures.
À l'examen clinique, 49 patientes
présentaient une lésion perceptible au niveau de la cloison recto-vaginale,
dont 45 nodules individualisables (90 %). Dans un cas, la lésion méconnue
cliniquement a été découverte au début de la procédure
clioscopique par le toucher vaginal sous anesthésie générale combiné
à la palpation endoscopique mais la patiente se plaignait de douleurs évocatrices
d'endométriose de la cloison recto-vaginale.
Méthodes
Quarante-deux patientes ont bénéficié
d'une exploration pré-opératoire (84 %) : 39 par IRM, 31 par EESAR et
28 par ces 2 examens. Les résultats ont été colligés à
partir des comptes rendus d'examen fournis par les praticiens ayant réalisé
les explorations, et ont été confrontés aux résultats histologiques
:
- le radiologue
devait explorer la cloison recto-vaginale à la recherche ou par la confirmation
d'un nodule, et faire le bilan des lésions péritonéales et sous-péritonéales
: existe-t-il un nodule de la cloison recto-vaginale, un envahissement de la paroi
digestive, une atteinte des ligaments utéro-sacrés, des endométriomes
? Toutes les IRM ont été réalisées à 1,5 tesla, avec une
antenne de surface "phased array". Les coupes effectuées ont été
des coupes de 4 à 6 mm d'épaisseur, sagittales et axiales en pondération
T2 et avec suppression de graisse, axiales en pondération T1 ;
- le gastro-entérologue
réalisant l'écho-endosonographie ano-rectale (EESAR) devait préciser
s'il existait une atteinte de la cloison recto-vaginale et s'il y avait un envahissement
associé de la paroi rectale. Les EESAR ont été réalisées
avec un écho-endoscope OLYMPUS GF UM 20 ou EUM 20, de 11 mm de diamètre
et utilisant des fréquences de 7,5 et 12 MHz, sans anesthésie, après
préparation par deux lavements évacuateurs. Le capteur était positionné
au niveau de la charnière recto-sigmoïdienne puis retiré progressivement
en étudiant les parois sigmoïdiennes et rectales, la cloison recto-vaginale
et le canal anal. Les ligaments utéro-sacrés n'ont pas été systématiquement
explorés lors de cet examen.
L'information à fournir aux patientes
est déduite des résultats de cette étude. Le bénéfice attendu
pour la patiente lui est exposé en fonction de sa demande, puis les risques
encourus en fonction des gestes prévisibles lui sont présentés. Si
la patiente désire une prise en charge chirurgicale, l'intérêt des
examens complémentaires est présenté, puis ils sont réalisés.
Lors d'une seconde consultation, avec les résultats de ces examens, on précise
l'information sur les gestes à réaliser, la voie d'abord prévisible
ainsi que les possibles complications.
Toutes les patientes ont été
opérées après une préparation digestive (régime sans résidu
les 5 jours précédant l'intervention, 2 litres de COLOPEG‚ (Laboratoires
NCHOLAS, Gaillard) puis une dose adulte de lavement NORMACOL‚ (Laboratoires
NORGAN, Paris) le soir de l'hospitalisation. Il n'a pas été prescrit de
préparation systématique par analogues de la LH-RH ou par progestatif,
ces traitements n'ayant pas fait la preuve formelle de leur intérêt dans
cette indication [24].
En cas d'antécédents de prise
en charge chirurgicale lourde pour endométriose profonde et d'atteinte rectale
suspectée lors de l'EESAR, une laparotomie a été pratiquée d'emblée
: dans tous les autres cas, une clioscopie a été réalisée dans
le premier temps opératoire afin de préciser le bilan complet des lésions
et d'établir une évaluation selon la classification rAFS [27].
Une dissection complète de la
cloison recto-vaginale a été systématiquement conduite chez toutes
les patientes avec résection de toutes les lésions visibles ou palpées
:
- le premier
temps opératoire était un clivage recto-vaginal de proche en proche jusqu'au
sommet du nodule. Si celui-ci n'infiltrait pas la paroi rectale, il était libéré
de la face antérieure du rectum jusqu'à son pôle inférieur.
Le clivage peut être plus aisé par voie vaginale, après une colpotomie
postérieure ;
- le deuxième
temps opératoire consistait à libérer les faces latérales du
nodule en ouvrant les fosses pararectales. Il faut pour cela repérer les uretères
sur tout leur trajet pelvien : une urétérolyse était souvent nécessaire.
Si la paroi rectale était envahie, la dissection se poursuivait plan par plan
: si la séreuse était envahie, elle seule était réséquée
; si la musculeuse était envahie, elle était réséquée sans
ouvrir la lumière digestive ; et si la sous-muqueuse était envahie, on
réalisait une résection de la face antérieure du rectum. En cas d'atteinte
étendue de la paroi rectale ou de nodules sigmoïdiens ou rectaux associés,
une résection segmentaire sigmoïdo-rectale de hauteur déterminée
par l'atteinte digestive était réalisée en collaboration avec le
chirurgien digestif. La paroi rectale était considérée comme infiltrée
quand une résection de la musculeuse rectale au minimum était nécessaire
à l'exérèse complète du nodule. Après une résection
localisée de musculeuse rectale, une suture de celle-ci par des points séparés
de Vicryl 3/0 était effectuée ;
- le troisième
temps consistait en la libération du nodule de la face postérieure du
vagin : si ce geste était impossible, une colpectomie emportant le nodule était
réalisée, cas le plus fréquemment rencontré ;
- le dernier
temps opératoire consistait à vérifier le site opératoire et
à réaliser l'exérèse de toutes les lésions péritonéales,
ovariennes et sous-péritonéales associées si celles-ci n'avaient
pas été réséquées au début de l'intervention ;
- on s'assurait
visuellement de l'intégrité des uretères, en utilisant parfois l'injection
intraveineuse de carmin indigo et le contrôle cystoscopique de l'éjaculation
urétérale bilatérale. L'intégrité du rectum ou l'étanchéité
des sutures étaient vérifiées par l'injection de bleu de méthylène
dans l'ampoule rectale en fin d'intervention.
Seules les lésions d'endométriose
profonde infiltrant le septum recto-vaginal anatomique ont été considérées
comme des nodules de la cloison recto-vaginale. Ces lésions sont distinctes
des atteintes des ligaments utéro-sacrés, mais en cas de lésion très
volumineuse, une infiltration par contiguïté pouvait engendrer une certaine
confusion : en l'absence de localisation endométriosique dans la cloison recto-vaginale
lors de la dissection, l'exploration a été considérée comme
négative. Les patientes présentant une endométriose profonde d'un
ou des ligaments utéro-sacrés isolée suspectée en pré-opératoire
n'ont pas été incluses, qu'il y ait ou non infiltration vaginale ; en
cas de découverte per-opératoire, l'exploration a été considérée
comme négative. Les patientes opérées pour endométriose digestive
localisée hors des limites de la cloison recto-vaginale n'ont pas été
incluses.
Le recueil des résultats fonctionnels
à distance de l'intervention était fait à l'aide d'un questionnaire
standardisé. Il a été demandé aux patientes si leurs symptômes
ont été améliorés de façon modérée, importante,
complète ou insuffisante par l'intervention. Il n'a pas été utilisé
d'échelle visuelle analogique de la douleur.
Le test du chi-2 de Pearson a été
utilisé pour les comparaisons (a = 0,05).
Résultats
Sur 50 patientes opérées pour une présomption
de nodule endométriosique de la cloison recto-vaginale, 45 étaient effectivement
porteuses de la lésion.
Dans 5 cas, il n'a pas été
retrouvé de nodule de la cloison recto-vaginale : un cas de faux-positif de
l'examen clinique (pas de lésions à l'IRM), et quatre cas de faux-positifs
de l'association clinique-IRM. Dans deux de ces cinq cas il s'agissait de
patientes ayant déjà eu une prise en charge chirurgicale pour exérèse
d'une endométriose sous-péritonéale : un nodule de la cloison recto-vaginale
pour l'une et du ligament utéro-sacré droit pour la seconde.
Examens complémentaires
IRM
Trente-neuf patientes ont bénéficié
de cette exploration (Tableau 1).
Reconnaissance du nodule endométriosique
de cloison recto-vaginale
Vingt-quatre IRM en faveur du diagnostic
ont été confirmées chirurgicalement (vrais-positifs). Dans 9 cas,
il a été retrouvé un nodule lors de l'exploration chirurgicale alors
que l'IRM n'en avait pas visualisé (faux-négatifs). Dans 2 cas, les nodules
non vus à l'IRM étaient des nodules de fibrose et dans 1 cas, l'absence
de nodule a été confirmée lors de l'exploration chirurgicale malgré
une suspicion clinique (vrais-négatifs). Dans 3 cas, malgré une IRM en
faveur du diagnostic, il n'a pas été trouvé de nodule lors de la
dissection de la cloison recto-vaginale (faux-positifs).
Reconnaissance de l'infiltration de
la paroi rectale
Neuf IRM en faveur du diagnostic d'infiltration
ont été confirmées chirurgicalement (vrais-positifs). Dans 8 cas,
il a été retrouvé une infiltration digestive lors de l'exploration
chirurgicale alors que l'IRM n'en avait pas visualisé (faux-négatifs).
Dans 18 cas l'absence d'infiltration a été confirmée lors de l'exploration
chirurgicale (vrais-négatifs). Dans 4 cas, malgré une IRM en faveur du
diagnostic, il n'a pas été retrouvé d'infiltration lors de l'exérèse
du nodule de la cloison recto-vaginale (faux-positifs).
Reconnaissance de l'atteinte des ligaments
utéro-sacrés
Seize IRM en faveur du diagnostic ont
été confirmées chirurgicalement (vrais-positifs). Dans 3 cas, il
a été retrouvé une infiltration de ligaments utéro-sacrés
lors de l'exploration chirurgicale alors que l'IRM n'en avait pas visualisé
(faux-négatifs). Dans 19 cas l'absence d'infiltration a été confirmée
lors de l'exploration chirurgicale (vrais-négatifs). Dans 1 cas, malgré
une IRM en faveur du diagnostic, il n'a pas été retrouvé d'infiltration
des ligaments utéro-sacrés (faux-positif). Il faut cependant rappeler
que la corrélation anatomopathologique n'est pas parfaite dans cette étude
parce que les ligaments sains à l'exploration chirurgicale ont été
laissés en place.
EESAR
Trente et une patientes ont bénéficié
de cette exploration (Tableau 2).
Reconnaissance du nodule de la cloison
recto-vaginale
Vingt-sept EESAR en faveur du diagnostic
ont été confirmées chirurgicalement (vrais-positifs). Les deux nodules
non détectés (faux-négatifs), étaient des nodules isolés,
mesurant environ 2 cm, situés dans le tiers supérieur de la cloison recto-vaginale,
sans envahissement de la paroi rectale. Ces nodules étaient suspectés
au toucher vaginal et à l'IRM. Dans 2 cas, l'absence de nodule de la cloison
recto-vaginale a été confirmée lors de l'exploration chirurgicale
(vrais-négatifs). Il n'y a pas eu de faux-positifs dans cette série.
Reconnaissance de l'infiltration de
la paroi rectale
Dix-sept EESAR en faveur de l'infiltration
ont été confirmées chirurgicalement (vrais-positifs). Dans quatre
cas, la suspicion d'infiltration rectale à l'EESAR n'a pas été confirmée
(faux-positifs). Dans 10 cas, l'absence d'infiltration de la paroi digestive a été
confirmée lors de l'exploration chirurgicale (vrais-négatifs). Il n'y
a pas eu de faux-négatifs dans cette série.
IRM et EESAR
Vingt-huit patientes ont bénéficié
de ces deux explorations (Tableau 3).
Il est possible de comparer les performances
de l'IRM et de l'EESAR dans leurs indications communes soit la reconnaissance du
nodule et l'infiltration digestive.
Pour l'identification du nodule
de la cloison recto-vaginale les différences constatées entre les deux
examens sont significativement en faveur d'une supériorité de la sensibilité
de l'EESAR sur l'IRM (p = 0,03) (spécificité, p = 0,15 ; VPP, p =
0,26 ; VPN, p = 0,08).
Pour la reconnaissance de l'infiltration
de la paroi rectale, la sensibilité de l'EESAR est significativement supérieure
à celle de l'IRM (p = 0,002) ainsi que sa valeur prédictive négative
(p = 0,02) mais non la spécificité (p = 1, identique) ou la valeur prédictive
positive (p = 0,48).
Résultats chirurgicaux
Dans 5 cas, il n'a pas été retrouvé
de nodule de la cloison recto-vaginale lors de l'exploration chirurgicale. Dans
45 cas il a été retrouvé un nodule de la cloison recto-vaginale -
cas précisément étudiés ci-après. La durée opératoire
moyenne a été de 237 minutes (110-540) et la durée d'hospitalisation
de 7,9 jours (2-22).
Voie d'abord et exploration
Cinq laparotomies premières ont
été réalisées chez des patientes qui associaient des antécédents
de prise en charge chirurgicale lourde pour endométriose profonde et une atteinte
rectale suspectée lors de l'EESAR. Quarante patientes ont eu une clioscopie
première (89 %). Quinze laparoconversions ont été réalisées
: 3 pour une complication per-opératoire (2 emphysèmes sous-cutanés
et 1 plaie de veine utérine), 1 devant la complexité de la dissection
et 11 pour réaliser une résection digestive. Dans 19 cas (42 %), un abord
vaginal a été associé à la clioscopie. Le traitement complet
a été possible par clioscopie seule dans 6 cas (Fig. 1). Au total, une
laparotomie a été nécessaire dans 20 cas (44 %), dont 16 en raison
d'une atteinte digestive. Le score rAFS moyen est de 35,3 (2-128). Les formes classées
modérées et sévères sont les plus fréquemment rencontrées
(66 % des cas).
Gestes liés à l'exérèse
du nodule de la cloison recto-vaginale
Sur
45 nodules, il y a eu 43 exérèses complètes. Deux patientes avaient
exprimé en pré-opératoire un refus des gestes extensifs pouvant menacer
leur fertilité ultérieure : une résection digestive étendue
aurait été nécessaire pour obtenir une exérèse complète
des lésions endométriosiques. Il avait été décidé
en pré-opératoire de surseoir si cette circonstance était rencontrée
et d'attendre qu'elles aient réalisé leur désir de grossesse.
Une résection digestive
a été nécessaire dans 19 cas (44 %) dont 16 par laparotomie : 5 résections
segmentaires recto-sigmoïdiennes, 5 résections de la paroi antérieure
du rectum (musculeuse et muqueuse) et 9 résections de la seule musculeuse rectale.
Trois patientes ont eu une dérivation digestive (stomie) : 2 afin de protéger
l'anastomose recto-sigmoïdienne, et une en raison d'une résection de la
paroi antérieure du rectum sur une longueur de 10 cm. Une colpectomie a été
réalisée dans 30 cas (70 %) (Tableau 4).
Seules 10 patientes (23 %) avaient
un nodule isolé : de nombreux gestes associés ont été nécessaires
pour réaliser l'exérèse de toutes les lésions endométriosiques
péritonéales et sous-péritonéales associées (Tableau 5).
Complications
Trois complications postopératoires
à court terme ont nécessité la réalisation d'intervention de
Hartmann avec drainage pelvien par Mickulicz :
- une péritonite
par perforation sigmoïdienne probablement ischémique : il n'y avait pas
d'infiltration rectale lors de l'exérèse du nodule de la cloison recto-vaginale
et il n'y avait pas eu de résection de la paroi rectale. Reprise chirurgicale
à J7 devant une défense pelvienne fébrile avec fuite de produit de
contraste au lavement hydrosoluble ;
- une péritonite
par fistule de l'anastomose colo-rectale d'une résection recto-sigmoïdienne,
réalisée après laparoconversion devant une infiltration rectale par
un nodule endométriosique de la cloison recto-vaginale, découverte à
J7 devant une défense pelvienne fébrile ;
- une fistule
recto-vaginale par désunion de la suture rectale antérieure découverte
à J7 devant des pertes vaginales fécaloïdes associées à
une défense pelvienne.
Une patiente a eu un hématome
du cul-de-sac de Douglas évacué par voie vaginale.
Une patiente a nécessité
des dilatations rectales pour une sténose rectale secondaire à une résection
antérieure du rectum sur 10 cm.
Constatations anatomopathologiques
Dans 5 cas, il n'a pas été
retrouvé de nodule de la cloison recto-vaginale lors de l'exploration chirurgicale.
Dans deux autres cas, le nodule, confirmé lors de la clioscopie, a été
laissé en place devant le refus des patientes de subir une résection digestive.
Ainsi, sur les 50 patientes initiales, 43 nodules de la cloison recto-vaginale ont
été réséqués.
Quarante-et-un des 43 nodules réséqués
étaient endométriosiques. Deux patientes avaient un nodule de la cloison
recto-vaginale avec atteinte des ligaments utéro-sacrés et du vagin, sans
infiltration rectale qui se sont révélés à l'examen histologique
des nodules de fibrose, sans lésions d'endométriose. Ces patientes n'avaient
eu aucune résection d'endométriose sous-péritonéale dans leurs
antécédents chirurgicaux.
L'anatomopathologie a confirmé
la nature endométriosique des lésions dans les 19 résections rectales
: elles infiltrent toutes la musculeuse rectale mais il n'y a pas d'atteinte de
la muqueuse rectale dans cette série. Il faut rappeler qu'aucune patiente ne
présentait de rectorragies cataméniales.
Résultats fonctionnels
Trente-trois patientes (75 %) ont pu
être interrogées sur l'évolution de leurs douleurs avec un recul
moyen de 20 mois (9-35 mois) : 90 % des patientes étaient satisfaites de l'opération
subie (Tableau 6). Ces résultats montrent une amélioration significative
(p < 0,0001) de la symptomatologie algique des patientes après la résection
chirurgicale des lésions. Dix-sept des 19 patientes ayant une atteinte digestive
ont pu être contactées et sont toutes très satisfaites des résultats
de l'intervention.
Discussion
Examens complémentaires
L'examen clinique permet d'évoquer le diagnostic
mais apparaît insuffisant pour préciser l'étendue des lésions
sous-péritonéales et péritonéales ainsi que l'infiltration éventuelle
du rectum [15]. Les implications thérapeutiques justifient des explorations
pré-opératoires lourdes pour préciser au mieux à la patiente
la méthodologie opératoire, ses possibilités et ses risques.
IRM
Les résultats disponibles pour
évaluer l'intérêt de l'IRM dans l'exploration des endométrioses
sous-péritonéales sont regroupés dans le Tableau 7.
- Dans notre
expérience l'IRM permet de confirmer le diagnostic de nodule endométriosique
de la cloison recto-vaginale de façon relativement performante (Tableau 1).
Dumontier [18] a réalisé, avant cette étude, la seule évaluation
précise de l'IRM dans cette indication : 48 patientes ayant une endométriose
pelvienne symptomatique, explorée par IRM et EESAR en pré-opératoire
ont été opérées avec exérèse complète des lésions
: 6 patientes présentaient une endométriose de la cloison recto-vaginale.
Les performances de l'IRM dans ce travail ont été médiocres : 4 nodules
ont été mis en évidence et le diagnostic a été porté
à tort dans 5 cas (sensibilité de 66 % et spécificité de 88
%).
- Dans notre
expérience, l'IRM a été peu performante pour diagnostiquer l'infiltration
rectale (Tableau 1). Kinkel a réalisé une étude rétrospective
sur une population de 20 patientes présentant une suspicion clinique d'endométriose
profonde des ligaments utéro-sacrés et ayant eu une IRM avant résection
chirurgicale : trois patientes avaient une atteinte rectale confirmée chirurgicalement
mais le diagnostic n'avait été évoqué que dans un cas par l'IRM.
Dumontier [18] retrouve seize patientes présentant une atteinte digestive lors
de l'exploration chirurgicale dont douze ont eu une résection digestive avec
confirmation histologique de l'atteinte (4 refus du geste) : le diagnostic n'avait
été suspecté que dans huit cas par l'IRM (sensibilité 75 %,
spécificité 100 %).
- Dans notre
expérience, l'IRM est très satisfaisante pour faire le diagnostic de l'atteinte
des ligaments utéro-sacrés (Tableau 1), résultats comparables à
ceux de la littérature [17,18].
EESAR
Les résultats disponibles pour
évaluer l'intérêt de l'EESAR dans l'exploration de l'endométriose
de la cloison recto-vaginale sont regroupés dans le Tableau 8.
- Dans notre
expérience, les résultats de l'EESAR sont très satisfaisants pour
la détection des nodules (Tableau 2), confirmant les résultats de la littérature
: Fedele [16] a réalisé une étude portant sur 102 patientes opérées
pour endométriose et ayant eu une EESAR pré-opératoire systématique
: 34 présentaient une infiltration de la cloison recto-vaginale confirmée
chirurgicalement dans 33 cas. Mais dans cette étude, seules les patientes ayant
une EESAR en faveur de la localisation recto-vaginale ont eu une dissection de la
cloison à la recherche d'une lésion. Pour Dumontier [18], l'EESAR est
plus apte à détecter les nodules avec atteinte digestive associée
que les nodules isolés ; de fait 3 nodules isolés ont été méconnus
sur 6 retrouvés : sensibilité 50 %, spécificité 100 %.
- L'ensemble
des auteurs [16,18,28-31] rapportent des résultats concordants en faveur de
la fiabilité de l'EESAR pour établir le diagnostic d'endométriose
digestive (sensibilité de 100 %, spécificité 91 à 100 %). Dans
notre étude, elle a corrigé les 7 faux-négatifs de l'IRM et est significativement
plus performante pour diagnostiquer ou préciser l'éventuelle infiltration
rectale associée à un nodule endométriosique recto-vaginal.
La fréquence importante de lésions
endométriosiques sous-péritonéales et péritonéales associées
incite à réaliser l'IRM et l'EESAR dans le bilan pré-opératoire,
pour apprécier au mieux l'étendue des résections à prévoir
et en informer précisément la patiente : il s'agit d'une pathologie bénigne
et la patiente peut légitimement décider de surseoir à l'intervention
si elle estime que ses douleurs ne justifient pas le risque chirurgical.
Résultats chirurgicaux
En présence d'un nodule de la cloison recto-vaginale
sans infiltration digestive, la prise en charge clioscopique ou coelio-vaginale
est la plus couramment réalisée dans les centres habitués à
ces cas [5-7, 21, 24, 26]. En cas d'atteinte digestive associée, la voie coelioscopique
à été proposée [12, 21, 23] mais la laparotomie est privilégiée
à ce jour pour réaliser les résections nécessaires [6, 8, 26,
32-46]. L'exérèse complète de l'ensemble des lésions est nécessaire
pour obtenir la sédation des symptômes à long terme en cas d'endométriose
de la cloison recto-vaginale [5-9, 12, 18-26, 32, 47, 48] et d'endométriose
digestive [32-46, 49-55]. Dans notre expérience, l'endométriose des ligaments
utéro-sacrés est plus fréquente que celle de la cloison recto-vaginale,
ce qui est en accord avec les publications de Chapron [6,11,56] : en cas d'infiltration,
la résection est indispensable. Une urétérolyse doit être réalisée
si les uretères sont mal visualisés ou en cas de lésions latéralisées,
en particulier s'il existe une atteinte associée des ligaments utéro-sacrés
et de la cloison recto-vaginale [6, 8, 12, 24, 25, 47]. Une colpectomie est très
souvent nécessaire à l'exérèse complète des lésions
[5, 6, 8, 12, 21, 24, 26]. Il est essentiel, à notre avis, de réaliser
une exérèse complète des lésions endométriosiques pour
obtenir une sédation de la symptomatologie douloureuse. Dans notre expérience,
les patientes ayant eu un traitement incomplet (en accord avec la patiente qui ne
désirait pas prendre les risques d'une chirurgie radicale) ont une récidive
douloureuse précoce.
Cette option semble plus discutable
si la demande de la patiente est plus orientée vers un désir de grossesse,
même si les résultats sur la fertilité semblent satisfaisants (taux
de grossesse de 33 à 70 %) [7, 8, 10, 12] ainsi que ceux de la fécondation
in vitro dans cette indication [57]. En effet, les complications, en particulier
les péritonites, sont peu fréquentes [12, 13, 24, 35, 37,38, 44] mais
graves pour une pathologie fonctionnelle et incitent à réaliser ces interventions
dans des centres les pratiquant régulièrement car elles éloignent
le projet de grossesse et les séquelles adhérentielles sont susceptibles
de compliquer la prise en charge en assistance médicale à la procréation
(AMP), en particulier pour la réalisation des ponctions ovocytaires. De plus,
durant la grossesse, on observe une diminution de la symptomatologie douloureuse.
Certaines de nos patientes, informées
des risques opératoires ont préféré soit attendre d'avoir obtenu
au moins un enfant, soit avoir un geste le plus complet possible sans résection
digestive. Dans ce cas, le traitement des seules lésions intrapéritonéales
par voie clioscopique a été proposé, associé à une prise
en charge en AMP. Ce type de décision n'est possible qu'après une information
précise, argumentée par les examens complémentaires et l'expérience
du praticien.
Le score rAFS, dans sa conception,
ne prend pas en compte les lésions sous-péritonéales et l'ensemble
des auteurs trouvent en majorité une endométriose péritonéale
modérée à sévère associée au nodule de la cloison
recto-vaginale [6-8], en dehors de Koninckx [24] qui a une prédominance de
formes minimes et légères. Koninckx a proposé en 1992 une classification
de l'endométriose profonde [4] mais celle-ci est peu utilisée actuellement.
Il est donc difficile de comparer les expériences des différents auteurs
: tout le monde parle-t-il de la même pathologie ? On peut être surpris
de constater que Donnez ne rapporte quasiment aucune infiltration digestive sur
500 résections d'endométriose de la cloison recto-vaginale [26] alors
que ce cas se rencontre dans 44 % de notre série, même s'il ne les recherche
pas de façon « agressive ».
Alors que les thérapeutiques médicales
ne font que suspendre les symptômes, le traitement chirurgical est efficace
pour l'amélioration de la symptomatologie douloureuse (89 à 100 % des
patientes améliorées) [6-8, 12, 24, 26], ce qui est essentiel dans cette
pathologie fonctionnelle (Tableau 9).
Conclusion
Ce diagnostic peu connu doit être évoqué
dès l'interrogatoire devant un syndrome douloureux pelvien chronique, en particulier
en présence d'une dyspareunie et d'une dyschésie. L'examen clinique en
période cataméniale est essentiel pour renforcer l'hypothèse diagnostique.
La réalisation pré-opératoire
d'une IRM permet d'établir une cartographie complète des lésions
sous-péritonéales (cloison recto-vaginale, ligaments utéro-sacrés,
vessie et uretères) et péritonéales (endométriomes, implants
péritonéaux) ; l'EESAR permet le diagnostic d'une infiltration de la paroi
rectale de façon fiable et confirme la présence d'un nodule de la cloison
recto-vaginale. Ces données permettent au chirurgien de prévoir les gestes
nécessaires au traitement complet, en particulier les exérèses digestives,
et d'en informer la patiente pour qu'elle puisse adhérer au traitement chirurgical.
Si la demande essentielle de la patiente est la prise en charge de sa symptomatologie
douloureuse, une chirurgie radicale lui est proposée ; si sa demande est principalement
dirigée vers l'obtention d'une grossesse, une prise en charge préalable
par assistance médicale à la procréation est effectuée : la
chirurgie sera rediscutée secondairement ou en cas d'échec. Le traitement
chirurgical est sûr dans une équipe habituée à cette prise en
charge. Les complications per-opératoires sont rares mais sont à mettre
en parallèle avec la complexité et la diversité des gestes à
réaliser, la nécessaire expérience des opérateurs, justifiant
la prise en charge dans des centres spécialisés. Les complications postopératoires
sont peu fréquentes mais très sévères et leurs conséquences
sur la fertilité de ces femmes jeunes désireuses de grossesse sont méconnues.
Les résultats fonctionnels sont,
à la condition d'une exérèse complète des lésions, très
satisfaisants et justifient la prise en charge chirurgicale de cette pathologie.
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en Gynécologie-Obstétrique 2000 ; 55 : 12-17.
* olivier.camagna@bch.ap-hop-paris.fr
a Service de gynécologie-obstétrique,
hôpital Bichat-Claude-Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France.
b Service de gynécologie-obstétrique,
hôpital de la Croix-Rousse, 103, Grande-Rue-de-la-Croix-Rousse, 69317 Lyon
cedex 04, France.
c Institut de radiologie de Paris,
31, avenue Hoche, 75008 Paris, France.
d Cabinet médical, 30, rue d'Astorg,
75008 Paris, France.
e Service de chirurgie viscérale,
hôpital Bichat-Claude-Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France.
496 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 497
498 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 499
500 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 501
502 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 503
Tableau 1. Corrélation I.R.M. et résultats
histologiques IRM
+ IRM - 39 patientes ayant eu une IRM
Chir + Chir - Chir
+ Chir - Sens. Spé. VPP VPN
Nodule endométriosique de la cloison recto-vaginale 24 3 9 3 73 % 50 % 89 % 25 %
Envahissement de la paroi rectale 9 4 8 18 53 % 82 % 69 % 69 %
Atteinte endométriosique des ligaments utéro-sacrés 16 1 3 19 84 % 95 % 94 % 86 %
504 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
Tableau 2. Corrélation E.E.S.A.R. et résultats
histologiques EESAR
+ EESAR - 31 patientes ayant eu une EESAR
Chir + Chir - Chir
+ Chir - Sens. Spé. VPP VPN
Nodule endométriosique de la cloison recto-vaginale 27 0 2 2 93 % 100 % 100 % 50 %
Envahissement de la paroi rectale 17 4 0 10 100 % 71 % 81 % 100 %
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 505
Tableau 3. Performances comparées de l'I.R.M.
et de l'E.E.S.A.R. pour la détection des nodules de la cloison recto-vaginale
et de l'infiltration rectale Détection
des nodules Détection de l'infiltration de
la cloison recto-vaginale de la paroi rectale
Nombre de cas confirmés 27 16
Sensibilité EESAR 93 % (p = 0,03) 100 %
(p = 0,002)
Sensibilité I.R.M. 70 % 56 %
Spécificité EESAR 100 % 67 %
Spécificité I.R.M. 0 % (NS) 67 %
506 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
Figure 1. Voie d'abord
Tableau 4. Résections liées
à l'exérèse du nodule et voie d'abord Type
de résection n % Stomie Laparotomie Coelio-vaginal N
= 43
Recto-sigmoïdienne segmentaire (atteinte étendue) 5 11,5 % 2 5 0
Musculeuse et muqueuse rectale (atteinte antérieure) 5 11,5 % 1 5 0
Musculeuse rectale (atteinte sous-muqueuse) 9 21 % 0 6 3
Colpectomie (atteinte vaginale) 30 70 %
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 507
Tableau 5. Gestes associés à
l'exérèse du nodule Gestes
associés Nombre Proportion N
= 43 résections complètes
Exérèse ligament US 22 51 %
- bilatérale 7 16 %
- unilatérale 15 35 %
Urétérolyse 28 65 %
- bilatérale 14 32,5 %
- unilatérale 14 32,5 %
Gestes intra-péritonéaux 34 79 %
- exérèse endométriome 14 33 %
- adhésiolyse 31 72 %
Appendicectomie 3 7 %
Hystérectomie 3 7 %
508 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
Tableau 6. Résultats fonctionnels
à 20 mois de la chirurgie
|
˙Symptômes |
˙ |
˙ |
˙ |
˙Total |
|
˙ |
˙pré-opératoires |
˙Modérée |
˙Importante |
˙Complète |
˙ |
˙28 dysménorrhées |
˙18 % |
˙14 % |
˙50 % |
˙82 % |
|
˙25 dyspareunies |
˙12 % |
˙28 % |
˙44 % |
˙84 % |
|
˙16 dyschésies |
˙6 % |
˙31,5 % |
˙37,5 % |
˙75 % |
21 douleurs permanentes 9,5 % 29 % 52 % 90,5 %
10 infertilités 40 %
Globalement (n=33) 16 % 42 % 32 % 90 %
Amélioration des symptômes
4 grossesses à terme
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 509
Tableau 7. I.R.M. dans l'endométriose
sous-péritonéale : résultats de la littérature
Auteur N Localisation N
cas n mis en Sens. Spéc. VPP VPN patientes étudiée évidence
Kinkel [17] 20 Ligaments 12 12 100 % 100 % 100 % 100 % 1999 utéro-sacrés
Paroi rectale 3 1 33
%
Dumontier [18] 48 Cloison 6 4 66 % 88 % 2000 recto-vaginale
Ligaments 15 12 80 % 25 % utéro-sacrés
Paroi digestive 16 12 75 % 100 %
Chapron [20] 8 Cloison 8 6 75 % 2002 recto-vaginale
Camagna, 39 Cloison 33 24 73 % 50 % 89 % 25 % Madelénat recto-vaginale
2002 Ligaments 19 16 84 % 95 % 94 % 86 % utéro-sacrés
Paroi rectale 7 9 53 % 82 % 69
% 69 % 510
O. CAMAGNA, C. DHAINAUT,
O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN, L. PALAZZO, D. CHOSIDOW,
P. MADELENAT Tableau
8. EESAR dans l'endométriose de la cloison recto-vaginale : résultats
de la littérature Auteur Nombre Localisation Nombre Sens. Spéc. VPP VPN de
patientes étudiée de cas
Cloison 34 97 % 96 % 89 % 99 % recto-vaginale
Infiltration 9 100 % 97,7 % 75 % 100 % rectale
Infiltration 16 100 % 100 % digestive
Cloison 6 50 % 100 % recto-vaginale
Cloison 27 93 % 100 % 100 % 50 % recto-vaginale
Infiltration 17 100 % 71 % 81 % 100 % rectale
Fedele, 1998 [16]
Dumontier, 2000 [18]
Camagna, Madelénat 2002
140 48
31 PRISE
EN CHARGE CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES
DE LA CLOISON RECTO-VAGINALE 511
512 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
Tableau 9. Résultats fonctionnels
de l'exérèse des nodules endométriosiques de la cloison recto-vaginale
|
˙Auteur |
˙Durée |
˙Douleurs pelviennes |
˙Dyspareunie |
˙Dyschésie |
| | | |
˙ |
˙ |
˙du suivi |
˙Pré-op. |
˙Améliorat° |
˙Pré-op. |
˙Améliorat° |
˙Pré-op. |
˙Améliorat° |
˙Reich, 1991 [48] |
˙6 mois |
˙46 |
˙89 % |
Candiani, 1992 [8] 41 mois 11 100 % 10 100 % (7-107)
Donnez,
1997 [10] |
˙> 2 ans |
˙242 |
˙96,3 % |
˙242 |
˙98,8 % |
| |
˙Possover,
2000 [12] |
˙16 mois |
˙34 |
˙100 % |
˙ |
˙ |
˙34 |
˙100 % |
˙Chapron, 2001 [6] |
˙ |
˙24 |
˙91,7 % |
˙24 |
˙100 % |
Camagna, 20 mois 28 82 % 25 84 % 16 75 % Madelénat
2001 (9-35) PRISE
EN CHARGE CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES
DE LA CLOISON RECTO-VAGINALE 513
514 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT
PRISE EN CHARGE
CHIRURGICALE DES ENDOMéTRIOSES DE LA CLOISON
RECTO-VAGINALE 515
516 O.
CAMAGNA, C. DHAINAUT, O. DUPUIS, E. SONCINI, B. MARTIN,
L. PALAZZO, D. CHOSIDOW, P. MADELENAT |